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Deuxième prix ex æquo.

FRANCE Guides de la garde impériale.

RUSSIE. Chevaliers-Gardes.

BAVIÈRE Régiment royal d'infanterie.

Troisième Prix ex æquo.

PAYS-BAS Grenadiers et chasseurs. DUCHÉ DE BADE Grenadiers de la garde.

Quatrième Prix ex æquo.

ESPAGNE Régiment du génie.

-

BELGIQUE Grenadiers belges.

Quelques mots à propos de la suppression des musiques françaises de cavalerie et d'artillerie.

Ce concours a révélé au public français des qualités qu'il soupçonnait à peine chez quelques-uns des corps de musique étrangers, en même temps qu'il lui a prouvé de la façon la plus éloquente la grande importance qu'on attache partout à posséder de bonnes musiques régimentaires.

Le succès des musiques étrangères et de nos deux musiques françaises, l'accueil enthousiaste qu'elles ont reçu de tout le peuple parisien rend d'autant plus regrettable, au point de vue de l'art, la suppression de nos musiques de cavalerie et d'artillerie. Aucune d'elles n'a pu échapper à cette féroce razzia 1, qui a eu pour but, dit-on, l'économie de trois mille chevaux. Moi, qui aime beaucoup plus la musique que

1. De grands et généreux efforts ont été tentés pour sauver du naufrage la musique des Guides qui était une musique modèle. Le 31 août 1867, l'Empereur reçut la requête suivante :

« SIRE,

« L'existence de la musique des Guides, un des types les plus parfaits du progrès accompli dans les musiques militaires, étant menacée, nous venons supplier Votre Majesté,

« dont la sollicitude embrasse tout ce qui peut ajouter à la gloire de la France, de daigner << ordonner le maintien, à un titre quelconque, de cet orchestre, dont la suppression serait « une véritable perte pour l'art musical français.

« Nous avons l'honneur d'être avec respect, Sire, de Votre Majesté, les très-obéissants « sujets.

« Signé : G. Rossini, Auber, Ambroise Thomas, Georges Kastner, Félicien David, F.-A. Gevaërt, A. Elwart, baron Taylor, de Vaucorbeil, Duprato, François Bazin, Léo Delibes, Lefébure Wély, Émile Durand, Charles Colin, Oscar Comettant, Ermel, Laurent de Rillé, Georges Bizet, Sain-d'Arod, A. Maillard, Victor Massé, Th. de Lajarte, Th. Semet, E. Vauthrot, Johannès Weber, J. Viallon, F. Benoist, Alex. Leprévost, C. Saint-Saëns. »>

C'était écrit, comme disent les Turcs fatalistes. Ce beau corps fut dissous à son tour. Son chef, M. Cressonnois, conduit, au moment où nous écrivons ces lignes, les concerts Besselièvre, aux Champs-Élysées.

les chevaux, je regrette infiniment que les chevaux soient si précieux et si rares qu'il faille leur sacrifier nos meilleurs orchestres d'harmonie.

Personne n'ignore que la musique est pour le soldat la plus saine et la plus fortifiante des récréations. Elle élève son moral, le fait rechercher et aimer des populations où il tient garnison. A l'arrivée d'un nouveau régiment dans la ville où il doit tenir garnison, la première question que tout le monde adresse à l'avant-garde est invariablement celle-ci : « Avez-vous une bonne musique?» Si la réponse est affirmative, la foule se presse au-devant des troupes, et l'accueil qu'elles reçoivent est plus cordial, plus chaleureux. Grâce aux concerts hebdomadaires que la musique offre aux populations dans les promenades, sur la place publique, des relations affectueuses s'établissent entre les habitants de toutes les classes de la société et les militaires de tous les grades. La présence d'une musique militaire ajoute à l'éclat des fètes nationales, à la pompe des cérémonies religieuses, à la solennité des distributions de prix dans les colléges, et apporte aux orchestres des théâtres lyriques, si incomplets dans presque toutes les villes de province, un contingent d'instruments à vent de plus en plus indispensable à l'exécution des nouvelles partitions d'opéra.

