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indifpenfables que doit avoir un véritable & un excellent écuyer.

CONNOISSANCES.

Les connoiffances qui doivent contribuer à former un bon écuyer font toutes relatives au cheval.

Première Connoiffance. Propagation.

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Il faut que l'écuyer foit inftruit de la manière la plus avantageufe dont on peut perpétuer l'efpèce fi précieufe des chevaux : ce qui exige des connoiffances très étendues fur les differentes efpèces de chevaux qui peuvent réullir dans le royaume; les lieux les plus propres à la propagation de telle espèce plutôt que de telle autre, d'après le fol, la nourriture, le climat, &c. ; la façon de perfectionner chaque espèce, foit par le croifement des races, foit au moyen d'étalo s pris dans les pays étrangers, & placés chez vous dans les lieux & pour les espèces qui leur conviennent le mieux.

La manière de conduire les étalons & les foit jumens, foit avant qu'on les faffe couvrir, après, foit torfque les jumens ont mis bas; enfin la manière de conduire les jeunes poulains depuis l'inftant de leur naiffance jufqu'au moment où ils font livrés à l'écuyer pour les dreffer & les

monter.

Seconde Connoiffance. Qualités du Cheval, & fes vices ou défauts.

Il faut que l'écuyer connoiffe les qualités phyfiques, & on oferoit dire morales, des chevaux qu'il fe charge de dreffer ou de faire dreffer & monter, ainfi que tous leurs vices ou défauts.

La connoiffance des qualités phyfiques du cheval, ainfi que celle de fes vices & de fes défauts, entraîne celle préliminaire de fa conftruction, de fa conftitution & de fa conformation. Si la nature fe trouve rebelle & qu'on ne foit point en état de découvrir d'où naît cette opiniâtreté, on court rifque d'employer des moyens capables de produire des vices nouveaux. Pour que l'écuyer ne coure pas les risques de commettre une auffi grande faute, il faut qu'il connoiffe les défauts ou extérieurs ou intérieurs de l'animal qu'il veut dreffer. Par les défauts extérieurs, on entend la foibleffe des membres, foit naturelle, foit accidentelle, qui fe rencontre aux reins, aux hanches, aux jarrets, aux jambes, aux pieds, ou à la vue. Les défauts intérieurs, qui forment le caractère du cheval, font la timila colère, la dité, la lâcheté, l'impatience malice, les mauvaises habitudes.

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L'écuyer ne doit pas ignorer non plus que les os & les mufcles offrent ce qu'il y a de plus intéreffant dans le mécanitime de l'animal rela tivement à fes actions; mais il doit bien fe garder de fe laiffer féduire par le bel enfemble de l'extérieur; il faut aufli qu'il s'affure que l'organifation intérieure ne dément pas les belles formes du corps; pour cela il doit confulter les mouvemens & le caractère de l'animal. 11 eft donc effentiel que l'écuyer foit en état de juger & de connoître jufqu'aux moindres nuances de l'individu qu'il fe propofe de former.

En effet, il eft d'autant plus indifpenfable de connoître parfaitement toute la mécanique du cheval, que fi l'on ignore les refforts & toutes les machines que la nature emploie pour la progreffion de cet animal, on fera fans ceffe trompé & l'on ne pourra jamais juger bien fainement en quoi & pourquoi tel ou tel cheval eft bon à un fervice plutôt qu'à un autre; cependant un cheval ne peut fe mouvoir que conformément à fon mécanifme & rien ne peut amener aux ufages ce qui y eft diamétralement oppofé.

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d'où

Toutes ces différentes connoiffances, dépendent celles des qualités des vices & des defaurs du cheval, font donc toutes infiniment effentielles à l'écuyer... Sans elles, il eft impoffible qu'il ne règne une grande oppofition de volonté & de moyens entre les individus, d'où s'enfuit la fatigue de l'homme & du cheval & le dépériffement du dernier ; ici, vous aurez un cheval ardent qui fe précipitera, forcera tous fes mufcles & abufera de fes forces: fi, faute de le connoître & d'avoir bien étudié fon caractère, vous n'avez pas l'attention de le calmer en l'endormant au pas & au trot, vous ne tarderez pas d'abufer de tous fes moyens, & d'en faire un très-mauvais cheval. .; là, vous trouverez des chevaux ramingues ...; ici, vous en aurez d'ombrageux; là, de rétifs...; les uns voudront être retenus d'autres excités cu encouragés... ; ceux-ci foutenus. . . ; ceuxlà abandonnés à leur bonnes qualités; tous enfin veulent être connus, afin que l'on puiffe ou corriger leurs défauts, ou profiter de leurs qualités. Les écuyers inftruits font d'autant plus convaincus de cette vérité, qu'ils fentent bien que ce n'eft que d'après ces connoiffances qu'ils peuvent efpérer de mettre en confiance le cheval qu'ils dreffent, d'accorder fes volontés avec la leur, en un mot de le raifonner; en effet, n'eft fi dangereux qu'un artifte ignorant, parce qu'il fe trompe avec méthode, & s'égare avec entêtement.

