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sousjourna ung petit de temps, et puis se mist à chemin avec son exercite pour aler vers la ville de Creil, que tenoient les Anglois. Si se loga assés près d'ycelle ville, au costé devers Paris. Et le connestable et aultres capitaines se logèrent à l'autre costé devant le pont. Devant laquelle ville, de première venue furent faites aulcunes escarmuches. Et tost après furent assis les gros engiens du Roy contre les portes et murailles, dont très fort les adommagèrent, et tant que les assiégés commencèrent à avoir grand doubte d'estre prins d'assault. Pour quoy, au bout de douze jours ou environ après ledit siège mis, requirent de traictier avec ycelui Roy ou ses commis. Sy leur fut octroyé. Et en fin d'ycelui traictié, furent contens de rendre ladicte ville et le chastel avec tous les biens, par tel si qu'ils povoient emporter tant seulement leurs robes et ce qu'ils avoient d'argent. Et ce fait, s'en alèrent soubz bon sauf conduict, tous à pied, par la porte du pont en tirant vers la ville de Biauvais. Et y estoit en chief d'yceulx Anglois, messire Guillaume Chamberlan. Après lequel partement des dessusdis Anglois, le Roy entra dedens le chastel. Et les aultres seigneurs et capitaines se logièrent en pluiseurs lieux devant la ville. A laquelle garder il commist Yvon du Puis.

CHAPITRE CCLXI.

Comment le roy de France ala asségier la ville de Pontoise, laquelle en la fin il conquist d'assault.

Item, après que le roy de France eut sousjourné aulcuns peu de jours en la ville de Creil, il tira vers la

ville de Pontoise, à tout son armée, et y vint environ la my mai. Si se loga en l'abéye de Maubuisson, où il y a une notable église de dames et de moult beaulx édefices. Et avec luy se logèrent tous ceulx de son ostel, avec aulcuns aultres. Et le connestable et les mareschaulx de France, c'est assavoir les seigneurs de Saloingnies et de Lohiac, et pluiseurs aultres capitaines, se logèrent en aulcuns aultres divers lieux. Et brief ensievant furent assis et affustés les grans engiens du Roy devant ung bolevert qui estoit au bout du pont, au costé devers ledit lieu de Maubuisson. Lequel fut tantost si adommagié qu'il fu prins d'assault. Si y furent mors quatorze ou seize des gens du Roy, et pluiseurs bléciés. Et pareillement furent aulcuns Anglois. Lequel bolevert le Roy fist refortifier, et ordonna pour la garde d'ycelui messire Denis de Chailly et Michault Durant, à tout leurs gens. Et d'aultre part on fist faire ung pont par dessus la riviere d'Oise contre l'abéye de SaintMartin, lequel fut cloz de petite muraille, et fut fortifié tout à l'environ, tant de fossés comme de petit boleverts, ainsy qu'il est acoustumé de fortifier bastilles. Et là se loga messire Charles d'Angou, le seigneur de Cotigny, admiral de France, avec lui trois ou quatre mil combatans. Et si fut fait à l'entrée du pont, au dehors de ladicte rivière d'Oise, une assés forte bastille, pour la garde d'ycelui pont. Par le moyen desquelles fortificacions pouvoient passer seurement à leur aise, sans le dangier desditz Anglois leurs adversaires, auquel costé il leur plaisoit de ladicte rivière. Et entretant que les approches dessusdictes se faisoient, vinrent devers le Roy grand nombre de gens, tant seigneurs et nobles hommes comme ceulx des bonnes villes, qui

par avant avoient esté mandés. Entre lesquels y vindrent, de ceulx de la cité de Tournay, jusques au nombre de six vins combatans ou au desus, en très bon convenant, gens d'eslite et très bien habilliés, dont la plus grand partie estoient arbalestriers. Et les conduisoient trois notables hommes d'ycelle cité, dont le premier estoit nommé Symon de Saint-Jenois, l'autre Robert le Louchier, et le tiers Jehan de Courcielles. Si furent reçus du Roy très joieusement. Et aussy y vinrent ceulz de la cité de Paris, en moult grand quantité et en très bel estat, et avec ce d'aultres bonnes villes. Et si comme ils venoient, estoient receus et logés par les gens du Roy, comme il appertenoit. En oultre, Loys de Luxembourg, conte de Saint Pol et de Ligney, qui par avant avoit fait son amas de gens d'armes en ses seignouries, y arriva, environ huit jours après le Saint Jehan, à tout six cens combatans ou environ, très bien en point; et faisoit moult chault. Si mist ses gens en bataille assés près du logis du Roy. Lequel, avec aulcuns de ses princes et capitaines, les ala veoir bien à loisir, et toutes ses gens. En fu moult joieux de sa venue; si le festoia et mercia moult grandement de ce qu'il l'estoit venu servir à si belle compaignie. Avec lequel conte de Saint-Pol estoit le seigneur de Vervins, messire Colard de Mailly, Loys d'Enghien, messire Ferri de Mailly, Jehan de Hanghiers, messire Daviot de Poix, Jacotin de Béthune et ses frères, George de Croix, et pluiseurs autres gentils hommes. Si furent ce jour une grand partie moult travilliés de la chaleur dessusdicte, et tant que à la cause d'ycelle chaleur morut ung gentil homme, nommé Robert de Fransomme. Et quand le Roy les eut veus, comme dict

