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sionnés pour le chaoin, qui est bien plutôt de l'épilepsie que de la danse. Imaginez les mouvements les plus baroques, les contorsions les plus endiablées, les gestes les plus furieux, et vous avez le chaoin. La danse aux oiseaux, de ces mêmes peuplades, est plus humaine, et même elle ne manque pas d'originalité. Les danseurs et les danseuses ont le corps tatoué de rouge et portent sur la tête, ainsi qu'autour du corps, des ornements en plumes de flamants et d'autres oiseaux de couleurs éclatantes et trèsbigarrées. Voici comment, d'après M. Benoît, procèdent les danseurs : « Les hommes vont d'abord se cacher dans les bois ou derrière les arbres. Ensuite, les femmes ou les filles se disposent, accroupies les unes derrière les autres, et se mettent à contrefaire, avec un talent parfois étonnant d'imitation, les cris et les sifflements des différents oiseaux. A cet appel ou à cette provocation, les hommes répondent aussitôt par d'autres cris, en contrefaisant les bêtes féroces, les singes ou les porcs. Quelques moments après, ils sortent du bois, et aussitôt que les femmes les aperçoivent, elles se mettent à sauter comme des grenouilles, en se tenant toujours accroupies. Les premiers en font autant, et ils se mettent ainsi à courir tous les uns après les autres. Ce manége, vraiment drôle, se continue pendant quelque temps avec une vivacité extraordinaire. C'est un mouvement, un pêle-mêle aussi pittoresque que divertissant. On tombe, on se relève, on s'évite, on se poursuit. Et, quand cela a duré ainsi pendant un certain temps, chacune des filles finit toujours par se laisser attraper par celui seulement pour lequel elle a quelque inclination. »

On croit bien souvent découvrir des produits nouveaux, quand on ne fait qu'imiter des vieilleries. Je vois parmi les instruments à percussion des nègres le xylophon sous l'étiquette de balafon. Le xylophon, vous le savez sans doute, est l'instrument bois et paille dont joue avec tant de goût et de virtuosité le jeune Bonnay. C'est aussi l'instrument en quelque sorte classique des paysans russes, polonais, lithuaniens, tartares et cosaques. Le balafon a-t-il précédé le xylophon, ou celui-ci est-il venu au monde avant celui-là? Voilà ce qu'il serait difficile de déterminer, et ce qui, d'ailleurs, importe médiocrement.

Ne considérant pas comme des peuples sauvages bien loin de là les Indiens des Indes anglaises, les Japonais et les Siamois, je réserve leurs instruments de musique, si curieux de forme, pour m'arrêter un instant devant les quelques spécimens d'instruments à l'usage des Peaux-Rouges.

C'est d'abord une raquette, instrument avec lequel on ne risque pas de faire de fausses notes, par la raison qu'il ne produit aucune note. Imaginez une sorte de cornue en cuir de buffle, remplie de petits cailloux, et que l'artiste agite pour marquer le rhythme de quelque chant féroce, et vous avez la raquette. Ce hochet, du reste, se retrouve chez les Koholanes de Tombouctou, qui s'en servent pour appuyer le rhythme de leur long tambour appelé roum-roum. Les Peaux-Rouges ont plusieurs espèces de tambours dont quelques-uns ressemblent à nos timbales, dont les autres sont de véritables tambours de basque, faits d'un morceau de cuir attaché sur un cercle de plumes, de fourrures et de crins de cheval. Dans les danses et les cérémonies religieuses, ce sont les prêtres-magiciens-docteurs, nous apprend le savant auteur du Voyage pittoresque dans les déserts du Nouveau-Monde, qui battent le tambour, soit avec des baguettes garnies d'un tampon, soit avec des raquettes. Ce monopole musical et religieux vient probablement de ce que les prêtres seuls connaissent les chants sacrés qui accompagnent ces cérémonies et ces réjouissances célestes.

Pour compléter l'orchestre des Peaux-Rouges, il faut ajouter aux instruments de percussion qui dominent tout,-leur musique n'étant guère qu'un choix de rhythmes, la flùte, le flageolet de paix et le flageolet de guerre. La flûte est longue d'environ quarante centimètres; elle est percée de trois à six trous. Les sons doivent en être doux. Le flageolet de paix, en bois, est plus long et plus mince que le nôtre, et il produit des sons très-aigus. Le flageolet de guerre est plus court et n'est autre chose qu'un os de chevreuil ou de dinde sauvage, galamment orné de piquants de porc-épic. M. Domenech nous assure qu'il n'appartient qu'aux chefs de tribus d'en faire usage; ils le portent suspendu à leur cou, sous leur vêtement, et ne s'en servent que dans les combats. En soufflant par un certain bout, il en sort des notes perçantes qui sont le signal de l'attaque. En soufflant par l'autre bout, on obtient un son moins aigu qui indique le mouvement de retraite.

Comme les Lapons, les Peaux-Rouges ont un tambour magique (dont nous parlons plus loin) qui dit toutes les folies dont les cervelles de ces malheureux sont troublées, ni plus ni moins que s'ils fussent nés Français, Anglais, Espagnols, Allemands, Portugais, Turcs ou Russes. Ces mêmes Peaux-Rouges jouent d'un instrument formant une échelle plus ou moins diatonique, et qui n'est guère autre chose que Rabana des Moluquois, c'est-à-dire des pièces de métal de différentes

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grandeur disposées sur un châssis et qu'on frappe au moyen de deux baguettes tenues de chaque main.

