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que l'extrême difette d'argent forcera toujours les princes à faire des guerres courtes; n'oublions point que les peuples commencent à s'éclairer, & que bientôt ils ne voudront plus aller courir les hafards de la guerre & fe foumettre à des peines & à des privations de tous les genres pour occuper l'oifiveté de leurs fouverains, fatisfaire les caprices d'un miniftre, ou l'ambition d'un Courtifan; fouvenons - nous enfin que la France, fi elle eft fage, prendra la ferme réfolution de fe borner à rendre immuables les limites de fon empire.

A ces obfervations purement politiques & militaires, on doit en joindre quelques autres tirées de la nature même de la chose.

Il eft un grand nombre de drogues qui perdent, dans un espace de tems très-court, leur vertus curatives, & qui ehangent même de nature au point de devenir très - infalubres. Ne mettons point nos chirurgiens-majors dans l'alternative, ou de faire éprouver des pertes confidérables aux régimens, ou de donner aux foldats malades des poifons au lieu de remèdes. Avec les apothicaires des villes on n'a point ces craintes à concevoir; cette aifon jointe à celles que nous avons précédemment rapportées, nous déterminent à conclure qu'il faut ordonner aux régimens de faire des traités avec les apothicaires de leurs garnifons, & bannir de nos hôpitaux militaires, de toutes les claffes, toutes les perfonnes qui n'y font employées que pour y préparer des remèdes.

APPOINTÉ. Supplément. L'ordonnance provifoire du 12 juillet 1784 a rétabli les appointés; elle en crée dix dans les compagnies de fufiliers, & huit dans les compagnies de grenadiers & de chaffeurs ce font les plus anciens foldats de chaque compagnie qui obtiennent le grade d'appointé le plus ancien tambour de chaque bataillon obtient auffi ce grade. Le premier appointé de chaque compagnie a un fol de haute-paye; les autres appointés n'ont que fix deniers les tambours appointés font traités comme les premiers appointés: les appointés ont, en l'absence du ca poral, le commandement de l'efcouade à laquelle ils font attachés. Les appointés portent pour marque diftinctive, un galon de laine placé proche du parement de l'habit.

Rien de plus fage & de plus néceffaire que le rétabliffement des appointés: autant il eut été dangereux d'accorder à l'ancienneté le droit de nommer les caporaux, autant il étoit, j'ofe dire, ridicule, de ne point diftinguer un foldat parvenu par fon ancienneté à la tête d'une compagnie, d'avec le dernier des foldats de recrue. Mais une diftinction en argent eft-elle du genre de celles qu'on doit employer dans l'état militaire? Oui, avec les vieux bas- officiers & es vieux foldats, & même avec les anciens de

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toutes les claffes. La loi qui accorde aux anciens guerriers une augmentation de folde ne leur die point: » Attachez vous à l'argent, l'argent eft tout; mais elle dit au foldat: » Vous ne » pouvez plus vous procurer les petits objets d'agrément ou de fantaifie auxquels votre tra»vail pourvoyoit dans votre jeuneffe, il eft jufte " que l'Etat y pourvoye lui-même. » Elle dit à l'officier : » Les befoins de l'homme s'accroif» fent à mesure qu'il vieillit; il ne peut plus fe » fervir lui-même, il eft jufte que l'Etat lui four»niffe un ferviteur & qu'il pourvoye à fes be» foins. Voyez RÉCOMPENSES PECUNIAIRES, RETRAITES, &c.

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Comme chaque appointé jouiffoit autrefois leur eft accordée aujourd'hui a paru mefquine. d'une haute-paye d'un fol par jour, celle qui Tel l'effet, le premier effet, l'effet néceffaire de Avant de faire un établiffement quelconque, il toutes les réductions & de toutes les réformes. faut voir fi on pourra le foutenir; avant de le détruire il faut calculer les effets que fa deftruction produira ; mais trop fouvent les adminiftrapoint en prodiguant l'argent qu'on le rend proteurs ne voyent que le moment préfent. Ce n'eft ductif, c'eft en le donnant avec choix, en le diftribuant avec art. Il eut été poffible de joindre à la haute-paye qu'on a accordée aux appointés de petites exemptions, qui n'auroient point nui au bien du fervice, & qui auroient cependant rendu le fart de ces hommes plus doux, & par conféquent plus envié. Telle eut été, par exemple, celle des corvées intérieures, & de toutes celles qui ne font pas effentiellement militaires. Les jeunes foldats auroient fenti, qu'en faifant beaucoup de corvées pendant leur jeuneffe, ils travailloient pour un âge où ils auront moins de force & d'activité, & ils auroient par conféquent été les premiers à applaudir à l'exemption accordée aux appointés.

