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mond de Bomber, le seigneur d'Auxois, et plusieurs autres, jusques au nombre de mille combattants ou au-dessus, tous armés sur leurs chevaux, pour défendre lesdits occiseurs si besoin étoit. Toutefois moult étoient émerveillés de voir faire telle dérision, mais rien n'osoient dire, fors: « Mes enfants, vous faites bien.»

Et les corps du connétable, du chancelier, et de Remonnet de la Guerre, furent tous dénués (mis à nu), liés et pris et ensemble d'une corde par trois jours; et là les traînoient de places en places les mauvais enfants de Paris. Et avoit ledit connétable de travers son corps, en manière de bande, ôté de sa pel environ deux doigts de large par grand' dérision. Etfurent en cet état tout nus, à (avec) grand dérision sur eux, comme dit est, par trois jours à la vue de chacun, et au quatrième jour furent traînés sur une claie par un cheval dehors Paris, et enterrés en une fosse 'nommée la Louvière, avec les autres.

Ef après, combien que les seigneurs dessusdits se missent en peine de rapaiser ledit commun de Paris, en eux remontrant qu'ils laissassent punir les malfaiteurs par la justice du roi, néanmoins ne vonlurent pas cesser; ainçois (mais) alloient par grands tourbes (foules) ès maisons de ceux qui avoient tenu le parti du comte d'Armagnac, ou de ceux qu'eux-mêmes hayoient, lesquels tuoientsans merci, et emportoient le leur. Et qui alors à Paris hayoit un homme, de quelque état qu'il fût, Bourguignon

ou autre, il ne falloit que dire: « Véez là un Armagnac!», et tantôt étoit mis à mort sans en faire autre information.

CHAPITRE CXCVIII.

Comment les nouvelles de toutes les besognes avenues à Paris furent portées au duc de Bourgogne, qui y mena la reine; et la mort de

Jean Bertrand.

DURANT le temps des besognes dessusdites, les nouvelles de la prise de Paris, et aussi de la réduction des autres villes et forteresses, furent portées au duc de Bourgogne, qui étoit en sa ville de Dijon. Lequel, de ce très joyeux, bâtivement, atout (avec) ce qu'il put finer de gens, alla à Troyes devers la reine. Auquel lieu de Troyes il fut moult joyeusement reçu, et tantôt fit préparer l'état de ladite reine pour l'amener à Paris; et manda gens de toutes parts pour l'accompagner. Et aussi messire Jean de Fosseux, messire Jean de Luxembourg et plusieurs autres capitaines de Picardie, atout (avec) mille combattants ou environ, allèrent au-devant de lui jusques à Troyes. Auquel lieu de Troyes vinrent nouvelles audit duc de la mort du comte d'Armagnac et d'autres prisonniers morts à Paris, dont grandement fut courroucé; car, par le moyen d'iceux et par leur délivrance, avoit em

pensé de ravoir le dauphin et toutes les places que tenoit le comte d'Armagnac et ses gens. Toutefois, le second jour du mois de juillet, se partirent la reine et le duc de Bourgogne, de Troyes, pour aller à Paris en moult grand' ordonnance; et faisoient messire Jean de Luxembourg et les Picards l'avantgarde; et ledit duc, atout (avec) sa bataille, conduisoit la reine; et allèrent le chemin de Nogentsur-Seine et de Provins.

Finalement, le quatorzième jour dudit mois de juillet, ils entrèrent dedans Paris en moult grand' quantité, tous armés, étendard déployé, et par belle ordonnance. Et étoient allés au-devant de la reine et du duc, bien six cents bourgeois de Paris, vêtus de cottes bleues, ayant la croix Saint-Andrieu dessus, au lieu de la bande qu'ils avoient portée par long-temps. Et baillèrent audit duc de Bourgogne et à son neveu, le jeune comte de Saint-Pol, deux robes de bleu velours, lesquelles ils vêtirent, et entrèrent par la porte Saint-Antoine.

A l'entrée desquels fut menée dedans Paris moult grand' joie pour la venue d'iceux, et crioit-on : Noël ! par tous les carrefours, à hautes voix ; et des hautes fenêtres, en plusieurs lieux, on jetoit sur le charriot de la reine et sur les seigneurs, fleurs en grand' abondance. Et ainsi le duc de Bourgogne mena la reine jusques à l'hôtel de Saint-Pol, où étoit le roi, qui à elle et audit duc de Bourgogne fit joyeuse reception. Et brefs jours ensuivant, furent en icelle ville tenus plusieurs grands con

seils, tant par icelui duc, comme par autres seigneurs, sur le régime et autres affaires du royaume.

Après la fin desquels conseils furent constitués, en la faveur dudit duc de Bourgogne, plusieurs nouveaux officiers de par le roi ; c'est à savoir, les seigneurs de l'Ile-Adam et de Chastellus, furent faits tous deux maréchaux de France; messire Robinet de Mailly fut fait grand panetier; et messire Charles de Lens, fut commis amiral de France, jà-soit-ce que par avant en eût eu le don du roi messire Jennet de Poix; et se nomma amiral certaine espace; maître Eustache de Lactre fut fait chancelier de France; et maître Philippe de Morvilliers, premier président en parlement ; et le duc de Bourgogne fut capitaine de Paris, et y commit son lieutenant messire Charles de Lens. Et aussi, comme dit est, lors eut audit lieu de Paris plusieurs besognes remuées, tant des offices de France comme d'autres choses, desquelles le roi étoit content; et accordoit toutes requêtes à lui faites par ceux de qui il étoit administré.

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Esquels jours, par le commandement de messire Jean de Luxembourg, comine il fut commune renommée, fut mis à mort à la Chapelle, entre Paris et Saint-Denis, un nommé Jean Bertrand, capitaine dudit Saint-Denis, lequel avoit été un des meneurs de compagnies avec messire Gastelinas, Jean de Gingin et Jean de Clau, et étoient bouchers. Pour la mort duquel les Parisiens furent très mal contents; et pour trouver et punir ceux qui l'a

voient mis à mort, saillirent hors de leur ville en grand nombre; mais ils ne furent pas trouvés ; car hâtivement s'étoient mis à sauveté. Si en firent grand' plainte au duc de Bourgogne, lequel demanda au dessusdit de Luxembourg, s'il avoit fait / faire cette œuvre, et il répondit que non : toutefois il demeura mort. Et comme il fut informé, les principaux facteurs de cette besogne, furent Lyonnet de Vendôme, le bâtard de Roubaix, et autres leurs complices, jusques au nombre de douze com- . pagnons, mauvais garçons.

CHAPITRE CXCIX..

Comment le concile de Constance fut transmué par le pape Martin; de la prise du Pont-de l'Arche par le roi d'Angleterre, et autres matières.

par

En ce temps, par l'approbation du saint concile de Constance, pape Martin ordonna ledit concile général à être convoqué au cinquième an ensuivant, l'an mil quatre cents et vingt-trois, au mois d'avril. en cité et lieu habile, lequel lieu sera déclaré lui ou son successeur un an devant. Et ainsi le se partit hors de Constance; lequel fut mené hors de la maison de l'évêque, l'onzième jour de juin, par Sigismond, roi d'Allemagne et de Hongrie, élant à pied et tenant le frein de sa mule. Et ainsi

pape

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