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rien

Pour maintenir conferver le cheval en fanté, ou la lui rendre lorfqu'il est tombé malade,

il

faut que l'écuver possède parfaitement l'anatomie da cheval, foit très-inftruit de l'hygiène qui lui eft relative, & qu'il connoiffe les caufes qui concourent aux maladies des chevaux & à leur deftruction. Ces caufes font très nombreufes & peut-être auffi variées que multipliées. . .; elles ont les unes & les autres plus ou moins de fimilitude, de convenances, d'analogie & de rapports qui les rapprochent de certains genres qui aident à les faifir; mais dont on ne peut faire la différence, fans entrer dans de grands détails.

Pour éviter ces détails, l'écuyer inftruit raffemblera fans doute les différentes caufes fous un certain nombre de claffes..., comme la débilité..., les vices héréditaires. ceux de conformation..., de la nutrition..., de l'éducation..., de la conduite. du régime. du climat & des fifons . .; les differentes maladies, foit aiguës, foit febriles..., foit oppreffives..., foit douloureufes ...; les abus de confiance.. ceux des remèdes & leurs

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fauffes applications. Sous la débilité, il ne manquera pas de comprendre tous les effets de la foibleffe, foit générale, foit particulière, foit naturelle, foit acquife, foit effentielle, foit accidentelle. . . . Il faura que cette caufe a lieu dans toutes les époques de la vie de l'animal & fait de grands ravages, parce que l'inftruction & l'expérience lui auront appris qu'il périt beaucoup de chevaux; lorfqu'ils font poulains, parce que les forces manquent lorsqu'on commence à les monter, parce que les forces font prodiguées; lorfqu'ils font plus ágés, parce que les forces font épuifces.

Relativement aux vices héréditaires, il fera attention à tous les défauts qui ont été tranfmis à l'animal par ceux dont il provient, foit vices de caractère, foit vices de conftruction, d'après des accouplemens, ou trop prématurés, ou trop tardifs, ou mal affortis.

Dans les vices de conformation, il renfermera tout ce qui dans la forme & dans la conftru&tion de l'animal s'oppofe à la liberté des fonctions vitales & animales.

Par les vices de la nutrition, il entendra tous ceux qui font les fuites d'une mauvaise première nourriture après la naiffance.

Les vices de l'éducation doivent comprendre tous les maux qui doivent réfulter de la mauvaile manière dont on élève les poulains, ainsi que de celle dont on dreffe les chevaux.

Les vices de la conduite, l'écuyer les verra naître des alternatives dans l'excès du travail & de l'inaction; tous excès oppofés devant avoir des réfultats malheureux.

Les vices du régime renfermeront les maux qui doivent naître du défaut & de l'abondance

des alimens & des boiffons, de leur nature, de leurs qualités, ou de leurs défauts naturels ou accidentels..

L'intempérie comprendra tous les maux qui peuvent dépendre des influences de l'air, de la conftitution du temps, des faifons, des lieux, des climats, des habitations, &c.

Les maladies... aiguës, celles qui font avec des fymptômes violens & finiftres..., redoublemens, inflammation, putridité... ; febriles, les fièvres...; oppreffives, ce qui tient aux organes de la refpiration..., toux, morve, &c; douloureufes, tous les accidens luxations, fractures, bleffures, &c.

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Les abus.. ceux de confiance occafionnent les maux qui viennent de l'ignorance de ceux auxquels vous avez confié vos chevaux...; ceux des remèdes occafionnent les maux, les accidens & les rifques qui peuvent naître de l'habitude, du trop grand ufage comme de la négligence des remèdes.