APPOINTER. Punition militaire. Appointer un foldat de garde, de faction, d'exercice, de foupe ou de corvée, c'eft l'obliger à monter la garde, à faire quelque corvée ou à aller à l'exercice, quoique, par le tour de contrôle de fervice, ce ne foit point à lui à remplir l'un de ces devoirs.

Des militaires ayant remarqué que le foldat qu'on avoit appointé d'exercice, pour avoir manqué d'activité ou d'attention, devenoit plus attentif; & que celui qu'on avoit appointé de corvée ou de foupe, pour avoir rempli avec négligence les devoirs de l'ordinaire, ou mal fait une corvée de quartier, devenoit plus foigneux, imaginèrent qu'ils devoient appointer de faction la fentinelle qui avoit manqué de vigilance & de garde, le foldat qui avoit commis quelque faute légère pendant la durée de fon dernier fervice. Comme ils fe laiffèrent conduire par une fauffe analogie, ils tombèrent dans une erreur gro

fère.. Il n'y a en effet entre les devoirs du foldat | atteliers par des artifans habiles; il fuffit à notre quand il eft de garde ou en faction, & fes de objet d'indiquer l'utilité que les militaires peuvoirs dans l'intérieur des chambres & des quar-vent aujourd'hui, fans beaucoup d'art & de tiers qu'une analogie apparente; les premiers peine, retirer des différentes parties des arbres font effentiellement militaires, les feconds ne le qu'ils rencontrent dans la campagne. font point; les uns font honorables, glorieux, les autres font prefque ferviles. On peut donc utiles pendant la guerre les troncs armés de Toutes les parties des arbres qu'on abat font mettre fans danger ceux-ci parmi les punitions, leurs plus groffes branches, aiguifées, forment une au lieu qu'il feroit dangereux d'y placer ceux-là. fortification refpectable. Voyez ABATTIS. DépouilVoyez les articles CONSIGNE, PUNITION mili-lés de toutes leurs branches, couchés les uns fur taire, DUEL & PEINES.

APPUI. Les militaires entendent par le mot appui tout ce qui sert à foutenir & à couvrir les ailes d'une armée, ou les flancs d'un corps de troupes; pour favoir quels font les meilleurs appuis & comment on doit les difpofer. Voyez les arti

cles AILES & FLANCS.

les autres & difpofés dans un certain ordre, ils forment un excellent parapet. Voyez l'alinea fuivant. Placés fur le haut du parapet, armés, ou privés de leurs branches, ils font utiles contre les efcalades. Voyez OUVRAGES EN TERRE. Refendus ils deviennent des paliffades, des fraifes. Voyez ces mots. Plantés perpendiculairement, intéreffé à relever en forme de mur. Voyez la fuite de cet article. Ils peuvent fervir encore à conftruire une espèce de caponnière cafematée. Voyez CAPONNIERE. Les principales branches dédes paliffades; celles qui font d'une moyenne tachées du tronc, deviennent aufli des fraifes & groffeur, mais un peu longues, fourniffent des de fafcines; celles qui font courtes fourniffent piquets deftinés à lier enfemble les différens lits des piquets qu'on plante, ou dans le fond des. puits, Voyez PUITS; ou même fur les avenues du pofte. Voyez PIQUETS. Avec les branches minces & flexibles on fait des fafcines, Voyez FASCINES; ou bien de petits fagots utiles dans ARBORER. On le fert du mot arborer, pour la défenfe des ouvrages. Voyez OUVRAGES EN défigner l'action d'un fignifère, qui, arrivé au TERRE. Enfin on conftruit avec la tête des jeuhaut de la brèche d'une ville à laquelle on donne nes arbres & avec celle des arbriffeaux une efl'affaut, y plante le figne militaire qu'il porte.pèce d'abattis, connus fous le nom de vignes miOn dit donc il arbora fon drapeau fur la brèche. litaires. Voyez ce mot. On arbore auffi, en figne de victoire, les étendards & les drapeaux fur le haut des portes & fur les tours élevées des villes qu'on a prifes. L'hiftoire de France nous offre quelques exemples de ce genre; le plus mémorable & le plus fingulier eft celui du duc de Lancaftre devant Rennes. Voyez-en le récit dans le chapitres des mémoires de Bertrand Duguefclin.

