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presse; nous avons recherché les ouvrages des exposants absents du catalogue, et nous les avons examinés avec soin.

Dans cette catégorie, voici d'abord l'École de lecture musicale et de chant d'ensemble, par M. Serrier, organiste du grand orgue de Saint-Denis-duSaint-Sacrement, à Paris, et professeur au collége de Vaugirard. Cet ouvrage, conçu dans le but d'offrir aux lycées, aux écoles communales et aux réunions d'orphéons un cours complet d'instruction et d'éducation musicale, par des solféges tirés des œuvres des grands maîtres, est divisé en trois parties (la 3° partie toutefois n'est pas encore publiée).

La 1re section de l'école de lecture renferme, avec une théorie clairement présentée, des éléments de la musique, l'étude de l'intonation d'après les données de Galin, de Juë, de Toury, de Gelé et de Langlé; puis viennent des exercices pour apprendre à chanter à plusieurs parties, et des exercices préparatoires et pratiques de la mesure, gradués de manière à conduire insensiblement l'élève aux plus grandes difficultés.

La 2o partie est remplie par des études élémentaires et progressives dans tous les tons, à une, à deux et à trois voix égales, tirées des œuvres classiques des grands maîtres.

Après avoir lu dans son entier l'ouvrage de M. Serrier, j'ai partagé l'opinion de M. Gevaërt, qui écrit à l'auteur: « Votre livre est un bon « livre, méthodique, pratique, sans développement exagéré, répondant

à tous les besoins de l'enseignement. J'approuve fort l'idée que vous << avez eue d'exercer le commençant sur la lecture de vraies mélodies <choisies dans les œuvres des maîtres. Vous avez bien fait de reprendre « à cet égard les traditions du solfége d'Italie. Je souhaite à votre livre tout le succès qu'il mérite, et je serai heureux de contribuer, dans « les limites de mes moyens, à sa propagation. » Que pourrions-nous dire de plus ?

Guide musical de l'Instituteur, par Chanat.

Le Guide musical de l'Instituteur, par Eugène Chanat, professeur à l'École normale de Dijon, est un ouvrage entièrement pratique, qui ne s'adresse qu'aux élèves déjà instruits des premiers éléments de l'art. Il débute par cent vingt exercices mélodiques, à une, à deux et à trois voix, dans tous les tons majeurs et mineurs, mais avec les seules clés de sol et de fa. Viennent ensuite un exemple de sons filés à quatre voix, des modèles de dictée musicale et des récréations à plusieurs parties,

avec des paroles choisies parmi les œuvres de nos meilleurs poëtes. A côté de l'Application au travail, de Racine; de la Bienfaisance, de Voltaire; d'Une Mère, de Ducis, nous lisons un joli petit choeur à trois voix, sur des paroles de l'auteur de Zaïre. La politesse en est le sujet délicat, et voici ce que le grand écrivain pensait de cette aimable qualité sociale, à une époque où nos petits crevés, assez mal polis généralement, n'étaient pas encore inventés:

La politesse est à l'esprit

Ce que la grâce est au visage :

De la bonté du cœur elle est la douce image,

Et c'est la bonté qu'on chérit.

Le Guide musical de l'Instituteur nous offre ensuite divers chœurs, des motets et des messes en plain-chant, avec des accompagnements d'orgue très-faciles. Ce recueil, dédié aux instituteurs, et qui leur sera utile certainement, se termine par dix petites pièces pour orgue ou harmonium.

Chant grégorien restauré, par l'abbé Raillard.

Nous devons une mention toute spéciale à M. l'abbé Raillard, vicaire de Saint-Thomas-d'Aquin, pour son excellent ouvrage sur la notation neumatique. Le lecteur connaît notre opinion sur le chant grégorien restauré qui, sans offrir la désespérante monotonie du chant ambrosien, est bien loin encore de mériter le nom de musique. Mais quelle que soit la valeur relative du plain-chant, il sera toujours très-intéressant de l'étudier avec un homme aussi compétent que M. l'abbé Raillard, ne fût-ce qu'au point du vue historique.

