Imágenes de página
PDF
ePub

les procédés de la fabrication afin qu'elles puffent remplir, avec connoiffance les fonations qui leur étoient confiées. En un mot, fuivant les expreffions de la loi, les membres du diredoire ne devoient d'abord être que les adminiftrateurs ou plutôt les ordonnateurs du département des fubfiftances militaires; tandis que les confeils d'adminiftration des régimens étoient chargés des achats de grains, du foin de la mouture, de la fabrication du pain, &c. Le confeil de la guerre avoit mis cependant de juftes bornes à cette liberté, qu'il accordoit aux régimens de faire eux-mêmes l'achat des grains; il avoit ordonné que les garnifons occupées par plus de deux regimens recevroient, des mains des prépofés du dredoire, la quantité de grains néceffaires à leur confommation; & qu'il en feroit de même dans toutes les garnifons quand le prix des mêmes grains s'élèveroit à un taux plus haut que celui que les régimens pouvoient payer d'après la maffe de boulangerie. Voyez MASSE DE ROULANGERIE & PAIN. Pour mettre le directoire à portée de faire ces fournitures, la loi les autorifoit à établir des magafins de grain dans les différentes parties du royaume qu'ils voudroient choifir.

Cette loi étoit fage, auffi la durée n'en fut-elle point longue; le directoire fe chargea de fournir tous les grains néceffaires à l'armée; ils les remit d'abord aux régimens en nature & fans être mélangés; puis il les leur donna mélangés; puis réduits en farine. Aujourd'hui enfin les régimens reçoivent deux tiers de grains mélangés en leur préfence, & un tiers de farine.

Quelles raifons ont déterminé les adminiftrateurs à tous ces changemens? Il en eft fans doute qui font l'effet d'une fage prévoyance; mais cette prévoyance n'a-t-elle pas été portée trop loin? fi c'eft défiance, elle eft injurieuse, & des foupçons font nés des foupçons. C'eft, dit-on, pour gagner fur l'achat des grains que les prépofés du diredoire ont perfuadé au confeil de la guerre, que c'est à eux à faire l'acquifition des grains; c'eft pour fe maintenir dans l'adminif tration & faire bientôt renaître la régie que les anciens adminiftrateurs des vivres font entrés dans le directoire & qu'ils ont confervé tous leurs anciens prépofés. A quoi bon tous ces prépofés, difent les hommes qui ont fucé les principes des économistes; accordez une liberté légale, c'està-dire une liberté furveillée, & les régimens parviendront avant peu à donner aux foldats, dans tous les temps, & dans tous les lieux, du pain d'une qualité bien fupérieure à celle que le direduire diftribuoit : il arrivera fans doute quelques mécomptes; des régimens feront, dans le principe, de fauffes fpéculations; mais bientôt éclairés par l'expérience ils ne commettront plus d'erreur; & d'ailleurs le diredoire ne s'étoit-il pas réservé les moyens de réparer ces erreurs, &

de fubvenir à la hauffe momentanée des grains, en gardant à sa difpofition les deux cinquièmes du prix que la ration de pain coûte à l'état. En effet, l'état payoit la ration fur le pied de trente deniers, & les régimens n'en avoient que dix-huit à leur difpofition; avec ces deux cinquièmes qui s'élevoient à une fomme d'environ deux millions cinq cent mille livres, le diredoire pouvoit parer avec facilité, foit aux erreurs, foit aux augmentations trop grandes du prix des grains. Comme nous ferons forcés de revenir dans l'article PAIN, fur cette portion importante de l'adminiftration militaire, nous renverrons nos lecteurs à cet article que nous venons de citer, & au réglement concernant l'administration des vivres en date du premier avril 1788; nous les renverrons auffi au réglement arrêté par le roi, le même jour, concernant la compofition & les fonctions du diredoire des fubfiftances militaires; nous les renverrons enfin à quelques décifions émanées depuis du confeil de la guerre & qu'on trouvera dans la collection des ordonnances militaires. Nous devons recommander fur-tout, non-feulement aux militaires, mais à tous les citoyens, la lecture d'une inftruction publiée par le gouvernement fur les procédés qui doivent être fuivis par les troupes relativement à la manutention de leur pain. Cette inftruction eft courte mais claire, elle eft en un mot très-bien faite.