AQUEDUC. Un aqueduc eft un canal conf-ils peuvent fervir à foutenir les terres qu'on eft uit pour conduire de l'eau d'un lieu à un autre. Plufieurs villes ont été prises par le moyen des aqueducs; quelques autres ont été obligées d'ouvrir leurs portes, parce que l'ennemi avoit dé. truit les aqueducs qui leur fourniffoient de l'eau ; ces évènemens nous prouvent qu'il faut fermer les aqueducs avec exactitude, vifiter fouvent les grilles qui en ferment l'entrée & y placer des gardes fortes & fidelles; ils nous prouvent encore qu'il ne faut point s'en repofer totalement fur les aqueducs, pour fournir aux villes dont la confervation eft précieufe, l'eau néceffaire à leurs

habitans & à leurs défenfeurs.

Pour former, avec des troncs d'arbres, an ouvrage contre lequel l'ennemi foit obligé de conduire de l'artillerie, & peut-être même d'un calibre confidérable, choififfez d'abord un fite heureux; difpofez en les environs comme fi vous vouliez conftruire une redoute ordinaire; tracez fur cet emplacement la figure la Dans une place affiégée, on arbore aufi plus convenable à l'objet que vous avez en vue, pavillon ou un étendard, pour demander à par-hommes & aux armes dont vous pouvez difpoau terrein fur lequel vous devez opérer, aux lementêr. Voyez CAPITULATION.

un

ARBRE. Les premiers guerriers vivant au milieu des forêts, & éclairés par la néceffité, faifoient, felon les apparences, un ufage fréquent des arbres pour fortifier les habitations qu'ils avoient choifies, & les pofitions militaires qu'ils avoient prifes. Cette manière de fe fortifier eft trop naturelle pour n'avoir point été employée des premières. Nous ne dirons point comment ces premiers guerriers difpofoient les arbres qu'ils avoient abattus; nous ne nous occuperons pas non plus des arbres façonnés au milieu de nos

fer; faites enfuite coucher fur les lignes extérieures que vous avez tracées une rangée de troncs d'arbres, que vous confidérerez comme de groffes & longues fafcines; puis faites remplir avec des troncs d'arbres d'une groffeur à-peuprès égale à ceux que vous avez d'abord employés, l'intervalle compris entre les premiers troncs; fur cette première affife faites en placer une feconde, fur celle-ci une troisième, &c. jufqu'à ce que les troncs entaffés couvrent parfaitement l'intérieur du pofte. Pour que les arbres reftent ainfi entaffés vous placerez ceux de la feconde

affife dans l'intervalle de ceux de la première, &c. ainfi chaque aflife diminuera d'un arbre: on obfervera que la dernière affife foit au moins compofée de deux arbres, & que le tronc placé extérieurement foit un peu moins gros que le tronc placé intérieurement; on mettra extérieurement entre chaque rang d'arbres des ronces, des épines & des branches d'arbres dont on aiguifera la partie faillante. Pour conftruire les embrafures on n'aura qu'à laiffer un petit intervalle entre deux arbres de la troifième ou quatrième affife, fuivant leur groffeur.

Quand les foldats voudront tirer fur l'ennemi, ils monteront fur les arbres des premières rangées qui leur ferviront de banquette.