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La fauffe application des remèdes doit occafionner les maux, les accidens les dangers, qui peuvent naître des erreurs des méprifes, des mauvais remèdes ou de ceux mal appliqués, mal préparés, ou mal dirigés, foit par ceux qui n'ont qu'une routine, foit même par les gens de l'art.

Quatrième Connoiffance. Nourriture.

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Comme la vie, le travail & la fanté du cheval dépendent en grande partie de la manière dont il eft nourri, il eft important que l'écuyer connoiffe non-feulement les qualités des foins pailles, luzernes, trèfles, fainfoins, avoines, orges, &c, dont on peut fe fervir pour nourrir les chevaux, mais qu'il fache aufli quelles font celles de ces différentes nourritures qui conviennent le mieux à chacun des chevaux dont il eft chargé, ainfi que la quantité qu'il faut leur en donner & les occafions où il faut les changer. Ainfi, tel cheval ne feroit pas devenu pouflif fi on lui avoit fait manger moins de foin tel autre foutiendra plus long-temps le travail s'il n'eft nourri qu'avec de la paille &c. 11 eft abfurde de croire qu'il faille le foumettre aveuglément à la routine fuivie jufqu'à préfent fans aucune obfervation fur la conformation le tempérament, l'efpèce de travaux des chevaux, ainfi que le climat dans lequel on fe trouve...; faute de foins fur cette partie effentielle, des chevaux deviennent pouflifs, d'autres goufeaux ceux-ci perdent leurs forces, ceux-là s'entreprennent, & prefque aucuns ne rendent les fervices qu'on en efpéroit & qu'on auroit dû en attendre..

Cinquième Connoiffance. Panfement.

On a dit avec raison qu'un cheval bien panfé étoit à moitié nourri, & cependant rien n'est plus rare chez nous qu'un excellent palefrenier. Il est donc très-important qu'un écuyer connoiffe parfaitement cette partie, foit pour en inftruire les palefreniers, foit pour veiller à l'exécution, ainfi que fur la manière de manier la peau des chevaux pour faciliter leur tranfpiration, celle de les bouchonner, de les étriller, de les laver de les tenir toujours très-proprement; les foins qu'il faut avoir de ne pas les faire paffer du chaud au froid trop fubitement; de ne pas les laiffer trop chaudement dans les écuries, parce qu'une trop grande transpiration les énerve & les fatigue, de ne pas les expofer fans précaution au froid, à la pluie, aux frimats, fur-tout quand ils viennent de courir, &c.

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Sixième Connoiffance. Ecuries.

La manière dont on doit loger les chevaux n'est pas la moins importante des connoiffances de l'écuyer; on ne fait pas affez qu'en général il y a fort peu de très-bonnes écuries; il faut ne foient ni trop chaudes, ni trop qu'elles ne froides, qu'elles ne foient point humides, qu'elles foient fuffifamment aérées & à portée de l'eau &c.; il faut fur-tout auffi qu'on puiffe les tenir très-proprement; il faudroit donc en général qu'elles fuffent voûtées ou plafonnées; fans ces précautions, les ais, les planchers, n'étant jamais bien joints, il tombe continuellement fur le corps du cheval ou dans fon manger des ordures ou de la pouffière qui le fatiguent pour l'extérieur & qui font très - nuifibles pour l'intérieur. Í eft aufli très-effentiel qu'il n'y ait dans les écuries aucune ouverture par où l'on jette le foin; on a remarqué que l'odeur qui s'exhale du foin, & qui eft attirée dans l'écurie par la chaleur & refpirée par les chevaux, leur eft très-dangereufe; il paffe auffi par les mêmes ouvertures une affez grande quantité de la pouffière du foin ou autre qui, lorfqu'elle tombe dans les mangeoires, eft très-nuifible aux chevaux qui ne peuvent guères s'empêcher d'en avaler avec leur nourriture. Toutes ces obfervations font d'autant plus effentielles qu'une grande partie des troupes à cheval, foit en quartiers, foit même dans plufieurs garnifons, font expofées à avoir de très-mauvaifes écuries, & dont on pourroit diminuer en partie les dangers fi on les connoiffoit mieux, & fi on cherchoit plus affiduement à y obvier.

Septième Connoiffance. Ferrure.

