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mais du joug de la féodalité les communes de la Flandre, si la fortune lui avait souri à Roosebeke autant qu'à Beverholt.

Nous ne suivrons pas M. Kervyn dans les pages qu'il a consacrées à l'histoire de la Flandre sous les ducs de Bourgogne. Partout son ouvrage abonde en détails curieux, en faits intéressants. On doit lui reprocher, comme nous l'avons dit plus haut, d'avoir négligé l'examen des institutions. Cet examen seul, en effet, peut nous expliquer ces luttes qui éclatent, à chaque instant, au sein des villes flamandes, qui entretiennent leurs inimitiés réciproques. Quelles étaient les points fondamentaux des institutions communales, quelles en étaient les vices, comment étaient-elles appliquées, ce sont là autant de questions dont la solution reste à donner. L'excessive richesse des archives de la plupart de nos villes nous permet d'espérer qu'un écrivain, et pourquoi pas M. Kervyn lui-même, aura le courage d'aborder ce côté de l'histoire de la Flandre.

Les annales littéraires et artistiques de ce pays ont aussi été négligées par M. Kervyn, comme l'a fait observer un jeune écrivain de beaucoup de mérite '; il mentionne à peine les œuvres, si importantes, des poëtes flamands, et il consacre à peine quelques pages à la glorieuse école des Van Eyck.

En terminant, nous présenterons encore une observation. Dans sa première édition, M. Kervyn ne s'était arrêté qu'en l'année 1792; la seconde se termine en 1494, à l'avénement de Philippe-le-Beau. Cette manière de procéder ne nous plaît pas. Le lecteur peut lire, dans les quatre volumes dont nous venons de parler, les com

M. Serrure fils, dans son travail sur l'histoire de la littérature, en Flandre.

mencements, la grandeur et la chute de la puissance communale. Il lui fallait de plus un enseignement profitable. Quelles furent les conséquences de la victoire du despotisme? que devint la Flandre sous Charles-Quint et ses successeurs. M. Kervyn avait esquissé les annales de cette période dans sa première édition; pourquoi les a-t-il supprimées dans la seconde. La décadence d'un pays n'est-elle pas plus utile à étudier que les phases successives de sa grandeur?

A. WAUTERS.

PENSÉES.

Qu'est-ce que l'homme? C'est un animal à deux

pieds et sans plumes, disait Socrate.

- C'est un mam

mifère bimane et plantigrade, disent les naturalistes modernes. L'une et l'autre de ces définitions peuvent être également exactes; mais elles n'ont rien qui justifie les hautes prétentions de l'espèce humaine.

Que deviendrait l'orgueil des hommes, si l'on écrivait l'histoire de cette manière, par exemple : « Le mammifère bimane et plantigrade qui règne à Londres, a fait visite à l'animal bipède et sans plumes qui règne à Paris. On pense que, flattés de cette démarche, les bipèdes de France continueront de se faire tuer au profit des bimanes d'Angleterre. D'autres animaux, également créés pour la station verticale, comme les troglodytes et les orangs, sont chargés de l'exécution. »

Tous les hommes sont susceptibles de devenir raisonnables; mais il en est peu dont l'intelligence se développe jusqu'au point d'avoir le sens commun. Les femmes n'ont jamais le sens commun: aussi le mariage a-t-il ordinairement pour effet d'abaisser le niveau intellectuel de l'homme.

Les plus grands hommes sont bien petits, quand on les regarde de près. C'est pourquoi les gouvernements fondés sur le principe d'autorité, comme l'on dit, ont soin de tenir le prince à une grande distance du peuple.

La crédulité des hommes est prodigieuse. Tous les hommes éprouvent le besoin de croire. De sceptiques absolus, je n'en connais point. Tel qui nie la divinité de Jésus-Christ, par exemple, croit à une multitude d'autres choses qui ne sont pas davantage susceptibles de démonstration.

Il y a évidemment dans l'esprit de l'homme plus de place pour l'erreur que pour la vérité. Quand on voit la facilité avec laquelle il accepte comme articles de foi les contes les plus absurdes, on ne peut s'empêcher de prendre en pitié ces honnêtes philanthropes qui fondent sur la raison humaine le succès de leurs utopies. Ils sont pratiquement plus dans le vrai, c'est-à-dire, ils connaissent mieux les hommes, ceux qui exploitent le miracle de la Salette.

L'imposture est la reine du monde. Depuis les temps les plus reculés, c'est par l'imposture qu'on a gouverné les peuples. Il y a des gens qui travaillent avec une ardeur incroyable à étouffer la vérité, et qui y consacrent toute leur vie. C'est ainsi que l'histoire est tissue de mensonges. On s'évertue de siècle en siècle à lui conserver ce caractère. Les académies sont aujourd'hui chargées de cette honorable mission.

C'est une erreur de croire à la perfectibilité indéfinie de l'esprit humain. Le développement de l'intelligence est circonscrit dans des limites étroites qu'il est physiquement impossible de franchir. Lorsque l'activité intellectuelle est soumise à des efforts immodérés, le système nerveux se développe aux dépens de la force corporelle, et la sensibitité augmente, à mesure que l'excitabilité du système musculaire s'affaiblit. La faiblesse des muscles est suivie d'un défaut d'absorption, d'un appauvrissement du sang et enfin d'un dépérissement graduel, jusqu'à l'extinction de la vie.

Il en est à peu près de même des peuples de diverses races. Quand on les soumet au régime d'un progrès social forcé ou d'une civilisation que leur nature ne comporte point, une surexcitation fiévreuse trouble leur économie; le sens moral se pervertit et la décadence arrive infailliblement.

Il me restait une illusion je croyais à la grandeur et

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