On ne peut guères déterminer le nombre d'arbres dont la première couche doit être compofée; ce nombre dépend du plus ou moins de groffeur de chaque arbre: on ne peut point, par la même raifon, déterminer le nombre des couches, On obfervera de mettre les plus gros arbres dans la partie inférieure, & de placer dans la même couche les arbres qui feront à-peu-près de la même groffeur.

Autour de cet ouvrage, que nous regardons comme un des plus forts, on difpofera les têtes des arbres en forme d'abattis. Voyez ABATTIS.

Quand on eft privé, pour foutenir les terres d'un parapet, de tous les moyens indiqués dans l'article OUVRAGE EN TERRE, on peut recourir à des troncs d'arbre que l'on plante perpendicu lairement & proche les uns des autres ce moyen n'offrant aucune difficulté nous nous difpenferons de le détailler.

bois neuf ou vieux façonné. Voyez l'article 13 du titre 28 du règlement pour l'infanterie.

ARBRE DE REMARQUE. On donne le nom d'arbre de remarque à un arbre ifolé, ou trèsremarquable par fa conformation, qui peut, ou indiquer par fa pofition le chemin qu'une colonne doit tenir pour aller d'un endroit à un autre, ou marquer un alignement, ou fervir en un mot de repère ou d'efpèce de jalon. Voyez RECONNOISSANCE MILITAIRE.

ARCS DE TRIOMPHE. Récompenfe militaire. On donne le nom d'arc de triomphe à un monument qui a la forme d'une porte, & qui a été conftruit pour conferver le fouvenir de quelque grand évènement militaire.

Le dictionnaire des antiquités offre des détails intéreffans fur les arcs de triomphe élevés par les différens peuples; nous ne devons donc nous occuper dans cet article qu'à examiner fi les arcs de triomphe doivent, de nos jours, être mis au rang des récompenfes militaires..

Il est peu d'hommes, il eft même peu d'écrivains qui ne placent les arcs de triomphe à la tête des récompenfes qu'on doit accorder aux généraux qui fe font illuftrés par de grandes victoires. Il importe à chaque gouvernement, dit-on, d'exciter dans l'ame de fes guerriers un vif enthoufiafine de la gloire, feul garant affuré des grandes actions; il importe à chaque nation d'offrir à fes défenfeurs des objets capables de leur arracher les facrifices difficiles que leur état exige; or, quoi de plus propre à produire ce double effet, que des monumens authentiques & dura-' bles, élevés à la gloire des généraux vainqueurs On trouve dans un nouveau traité de fortifi- & deftinés à tranfmettre à la postérité la plus cations, compofé par un officier du corps royal reculée le fouvenir de leur nom & de leurs grandu génie, une idée relative aux arbres, faite, des actions. Les arcs de triomphe, dit-on encore ee me femble, pour être adoptée. L'auteur vou- ont cela de particulier, qu'en récompenfant les droit que l'on plantât plufieurs rangs d'arbres fur guerriers illuftres, ils décorent & embelliffent les glacis de toutes nos places de guerre, & les lieux dans lefquels ils font élevés ; ainfi la principalement fur le prolongement de la capi- nation elle même jouit de la juftice qu'elle a tale des demi-lunes, des baftions, &c. ces ar rendue à fes défenfeurs. Les Romains, ajoute-t-on, bres formeroient un coup d'oeil agréable, aug- enfin, ce peuple, militaire par effence, conquémenteroient la falubrité de l'air, feroient utiles rant par principes, & fait par fa fageffe pour ferdans nos arfenaux, & ajouteroient, voici l'ob-vir de modèle à toutes les nations qui veulent jet effentiel, à la force de la place en cas de fiége. L'auteur fonde ce dernier avantage fur une remarque bien fimple; fur l'extrême difficulté qu'on éprouve à creufer un foffé dans un terrein rempli de troncs d'arbres & de groffes racines. Il faut espérer qu'il n'en fera pas de cette idée, qui nous a paru lumineufe, comme de la loi qui veut que toutes nos grandes routes foient

bordées d'arbres.