Agréables et utiles aux populations, les musiques régimentaires ne le sont pas moins aux troupes qu'elles servent de plus d'une manière. Pendant la belle saison, la musique conduit le régiment à l'exercice, et les nouvelles recrues, en marchant en cadence, prennent l'habitude d'une allure et d'une tenue plus martiales. Dans les moments de repos elle égaie et fortifie le soldat. Durant l'hiver elle rend plus courtes les longues marches militaires. En traversant les villages ses màles accents réveillent les instincts belliqueux des jeunes gens des campagnes, et c'est plus qu'un besoin, c'est une nécessité aujourd'hui que l'entretien des instincts belliqueux avec la création de la garde mobile.

Aux revues du colonel et des généraux, la musique, placée au centre du régiment, joue ses plus beaux airs, et le temps que le soldat est obligé de passer debout, appuyé sur ses armes, s'écoule ainsi pour lui sans fatigue.

Si le régiment est en voyage, quelque longue qu'ait été l'étape, dès que la musique se fait entendre, on voit les têtes se redresser, les hommes marcher d'un pas plus assuré et oublier en quelque sorte les trente ou quarante kilomètres qu'ils viennent de franchir.

Au milieu des camps d'instruction, la musique est plus précieuse

que partout ailleurs. Elle rompt la monotonie des exercices et rapproche les officiers d'une même brigade, d'une même division. Le matin, au réveil, le soir, devant le front de bandière, ses harmonies sont enivrantes. Aussi voit-on, autour du cercle formé par les musiciens, des militaires de tous grades qui, tout en humant le parfum du maryland ou du caporal, écoutent, sous le charme, les airs restés dans leur mémoire durant les loisirs de la garnison. Voilà pour la musique en temps de paix. Examinons son utilité en temps de guerre.

Le rôle de la diplomatie a cessé, et c'est au canon à fournir l'ultima ratio. Le régiment s'embarque. Qui charmera les longs ennuis de la traversée et entretiendra le moral, si ce n'est la musique? Chaque soir, sur le pont, l'heure des concerts est attendue et les places sont retenues à l'avance pour mieux entendre et voir. En Afrique, en Crimée, en Chine, au Mexique, la musique a contribué dans une farge mesure à préserver nos soldats de la nostalgie (cette étrange et dissolvante maladie qui résiste à tous les remèdes) en rappelant à ces glorieux exilés les airs de la patrie regrettée et en leur donnant, avec l'espérance de la revoir bientôt, l'énergie nécessaire pour la faire triompher.

En Crimée, quand les musiques militaires des 1er voltigeurs, 1er grenadiers et gendarmes de la garde impériale jouaient devant l'habitation du maréchal Pélissier, on voyait accourir de tous les camps environnants des centaines de soldats de toutes armes, lesquels, après s'être assis sur leurs talons, écoutaient en fumant leur pipe et dans le plus profond recueillement. Ils faisaient ainsi provision de bonheur.

« Si nous n'avions pas eu de musiciens en Crimée pour égayer notre esprit et fortifier notre cœur, me disait dernièrement un officier supérieur, des soldats seraient morts d'ennui pendant ce long siége, et les désertions eussent été à craindre. La musique consolait tout le monde et raffermissait notre ardeur. »

Le brave colonel Boudville, commandant le 1er voltigeurs, ayant été grièvement blessé le 18 juin 1855, il fut porté à l'ambulance où il devait mourir. Le chef de musique de ce régiment pensa que la musique serait peut-être agréable au glorieux blessé, en même temps qu'aux autres malades, et il communiqua cette pensée au colonel. M. Boudville accueillit la proposition du chef de musique avec joie, et bien certainement le plaisir d'entendre les airs du Chalet, qu'il aimait tout particulièrement, dut contribuer à alléger ses souffrances.

Partout du reste les musiciens étaient attendus avec impatience par

les malades. Que de remerciements, que de serrements de main au chef de musique après chacun de ces concerts bienfaisants! Et, plus tard, lorsque le régiment, en deuil, conduisit son colonel à sa dernière demeure, les accents déchirants de la marche funèbre de Thalberg n'ontils pas ajouté au douloureux éclat de cette triste cérémonie ?

Il est bien permis de faire remarquer les services d'une autre nature rendus par les musiciens pendant les dernières guerres.

