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chere.Sans vous le corps de mon frère auroit été la proye des vautours; fans vous fon ombre privée de la fépulture feroit malheureusement errante fur les ri ves du Styx, toujours repouffée par l'impitoyable Caron. Faut. il que je doive tant à un homme que j'ai tant haï? O Dieux ! récompenfez-le, & délivrez-moi d'une vie fi malheureuse. Pour vous, ô Telemaque, rendez-moi les derniers devoirs que vous avez rendus à mon frere, afin que rien ne manque à votre gloire.

A ces paroles Phalante demeura épuifé & abattu d'un excès de douleur. Telemaque fe tint auprès de lui fans ofer lui parler, & attendant qu'il reprit fes forces. Bientôt Phalante revenant de cette défaillance, prit l'urne des mains de Telemaque, la baifa plufieurs fois, l'arrofa de fes larmes, & dit : O cheres, pré

:

précieufes cendres quand eft-ce que les miennes feront renfer mées avec vous dans cette mê. me urne? Oombre d'Hippias, je te fuis dans les enfers: Tele, maque nous vengera tous deux. Cependant le mal de Phalan te diminua de jour en jour par les foins des deux hommes qui avoient la fcience d'Efculape. Telemaque étoit fans céffe avec eux auprès du malade, pour les rendre plus attentifs à avancer fa guérifon, & toute l'armée admiroit bien plus la bonté de cœur avec laquelle il fecouroit fon plus grand ennemi, que la valeur & la fageffe qu'il avoit montrées en fauvant dans la bataille l'armée des alliez. En même tems Telemaque fe montroit infatigable dans les plus rudes travaux de la guerre il dormoit peu,& fon fommeil étoit fouvent interrompu, ou par les avis qu'il recevoit à toutes les heures de la nuit, comme du

jour,

jour, ou par la vifite de tous les quartiers du camp qu'il ne faifoit jamais deux fois de fuite aux mê. mes heures, pour mieux furprendre ceux qui n'étoient pas affez vigilans, il revenoit fouvent dans fa tente couvert de fueur & de pouffiere; fa nourriture étoit fim: ple; il vivoit comme les foldats pour leur donner l'exemple de la fobrieté & de la patience. L'ari mée ayant peu de vivres dans ce campement,il jugea à propos d'ar rêter les murmures des foldats, en fouffrant lui-même volontairement les mêmes incommoditez qu'eux. Son corps loin de s'affoiblir dans une vie fi pénible, fe fortifioit & s'endurciffoit chaque jour; il commençoit à n'avoir plus ces graces fi tendres,qui font com me la fleur de la premierę jeunes fe; fon teint devenoit plus brun & moins délicat,fes membres moins moux & plus nerveux.

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Bonnart fildel

P.F.

F. Giffart

sail.

Télémaque traverse le Tartare.

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