Les ordonnances militaires défendent au foldat, fous des peines févères, de couper des arbres fruitiers ou de décoration, & de prendre aucun

s'illuftrer par la guerre, ou qui ont feulement befoin d'avoir une bonne armée; les Romains ont élevé à leurs généraux victorieux un grand nombre d'arcs de triomphe, & l'hiftoire met ces monumens au rang des caufes de leur grandeur.

J'appuyerai ces différentes affertions, je donnerai même en faveur des arcs de triomphe quel ques nouvelles raifons; ils entretiennent, dirai-je, l'humeur belliqueufe dans la nation entière; ils lui donnent d'elle-même cette opinion avantageufe, qui eft la mère de la confiance, & par conféquent des fuccès; ils offrent aux artistes

confommés des occafions de prouver leurs talens; à leurs élèves, des modèles dignes d'être imités, & des objets propres à exciter leur émulation: j'avouerai que les arcs de triomphe convenoient au peuple Romain, mais je n'en dirai pas moins, qu'ils ne conviennent point aux nations modernes, fur-tout à la nation Françoife; car ils ne rempliffent pas toutes les vues que doit avoir un fage légiflateur, en créant des récompenfes militaires.

moins brillante, moins pure & moins durable, parce que le monument qui en tranfmettroit le fouvenir feroit utile? Non fans doute; elle n'en feroit que plus éclatante, que plus généralement répandue. Beaucoup de triomphateurs ont été oubliés ; & l'on parle encore des hommes qui ont donné leur nom à une voie romaine, à un aqueduc, à un pont, ou à quelqu'autre édifice utile.

Si l'on renouvelloit l'ufage des arcs de triomphe plufieurs généraux victorieux feroient privés de l'honneur d'un monument, témoin de leur gloire; fi l'on adopte ce que je propofe ils verront tous, leur nom tranfmis fûrement à la poftérité. L'idée de donner le nom d'un homme à un monument public n'eft pas nouvelle ; mais on n'a prefque jamais gravé fur ces monumens que le nom des rois & des princes. Ces hommes, que leur naiffance place fi loin du peuple, peuvent fe paffer de ce fecours; leur nom fera configné dans l'hiftoire, ils en font affurés, auffi ne font-ils point flattés de cette efpèce d'hommage, & ne font-ils rien pour s'en rendre dignes.

Les Romains étoient maîtres d'une grande partie de la terre; les nations modernes n'ont chacune qu'un territoire très-borné : ils avoient ravi, raffemblé les richeffes de tous les peuples, elles font dans une grande pénu je d'or: ils avoient conftruit dans la capitale de les empire, & juf ques dans les provinces les plus reculées, tous les monumens que l'utilité publique exigeoit; elles ont bien élevé de loin à loin quelques grands monumens, mais comme ils font prefque tous confacrés à des objets frivoles, l'utilité publique a plufieurs réclamations à faire, même dans les capitales les plus célèbres: ils avoient un grand nombre de bras fuperflus; elles en manquent, tant pour l'agriculture que pour les méUne infcription courte, fimple, en langue vultiers les plus néceffaires : la république en corps, gaire, placée de manière à être facilement lue & chaque Romain en particulier, étoient inté par tous, feroit donc pofée fur chaque monureffés à être en guerre avec leurs voifins; les A tel général, pour avoir vaincu à tel endroit. ment public; elle pourroit confifter en ces mots : nations modernes ne gagnent rien à la guerre Je ne voudrois ni nations enchaînées, ni peula plus heureuse, & leurs chefs n'y gagnent qu'une augmentation de travaux: différence im- ples terraffés; je ne voudrois même point qu'on menfe, qui n'a point été affez fentie par les trouvât dans l'infcription le nom des vaincus. rois & leurs fujets les Romains étoient inté-On fait que la haine du nom Romain fut proreffés à tenir dans l'humiliation les peuples dont ils avoient triomphé; les nations modernes ont au contraire un intérêt puiffant à leur faire perdre, fi ce n'eft le fouvenir de leurs défaites, du moins celui de leur honte: le gouvernement romain ne pouvoit guères fixer les regards des peuples que fur la gloire militaire; les gouvernemens modernes peuvent les tourner vers le commerce, les arts & les fciences.