[blocks in formation]

Le but qu'on avoit eu en créant le diredoire étoit, dit l'ordonnance du 17 mars 1788, de fe ménager des approvifionnemens en cas de guerre, d'encourager les manufactures, de multiplier les atteliers de fabrication & de pouvoir tenter des effais.

Le directoire n'étoit primitivement chargé que de la fourniture des étoffes de laine, mais il crut depuis devoir faire les achats de toile, & bientôt fans doute il auroit fourni le refte de l'habillement & de l'équipement.

Un diredoire qui auroit été chargé d'empêcher les fabricans de faire de mauvaifes étoffes auroit été fans doute très-avantageux à l'état, aux ma nufactures & aux troupes; mais il feroit aifé de prouver qu'un diredoire marchand ou du moins

commiffionnaire général, fera toujours nuifible à Pétat, auquel il coutera des appointemens; aux manufatures qu'il pourra vexer, auxquelles du moins il peut faire la loi; aux troupes qu'il mécontentera toujours même quand il fera le bien. Tels font les hommes, ils n'aiment point, & ils ont raifon, qu'un tiers s'immifce dans leurs affaires; il foupçonnent toujours que ce tiers étant homme n'eft point à l'abri de la féduction de l'or. Les magafins & leurs gardes; les bureaux & leurs fcribes ; les verlemens, reverfemens, faux tranfports, tout cela retombe fur le confommateur & même fur le fabricant. Ce font-là des vérités généralement reconnues & dont nous avons démontré l'évidence. Voyez notre article HA BILLEMENT; nous croyons avoir prouvé qu'il feroit avantageux de laiffer aux troupes l'abfolue difpofition de leurs fonds pour l'habillement, & donné un moyen fimple, facile & peu difpendieux de fe ménager des approvifionnemens en cas de guerre.

Le directoire devoit retenir huit deniers par jour pour l'infanterie françoife & les huffards: dix deniers pour l'infanterie étrangère & légère, ainfi que pour la cavalerie & les dragons: onze deniers pour l'artillerie les mineurs & les ouvriers; un fol pour les chaffeurs. A la fin de l'année le diredoire devoit fournir le bordereau de chaque régiment & le régiment payer l'excédant de fes demandes, ou recevoir l'argent qui lui avoit été retenu de trop.

J'ai vu un calcul par lequel on prouvoit que les bénéfices fur le produit de l'argent que le diredoire touchoit avant d'être obligé de payer les fabricans, auroit pu fuffire à tous les faux frais que cause cette branche de l'administration. Nous n'entrerons point dans ces détails, ils font inutiles puisqu'il eft démontré, fans leur fecours, qu'il n'eft pas néceffaire de créer pour l'habillement des troupes un diredoire commiffionnaire.

§. III.

Diredoire de Padminiflration des Hôpitaux.

Entraîné par l'amour du bien & par le charme irréfiftible que la vérité a pour moi, j'ai cru devoir montrer l'inutilité du directoire de l'habillement & les vices du diredoire des fubfiftances militaires; guidé par le même motif, je donnerai à l'établiffement du directoire des hôpitaux militaires les louanges qu'il mérite. Il doit en effet paroître aux yeux de tout homme impartial non-feulement utile, mais encore néceffaire, Comment, fans Pétabliffement de ce directoire, les chefs de l'adminiftration militaire auroient-ils pu fuivre les rameaux, auffi variés que nombreux, que cette branche préfente. Ce diredoire avoit encore cet avantage fur les autres, que n'étant ni marchand

ni même commiffionnaire, il ne pouvoit donner à la malignité aucune prite fur lui. Il retenoit, il eft vrai, en fes mains, deux cinquièmes de la maffe affectée pour la guérifon de l'armée, mais cette retenue étoit néceffaire. Comme les fonds dont on avoit laiffé aux régimens la libre difpofition, pouvoient fuffire à ceux qui étoient bien conftitués, qui étoient placés dans les climats fains, dans de bons établiffemens militaires & qui ne faifoient point de mouvemens extraordinaires, il eut été vicieux de leur payer une maffe plus forte; mais comme ces mêmes fonds ne fuffifoient point à ceux qui fe trouvoient placés dans des circonftances contraires; à ceux qui étoient obligés de louer des édifices pour placer leurs malades; à ceux qui étoient obligés de les faire entrer dans les hôpitaux de charité, il falloit bien charger un comité d'apprécier cette augmentation de dépente; il falloit bien encore veiller à l'entretien des édifices & à l'approvisionnement des objets chers & d'un ufage non journalier qui doivent le trouver dans les grands hôpitaux, & c'étoit-là les fonctions du direoire: c'étoit avec les fonds qu'il gardoit en réferve & dont il comptoit avec le confeil de la guerre, que le directoire faifoit ces achats & ces dépenfes; c'étoit encore avec ces fonds que le directoire devoit former les prix d'encouragement qu'il fe propofoit de donner aux officiers de fanté & qu'il fabriquoit les jetons, prix de l'affiduité des membres du confeil de fanté. Voyez HoPITAUX, OFFICIERS DE SANTÉ, & CONSEIL DE SANTÉ.

