Images de page
PDF
ePub

THE NEW YORK PUBLIC LIBRARY

ASTOR, LENOX AND TILDEN FOUNDATIONS.

OU

HISTOIRE ET DESCRIPTION

DE TOUS LES PEUPLES,

DE LEURS RELIGIONS, MOEURS, COUTUMES, etc.

DICTIONNAIRE ENCYCLOPÉDIQUE

DE L'HISTOIRE DE FRANCE,

PAR M. PH. LE BAS
MEMBRE DE L'INSTITUT.

CAISSES D'ÉPARGNE. Cette institution, due à la philanthropie plus éclairée des temps modernes non moins qu'au développement du principe moral et des idées d'ordre dans toutes les classes, ne date cependant en France que d'une vingtaine d'années. A partir de cette époque, une grande réforme s'est opérée dans les habitudes de notre population ouvrière. Jusqu'alors, l'artisan ou ne faisait pas d'économies et dissipait en folles dépenses la portion de son salaire, dont l'emploi n'était pas réclamé par ses besoins immédiats, ou cachait et rendait par là aussi inutile aux autres qu'à lui-même ce qu'il pouvait prélever sur le gain de chaque jour. C'est à l'un des membres les plus honorables du commerce français, à M. Benjamin Delessert, que nous sommes redevables de l'introduction en France de cette utile création, dont, déjà depuis quelques années, nos voisins d'outre-mer recueillaient les heureux fruits. En 1818, sur sa proposition, une société se forme et appelle à sa tête le vertueux la Rochefoucauld

C

Liancourt. Le 22 mai, l'acte constitutif est signé. Les statuts sont approuvés par ordonnance royale du 29 juillet, et le 15 novembre la Caisse d'épargne et de prévoyance de Paris ouvre ses bureaux dans le local de la compagnie royale d'assurances maritimes, dont les vingt administrateurs avaient été les premiers souscripteurs de la nouvelle société. Pour faire face aux frais de la gestion, sans rien prélever sur le dépôt qui leur était confié, ils avaient chacun doté l'établissement naissant d'une rente de 50 francs. Ce revenu se grossit rapidement. La Banque de France, qui ensuite fournit un local mieux proportionné à l'importance toujours croissante de l'institution, contribua pour une somme de neuf mille francs à la formation de son capital. De leur côté, les banquiers souscripteurs du premier emprunt du gouvernement firent abandon à la Caisse d'épargne d'une rente de huit mille francs lorsqu'ils liquidèrent leur opération en 1819. L'établissement possède aujourd'hui plus de soixante mille francs de re

T. IV. 1re Livraison. (DICT. ENCYCL., ETC.)

1

venu, provenant de dons, et de bénéfi ces réalisés en diverses circonstances. Cette somme ne couvre cependant qu'une partie des frais. Le surplus est supporté par le budget de la ville. Dans l'origine, dès que le chiffre du compte des déposants le permettait, le montant en était converti en rentes sur l'État. Une loi du 17 août 1822 avait fixé à dix francs le minimum des inscriptions achetées ainsi par la Caisse., N'oublions pas de dire que les agents" de change prêtaient gratuitement leur ministère pour ces achats, et que le gouvernement exempta du droit de timbre les pièces de comptabilité de la Caisse. La fluctuation du cours des fonds publics, l'influence qu'eurent sur leur valeur les événements politiques, tels que la guerre d'Espagne et la création du 3 pour cent, firent sentir au conseil des directeurs le besoin de trouver pour les fonds qui leur étaient confiés un placement qui fût plus à l'abri des chances de bourse. Ils s'adressèrent donc, en mars 1829, au ministre des finances, alors M. Roy, à l'effet d'obtenir que les caisses d'épargne pussent verser directement feurs fonds au trésor en compte courant. Cette autorisation fut accordée par une ordonnance royale du 3 juin, et sanctionnée par la loi du budget de 1830. L'intérêt de ce compte fut stipulé au taux de 4 pour 100. Une ordonnance du 15 juillet 1833 fixa définitivement à 300 fr. la somme la plus forte que la caisse pût recevoir de ses clients en un seul versement. Ce chiffre avait d'abord été porté à 600 fr., puis réduit à 50. Le maximum que put atteindre chaque livret fut fixé lui-même à 3,000 fr. pour les particuliers, et à 6,000 pour les sociétés de secours qui choisiraient ce mode de placement. Une loi du 31 mars 1837 confia à la caisse des dépôts et consignations le soin d'administrer les fonds provenant des caisses d'épargne. Celles-ci conservèrent néanmoins la faculté d'adopter de préférence d'autres modes de placement, s'il s'en présentait ailleurs de plus avantageux. Profitant de cette latitude,

quelques-unes, celles de Metz et d'Avignon, par exemple, ont lié leurs opérations à celles des monts-depiété, qu'elles se sont annexés.