On eft obligé de dire que plus il feroit effen

tiel qu'il n'y eût que des maréchaux très-inftruits, & plus il femble qu'on ait laiffé fe multiplier les mauvais maréchaux.... Dans les campagnes, dans les villages, dans les villes même, élève qui veut une boutique de maréchal...; aussi eft-il incroyable quelle eft la quantité de chevaux qui font eftropiés par ces foi-difans maréchaux... Au moyen des écoles vétérinaires, il eft arrivé dans quelques parties de chaque province quelques hommes inftruits, mais en beaucoup trop petit nombre; il eft donc très-important que l'écuyer fache comment on doit ferrer un cheval & fache le ferrer lui-même. On oublie trop fouvent que le fer n'a été imaginé que pour préferver le labot de la trop grande fatigue, & que l'art du maréchal confifte principalement (dans la partie de la ferrure) à favoir conftruire fon fer de manière qu'il correfponde à la conformation du pied du cheval, & à éviter de vouloir , pour ainfi dire, plier la corne à la forme d'un fer fabriqué d'avance pour cette partie fi intéreffante & trop négligée : l'écuyer confultera fans doute M. La Foffe dans fon Parfait Maréchal.

Outre les inconvéniens fans nombre qui doivent s'enfuivre d'une mauvaife ferrure pour la partie des pieds, c'est qu'il arrive fouvent que la douleur qu'éprouvent aux pieds les chevaux malferrés leur fait paroître les épaules douloureufes, & leur ôte leur foutien; ce qui donne à toutes les autres parties un mouvement contraint & forcé qui ne tarde pas à les altérer : ce qui prouve toujours davantage combien il eft néceffaire que l'écuyer connoiffe à fond la manière dont il faut ferrer les différens chevaux.

Huitième Connoiffance. Bride & Mors.

Quelques éperoniers peuvent, mériter la confiance qu'on leur accorde pour emboucher des chevaux, mais il y en a fi peu, & encore même les plus habiles agiffent fi fouvent par pratique plutôt que par théorie, qu'il eft indifpenfable à l'écuyer de s'occuper de la connoiffance des differentes parties de la bouche de chaque cheval; les lèvres, la mâchoire, les gencives, les barres, la langue, &c, doivent être bien connues, afin de donner à chacun un mors analogue à la conformation de fa bouche; bien ou mal embouché un cheval eft facile ou difficile à conduire, fouple, docile ou vicieux; & de la réfiftance que peut faire un cheval mal embouché doit s'enfuivre de la part de l'écuyer une maffe de force qui nuit aux articulations de l'animal... La monture de la bride demande à être ordonnée avec grâce & méthode, fans quoi elle diminue la grace de la tête du cheval. Un écuyer ne doit pas négliger ces différens détails, & il feroit très-fâcheux qu'il les regardât comme minutieux.

Huitième Connoiffance. Manière de feller les

chevaux.

Une felle doit contribuer à la grâce du cheval & de l'.cuyer, elle doit être commode à tous les deux, elle l'eft au cheval quand elle ne peut pas le bleffer, qu'elle eft légère & qu'elle ne gene pas fes mouvemens; elle eft commode au cavalier quand elle le met dans l'affiette la plus ftable, qu'elle lui donne le plus de point de liaifon & le plus d'aide qu'il eft poflible: parce que plus le cavalier fe trouve à fon aife, plus put fe lier au cheval, plus il opère moëllement, plus il donne de la confiance à fon cheval, plus il fe prête à l'obéiffance, plus elle Li devient douce, & plus l'écuyer foulage fes articulations. Il est donc néceffaire que ce foit un écuyer inftruit qui dirige le fellier dans la manière dont il doit conftruire les felles, & pour le faire bien plus sûrement il eft à propos qu'il connoiffe très-bien cette partie.

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QUALITÉS PHYSIQUE S.

Première qualité. Conformation.