Le directoire des hôpitaux militaires étoit compofé de cinq membres: de deux officiers généraux membres du confeil de la guerre; d'un commiffaire des guerres & de quelques officiers de fanté pris parmi les anciens médecins & chirurgiens des armées, diftingués par leurs connoiffances dans leur art & dans la partie adminif trative des hôpitaux.

Le premier des officiers de fanté qui compofoient le direoire, en étoit le rapporteur, & le fecond étoit le vice-rapporteur. Ces deux officiers de fanté qui étoient employés avec le même titre auprès du confeil de fanté, formoient entre le diredoire & le confeil de fanté, le canal de communication qui devoit exifter entre ces deux comités du même corps. Car, d'après l'esprit de la loi, le directoire des hôpitaux & le confeil de fanté ne formoient qu'un corps divifé en deux parties; une, le directoire, étoit chargé de P'adminiftration des finances & de la partie exécutive, & l'autre, le confeil de fanté, de tout ce qui étoit relatif à l'objet médical.

Le rapporteur mettoit fucceflivement fous les yeux du directoire les délibérations du confeil de fanté, & fous les yeux du confeil les demandes du directoire. Il devoit tenir un registre exact de tous les officiers de fanté employés, foit dans les

[ocr errors][merged small]
[ocr errors]

DISCRETION. C'et en Italie qu'eft née Fexpreflion vivre à difcrétion. Permettre foldats de vivre à difcrétion, c'eft leur donner le droit d'exiger des habitans d'un pays ou d'un droit quelconque, tout ce qui eft néceffaire àbitisfaction, non-feulement de leurs befoins, mais même de leurs défirs. Les peuples policés e font plus vivre leurs foldats à difcrétion, meme fur le territoire du peuple vaincu. L'indifciFine auroit bientôt détruit le corps à qui on auroit permis de vivre ainfi.

Se rendre à difcrétion, c'eft fe rendre fans capitulation. Jadis un esclavage long & dur & quelquefois la mort, étoit le fort réservé à celui qui fe rendoit à difcrétion, aujourd'hui celui qui le rend de cette manière éprouve, il eft vrai, des humiliations militaires, mais les jours font toujours en sûreté. C'eft-là un effet des lumières qui éclairent notre fiècle.

DISTANCE (fuppl.)

De la diflance entre deux hommes du même rang.

Les ordonnances militaires veulent qu'on ne hiffe aucune diflance entre les hommes d'un mime rang; on a prétendu, par le rapprochement extrême, remédier à la foibleffe de notre ordre habituel. Ce remède produit quelques avantages, mais il a de grands inconvéniens pour les marches, pour le feu, & en auroit encore davantage fi Ton combattoit à l'arme blanche. Il est en effet impotlibie qu'un homme qui eft ferré, preffé par fes deux voifins marche avec aifance, vife avec adreffe, & qu'il pare avec facilité les coups de Tennemi ou qu'il lui en porte de très-affurés. Cette vérité avoit été fentie par tous les peuples de l'antiquité. Voyez TACTIQUE. Il eft des tacticiens qui réduisent à 18 pouces l'espace que chaque homme en bataille doit occuper; d'autres portent à 20 pouces, d'autres enfin à 21. D'après un grand nombre d'expériences que j'ai faites, je me crois fondé à dire qu'il faudroit le calculer fur 23 ou même fur 24 pouces : alors il y auroit environ un pouce de distance entre chaque homme & cette diflance, toute petite qu'elle eft, leur donneroit beaucoup de facilité fait pour faire feu foit pour marcher. Ce qui

le

[ocr errors]

m'a conduit à cette conclufion, c'eft lobfervation fuivante. Toutes les fois que j'ai mefuré le front d' un bataillon qui venoit d'être corre&ement aligné, après un repos, j'ai vu que chaque homme n'occupoit, il eft vrai, que 21 pouces, mais après une marche, ou après un feu de deux rangs, j'ai vu toujours que chacun occupoit environ vingt-quatre pouces. Ne difons point au foldat de laiffer cette diftance d'un pouce, car il en laifferoit une plus grande; mais calculons toujours comme fi nous lui avions dit de la prendre, car il la prend constamment.