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est, s'en alèrent logier au plus près de là, et brief ensievant se logier avec les aultres audit siège. Et aussi y vint le conte de Vaudémont, acompaignié de cent à six vins combatans. De laquelle venue le Roy fut très content et joyeux. Et pour vray, à ceste assemblée furent moult de grans ou service du dessusdit roy de France. C'est assavoir, son fils le Daulfin, le conte de Richemont, connestable de France, et les deux mareschaulx dessus nommés, et l'admiral, messire Charles d'Angou, les contes d'Eu et de La Marche, de SaintPol, de Vaudémont, de Labreth, de Tancarville, de Joingny, le visdame de Chartres, le seigneur de Chastillon, le seigneur de Mareul en Brie, le seigneur de Bueil, La Hire, Pothon de Sainte-Treille, le seigneur de Ham, messire Heinselin de La Tour, le seigneur de Moy, Glaudu de Auges, Renauld de Longueval, le seigneur de Moyencourt, le seigneur de La Suze, messire Theolde de Walperghe, Anthoine de Chabennes, Charles de Flavi, messire Gilles de Saint-Simon, Hue de Mailly, Olivier de Coitivy, le seigneur de Pennesach, Blanchefort, Floquet, Brousacq, Joachim Rohault, Pierre Renauld, le seigneur de Graville, maistre Jehan de Gapondes, Joffroi La Hire, le bastard de Harcourt, et moult d'aultres notables gens de grande auctorité. Et tant que, seloncq l'estimacion de ceulx en ce congnoissans, le Roy povoit bien avoir en tout de dix à douze mil combatans, et fleur de gens de guerre. Lesquelz, chascun endroit soy, estoient moult désirans de conquerre la ville de Pontoise.

Durant lequel temps, le duc d'Yorch, le seigneur de Thalebot et aulcuns aultres chiefs de la partie des Anglois qui se tenoient à Rouen, commencèrent à viser

pour

et ymaginer comment ils pourroient mieulx souscourir à leurs gens qui estoient dedens ycelle ville de Pontoise. Et en fin se conclurent que pour la première fois, le seigneur de Thalebot le yroit ravitailler adviser la manière et conduicte des François. Si se mist sus ledit Thalebot, à tout quatre mil combatans ou environ, tant de pied comme de cheval, à tout chars, charettes et bestail. Et ala par aulcuns jours, tant qu'il vint logier jusques à une ville nommée Cheverin', assés près dudit lieu de Pontoise, et là jut deux nuis. Et entretant, bouta des vivres dedens ladicte ville, sans avoir aulcun empeschement et destourbier. Car le Roy et ceulx de son conseil estoient délibérés de non combatre yceulx Anglois, si non que ils les trouvassent grandement à leur advantaige. Après lequel ravitaillement, messire Jehan de Thalebot s'en retourna à Mante, et se logèrent ses gens en ung village au dehors de la ville, et de là s'en retournèrent en Normendie. Et entretant, les engiens du roy de France qui estoient assis contre ladicte ville de Pontoise, tant en la grande bastille de Saint-Martin comme ailleurs, gettoient continuelment contre les tours et murailles d'ycelles, et les dérompoient en pluiseurs lieux. Mais les dessusdiz assiégés les refaisoient nuit et

jour, de queues et de bois, au mieulx qu'ilz po

voient. Et avec ce faisoient aulcunes fois des saillies contre lesdiz François. Aux quelles, tant d'une partie comme de l'autre, en y avoit très souvent de mors et de bléciés et de navrés. Durant lequel temps, le

1. Chauvry, arr. de Pontoise (Seine-et-Oise).

2. De Queues, c'est-à-dire de tonneaux remplis de terre.

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