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Quoique toutes ces différences prouvent que les arcs de triomphe ne conviennent pas aux nations modernes, & à la France en particulier, Hous demanderions cependant qu'on en renouvellát l'ufage, fi nous n'étions pas perfuadés qu'il eft poffible de les remplacer d'une manière avantageufe, pour les défenfeurs de la nation & pour la nation elle-même.

Il est peu d'années où l'on ne faffe élever en France quelque grand édifice public: ici, on creufe un canal; là, on rend une rivière navigable; ailleurs, on deffèche des marais; plus loin, on confiruit un fuperbe pont; quelquefois on élève des magafins, des citadelles, des forts, &c. Ne feroit il pas poffible de confacrer chacun de ces monumens à la mémoire d'un général victorieux ? La gloire de ce guerrier feroit-elle

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pagée par leurs ares de triomphe; que la haine des fortifiée par les ftatues faftueufes & menaçantes Flamands contre les Efpagnols fut entretenue que le duc d'Albe avoit fait ériger; on fait que la Place des Victoires a coûté à la France des flots de fang. Mais fubfiftera-t-il long-tems ce monubaffeffe de fes courtifans? La ftatue de ce prince ment de l'orgueil de Louis XIV, ou plutôt de la fera confervée, fans doute; mais le jour où les nations enchaînées difparoîtront pour jamais, ce jour glorieux pour tous les François ne peut être éloigné. Un peuple qui veut compter autant d'alliés, autant d'amnis qu'il a de voifins; un peuple plus jaloux de la liberté & de la félicité générales que d'une vaine & fauffe gloire leur facrifiera, fans peine, ce monument menfonger, & tous ceux du même genre. La nation, l'Europe entière, applaudiront, j'ofe d'affirmer, à celui de nos repréfentans, qui le premier élevera la voix pour en folliciter la deftruction.

Jamais ces monumens ne feroient décorés avec trop de fomptuofité; le luxe dans les bâtimens publics eft encore une de ces idées vaines, filles d'un fiècle qui donnoit le nom de beau à ce qui étoit utile à la nation, mais à ce qui éblouiffoit fes regards, & frappoit ceux des étrangers. La vraie grandeur, la vraie beauté

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d'un édifice public, c'eft la folidité & l'utilité. Un des grands hommes dont la nation s'honore, Fénélon, vent, je le fais, que l'architecture & la peinture étalent leurs reffources, leurs miracles, dans les temples & les autres monumens publics: il a raifon, abiolument parlant; mais il auroit cu tort s'il eut appliqué fon principe à une nation accablée fous le poids de fa dette publique, & à qui il manque un grand nombre d'édifices de première néceflité. Ne traiteroit on pas d'infenfé un homme qui dépenferoit en portiques, en colonades, en ftatues les fonds qu'il auroit affemblés avec peine, pour bâtir fa maifon entière? & cependant beaucoup de nations commettent la même faute, & ne rougiffent point de l'avoir commife.

Gardons-nous d'attendre avant de confacrer un monument public à un général victorieux, qu'il ait terminé fa carrière; il est beaucoup d'hommes qui regardent avec indifférence les récompenfes dont ils ne doivent jouir qu'après leur mort. Jouir de fa propre gloire, voilà ce qui flatte, voilà ce qui élève l'ame. C'étoit ainfi que penfoient les Romains, & c'eft d'après ces principes qu'ils avoient établi les triomphes & les arcs, deftinés à en perpétuer le fouvenir. Un général, dira-t-on peut-être, ternira l'éclat de fes victoires, ou par plufieurs défaites, ou me par des crimes. Cela eft poffible; mais en aura-t-il, pour cela, moins rendu à fa patrie un fignalé fervice? Et d'ailleurs fi la crainte de voir fon nom effacé ne devient pas un nouvel aiguillon pour les généraux, au moins fera-t-elle toujours un frein capable de les éloigner des vices

B des crimes.