De la diftance entre les

rangs.

La diflance entre les rangs d'une même troupe a beaucoup varié, on en connoiffoit il n'y a pas encore long-temps deux ou trois différentes, il n'en eft aujourd'hui qu'une feule ufitée. Les ordonnances veulent que cette diflance foit de vingt- un pouces, à compter des talons de l'homme qui eft derrière aux talons de celui qui eft devant. Cette difiance eft-elle fuffifante, & la manière dont on la mefure eftelle bonne.

Il est néceffaire de rapprocher beaucoup les rangs afin que les hommes du premier foient moins fouvent bleffes par ceux du troifième, & afin que le pas puiffe être emboîté. Mais eft-il réellement poflible de marcher un pas emboîté? je ne l'ai jamais vu exécuter ailleurs que fur une esplanade, ou dans un hangard. Voyez MARCHE & PAS. Mais est-il réellement poffible de faire feu quand on a le fac fur les épaules, ou même quand on l'a dépofe, fi l'on n'a confervé que vingt- un pouces de diftance entre les rangs? Toutes les fois que j'ai mefuré les diftances après un feu de deux rangs, j'ai trouvé qu'il s'étoit établi entre chacun un espace de deux pieds; toutes les fois que j'ai mefuré les diflances après une marche dans un terrain labouré ou peu uni, j'ai eu les mêmes résultats. De ces obfervations je me fuis cru autorifé à conclure que la diflance entre les rangs devoit être comptée fur vingt-quatre pouces. Je ne prétends cependant point qu'on doive ordonner d'augmenter la difance, qu'il eft prudent de calculer comme fi elle étoit augmentée, & fur-tout de ne jamais faire tirer à la fois plus de deux rangs de notre infanterie. Voyez FEU.

mais

La manière nouvelle dont on a ordonné de mefurer la diflance entre les rangs eft vicieuse, en ce que le foldat ne peut guères juger luimême s'il ne s'eft point trompé. Ne vaudroitil pas mieux revenir à l'ancienne méthode, en mefurant du dos de l'homme du premier rang, à la poitrine de celui du fecond, on rend cette opération plus facile. N'attachons cependant jamais une trop grande importance à ces minuties:

on doit, toutes les fois qu'on le peut fans danger, laiffer un pen de liberté au foldat; ainfi on obtient avec plus de facilité qu'il fe contraigne quand la néceffité l'exige. Nous ne devrions d'après ce principe exiger la compreffion des rangs que lorfque nous voulons faire feu, & que nous formons la colonne ferrée pour fondre fur l'ennemi. Voyez Cuoc.

De la confervation des diftances dans les colonnes avec distance.

Rien de plus difficile & de plus important que de conferver les diflances, alors qu'on forme une colonne avec diflance. Tous les ta@iciens les reconnoiffent, mais aucun n'a indiqué la manière d'enfeigner aux officiers & aux bas-officiers à les conferver. La plupart prefcrivent, pour cet objet, de manœuvrer toujours avec un nombre égal de files; cette méthode me paroît infiniment vicieufe, il vaudroit mieux ce me femble varier chaque jour le nombre, ainfi on formeroit plus promptement le coup d'œil des militaires, & on le formeroit d'une manière plus générale. Un colonel françois perfuadé de cette vérité, avoit imaginé de faire porter par deux foldats de chaque compagnie un cordeau divifé par des nœuds faits à différentes diftances; il faifoit manoeuvrer fes officiers & fes bas - officiers avec fes pelotons factices, & jamais il ne fuppofoit deux fois de fuite le même front: il n'eut point employé cette méthode ingénieufe pendant trois mois, que fes officiers furent habitués à ne faire jamais d'erreur fenfible à l'œil le plus exercé. Cette méthode a cet avantage inappréciable qu'elle inftruit l'officier & le basofficier fans fatiguer & fur tout fans ennuyer le foldat. Il feroit peut-être très - avantageux de rendre cette pratique générale dans l'armée.