Il est bien certain que les chants du culte catholique sont d'anciennes épaves de la musique grecque; mais qui pourrait dire jusqu'à quel point ces épaves sonores n'ont pas été dénaturées par l'interprétation, qui est la moitié de la musique, et aussi par l'usage nouveau auquel on les a employées ?

« Les premiers patriarches, nous dit M. Tiron dans son étude sur la musique grecque, firent preuve d'un tact extrême, en donnant asile, dans les églises, aux mélodies antiques qui contribuaient à propager la religion chrétienne ils n'ignoraient pas que l'habitude est une seconde nature, contre laquelle se brisent les efforts les plus persévérants, et ils n'hésitèrent pas à accepter les nomes grecs, tels qu'ils

étaient chantés, même avec les broderies et les agréments qu'on y avait introduits dès le siècle de Périclès, et qui, sans les défigurer complétement, en avaient altéré la simplicité première... C'est dans le culte religieux particulièrement, ajoute M. Tiron, que les traditions se perpétuent, quoiqu'en subissant les atteintes du temps; et il était difficile d'exiger que celui qui se convertissait à la foi catholique, après avoir toute sa vie adoré Jupiter, renonçât, pour célébrer le Christ aux chants auxquels sa voix était accoutumée depuis l'enfance : la poésie seule en avait été changée.

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Oui, les premiers patriarches de la nouvelle Église firent sagement en adoptant les chants de l'ancienne religion : car la musique, bonne ou mauvaise, a de tout temps exercé une incontestable action sur l'esprit et le cœur des croyants, quelle que soit d'ailleurs leur croyance. Si la doctrine d'Arius menaça d'entrainer à l'arianisme tous les chrétiens dans le ive siècle de l'ère vulgaire, il faut en partie attribuer ce résultat à la musique qu'Arius, poëte et musicien des plus distingués, cultivait et faisait cultiver à tous les adeptes de sa foi. Comme plus tard Luther, Arius, que les historiens nous dépeignent éloquent, noble, beau, affable et gracieux, avait composé des hymnes et des cantiques dans le goût populaire, c'est-à-dire accompagnés d'une musique légère, animée, telle, nous dit M. Tiron, que celle dont les Grecs se servaient pour la danse et les festins. Les chants liturgiques d'Arius ne tardèrent pas à être recherchés de la multitude. On se pressait pour les entendre, et, à force de les écouter, on s'imprégnait insensiblement des interprétations que ce célèbre hérésiarque voulait inculquer à tous par l'attrait de la mélodie. Il osa nier, on le sait, la substantialité du Verbe divin, seconde personne de la Trinité, soutenant que le Fils de Dieu est une créature tirée du néant, et dont Dieu le Père se servit pour créer le monde. Il fut conduit à cette hérésie, nous dit M. l'abbé Guyot, par la difficulté d'expliquer l'accord de l'unité et de la trinité en Dieu et le contact de l'infini avec le fini dans l'acte de la création. Cette difficulté, Dieu merci, n'arrêta pas les théologiens mieux inspirés, qui se jouent véritablement de toutes les difficultés.

Au reste, avant comme depuis Arius, - le coupable commentateur, suivant tous ceux qui ne partagent pas son avis,-les Pères de l'Église et les Papes se sont toujours vivement préoccupés de la musique. Le chant, disait saint Bernard, réjouit l'esprit des fidèles, dissipe l'ennui, aiguillonne la paresse et excite le pécheur au repentir. -( La

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musique, pensait saint Justin, inspire le recueillement et l'humilité. Les âmes pieuses y puisent un remède salutaire contre les douleurs et les chagrins dont la vie est semée. » Dans un mouvement de poétique éloquence, saint Grégoire de Nazianze s'écria: «Le chant est le prélude de la gloire céleste. » « La musique agit sur l'intelligence », dit Richard de Saint-Victor. « Elle sèche les larmes des enfants suspendus à la mamelle », dit saint Jean Chrysostome. —`« En charmant l'oreille, confesse saint Augustin, elle réveille dans les âmes faibles le zèle de la piété. L'hymne accompagnée du chant est la véritable louange de Dieu, et là où il n'y a pas de chant, il n'y a pas d'hymne. Quand j'écoute un cantique, les vérités chrétiennes affluent au fond de mon cœur. Ajoutons que les délibérations des conciles ont souvent porté sur la musique, quelquefois pour la retrancher du culte, comme dans le concile de Trente, le plus souvent en sa faveur. Celui de Latran met le chant à la tête des choses qu'un ecclésiastique doit absolument savoir pour remplir dignement (sic) les fonctions auxquelles il est appelé.

