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épics dorez pendant la moiffon tombent fous la faux tranchante d'un infatigable moissonneur, oublioit le danger où il s'expofoit inutilement. Sa vieilleffe l'avoit quité, il ne fongeoit plus qu'à fuivre des yeux Pifistrate fon fils,qui de fon côté foûtenoit avec ardeur le combat pour éloigner le périk de fon pere: mais le moment fatal étoit venu, où Pififtrate devoit faire fentir à Neftor combien on eft fouvent malheureux d'a voir trop vécu.

Pififtrate porta un coup de lance fi violent contre Adrafte que le Daunien devoit fuccomber mais il l'évita; & pendant que Pififtrate ébranlé du faux coup qu'il avoit donné, ramenoit fa lance, Adrafte le perça d'un javelot au milieu du ventre. Ses entrailles commencérent à fortir avec un ruiffeau de fang; fon teint se flê. fe trit comme une fleur que la main d'une

d'une Nymphe a cueillie dans les prez. Ses yeux étoient déja prefque éteints, & fa voix défaillante. Alcée fon gouverneur, qui étoit auprès de lui, le foûtint comme il alloit tomber,& n'eut le tems que· de le mener entre les bras de fon pere. Là il voulut parler & donner les dernieres marques de fa tendreffe; mais en ouvrant la bouche il expira.

Pendant que Philoctete répan doit autour de lui le carnage & P'horreur pour repouffer les efforts. d'Adrafte, Neftor tenoit ferré en tre fes bras le corps de fon fils : il rempliffoit l'air de fes cris, & ne pouvoit fouffrir la lumiere. Malheureux,difoit.il,d'avoir été pere & d'avoir vécu fi longtems! Helas cruelles deftinées, pourquoi n'avez-vous pas fini ma vie ou à la chaffe du fanglier de Calydon, ou au voyage de Colchos, ou au premier fiege de Troye? Je ferois

!

mort

mort avec gloire & fans amertu me maintenant je traîne une vieilleffe douloureuse,méprisée & impuiffante. Je ne vis plus que pour les maux, je n'ai plus de fentiment que pour la trifteffe. O mon fils! ô mon fils! ô mon cher fils Pififtrate! quand je perdis ton frere Antiloque,je t'avois pour me confoler. Je ne t'ai plus, rien ne me confolera; tout eft fini pour moi. L'efperance, feul adouciffement des peines des hommes,n'eft plus un bien qui me regarde. Antiloque, Pififtrate, ô chers enfans! je croi que c'eft aujourd'hui que je vous perds tous deux, la mort de l'un rouvre la playe que l'autre avoit faite au fond de mon cœur. Je ne vous verrai plus ? Qui fermera mes yeux ? Qui recueillira mes cendres ? O cher Pifistrate, tu es mort comme ton frere en homme de courage; il n'y a que moi qui ne puis mourir.

En

En difant ces paroles il voulut fe percer lui-même d'un dard qu'il tenoit : mais on arrêta fa main, & on lui arracha le corps de fon fils. Et comme cet infortuné vieillard tomboit en défaillance, on le

porta dans fa tente,

ayant un peu repris fes forces il voulut retourner au combat, mais on le retint malgré lui. Cependant Adrafte & Philoc. tete fe cherchoient; leurs yeux étoient étincelans comme ceux d'un lion & d'un leopard, qui cherchent à fe déchirer l'un l'autre dans les campagnes qu'arrofe le Caystre. Les menaces,la fureur guerriere, & la cruelle vengeance éclatent dans leurs yeux farouches. Ils portent une mort certaine par tout où ils lancent leurs traits. Tous les combattans les regardent avec effroi. Déja ils fe voyent l'un l'autre, & Philoctete tient en main une de ces flêches

terribles qui n'ont jamais manqué leur coup dans fes mains, & dont les bleffures font irremediables. Mais Mars qui favorifoit le cruel & intrépide Adrafte, ne put fouffrir qu'il perît fi-tốt; il vouloit par lui prolonger les horreurs de la guerre,& multiplier le carnage. Adrafte étoit encore dû à la juftice des Dieux pour punir les hom mes & pour verfer leur fang.

Dans le moment où Philoctete veut l'attaquer, il eft bleffé luimême par un coup de lance que lui donne Amphimaque jeune Lu-canien, plus beau que le fameuxNirée, dont la beauté ne cedoit qu'à celle d'Achille parmi tous les Grecs qui combatirent au fiege de Troye. A peine Philoctete eut reçu le coup, qu'il tira la flêche contre Amphimaque,elle lui perça le cœur. Auffitôt fes beaux yeux noirs s'éteignirent, & furent couverts des tenebres de la mort. Sa

bou-

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