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par la délibération de Philippe, comte de Charrolois, seul fils du duc de Bourgogne, et par les seigneurs de son conseil, assemblèrent à grand' puissance, et vinrent à Pontoise, et de là chevauchèrent vers Senlis, ayant volonté de lever ledit siége; mais ils furent avertis que leurs ennemis étoient en trop grand nombre, pourquoi ils envoyèrent dedans ladite ville cent combattants ou environ, lesquels entrèrent par une porte où il n'avoit logé nul des gens du connétable. Par lesquels fut mandé auxdits assiégés qu'ils fissent bonne chère, et que brièvement, sans point de faute, auroient bon secours; et lesdits de Luxembourg et de Fosseuxatout leurs gens d'armes, par Pontoise et Beauvais s'en retournèrent en Picardie pour cette fois, sans autre chose faire.

Et d'autre partie, messire Jean Tanneguy du Châtel, prévôt de Paris, prit la ville de Chevreuse; et déjà avoit assiégé le châtel, quand hâtivement il fut mandé par le roi et le connétable pour venir audit siége de Senlis; pourquoi, laissant partie de ses gens en ladite ville de Chevreuse, vint audit siége, où il trouva le roi et ledit connétable.

CHAPITRE CXCI.

Comment le roi de France envoya ses ambassadeurs à Montereau-FautYonne, pour l'union de l'église, et comment ceux de Rouen se rendirent Bourguignons.

EN après, le roi Charles et son connétable envoyèrent leurs ambassadeurs à Montereau où faut Yonne, c'est à savoir l'archevêque de Reims, les évêques de Paris, et de Clermont en Auvergne, Jean de Harcourt, comte d'Aumale; messire Mansart d'Esne, et messire Regnault de Merqueques, chevaliers ; maître Guérard Marchet, le juge maître Jean de l'Olive, et autres, jusques au nombre de seize notables personnes, pour être et convenir avec les ambassadeurs, afin de traiter paix entre icelles parties. Et furent envoyés de par ladite reine et le duc de Bourgogne, à Bray-sur-Seine, c'est à savoir, l'archevêque de Sens, frère à messire Charles de Savoisy: les évêques de Langres et d'Arras, messire Jean de la Trimouille, seigneur de Jonvelle; le seigneur de Courcelles, messire Jacques de Courte-jambe, Coppin de Vielville, maître Pierre Cohen, depuis évêque de Beauvais ; Jean le

1. Où l'Yonne se jette dans la Seine.

Clerc depuis chancelier de France, Gilles de Clamecy, maître Thierry le Roi, Jean le Mercier, Jacques Branlart, et maître Baude des Bordes, lesquels ambassadeurs dessusdits avoient chacun, de son adverse partie, bon et sûr sauf-conduit.

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Et eux venus aux villes dessusdites, c'est à savoir à Montereau et Bray, avisèrent d'un commun accord de convenir ensemble, et à certains jours nommés, en un village nommé la Tombe, qui étoit à mi-voie des deux villes. Auquel lieu fut ordonné, pour la sûreté des deux parties, ayant certain nombre de gens d'armes, le seigneur de la Trimouille. Et dura cette ambassade par l'espace de deux mois ou environ, souvent les deux parties ayant recours devers leurs seigneurs, envoyant les réponses de leur adverse partie, chacun en droit soi, sur l'espérance de mener la besogne à bonne conclusion.

Et adonc, en ces mêmes temps, fut mise l'union par toute l'universelle église. Car, après que pape Martin fut pontifié, il fit mettre hors de prison le pape Jean, lequel se mit du tout en sa merci et obéissance, et ledit pape Martin le reçut à ce bénignement, et le fit cardinal mais il mourut dedans brefs jours ensuivant.

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En outre, en ces propres jours, les bourgeois et citoyens de la ville de Rouen, qui moult étoient

1. Il fut fait doyen des cardinaux.

favorables au duc de Bourgogne, mandèrent secrètement aucuns capitaines tenants son parti; lesquels, avec foison de gens d'armes, ils boutèrent dedans leur ville. c'est à savoir messire Guy le Bouteillier, et Lagnon, bâtard d'Ailly. Et quand ils furent dedans, à l'aide des dessusdits citoyens, allèrent assaillir très puissamment la forteresse, que tenoient les gens du roi contre ladite ville; et en ce tant continuèrent, que ceux de dedans la rendirent, par si qu'ils s'en allèrent sauvement; et fut ledit messire Guy le Bouteillier constitué capitaine. Auquel assaut se porta très vaillamment icelui Lagnon d'Ailly, et tant qu'il en acquit la renommée et bienveillance de tous les bourgeois et manants d'icelle ville. Pour laquelle besogne ainsi achevée, le roi de France et ceux qui le gouvernoient furent très mal contents; et pour vrai, alors, en la plus grand' partie du royaume de France, y avoit guerre et division; et par ce moyen étoient les églises et le pauvre peuple moult désolés ; et aussi n'y étoit justice aucunement obéie.

CHAPITRE CXCII.

Comment le duc de Bourgogne alla devers l'empereur Sigismond; des serments que prit le comte de Charrolois, et du siége de Senlis, qui fut levé par les Picards.

Au commencement de cet an, Jean, duc de Bourgogne, après ce qu'il eut ordonné dedans Troyes l'état de la reine de France, et aussi qu'il eut commis plusieurs de ses capitaines, c'est à savoir Charlot de Deuilly, Jean de Clau, Jean d'Aubigny et plusieurs autres, atout (avec) deux mille combattants ou environ, pour aller vers Senlis courre sur les gens du connétable, prenant congé à la reine, se partit de la ville de Troyes, et s'en alla à Dijon voir sa femme et ses filles. Et après qu'il eut là séjourné aucune espace, s'en alla à Montbéliart, devers l'empereur Sigismond, roi d'Allemagne ; auquel lieu ils eurent grand parlement ensemble. Et depuis qu'ils eurent fait grand' révérence l'un à l'autre, se séparèrent; et retourna ledit duc en son pays de Bourgogne.

Durant lequel temps, Philippe, comte de Charrolois, vint à Arras; auquel lieu, par le commandement de la reine et de son père le duc, convoqua tous les seigneurs, chevaliers et écuyers, le clergé et ceux des bonnes villes des pays de Picardie et

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