»

La musique a opéré de véritables miracles sur les coeurs. Le plus grand de tous, peut-être, a été, à Baden, en 1829, de réconcilier, au moins pour un moment, des sectaires qui s'étaient voué réciproquement, selon la coutume, une haine mortelle. Il faut lire dans les Chants de la Vie, de Georges Kastner, les détails de cette fète musicoreligieuse. Catholiques et protestants, après être entrés bannière en tète dans un temple du culte réformé, et avoir chanté sans aucune note discordante les louanges de l'Éternel, entendirent d'un prédicateur, inspiré par la situation, les paroles suivantes :

Frères, dit-il, nous sommes dans la même salle où nos ancêtres, aveuglés par de funestes passions, il y a près de deux cents ans, engagèrent de déplorables luttes au nom de leur foi religieuse. Aujourd'hui, après bien des vicissitudes, après de longues années passées dans l'erreur, voici des citoyens de presque tous les districts de ce canton, des membres des deux confessions qui, pour la pre«mière fois, dans la même enceinte, mus par le plus touchant accord, « oublient les haines du passé et entonnent, non plus un chant de ‹ guerre, mais l'hymne de la fraternité. »

Voilà ce que produit la musique. Malheureusement on ne peut pas toujours chanter !

C'est donc à la fois une œuvre pie et une œuvre d'art, que M. l'abbé

Raillard à exposée. S'il ne nous appartient pas de juger l'œuvre pie, autrement que d'une manière générale, nous nous sentons du moins très à l'aise pour louer l'œuvre d'art ce que nous faisons avec autant d'empressement que de plaisir.

Méthodes diverses, rapports, circulaires, recueils, journaux, statuts de Sociétés orpheoniques, etc., par Divers.

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Signalons encore parmi les exposants de la riche et substantielle classe 89 (les principes de 89 en musique!) une méthode élémentaire de M. Parent, directeur de l'école normale de Châteauroux. Une autre méthode élémentaire aussi par M. Rémond, directeur de l'école municipale d'Orléans. Les Chants de l'enfance, d'après la méthode Galin-Paris-Chevé, par M. Calvès; - des choeurs orphéoniques, par Chouquet; - d'autres chœurs orphéoniques édités par Cambodgi; — des oriflammes pour orphéons, exposés par MM. Biais et Rondelet;-encore des choeurs par Gautier ; des rapports, des circulaires et des documents relatifs à l'Orphéon, par M. de Lyden; d'autres rapports, des pièces officielles et des règlements concernant les sociétés chorales de Seine-et-Oise, par M. Lory; la méthode de musique de Wilhelm, trop connue pour que nous ayons cru devoir en parler autrement que pour mémoire; des méthodes, des messes, des études et des motets, par Renaud; - des choeurs, par M. de Roubin; toute une librairie chorale, par M. Vaudin, directeur de la France chorale; — un journal de musique populaire, rédigé par M. Lebeau aîné; enfin diverses bannières et oriflammes pour orphéons, dues à l'industrie artistique de M. Marion, appelé aussi Michel-Ange, un nom qui oblige.

Il nous serait agréable d'examiner ici les pièces les plus intéressantes envoyées par les Sociétés orphéoniques à l'Exposition. Mais il faut savoir se limiter, même dans un ouvrage aussi volumineux que celui-ci. Toutefois nous citerons la série de documents appartenant à la Commission permanente des orphéons de Seine-et-Oise. On y voit que le nombre des orphéons dans ce département a été porté de cinq à cinquante-quatre (A l'heure où nous écrivons, ce nombre s'est encore accru il est de soixante-trois). Grâce aux efforts de cette Commission, l'enseignement du chant se pratique actuellement dans cent vingt

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