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fonneur. Enfuite Télémaque renverfe Euphorion, le plus célébre de tous les Lydiens venus en Etrurie. Enfin fon glaive perce Cléomenes nouveau marié qui avoit promis à son épouse de lui porter les riches dépouilles des ennemis, mais qui ne devoit jamais la revoir.

Adrafte frémit de rage voyant la mort de fon fils, celle de plufieurs capitaines, & la victoire qui échappe de fes mains. Phalante prefque abattu à fes pieds eft comme une victime à demi égorgée qui fe dérobe au couteau facré, & qui s'enfuit loin de l'autel. Il ne falloit plus à Adrafte qu'un moment pour achever la perte du Lacédémonien.

Phalante noyé dans fon fang, & dans celui des foldats qui combattent avec lui, entend les cris de Télémaque qui s'avance pour le fecourir. En ce moment la vie lui eft rendue; le nuage qui couvroit déjà fes yeux, fe diffipe. Les Dauniens fentant cette attaque imprévue, abandonnent Phalante pour aller repouffer un plus dangereux ennemi Adrafte eft tel qu'un tigre, à qui des bergers affemblés arrachent la proie qu'il étoit prêt à dévorer. Télémaque le cherche dans la mêlée, & veut finir tout à coup la guerre, en délivrant les alliés de leur implacable ennemi; mais Jupiter ne vouloit pas donner an fils d'Ulyffe une victoire fi prompte & fi facile. Minerve même vouloit qu'il eût à fouffrir des maux plus longs, pour mieux apprendre à gouverner les hommes.

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L'impie Adrafte fut donc confervé par le pere des Dieux, afin que Télémaque eût le temps d'acquérir plus de gloire & plus de vertu. Un nuage épais que Jupiter affembla dans les airs, fauva les Dauniens; un tonnerre effroyable déclara la volonté des Dieux. On auroit cru que les voûtes éternelles du haut Olympe alloient s'écrouler fur les têtes des foibles mortels; les éclairs fendoient la nue de l'un à l'autre pôle ; & dans le moment où ils éblouiffoient les yeux par leurs feux perçans, on retomboit dans les affreufes ténébres de la nuit. Une pluie abondante

qui

flower in the fields, which blooms and is cut down by the fcythe of the mower. Telemachus then kills Euphorion, the most renowned of all the Lydians that came into Hetruria. His fword afterwards flays Cleomenes, who was lately married, and had prɔmifed his bride to bring her the rich fpoils of the enemy; but he was never to fee her again.

Adraftus quivers with rage when he fees that his fon and feveral of his commanders are dead, and that victory is flipping out of his hands. Phalantus, just ready to fink at his feet looks like a half-flain victim, that ftarts from the facred knife, and flies away from the altar. A moment more had been fufficient for Adraftus to have compleated the Lacedæmonian's destruction.

Phalantus drowned in his own blood and in that of thofe who fought around him, hears the shouts of Telemachus coming to his relief. The fame inftant life returns, and the cloud which had already overfpread his eyes, difperfes. The Daunians perceiving this unexpected attack, leave Phalantus to repulfe a more dangerous enemy. Adraftus refembles a tiger, from whom a company of shepherds fnatch the prey, he was going to devour. Telemachus feeks him in the throng, being defirous to end the war at once by delivering the allies from their im placable enemy; but Jupiter would not grant the fon of Ulyffes fo quick and eafy a victory. Nay Minerva herself was willing that he should fuffer more hardships, that he might be the better qualified to govern.

The impious Adraftus was preferved therefore by the father of the Gods, that Telemachus might have time to acquire more glory and virtue. A thick cloud which Jupiter formed in the air, faved the Daunians; dreadful thunders fpoke the will of the Gods. One would have thought that the eternal vaults of high Olympus were going to break down on the heads of feeble mortals; lightnings cleft the clouds from pole to pole, and the eye was fcarcely dazzled by their piercing, fires, but all was

wrapt

qui tomba dans l'inftant, fervit encore à féparer les deux armées.

Adrafte profita du fecours des Dieux, fans être touché de leur pouvoir, & mérita par cette ingratitude d'être réfervé à une plus cruelle vengeance. Il fe hâta de faire paffer fes troupes entre le camp à demi brûlé & un marais qui s'étendoit jusqu'à la riviere; il le fit avec tant d'induftrie & de promptitude, que cette retraite montra combien il avoit de reffources & de préfence d'efprit. Les alliés animés par Télémaque, vouloient le pourfuivre ; mais, à la faveur de cet orage, il leur échappa, comme un cifeau d'une aîle légere échappe aux filets des chaffeurs.

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Les alliés ne fongerent plus qu'à rentrer dans leur camp, & à réparer leur perte. En y rentrant ils' virent ce que la guerre a de plus lamentable; les malades & les blessés manquant de forces pour se traîner hors des tentes, n'avoient pu fe garantir du feu. Ils paroiffoient à demi brûlés, pouffant vers le ciel, d'une voix plaintive & mourante, des cris douloureux. Le cœur de Télémaque en fut percé, il ne put retenir fes larmes; il détourna plufieurs fois fes yeux, étant faifi d'horreur & de compaffion: il ne pouvoit voir fans frémir ces corps encore vivans, & dévoués à une longue & cruelle mort: ils paroiffoient femblables à la chair des victimes qu'on a brûlées fur les autels, & dont l'odeur fe répand de tous côtés.

