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ont tant fait que mondit seigneur, nous et notredit fils le dauphin n'avons de quoi maintenir nos états et payer nos dépens: car, comme dit est, ils ont tenu et tiennent notredit seigneur et notre fils le dauphin, tellement qu'il convient qu'ils fassent ce qu'ils veulent et commandent, et à ce pourvoir, que la domination de mondit seigneur vienne es mains d'étranges, que Dieu ne veuille! Après ce que notre très cher et très amé cousin de Bourgogne a fait cesser lesdits inconvénients, il veut et offre paix à tous ceux qui avecque lui la voudront avoir, par ses lettres-patentes, publiées en plusieurs lieux de ce royaume. A laquelle les dessusdits non voulant entendre, icelui notre cousin se mit en armes à très grand' compagnie de chevaliers et écuyers, en intention d'ôter icelui mauvais gouvernement. Pour auquel résister et qu'il n'eut pas approchement à la personne de mondit seigneur, lesdits gouverneurs mandèrent et appelèrent à Paris toutes leurs garnisons, et abandonnèrent l'héritage de mondit seigneur aux Anglois, anciens ennemis de ceroyaume. Et en ce faisant ils démontrèrent leur mauvaise intention; mais la plus grand' partie des nobles de ce royaume et aucune grand' quantité des prélats et bonnes villes, sachant ce que dit est, s'adjoindirent avecque lui pour le bien de mondit seigneur, comme de raison, lequel est triste et dolent, en acquittant sa loyauté, de l'escandale et déshonneur que lesdits gouverneurs ont fait à mondit seigneur, à nous, à notre génération et à la noble mesgnie (maison) de

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France, et à ceux qui y ont affinité ou alliance par mariage ou autrement, et non sans cause; car vraiment la chose lui touche grandement ; car il laissa son siége devant Corbeil, et vint à nous pour nous mettre en franchise et ôter de la sujétion desdits gouverneurs ; et aussi à nous mettre à la compagnie de mondit seigneur, comme il est de raison. Et vinmes à la ville de Chartres; et notredit cousin avecque nous alla aviser et ordonner ce qui est à faire de nécessité pour la conservation de la domination de mondit seigneur et la récupération d'icelui, que brièvement entendons à faire nous et notredit coule conseil et avis de bons prud'hommes, vassaux et sujets de mondit seigneur, sans plus dissimuler.

sin

par

Pourquoi, très chers et bons amis, nous qui devons avoir le gouvernement de ce royaume ès besognes de mordit seigneur par le conseil de ceux de son sang, et de ce nous avons lettres-patentes de lui irrévocables, passées par son grand conseil présents tous les grands seigneurs de son sang, comme sont oncles, cousins-germains et autres; et nous, qui avons entière et certaine connoissance de vos bonnes et loyales intentions au regard de la seigneurie de mondit seigneur, et mêmement parce que pour le bien d'icelui vous êtes enclins avecque notredit cousin à vous employer de corps et de pouvoir, sans épargner, jusques à la mort, pour parvenir plus brièvement à la conclusion désirée et nécessaire, vous sommons, requérons et néan

moins de par mondit seigneur et de nous, expressément vous mandons, que vous maintenez en sain propos à l'intention de notredit cousin, sans aucunement obtempérer ou entendre à quelques lettres ou mandement qu'au nom de mondit seigneur et mon fils le dauphin vous seroient envoyés au contraire. Et ne souffrez qu'iceux gouverneurs dorénavant aient de vous aucunes pécunes, par quelque manière ou couleur que ce soit et que puisse être, et sur la loyauté et obéissance que devez à mondit seigneur, et sur toutes les choses que pourriez forfaire et être notés de rebellion et inobéissance envers lui et nous : car en ce faisant, vous ferez votre honneur et devoir; et vous aiderons, secourrons et défendrons de tout notre pouvoir contre tous qui pour cette cause et occasion s'efforceroient de vous nuire, gréver et dommager. Très chers seigneurs et bien amés, de vous soit garde Notre-Seigneur. » Écrit audit lieu de Chartres, le douzième jour de novembre. »

Et après ce, fut ordonné par le conseil de ladite reine et du duc de Bourgogne, que maître Philippe de Morvilliers iroit en la ville d'Amiens, accompagné d'aucuns notables clercs, déclarés parledit conseil, avecque un greffier juré ; et là feroient,

de par la reine, la souveraine cour de justice, au lieu de celle qui étoit en parlement à Paris, afin que ne fût besoin d'aller à la chancellerie du roi pour impétrer mandements, ni pour quelque autre cause qui pût advenir ès bailliages d'Amiens, Ver

avecque

man dois, Tournai et sénéchaussées de Ponthieu, les ressorts et enclavement des dessusdits pays. Auquel maître Philippe fut baillé un scel ou étoit gravé l'image de la reine, étant droite, ayant les deux bras tendant vers terre; et au droit lez étoit un écu des armes de France, et au sénestre avoit un écu parti des armes de France et de Bavière, et si étoit écrit autour: « C'est le scel des >> causes, souverainetés et appellations pour le roi.»>

Et fut ordonné par icelui conseil, que dudit scel on scelleroit de cire vermeille, et que les lettres et mandements se feroient au nom de la reine par la manière qui s'ensuit :

«Ysabelle, par la grâce de Dieu, reine de France; ayant, pour l'occupation de monseigneur le roi, le gouvernement et administration de ce royaume, par l'octroi irrévocable à nous sur ce fait dit seigneur et son conseil.">>

par mon

Par le moyen duquel scel et mandement devant dit, ledit maître Philippe assembla grand nombre de pécunes ; et pareillement fut ordonné, outre l'eau de Seine, pour les pays obéissant à la reine et au duc de Bourgogne, un autre chancelier.

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CHAPITRE CLXXXVII.

Comment messire Élyon de Jacqueville fut tiré hors de l'église NotreDame de Chartres, par Hector de Saveuse et ses complices qui le navrèrent à mort.

EN ces jours, le duc de Bourgogne étant dedans Chartres, en son hôtel, derrière Notre-Dame, se mut dissension entre messire Élyon de Jacqueville, chevalier, et Hector de Saveuse, et tant qu'en la présence dudit duc iceux dirent l'un à l'autre plusieurs hautaines paroles. Pourquoi ledit Hector, de ce non content, dedans brefs jours ensuivant, assembla aucuns de ses amis jusques à douze ou à seize hommes de fait, entre lesquels étoient son cousin-germain, c'est à savoir le seigneur de Crevecœur et son frère le Bon de Saveuse, Hues de Bours et un haussaire nommé Jean de Vaux; par lequel, et en la plus grand' partie, les deux dessusdits étoient en haine l'un contre l'autre ; car par avant ledit Jacqueville avoit détroussé icelui Jean, lequel étoit parent audit Hector; et avecque eux aucuns autres, jusques au nombre dessusdit, qui tous ensemble un certain jour vinrent de fait appensé ( prémédité) dedans l'église Notre-Dame de Chartres; auquel lieu ils rencontrèrent et trouvèrent ledit Jacqueville, qui venoit de l'hôtel dudit duc de Bourgogne.

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