La première des qualités que l'on doit rechercher pour faire un excellent homme de cheval, doit être ce femble la conformation. On fe trompe peut-être affez fouvent fur ce point.... la vraie conformation n'eft donc pas en général dans la très-grande taille, parce que dans les grands hommes le bufte étant rarement en proportion avec les cuiffes & les épaules, il détruit leur liaison & permet rarement le lien qui est néceffaire dans les nerfs; d'ailleurs on a obfervé que les très-grands hommes, avoient les aides molles & écartées, & que pour les mettre dans leur proportion & leur donner les moyens de tirer parti des avantages qu'ils pourroient avoir, il leur falloit de très-grands chevaux; on fait auffi par expérience que les jeunes chevaux acquièrent moins de force fous les hommes grands & lourds..... Il eft bon en même temps d'obferver qu'il ne faut pas confondre un beau corps avec un bon corps..... une belle avec une bonne conformation. Tel homme pourroit avoir un beau corps & une conformation avantageufe, qui au travail fe trouve roide, les reins mous, foibles, &c.; tandis qu'un autre moins bien conformé en apparence le trouvera liant & ner

veux.

La vraie conformation fembleroit donc devoir être, d'avoir le corps plutôt court que long, une grande liberté dans tous les mouvemens, afin de pouvoir être le maître d'employer dans les différentes opérations du nerf ou du lien. Les bras longs donnent plus de grâce au cavalier, & plus de liberté dans les mouvemens ; quant aux cuiffes, il faut les avoir un peu longues & plates.... D'après le travail qu'il faut pour faire acquérir aux mufcles la difpofition & P'habitude néceffaire pour que l'écuyer puiffe fe lier avec fon cheval, on fentira aifément combien il doit être avantageux d'avoir la meilleure conformation poffible pour être un bon homme de cheval & acquérir ce tact fi rare qui tranfmet le fentiment de tout ce qui fe paffe dans l'animal au phyfique & au moral afin d'opérer convenablement.

Seconde qualité. Santé & force.

Comme la fcience de l'écuyer néceffite plus de pratique encore que de théorie, comme indépendamment des connoiffances qu'il doit avoir, il faut qu'il foit continuellement à cheval, afin de ne faire qu'un pour ainfi dire avec l'animal qu'il veut dreffer, comme les différens chevaux qu'il monte ont prefque tous des vices ou des défauts, que les uns font nerveux, fufceptibles, fauvages, les autres rebours, gais, &c; que plus d'une fois la vie du cavalier eft en danger, il ne fera pas difficile de concevoir combien la fanté & la force font des qualités effentielles à l'écuyer.

QUALITES MORALES.

Première qualité. La conftance.

En réfléchiffant aux obftacles fans nombre qu'on ne peut furmonter dans l'éducation des chevaux que par la conftance, on fentira bien yîte de quelle importance doit être cette qualité pour Fécuyer.... Sans elle il fera bientôt rebuté par les difficultés; il n'aura pas le courage de mettre dans fon travail cette fuite qui peut feule occasionner les bons résultats; ainsi que les hommes les animaux ne s'inftruilent trop fouvent que par l'habitude, & l'habitude de telle ou telle chofe n'eft que le réfultat de la répétition continuelle & conftante de cette chofe...... Si l'écuyer fe rebute, il manquera une occafion de s'inftruire & laiffera l'animal avec des vices; fi au contraire il a le courage & la conftance de fuivre fon ouvrage, peut-être ne rendra-t-il pas le cheval parfait, mais au moins le mettrat-il au point que l'on puiffe en tirer parti.

Seconde qualité. La patience.

Un cheval est-il jeune, foible 2 avec des

articulations tendres, voulez-vous l'amener & l'affujettir, fi vous n'avez pas la patience de fouffrir les fautes qu'il fera par foibleffe, fi malheureufement vous frappez l'animal avec humeur, jamais il ne fe fortifiera, & il fera altéré avant d'être parvenu à l'âge où il auroit pu vous rendre des fervices...... Combien de chevaux ont les organes fentibles & craintifs qui néceffitent la plus grande pat ence de la part de l'écuyer, fans cela plus d'accord entre l'homme & le cheval; .... combien d'occafions où le cheval par fon ardeur, fa vivacité, fon étourderie, pouffe pour ainfi dire à bout fon cavalier, fi dans ce moment il ne s'arme pas d'une patience favante & conftante; il augmentera infailliblement par la crainte qu'aura le cheval du châtiment, fa fougue, fon inquiétude & fa fenfibilité,..... dès-lors l'animal fera comme un bon inflrument dans les mains d'un homme qui ne pourroit pas en jouer faute de favoir le mettre d'accord.

Troisième qualité. La hardieffe & le fang-froid.