Près de deux cent cinquante caisses d'épargne se sont, depuis la création de celle de Paris, établies dans les départements. Elles doivent leur existence, les unes à des associations particulières, les autres aux votes des conseils généraux ou municipaux. Celle de Bordeaux, qui en 1830 avait déjà reçu dix millions, a été fondée en 1819. Rouen et Metz eurent des établissements analogues en 1820; Marseille, Nantes, Troyes et Brest en 1821; le Havre et Lyon en 1822. Toutefois, le nombre des caisses d'épargne de France, en 1830, ne s'élevait encore qu'à treize. Leur développement devint plus rapide à partir de cette époque. Dès 1832, la caisse de Paris commença à ouvrir ses succursales d'arrondissement, par lesquelles elle va, pour ainsi dire, recueillir à domicile les épargnes de ses clients. Au mois de janvier 1835, le nombre des caisses d'épargne en activité s'élevait pour toute la France à soixante-dix; deux ans plus tard, on en comptait deux cent vingt-quatre. En 1833, le montant des versements opérés à la caisse de Paris fut de 8,700,000 fr., et au 31 décembre de cette même année, il y existait trente-trois mille livrets, représentant une valeur de 12,580,000 fr. Six mois plus tard, les sommes dont elle se trouvait débitrice envers sa nombreuse clientèle montaient à 18 millions. Enfin, jusqu'à ce jour, il n'a pas été versé, dans les caisses d'épargne de France, moins de 156 millions, lesquels ont donné lieu à l'ouverture de deux cent soixante mille comptes. Le succès de l'institution grandit tous les jours dans une rapide progression, car elle a complétement gagné la confiance de la population. L'ordre admirable qui règne dans sa gigantesque comptabilité n'a pas peu contribué à la popularité dont elle jouit. L'apprenti y vient insensiblement grossir le modeste capital, fruit de ses épargnes de chaque se

maine, et sur lequel il fonde l'espoir d'un prochain établissement; l'ouvrier marié s'y ménage un moyen de faire face aux charges probables que lui apportera l'augmentation de sa famille; tous enfin s'y créent une ressource pour les temps difficiles, et s'y assurent le pain de leurs vieux jours.

CAJACS (les), corps de deux cents gentilshommes, créé en 1668 pour le service de la marine, et ainsi nommé d'un M. de Cajac, seigneur de Ham, qui en fut le fondateur. On leur donna aussi le nom de Vermandois, le duc de Vermandois étant alors amiral. Ce corps fut du reste licencié peu de temps après sa formation.

CAJARC, petite ville de l'ancien Quercy, à vingt-deux kil. de Figeac, département du Lot. C'était autrefois une ville forte; et, dans les guerres contre les Anglais, elle opposa aux ennemis une vigoureuse résistance. Louis XIII en fit démolir les fortifications en 1622. La population de cette ville est aujourd'hui de dix-neuf cents habi

tants.

CAJETAN (Henri), de la maison de Sermoneto, fut fait cardinal en 1585, et envoyé en France par Sixte-Quint, avec le titre de légat à latere, à la fin de l'année 1589. Il arriva à Paris, le 5 janvier 1590. Alors l'exaltation des ligueurs était à son comble, et Cajetan, au lieu de rester neutre, suivant les instructions qu'il avait reçues du pape, se réunit à Mendoze, ambassadeur de Philippe II, et aux Seize, partisans dévoués des Espagnols. Le parlement de Tours, qui tenait pour Henri de Navarre, rendit un arrêt portant défense de communiquer avec le légat, sous peine de se rendre coupable du crime de lèse-majesté. Le parlement de Paris, dévoué à Cajetan, cassa cet arrêt, et enjoignit de montrer au prélat respect et révérence. Ce fut Cajetan qui, revêtu de ses habits pontificaux, reçut dans ses mains le serment que prêtèrent le parlement, les cours souveraines, les ambassadeurs d'Espagne et d'Écosse, le prévôt des marchands, les échevins, etc., de mourir pour la religion catholique, et de res

ter soumis à Charles X et au duc de Mayenne, lieutenant du royaume, serment qui fut répété ensuite par tous les bourgeois de Paris. Mais les victoires de Henri dérangèrent les plans des ligueurs : Paris fut assiégé, et le malheureux peuple réduit à la plus horrible famine. Cajetan, cependant, redoublait d'ardeur, mettait en jeu tous les moyens. Il fit distribuer cinquante mille écus de son argent aux pauvres; mais ceux-ci refusèrent un secours inutile, et demandèrent du pain. Ce fut, dit-on, Cajetan qui concut l'absurde et sacrilége idée de faire du pain avec les ossements des cimetières. Il fut probablement aussi un des inventeurs de cette fameuse pro-, cession des moines de la ligue, commandée par Rose, évêque de Senlis. On sait que Henri leva le siége à la nouvelle de l'approche du duc de Parme, qui arrivait des Pays-Bas avec une armée, et qui s'était réuni au duc de Mayenne. C'est vers cette époque que Cajetan fut rappelé par Sixte-Quint, lequel était loin d'approuver la politique de son légat. Il trouva le pape mort à son arrivée à Rome, et bien à point pour lui, dit l'Étoile avec raison; car il n'est pas douteux que SixtcQuint ne lui eût demandé un compte sévère de la manière dont il avait rempli sa mission. Cajetan néanmoins resta en faveur auprès du successeur de Sixte, et mourut paisiblement en 1599, à l'âge de quarante-neuf ans.