Les Peaux-Rouges, passionnés pour les instruments à percussion, ayant quelque goût pour les instruments à vent, n'ont pas, à ce qu'il paraît, d'instruments à cordes. Mais ils sont à la fois poëtes, musiciens à leur manière et grands danseurs, quand il s'agit d'exécuter une ronde autour d'un visage pâle qu'on a fait prisonnier et qu'on s'apprête à scalper. En un mot, ce sont de parfaits gentlemen.

A quelle famille de l'espèce humaine appartient au juste cette nation naïve qui mange volontiers du rôti d'homme et se régale l'ouïe du son d'une crécelle? J'ai demandé des explications sur ce peuple fin gourmet et médiocre mélomane; on m'a répondu : « Leurs instruments de musique sont bornés, mais ils chantent quand ils sont tristes ou gais. » (Quand le ròti manque ou qu'il est cuit à point.) Ils chantent! Que chantent-ils et comment chantent-ils?»-« L'homme est arrivé, dit Charles Nodier: il tenait de la nature animale la propriété de la vocalisation et du cri. » En effet, l'homme crie autant qu'il chante, chez les Cafres comme au grand opéra. » — » — « Il avait, par-dessus toutes les espèces, continue Nodier, l'heureuse conformation d'un organe admirablement disposé pour la parole instrument à touches, à cordes, à vent, dont la construction sublime fera le désespoir éternel des facteurs, et qui module des chants si supérieurs à toutes les mélodies de la musique artificielle dans la bouche des Malibran, des Damoreau. » Je doute qu'il se trouve des Malibran et des Damoreau chez ces peuplades de bon appétit et sans préjugés. Poursuivons. « Il avait dans les poumons un souffle intelligent et sensible; dans ses lèvres, un timbre épanoui, mobile, extensible, rétractible, qui jette le son, qui le modifie, qui le renforce, qui l'assouplit, qui le contraint, qui le voile, qui l'éteint; dans sa langue, un marteau souple, flexible, onduleux, qui se replie et qui s'interpose entre ses valves, selon qu'il convient de retenir ou d'épancher la voix » (il ne faut, pour se convaincre de cette vérité, qu'écouter quelqu'un de ces virtuoses de cour ou de politique, qu'on nomme courtisans ou diplo mates), « qui attaque ses touches avec énergie ou qui les effleure avec mollesse ; dans ses dents un clavier ferme, aigu, strident; à son palais, un tymphanon grave et sonore : luxe inutile, pourtant, s'il n'avait pas eu la pensée. Et celui qui a fait ce qui est n'a jamais rien fait d'inutile. L'homme parla parce qu'il pensait. Son langage fut d'abord simplement vocal. » Et voilà pourquoi, sans doute, les gastronomes dont il est question se contentent d'une crécelle.

En courant dans ce monde de l'Exposition universelle, de l'ancien monde au nouveau, de l'Afrique à l'Asie, d'une colonie à une autre, j'ai vu bien des instruments curieux encore, tout au moins comme forme. Voici la harpe des Birbans, qui a la forme d'un chat assis. Et Champfleury n'en parle pas !

Les Kalmouks se contentent d'un violon à deux cordes appelé dambour. Avec une seule corde souvent, Paganini a excité l'enthousiasme de ses auditeurs : tout dépend de la manière de s'en servir.

A côté du rabec des Arabes s'offre à nos regards l'eoud des mêmes peuples, à quatorze cordes pincées.

Leur guyla n'a qu'une seule corde en crin tressé. C'est, je crois, le chef de la dynastie de ces autres instruments arabes à archet qu'on appelle kemangeh.

Ne sont-ce pas aussi des instruments arabes que ces harmonieux à manche cylindrique du côté des cordes, à la peau de requin tendue sur une noix de coco? Peut-être appartiennent-ils à la Turquie ?

A coup sûr, il est moldo-valaque ce violoncelle monté de trois grosses cordes en crin.

Le même pays a vu naître ces jolies mandolines qu'on appelle kobsa. Il est à la fois turc et persan, ce violon à deux cordes. et à très-long manche; on le joue comme un violoncelle, et il s'appuie par terre sur un long pivot. Les sons qu'on en tire sont un peu lugubres, voilés et sourds, mais par cela même expressifs et sympathiques.

Le violon persan à quatre cordes emprunte sa forme à la guitare à manche court.

Le damboura des Arabes m'a rappelé le banjo.

Le banjo est l'instrument favori des nègres dans toutes les villes des États-Unis. On en fait en Amérique l'objet d'un commerce assez considérable. Cet instrument, inconnu en Europe, est une sorte de guitare à long manche, arrondie par sa base comme une mandoline, mais beaucoup plus grande qu'une guitare ordinaire. Le son du banjo est doux et triste, et convient on ne peut mieux à la musique si caractéristique des noirs, mélancolique dans sa gaieté et toujours heureusement rhythmée. Le banjo se joue avec les doigts comme la guitare, tandis que les cordes du damboura sont mises en vibration à l'aide d'une plume.

Autre instrument à cordes pincées est le psalterion turc. Sa forme est quadrangulaire, ses cordes sont en métal. On le tient sur les genoux, et on en joue avec les doigts.

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5. Deux gui

1. Wina indien. - 2. Cithare ou zither de Hongrie.-3. Pochette indienne. 4. Trompette turque. tares turques. 6. Bina indienne. 7. Violon indien.-8. Namsinga hindoue. 9. Trompette tartare.-10. Salterio 11. Violon turc et tartare. - 12. Trompette indienne. 13. Timbale simple japonaise. 14. Timbales indiennes. 15. Tambours indiens. - 16. Tambourin moldave. 17. Trompette indienne. - 18. Haubois indien.

turc.

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