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Sur les pas d'un banni craignez-vous de marcher?

ARICIE.

Hélas, qu'un tel exil, Seigneur, me feroit cher!
Dans quels raviffemens, à votre fort liée,
Du reste des Mortels je vivrois oubliée!
Mais, n'étant point unis par un lien fi doux,
Me puis-je, avec honneur, dérober avec vous?
Je fais que, fans bleffer l'honneur le plus févère,
Je me puis affranchir des mains de votre père.
Ce n'eft point m'arracher du sein de mes parens;
Et la fuite eft permife à qui fuit fes tyrans.
Mais vous m'aimez, Seigneur. Et ma gloire allarmée...

HIPPOLYTE.

Non, non, j'ai trop de foin de votre renommée.
Un plus noble deffein m'amène devant vous.
Fuyez vos ennemis, & fuivez votre époux.
Libres dans nos malheurs, puifque le Ciel l'ordonne,
Le don de notre foi ne dépend de perfonne.
L'hymen n'est point toujours entouré de flambeaux
Aux portes de Trézène, & parmi ces tombeaux,
Des Princes de ma race antiques fépultures,
Eft un Temple facré formidable aux parjures.
C'eft-là que les Mortels n'ofent jurer en vain.
Le perfide y reçoit un châtiment foudain ;
Et craignant d'y trouver la mort inévitable,
Le menfonge n'a point de frein plus redoutable,
Là, fi vous m'en croyez, d'un amour éternel
Nous irons confirmer le ferment folemnel.

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Nous prendrons à témoin le Dieu qu'on y révère.
Nous le prierons tous deux de nous fervir de père.
Des Dieux les plus facrés j'attefterai le nom,
Et la chafte Diane, & l'augufte Junon;

Et tous les Dieux enfin, témoins de mes tendreffes,
Garantiront la foi de mes faintes promesses.

ARICI E.

Le Roi vient. Fuyez, Prince, & partez promptement;
Pour cacher mon départ je demeure un moment.
Allez ; & laiffez-moi quelque fidèle guide,
Qui conduife vers vous ma démarche timide.

SCENE 1 I.

THÉSÉE, ARICIE, IS MENE.

THE SÉ E.

DIEUX, éclairez mon trouble, & daignez à mes yeux Montrer la vérité que je cherche en ces lieux.

તે

ARICI E.

Songe à tout, chère Ifmène, & fois prête à la fuite.

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V

SCENE III.

THÉSÉE, ARICIE.

THESE E.

ous changez de couleur, & femblez interdite, Madame. Que faifoit Hippolyte en ce lieu ?

ARICIE.

Seigneur, il me disoit un éternel adieu.

THESE E.

Vos yeux ont fcu dompter ce rebelle courage;
Et fes premiers foupirs font votre heureux ouvrage

ARICIE.

Seigneur, je ne vous puis nier la vérité.
De votre injufte haine il n'a pas hérité.
Il ne me traitoit point comme une criminelle.
THESE E.

J'entends. Il vous juroit une amour éternelle.
Ne vous affurez point fur ce cœur inconftant;
Car à d'autres que vous il en juroit autant.

Lui, Seigneur ?

ARICI E.

THESE E.

Vous deviez le rendre moins volage.

Comment fouffriez-vous cet horrible partage?

ARICIE.

Et comment fouffrez-vous que d'horribles difcours

D'une fi belle vie ofent noircir le cours ?
Avez-vous de fon cœur fi peu de connoissance ?
Difcernez-vous fi mal le crime & l'innocence?
Faut-il qu'à vos yeux feuls un nuage odieux
Dérobe fa vertu qui brille à tous les yeux ?
'Ah, c'est trop le livrer à des langues perfides!
Ceffez. Repentez-vous de vos vœux homicides.
Craignez, Seigneur, craignez que le Ciel rigoureux
Ne vous haïffe affez pour exaucer vos vœux.
Souvent dans fa colère il reçoit nos victimes.
Ses préfens font fouvent la peine de nos crimes.

THÉ SÉ E.

Non, vous voulez en vain couvrir son attentat. Votre amour vous aveugle en faveur de l'ingrat. Mais j'en crois des témoins certains, irréprochables. J'ai vu, j'ai vu couler des larmes véritables.

ARICI E.

Prenez garde, Seigneur. Vos invincibles mains
Ont de monftres fans nombre affranchi les humains;
Mais tout n'eft
pas détruit, & vous en laiffez vivre
Un....Votre fils, Seigneur, me défend de poursuivre.
Inftruite du refpect qu'il veut vous conferver,
Je l'affligerois trop fi j'ofois achever.
J'imite fa pudeur, & fuis votre présence,
Pour n'être pas forcée à rompre le filence.

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Q

UELLE eft donc fa pensée ? Et que cache un discours Commencé tant de fois, interrompu toujours? Veulent-ils m'éblouir par une feinte vaine? Sont-ils d'accord tous deux, pour me mettre à la gêne? Mais moi-même, malgré ma févère rigueur, Quelle plaintive voix crie au fond de mon cœur ? Une pitié secrette & m'afflige & m'étonne. Une feconde fois interrogeons Enone. Je veux de tout le crime être mieux éclairci. Gardes. Qu'none forte & vienne feule ici.

J'IGNO

SCENE V.

THÉSÉE, PANOPE.

PANOPE.

'IGNORE le projet que la Reine médite, Seigneur. Mais je crains tout du transport qui l'agite.

Un mortel désespoir fur fon visage eft peint.

La pâleur de la mort est déja fur fon teint.
Déja, de fa préfence avec honte chaffée,
Dans la profonde mer none s'est lancée.
On ne fait point d'où part ce deffein furieux;
Et les flots pour jamais l'ont ravie à nos yeux,

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