CAJOT (dom Jean-Joseph), bénédictin de la congrégation de Vannes, naquit à Verdun en 1726, et mourut en 1779. On a de lui: les Antiquités de Metz, ou Recherches sur l'origine des Médiomatriciens, Metz, 1760, in-8°; Histoire critique des coqueluchons, Cologne (Metz), 1762, in-12; Plagiats de J. J. Rousseau sur l'éducation, Paris, 1776, in-12, ouvrage où l'auteur s'efforce de prouver que les idées qui ont fait la fortune de l'Emile sont empruntées à Plutarque et à Montaigne.

CALABRE (soulèvement de la). L'arrestation du général Championnet avait altéré la confiance des Napolitains

dans le gouvernement des vainqueurs; de plus les exactions de quelques agents français avaient irrité la population, qu'excitaient encore les Anglais, placés à douze milles de Naples, dans la petite île de Procida. Bientôt les criminels sortis des prisons et des galères se réunissent; le cardinal Ruffo vient dans la Calabre prêcher contre les Français une nouvelle croisade.

Au nom sacré de la religion, toutes les campagnes se soulèvent; et en mai 1799 le cardinal Ruffo, à la tête d'une bande de brigands indisciplinables, pille Crotone, qui lui avait ouvert ses portes, et s'empare de Contazarro, capitale de la Calabre. En un instant, l'Apulie et les Abruzzes embrassent son parti, et la république parthénopéenne se trouve circonscrite dans les murs de Naples. Ruffo ne tarda pas à en commencer le siége; il l'attaqua de trois côtés. Les assiégés, craignant la famine, se décidèrent, après plusieurs engagements acharnés, à faire une sortie générale, qu'ils exécutèrent le 25 juin après midi. Écrasés par le nombre, ils furent contraints de se retirer dans les forts. Dès le lendemain, le cardinal Ruffo entra dans Naples, et les rues de cette ville furent teintes de sang. Cependant le château SaintElme, le château Neuf, le château de l'OEuf, la forteresse de Castellamare, tenaient encore les royalistes en échec. Ruffo fit proposer un armistice, et consentit à une capitulation honorable. Ces conditions furent d'abord exécutées de bonne foi; mais Nelson, arrivant dans la baie, ordonna à tous ceux qui avaient occupé des places dans le gouvernement républicain, de se rendre au château Neuf pour donner leurs noms et leurs demeures, promettant qu'ils seraient désormais à l'abri de toute poursuite : il voulait dresser une liste de mort. Presque tous ceux qui firent cette déclaration furent emprisonnés; beaucoup périrent sur l'échafaud; cinq cents furent banuis, et virent leurs biens confisqués. On parvint enfin à cet excès de délire, de faire le procès à saint Janvier, protec

teur du royaume, pour avoir paru approuver la révolution napolitaine, en laissant couler son sang au moment de l'entrée des Français. Les biens qui lui étaient consacrés furent confisqués au profit du roi, et saint Antoine de Padoue lui fut donné pour successeur, attendu qu'on célébrait sa fête au jour de la rentrée des troupes royales dans Naples.

CALAGES (mademoiselle Marie de Pech de vivait à Toulouse dans les premières années du dix-septième siècle. Elle est l'auteur d'un poëme de Judith, ou la Délivrance de Béthulie, en huit livres, qu'elle composa pendant sa jeunesse, et qui ne fut publié qu'après sa mort, en 1660. Ce poëme, terminé avant que le Cid eût paru, renferme des vers heureux. Racine s'en est approprié quelques-uns. Ainsi, mademoiselle de Calages avait dit, en parlant de Judith,

« Qu'un soin bien différent l'agite et la dévore, » avant que Racine eût fait dire à Phèdre, acte II, scène 5,

« Qu'un soin bien différent me trouble et me dévore,>>

Ce vers, mis par notre grand tragique dans la bouche d'Hippolyte :

"Maintenant je me cherche et ne me trouve plus,: est également imité de celui où mademoiselle de Calages dit, pour exprimer la passion naissante d'Holopherne :

<< Il se cherche lui-même et ne se trouve plus. »

Mademoiselle de Calages avait remporté plusieurs fois le prix à l'académie des jeux floraux.

CALAIS, Calesium, ancienne capitale du pays reconquis. Les premiers titres où il en soit fait mention ne remontent pas plus haut que le neuvième siècle. Ce n'était alors qu'une petite bourgade peuplée de pêcheurs, et des marins qui fréquentaient le port. Ce port, creusé par la nature, et amélioré en 997, par ordre de Baudouin IV, comte de Flandre, était défendu par deux grosses tours, dont l'une, attribuée à Caligula, était située au milieu des sables, au nord de la ville; l'autre protégeait l'embouchure de la rivière

« PrécédentContinuer »