[ocr errors]
[blocks in formation]

Si la perfection de la police miktaire exige qu'on diftingue les armes, les régimens, les compagnies, les efcouades, & les individus, le befoin de l'émulation exige de même qu'on puiffe diftinguer avec facilité les différens grades; les hommes qui ont fait la guerre d'avec ceux qui ne l'ont point faite; ceux qui fervent depuis long-temps d'avec ceux qui fervent depuis un petit nombre d'années; ceux qui ont reçu des bleffures d'avec ceux qui n'ont point été bleffés; ceux qui ont fait des actions éclatantes d'avec ceux qui n'ont fait que leur devoir. C'est avec les épaulettes, les chevrons, les plaques, les croix, qu'on peut rendre les diftinctions aifées. Voyez ces différens mots & l'article RECOMPENSE. C'eft dans ce dernier article que nous nous occupons principalement des diftinctions faites pour exciter une vive émulation dans le cœur des guerriers.

DISTRIBUTION. Les diftributions doivent, comme le reste des opérations militaires, être foumifes à des règles fixées par la loi. Les troupes doivent y être conduites en ordre; elles devroient être accompagnées, même pendant la paix, par un détachement deftiné à protéger & à prêter main-forte à la loi. La force de ce détachement doit pendant la guerre être proportionnée aux dangers que les foldats de corvée peuvent courir.

Ces précautions purement militaires ne font point les plus importantes; c'eft la qualité & la quantité des objets qu'on diftribue aux foldats qui doivent fixer l'attention de tous les officiers employés à ce genre de fervice. J'aime affez à trouver l'empreinte d'une grande méfiance fur le front de toutes les perfonnes chargées de préfider aux diftributions militaires, fur-tout lorfque c'eft une compagnie financière qui eft chargée des approvifionnemens. Comme le défir du gain l'a feul formée, elle ne perd aucune occafion de le fatisfaire ici le poids n'eft point faux, mais il eft foible; chaque individu ne perd prefque rien, mais la compagnie financière n'en gagne pas moins beaucoup là, les denrées ne font pas très-mauvaises, mais elles font médiocres; chaque foldat ne fouffre qu'un petit dommage, mais le traitant n'en fait pas moins un gros gain : ailleurs, on entremêle des provifions très-bonnes avec des provifions mauvaises; il faut que tout paffe, difent ces agens, mais l'état vous paye. t-il " leur répondrai-je, avec de la monnoie de bas aloi. Cette défiance que je défire lire dans les yeux des officiers ne doit point cependant paroître fous cet afpect aux yeux du foldat, ne doit fe montrer à eux, que fous celui d'une vigilance attentive; fans cela elle produiroit de mauvais effets.

:

elle

L'administration fubalterne du département de

la guerre ayant été prefque fans ceffe intéreffée, juiqu'a ce jour, dans les marchés faits avec les compagnies financières, elle a prefque toujours embraffé leur défenfe, prefque toujours elle a fait rendre des décifions qui leur étoient favorables; cependant fi la juftice pouvoit fe permettre de faire volontairement pencher sa balance, ce devroit être en faveur du foldat: fes droits font fa foibleffe & fa pauvreté. Si nous perfiftons à confier à des compagnies financières l'approvifionnement de nos armées, faifons des lois qui par leur févérité effrayent les adminiftrateurs infideles, & qui par leur prévoyance empêchent le foldat de devenir la victime de la cupidité de tout ce qui l'entoure.

Laloi veut que les poids, les mesures, dont fe fert pour les diftributions militaires, & la qualité des objets qu'on diftribue journellement aux foldats foient vérifiés par les officiers chargés de préfider préfider aux diftributions. Elle Teut que le capitaine de police, le quartiermaitre, & l'adjudant y foient préfens, que les foldats y foient conduits en farreau, en pantalon & bonnet de police. Voyez pour les détails le titre IX du Réglement intérieur pour l'infanterie, en date du 1er juillet 1788; & le titre XXVII du Réglement provisoire pour le fervice de l'infanterie en campagne, en date du 12 août 1788.