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d'efpèce: on pourroit encore employer le premier de ces mots pour défigner l'art qui enfeigne à conftruire tous les objets qui, n'étant pas effentiellement militaires, ont cependant beaucoup de rapport avec la guerre; tels font un arfenal, un magafin à poudre, un magafin de vivres, une porte de ville, de citadelle; & réferver le fecond pour l'art qui enfeigne à choifir le terrein le plus propre aux différens ouvrages, à tracer ces ouvrages & à les conftruire? Si cette diftinction étoit adoptée, on pourroit divifer l'architecture militaire en deux grandes branches, en architecture militaire, proprement dite, & en fortification.

ARGENT. Nous employons ici le mot argente. comme un terme générique, fous lequel font compris tous les gnes de la richeffe : or & argent monnoyés, ou non monnoyés, billets de

toute nature.

Il n'eft prefque perfonne qui n'ait très-fouvent répété ce vieil adage, répété ce vieil adage, l'argent est le nerf de la guerre ; & qui n'ait trouvé un très-grand fens dans. cette réponse dumaréchal de Trivulce à Louis XII. Il faut trois chofes pour faire la guerre avec fuccès, premièrement de l'argent, fecondement de l'argent, troisièmement de l'argent: cependant cet adage & cette réponse font faux. Non, ce n'eft point l'argent qui eft le nerf de la guerre; non, l'argent n'eft point la feule chofe néceffaire pour obtenir des fuccès: on peut fans argent entreprendre & foutenir une guerre, on peut fans argent la terminer avec gloire, mais il eft impoffible de remporter des victoires fi l'on n'a pas de bons foldats & des généraux habiles. L'hiftoire ancienne nous offre un grand nombre de preuves de cette vérité. Voyez notre article LuxE. L'hiftoire moderne elle-même n'eft point dépourvue de preuves du

Le nom du général ne devroit pas être le feul infcrit fur le marbre dépofitaire de la reconnoif-même genre; les François étoient beaucoup plus fance publique; on devroit trouver dans quelque autre partie du même édifice le nom de tous les généraux fubalternes, & celui de tous les corps qui auroient été à portée de fe fignaler. Cet acte de justice ranimeroit l'émulation de tous les guerriers.

L'armée victorieufe feroit le folliciteur de cette récompenfe, & la légiflature en feroit le difpenfateur. On fe garderoit bien de raffembler dans la capitale tous les monumens des victoires; répandus dans les provinces, ils les embelliroient, y entretiendroient l'ardeur belliqueufe, & y fe roient naître l'amour de la gloire & des arts.

ARCHITECTURE MILITAIRE. S'il eft vrai qu'il n'y a point dans la langue françoise des mots qui foient parfaitement fynonymes, on a tort d'employer indifféremment, pour défigner l'art de fortifier les places, les mots architecture militaire & fortification: ne pourroit - on pas fe fervir du mot architecture militaire comme d'un nom de genre, & du mot fortification comme d'un nom

riches dans le milieu du quatorzième fiècle que les Anglois leurs vainqueurs: Henri IV, fans argent & fans moyens d'en amaffer, vainquit & les maîtres des mines du Nouveau - Monde, & le pape, pour qui fon nom étoit une mine plus riche encore: Venife & la Hollande ont, malgré leurs richeffes, prefque toujours fubi la loi que leurs ennemis ont voulu leur impofer: la riche Angleterre n'a pû foumettre les États-Unis de l'Amérique, & la Suiffe eft reftée libre malgré fa pauvreté : nous dirons donc avec le citoyen de Genève « que nos politiques daignent fufprendre leurs calculs pour réfléchir à ces exemples, & qu'ils apprennent une fois qu'on a tout avec de l'argent, hormis des moeurs & des citoyens; nous dirons auffi avec Voltaire que les peuples les plus pauvres triomphent toujours des plus riches ; & enfin avec Montécuculli, dont l'opinion doit être pour les militaires d'un poids très-grand: qui n'a que de l'argent, qui n'entretient point affez de bonnes troupes, fubira tôt ou tard le joug qu'on voudra Tui impofer. Ce font donc les bonnes troupes &

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