En Crimée, le 18 juin 1855, les musiciens du 1er voltigeurs, divisés en deux fractions, allaient chercher les blessés jusque sous le feu de l'ennemi; ils les rapportaient, sur leurs bras, à l'ambulance la plus rapprochée, tandis que leurs camarades, restés à l'ambulance, contribuaient. par leurs soins intelligents à adoucir les souffrances de ces mêmes blessés. Ils leur donnaient à boire, aidaient au pansement de leurs blessures et chargeaient sur des cacolets ceux qu'on trouvait transportables et qui pouvaient être évacués sur Constantinople ou sur la France.

Après la prise de Malakoff, le 8 septembre 1855, le chef de musique du 1 voltigeurs avait établi une ambulance dans des baraques voisines de son régiment. Chaque baraque, contenant vingt malades au moins, était placée sous la surveillance de deux musiciens, dont l'un ne devait jamais s'absenter, tandis que l'autre allait chercher de l'eau, des vivres, des médicaments en attendant l'arrivée des médecins si tristement surchargés de besogne.

A Solférino, les mêmes musiciens et je les pourrais citer tous, avaient installé, dans une magnanerie voisine du lieu du combat, une ambulance où ils ont reçu plus de deux cents blessés. Ils les étendaient sur des claies recouvertes de foin ou de paille et les garantissaient ainsi de chocs douleureux. Comme en Crimée, ils leur donnaient à boire, aidaient au pansement de leurs blessures, aux amputations, et chargeaient sur des cacolets ceux qui pouvaient être transportés en arrière sur les villes de Castiglione, Monte-Chiaro et Brescia.

Et tout cela se faisait de bonne grâce, intelligemment, avec des manières de Sœurs de charité, bien que de semblables offices fussent tout à fait en dehors de leurs engagements.

La plupart de ces jeunes artistes sont devenus chefs ou sous-chefs de musique. Nul doute qu'ils ne montrassent le même zèle à secourir leurs camarades, si la même occasion se présentait.

Au reste, tous avaient appris à se servir d'un fusil, et l'on peut

affirmer que pas un n'eût reculé devant un danger sérieux, s'ils avaient été appelés à combattre.

Malgré tant de services rendus par nos musiques, et bien que l'histoire n'offre pas d'exemple d'une armée disciplinée sans musique, nos plus beaux orchestres régimentaires devaient disparaître sous l'action acharnée des réformateurs quand même.

Les réformes dans l'armée mises à l'ordre du jour, il était impossible qu'il ne se trouvat pas un certain nombre de passionnés réformateurs pour proposer tout bonnement et tout uniment la suppression de la plus belle partie de nos musiques de régiments. C'était radical et vite fait. Un trait de plume, comme on donne un coup de sabre.

- L'armée, ont dit certains d'entre eux, n'est pas un Conservatoire de musique, et il faut autre chose pour lutter contre les fusils à aiguille, que des couacs de clarinette.

Et ils se sont demandé pourquoi, puisqu'on était en veine de réforme, on ne supprimerait pas aussi, d'abord :

Le tambour-major, homme inutile, quoique fort bel homme, et dont la véritable place serait au café du géant ;

Puis une partie des simples tambours ;

Puis les sapeurs, qui ne sapent plus rien depuis longtemps, et pour lesquels, d'ailleurs, on le sait, rien n'est sacré.... à l'Alcazar. Puis les cordonniers ;

Puis les tailleurs;

Puis les armuriers de la compagnie hors rang, le système de la maind'œuvre par les soldats étant reconnu mauvais, et ces estimables ouvriers ne travaillant que dans le vieux;

Puis les deux tiers, au moins, des muletiers dont les mulets, en campagne, entravent la marche des troupes;

Puis les cantiniers, trop nombreux, ainsi que :

Les ordonnances,

Les cuisiniers,

Les domestiques qui conduisent les bagages,

Les hommes détachés au service de boucherie,

Les gardes de troupeaux, etc., etc., tous gens fort honorables, mais qui ne se battent pas ou qui se battent peu.

Quand on fait des réformes, on ne saurait trop en faire, et je ne vois, après toutes celles qu'on a proposées, qu'une réforme préférable à toutes ce serait de réformer les réformateurs eux-mêmes.

Dans l'armée, ont répété de belliqueux prud'hommes, il ne faut que

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