DIVISION, (fupp.) Ce fut M. le comte de Saint-Germain qui le premier forma, pendant la paix, l'armée françoile en divifions: cet ordre de choles ne fubfifta pas long-temps; la mort du miniftre entraîna la chute de fon fyftême. Le confeil de la guerre a repris les erremens de M. de Saint-Germain; il a formé l'armée françoile en vingt-une divifions. Ces divifions ne font égales, ni en efpèce, ni en nombre de régimens, aucune d'elles n'embraffe même une étendue de territoire égale. Ces vingt-une divifions font celle de Flandre, qui eft formce de dix-fept bataillons & huit efcadrons; celle de Haynault, dix-huit bataillons, quatorze efcadrons; de Champagne, huit bataillons, quatorze efcadrons; première des Evêchés, douze bataillons, quatorze efcadrons; deuxième des Evêchés, huit bataillons, quatorze efcadrons; première de Lorraine, neuf bataillons, quatorze efcadrons; feconde de Lorraine, vingt efcadrons, Baffe-Alface, feize bataillons, quatorze efcadrons; Haute-Alface,huit bataillons, quatorze efcadrons; Franche-Comté, quatre bataillons quatorze efcadrons; Dauphiné, fix bataillons; Provence, dix bataillons; Languedoc & Rouffillon, quinze bataillons, fix efcadrons; Guyenne, neuf bataillons, fix efcadrons; Aunis, Saintonge & Poitou, douze bataillons fix efcadrons; Bretagne, treize bataillons fix efcadrons; Normandie, feize bataillons; Picardie, huit bataillons, douze efcadrons; Artois feize bataillons, douze efcadrons;

intérieur, cinq bataillons, dix-huit efcadrons; Corfe, huit bataillons.

Chacune de ces divifions avoit pour chefs un lieutenant général des armées du roi, un infpecteur divifionnaire pour l'infanterie, un pour la cavalerie & un maréchal de camp pour chaque brigade; il y avoit de plus un commiffaire ordonnateur par divifion.

Lorfque cet ordre fut établi, les militaires fe demandèrent, pourquoi le confeil de la guerre a-t-il fi énormement multiplié le nombre des divifions? pourquoi a-t-il employé une fi grande quantité d'officiers généraux? En rendant le nombre des divifions moins grand, on auroit, diloientils, infiniment fimplifié la machine militaire & économifé les finances de l'état; en employant une quantité d'officiers généraux beaucoup moins grande, on eût pu les choifir avec plus de foin, & on n'eût point ralenti inutilement la marche des affaires. Quatre divifions fuffifent à la France; la Loire & une ligne qui traverferoient le royaume en paffant entre Lille & Valenciennes, & fe dirigeant vers Bourges, leur ferviroient de limites. Un maréchal de France, feroit le chef militaire de chacune de ces divifions; deux lieutenansgénéraux fuffiroient pour infpecter les troupes, qui compoferoient chacune d'elles; quatre maréchaux de camp pour les conduire, un commiffaire ordonnateur & quatre commiffaires ordinaires, foit pour les paffer en revue, foit pour arrêter leur comptabilité. Chacune de ces divifions pourroit former une petite armée qui auroit fon artillerie fes officiers du génie, fon état-major. La divifion du nord & celle de l'eft feroient, il est vrai, plus nombreufes que celles du fud & de l'oueft; mais l'on doit obferver que nos établiffemens militaires font plus confidérables dans la Flandre, le Hainault, les Evêchés, la Lorraine & l'Alface, que dans la Guyenne, le Rouffillon & la Provence. On doit obferver encore que ces divifions font en même temps celles qui avoifinent le plus le théâtre ordinaire de nos guerres. Les officiers généraux employés auprès des troupes feroient en même temps les commandans des provinces qui feroient enclavées dans leur divifion; un lieutenant général & deux maréchaux de camp devroient être fans ceffe en activité. Tous les ordres du roi leur parviendroient par le maréchal de France, chef de leur divifion. Les miniftres n'ayant plus à traiter qu'avec quatre perfonnes, le travail du bureau de la guerre feroit infiniment fimplifié; le nombre des officiers généraux étant beaucoup diminué, on pourroit les choifir avec foin, & leur donner, vu leur petit nombre, un traitement qui, quoique confidérable, ne feroit point une charge fenfible pour les finances du royaume. Pendant Fété, chaque divifion formeroit un ou deux camps de paix dans lefquels tous les officiers généraux non employés

« AnteriorContinuar »