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Garez-vous de cette hardieffe du caffe-cou qui ne vient que de l'ignorance & de la témérité, qui lutte avec l'animal au danger de tous les deux & à la ruine certaine du cheval; .... mais ayez cette hardieffe froide & raifonnée qui fait fentir à l'animal qu'on ne le craint pas, & qu'on applique le châtiment & aux circonftances & aux fautes; prenez-y bien garde, le cheval vous réfifte il réfufe l'obéiflance, il vous tâte, pour ainfi dire, & pour peu que vous méliez de l'incertitude dans vos actions, l'animal s'en apercevra, il prendra de l'empire & le détruira pour le maintenir. Ne demandez jamais à vos chevaux que ce qu'ils peuvent exécuter, alors ne foyez plus indecis; fans quoi vous rendriez vos chevaux poltrons & vicieux, ... fi après avoir préfenté une fois votre cheval au bord d'un foflé pour le faire fauter, vous avez manqué de hardieffe, une autre fois le cheval ne fautera pas ou il fe défendra long-temps avant d'obéir; un homme hardi & de fang-froid voit le danger & le prévient en employant les degrés néceffaires pour obtenir l'obéiffance; le caffe-cou au contraire brufque tout par ignorance ou par fauffe gloire, il ruine le cheval qui lui eft confié;.. la hardieffe & le fang-froid font d'autant plus nécefïaires à l'écuyer, qu'avec leur fecours il préviendra une grande partie des accidens auxquels il s'expofera en montant des chevaux vicieux ou indomptés tandis qu'avec de la témérité il courroit trop fouvent les rifques d'en être la victime ainsi que l'animal qu'il voudroit dreffer.

Quatrième qualité. La prudence.

La prudence eft une des qualités qui peut être

la plus utile au cavalier & au cheval... quelques exemples pourront venir à l'appui de cette vérité..... Un cheval vient-il à fe défendre fur les bords d'un précipice, la prudence indique qu'il faut remettre la correction à un autre moment pour éviter des accidens ou un plus grand défordre; .... fi un cheval fe retient dans un endroit gliffant, ce n'eft pas le moment de le decider; la prudence indique donc qu'il ne faut jamais demander au cheval au-delà de fes forces, & que ce ne doit être que par des moyens doux & raifonnés qu'il faut préparer les chevaux à tout ce qu'on doit attendre d'eux, & à tout ce qu'on peut être obligé de leur demander. Un écuyer prudent faura paffer une faute légère pour en éviter une plus grande; il s'inftruira par-là de la manière dont il faut fe conduire avec l'animal qu'il élève, même pour éviter à l'avenir la première faute.

Cinquième qualité. L'activité.

Sans une grande activité, quel est l'écuyer qui pourroit refifter au travail conftant que demande la fcience de l'équitation, & aux foins continuels qu'elle exige.... Après avoir fortement occupe fon corps & fon efprit dans les leçons qu'il vient donner aux différens chevaux qu'il a montés, à peine eft-il pied à terre, qu'il eft obligé de veiller fur les détails definitifs & effentiels de l'ecurie. Le panfement, la nourri. ture, l'examen des chevaux malades, les mêmes foins pour les chevaux bien portans, la tenue des écuries, des harnois, &c. Si un écuyer ne voit pas tout, s'il ne donne pas le premier l'exemple d'une activité exacte & très - eclairée, jamais il ne fera fecondé & les chevaux périront; plus exact & plus actif au contraire à le montrer par-tout, à préfider à tout, l'écuyer n'aura à punir perfonne, aucun fubalterne n'aura plus à fe plaindre des peines attachées à fon état & tous concourront avec plaifir au bien général.

Sixième qualité. La douceur, l'humanité.

Sans les vertus fi précieufes de la douceur & de l'humanité, le concours au bien n'aura jamais le même attrait; il faut donc que l'écuyer, en exigeant de chacun de fes fubordonnés de Pexactitude & en donnant l'exemple, n'oublie jamais ces égards fi précieux que l'on doit aux hommes, & que nous voudrions que l'on eut pour nous fi nous étions à leur place....... II faut bien diftinguer entre la foibleffe & la douceur; foyez, jufte & humain, votre févérité ne fera trembler que les mauvais fujets ;..... cette même douceur fi néceffaire vis-à vis des hommes qui font fous fes ordres, l'écuyer doir l'étendre jufqu'aux chevaux qui lui font confiés,

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