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Et semblablement leur fit serment ledit comte de Saint-Pol.

Desquels serments dessusdits furent faites lettres scellées de leur sceaux; lesquelles furent envoyées à Senlis et autres villes tenant leur parti, afin de les induire à faire le serment pareil à leurs gou

verneurs.

Après lesquelles besognes accomplies, furent pris dedans ladite ville de Paris, et mis prisonniers, plusieurs hommes et aussi aucunes femmes tenant ou qui avoient tenu le parti dudit duc de Touraine, dauphin, tant de ceux qui étoient retournés depuis la paix, comme autres sur quoi on avoit soupçon; et tantôt après en y eut aucuns exécutés par justice.

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CHAPITRE CCXXIII.

Comment le dessusdit dauphin se partit de Mon tereau; de la délivrance de ceux qui avoient été en la compagnie du duc de Bourgogne, et autres matières.

EN ces propres jours, après que le dessusdit dauphin eut constitué messire Pierre de Guitry capitaine de Montereau, lequel de Guitry avoit été présent quand le duc de Bourgogne fut mis à mort, se départit de là atout (avec) ses gens, et envoya tous les prisonniers dessusdits, la dame de Giac, et Philippe Jossequin, à Bourges en Berri. Lesquels.

prisonniers firent serment audit dauphin de le servir et tenir son parti, fors Charles de Bourbon, par dessus nommé, et messire Pierre de Giac. Et quant aux autres, jà-soit-ce qu'ils fussent par plusieurs fois requis d'icelui dauphin et de ceux de son conseil, qu'ils voulsissent demeurer avec lui et faire ledit serment, et que grands biens et honneurs leur fussent offerts à être faits, néanmoins, oncques ne s'y voulurent consentir; ainçois (mais) firent réponse à toutes lesdites requêtes, que mieux aimoient de mourir en prison ou autrement, comme il plairoit au dauphin, que de faire chose qui à eux et à leurs successeurs pût être réprouvée à mal. Et pour tant, voyant leur volonté, et que autre chose on n'en pouvoit avoir, furent depuis tous mis à délivrance, moyennant certaine grand' somme de pécune, qu'ils payèrent pour leur rançon, excepté ledit messire Charles de Lens, amiral, qu'ils firent mourir; et ne retourna pas.

En outre, le dessusdit dauphin venu en la ville de Bourges, comme dit est, anda gens d'armes de toutes parts à venir par-devers lui, atout (avec) lesquels il alla en Anjou, et eut parlement avecque le duc de Bretagne, lequel consentit qu'une partie des nobles de son pays servissent ledit dauphin. Et avecque ce lui vint grand' aide d'Ecossois, qu'il envoya et fit conduire sur la rivière de Loire; et de là alla à Poitiers, puis en Auvergne; et en Languedoc, par tout assembler gens, et faire alliance, sur intention de résister contre tous ceux

qui gréver ou nuire lui voudroient. Et par toutes les bonnes villes tenant son parti, faisoit prononcer que ce qu'il avoit fait contre le duc de Bourgogne, étoit et avoit été en bonne et juste querelle, en remontrant plusieurs titres, qui à ce faire l'avoient mu pour sa justification; lesquels seroient trop longs à raconter.

Et entre-temps, le roi de France, la reine et ceux de leur conseil, qui avoient su les nouvelles de toutes les matières dessusdites, en étoient très déplaisants; et afin d'y pourvoir, furent envoyés mandements royaux en diverses parties du royaume où le roi dessusdit étoit obéi, contenant la mort du duc de Bourgogne, et la déloyauté des faiteurs; mandant et défendant aux gouverneurs d'icelles, sur tant qu'ils se pouvoient méfaire, qu'au dauphin ni à ceux de son parti ne baillassent conseil, confort et aide ni faveur, mais se préparassent à toute diligence d'y résister; et à ce faire et poursuivir la réparation du royaume, ils auroient bien bref bonne aide.

CHAPITRE CCXXIV.

Comment Philippe, cointe de Charrolois, sut la piteuse mort de son père; le conseil qu'il tint sur ses affaires; et les trèves qu'il prit aux Anglois, et autres matières.

OR est vrai que Philippe, comte de Charrolois, seul fils et héritier du duc Jean de Bourgogne, étant à Gand, lui furent dites les nouvelles de la piteuse mort de son père. Pour lesquelles il eut au cœur si grand' tristesse et déplaisir, qu'à grand' peine, par aucuns jours, le pouvoient ses gouverneurs réconforter. Et quand madame Michelle de France, sa femme, et sœur du duc de Touraine, dauphin, le sut, elle en fut moult troublée et en grand ennui, doutant, entre les autres choses, que son seigneur et mari ne l'eût pour ce moins agréable, et qu'elle ne fût éloignée de son amour plus que par avant n'avoit été; ce qui pas n'advint; car, en dedans bref terme ensuivant, par les exhortations et amiables remonstrations que lui firent ses dessusdits gouverneurs, il fut très content d'elle, et lui montra aussi grand signe d'amour que par avant avoit fait. Et tôt après tint conseil avec ceux de Gand, de Bruges et d'Y pre; après lequel, sans le relever, prit possession de la comté de Flandre, et puis s'en alla à Malines, où il eut parlement avec le duc de Brabant son cou

sin, Jean de Bavière, son oncle, et la comtesse de Hainaut, sa tante, sur plusieurs de ses affaires ; duquel lieu de Malines s'en retourna à Lille. Et de ce jour en avant se nomma duc de Bourgogne en ses lettres, prenant tous les titres qu'avoit le duc Jean, son père.

Et là vinrent à lui plusieurs grands seigneurs pour lui offrir leurs services; lesquels par avant avoient été serviteurs de son feu père. Si en retint une partie de son hôtel, et aux autres promit grands biens à faire. Vinrent aussi de Paris vers lui, maître Philippe de Morvilliers, premier président en parlement, et plusieurs autres gens notables; avecque lesquels, et ceux de son conseil, ledit duc conclut d'écrire aux bonnes villes qui tenoient le parti du roi et le sien, certaines lettres contenant que comme ils avoient tenu le parti de son père, ils voulsissent tenir le sien. Si manda à iceux aussi qu'il leur feroit impétrer trèves aux Anglois bien bref, et si leur fit savoir, qu'ils envoyassent de leurs gens devers lui à Arras le dixseptième jour d'octobre ; et que ceux qui y seroient envoyés eussent puissance d'accorder ce qui par lui leur seroit requis.

Et après, ledit duc de Bourgogne envoya ses ambassadeurs à Rouen, devers le roi d'Angleterre, afin d'impétrer les trèves dessusdites certaine espace de temps pour tous les pays étant en l'obéissance du roi et de lui. Laquelle ambassade firent l'évêque d'Arras, le seigneur de Thoulongeon, mes

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