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TITUS.

Non, Madame. Jamais, puisqu'il faut vous parler, Mon cœur de plus de feux ne se sentit brûler.

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Sortons, Paulin, je ne lui puis rien dire..

SCENE V.

BÉRÉNICE, PHÉNIC E.

QUOI,

BERÉNICE.

UOI, me quitter fi-tôt, & ne me dire rien ! Chère Phénice, hélas, quel funeste entretien ! Qu'ai-je fait ? Que veut-il? Et que dit ce filence?

PHÉNIСЕ.

Comme vous, je me perds d'autant plus que j'y penfe Mais ne s'offre-t-il rien à votre souvenir,

Qui contre vous, Madame, ait pú le prévenir;

Voyez, examinez.

BÉRÉNICE.

Hélas, tu peux m'en croire !

Plus je veux du paffé rappeller la mémoire,
Du jour que je le vis jufqu'à ce trifte jour,
Plus je vois qu'on me peut reprocher trop d'amour.
Mais tu nous entendois. Il ne faut rien me taire ;
Parle. N'ai-je rien dit qui lui puiffe déplaire?
Que fai-je ? J'ai peut-être, avec trop de chaleur,
Rabaiflé fes préfens, ou blâmé fa douleur.
N'eft-ce point que de Rome il redoute la haine?
Il craint peut-être, il craint d'époufer une Reine.
Hélas, s'il étoit vrai!... Mais non, il a, cent fois,
Raffuré mon amour contre leurs dures loix.
Cent fois.... Ah! qu'il m'explique un filence fi rude
Je ne refpire pas dans cette incertitude.

Moi, je vivrois, Phénice, & je pourrois penser
Qu'il me néglige, ou bien que j'ai pû l'offenser ?
Retournons fur fes pas. Mais, quand je m'examine
Je crois de ce défordre entrevoir l'origine,
Phénice; il aura fù tout ce qui s'eft paffé :
L'amour d'Antiochus l'a peut-être offense.
Il attend, m'a-t-on dit, le Roi de Comagène.
Ne cherchons point ailleurs le fujet de ma peine.
Sans doute, ce chagrin, qui vient de m'allarmer,
N'est qu'un léger soupçon facile à défarmer.
Je ne te vante point cette foible victoire

Titus. Ah, plût au Ciel, que, fans blesser ta gloire,
Un rival plus puiffant voulût tenter ma foi,

Et pût mettre à mes pieds plus d'Empires que toi;
Que de fceptres fans nombre il pût payer ma flamme;
Que ton amour n'eût rien à donner que ton ame!
C'est alors, cher Titus, qu'aimé, victorieux,
Tu verrois de quel prix ton cœur est à mes yeux.
Allons, Phénice, un mot pourra le fatisfaire.
Raffurons-nous, mon cœur, je puis encor lui plaire.
Je me comptois trop tôt au rang des malheureux :
Si Titus eft jaloux, Titus eft amoureux.

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ACTE I I I.

SCENE PREMIERE.

TITUS, ANTIOCHUS, ARSACE.

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TITUS.

Uo1, Prince, vous partiez? Quelle raison fubite
Preffe votre départ, ou plutôt votre fuite?
Vouliez-vous me cacher jufques à vos adieux ?
Est-ce comme ennemi que vous quittez ces lieux?
Que diront avec moi, la Cour, Rome, l'Empire?
Mais, comme votre ami, que ne puis-je vous dire?
De quoi m'acculez-vous ? Vous avois-je, fans choix,
Confondu jufqu'ici dans la foule des Rois?
Mon cœur vous fut ouvert tant qu'a vécu mon père:
C'étoit le feul préfent que je pouvois vous faire.
Et lorfqu'avec mon cœur ma main peut s'épancher,
Vous fuyez mes bienfaits tout prêts à vous chercher :
Penfez-vous qu'oubliant ma fortune passée,

Sur ma feule grandeur j'arrête ma pensée;
Et que tous mes amis s'y préfentent de loin

Comme autant d'inconnus, dont je n'ai plus besoin?
Vous-même, à mes regards qui vouliez vous soustraire,
Prince, plus que jamais vous m'êtes nécessaire.

ANTIOCHUS.

Moi, Seigneur?

TITUS.

Vous.

ANTIOCH US.

Hélas, d'un Prince malheureux ỳ

Que pouvez-vous, Seigneur, attendre, que des voeux!

TITUS.

Je n'ai pas oublié, Prince, que ma victoire
Devoit à vos exploits la moitié de fa gloire ;
Que Rome vit paffer au nombre des vaincus,
Plus d'un captif chargé des fers d'Antiochus ;
Que dans le Capitole elle voit attachées
Les dépouilles des Juifs par vos mains arrachées.
Je n'attens pas de vous de ces fanglans exploits;
Et je veux feulement emprunter votre voix.
Je fais que Bérénice, à vos soins redevable,
Croit pofféder en vous un ami véritable.

Elle ne voit dans Rome, & n'écoute que vous.
Vous ne faites qu'un cœur & qu'une ame avec nous.
Au nom d'une amitié fi conftante & fi belle,

Employez le pouvoir que vous avez fur elle.

Voyez-la de ma part.

ANTIOCH US.

Moi, paroître à fes yeux !

La Reine, pour jamais, a reçu mes adieux.

TITUS.

Prince, il faut que pour moi vous lui parliez encore.

ANTIOCH US.

Ah, parlez-lui, Seigneur! La Reine vous adore.

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