Hélas! s'écrioit Télémaque, voilà donc les maux que la guerre entraîne après elle ! Quelle fureur aveugle pouffe les malheureux mortels? Ils ont fi peu de jours à vivre fur la terre, ces jours font fi miférables pourquoi précipiter une mort déjà fi prochaine? pourquoi ajouter tant de défolations affreufes à l'amertume dont les Dieux ont rempli cette vie fi courte ? Les hommes font tous freres, & ils s'entredéchirent; les bêtes farouches font moins farouches qu'eux. Les lions ne font point la guerre aux lions ni les tigres aux tigres; ils n'attaquent que les animaux d'efpece différente. L'homme feul, malgré fa raifon, fait ce que les animaux fans raifon ne firent ja

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wrapt again in the most hideous midnight darkness. A fluicy shower which fell at the fame time, contributed likewife to part the two armies.

Adraftus made his advantage of the fuccour of the Gods without being duly fenfible of their power, and by this ingratitude merited to be referved for a feverer vengeance. He immediately marched his army between the halfburnt camp, and a morafs which reached quite to the river; and this he did with fuch dexterity and difpatch, that his retreat was a proof of his readiness at expedients, and of his prefence of mind. The allies fpurred on by Telemachus, were eager to purfue him; but by the favour of the storm he escaped from them, as a fwift-winged bird escapes from the nets of the fowler.

The allies now return to their camp, and think only of repairing their lofs. As they entered it, they beheld the moft lamentable effects of war; the fick and the wounded, wanting ftrength to crawl out of their tents, had not been able to fave themselves from the flames: They feemed half burnt, and with a doleful dying voice fent up bitter cries to heaven, which pierced the very foul of Telemachus. He could not retain his tears; he often turned away his eyes through horror and compaffion, nor could without shuddering behold their bodies, though still alive, devoted to a lingering and painful death, and looking like the flesh of victims that has been burnt on the altars, and diffufes a fmell all around.

Alas! cried Telemachus, lo! the evils which war draws after it! How blind a fury poffeffes wretched mortals! They have but a few days to live on the earth, and thofe are days of forrow why then will they quicken the pace of death which is already fo near? Why will they add fo many shocking evils to the bitterness with which the Gods have crouded their span of life? Men are all brothers, and yet they tear each other in pieces. Savage brutes are lefs cruel than they: Lions make not war upon Lions, nor tygers upon tygers; they attack but animals of a different fpecies. Man only, notwithstanding his reafon, does what creatures

mais. Mais encore, pourquoi ces guerres? N'y a-t-il pas affez de terre dans l'univers pour en donner à tous les hommes plus qu'ils n'en peuvent cultiver? Combien y a-t-il de terres défertes? Le genre humain ne fauroit les remplir. Quoi donc une fauffe gloire, un vain titre de conquérant, qu'un prince veut acquérir allume la guerre dans des pays immenfes ! Ainfi un feul homme donné au monde par la colere des Dieux, en facrifie brutalement tant d'autres à fa vanité. - II faut que tout périffe, que tout nage dans le fang, que tout foit dévoré par les flammes; que tout ce qui échappe au fer & au feu, ne puiffe échapper à la faim encore plus cruelle; afin que cet homme, qui fe joue de la nature humaine entiere, trouve dans cette deftruction générale fon plaifir & fa gloire. Quelle gloire monftrueufe! Peut-on trop abhorrer & trop méprifer des hommes qui ont tellement oublié l'humanité? Non, non, bien-loin d'être dés demi-Dieux, ce ne font pas même des hommes; ils doivent être même en exécration dans tous les fiecles, dont ils ont cru être admirés. Oh! que les rois doivent bien prendre garde aux guerres qu'ils entreprennent! Elles doivent être juftes; ce n'eft pas affez, il faut qu'elles foient néceffaires pour le bien public. Le fang du peuple ne doit être verfé que pour fauver ce même peuple dans les befoins extrêmes. Mais les confeils flatteurs, les fauffes idées de gloire, les vaines jaloufies, l'injufte avidité, qui fe couvre de beaux prétextes, enfin les engagemens infensibles entraînent profque toujours les rois dans des guerres qui les rendent malheureux, où ils hafardent tout fans néceffité, & où ils font autant de mal à leurs fujets qu'à leurs ennemis. Ainfi raisonnoit Télémaque.

Mais il ne fe contentoit pas de déplorer les maux de la guerre; il tâchoit de les adoucir. On le voyoit aller dans les tentes fecourir lui-même les malades & les mourans; il leur donnoit de l'argent & des remédes; il les confoloit & les encourageoit par des difcours pleins d'amitié, & envoyoit vifiter ceux qu'il he pouvoit visiter lui-même,

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Parmi

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