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sant; des révoltes éclatèrent au bagne et dans les prisons; les troupes ne pouvaient suffire à contenir ces milices féroces; on découvri une horrible conspiration dont l'objet était, à la faveur d'un bouleversement général, de livrer la ville au pillage, et de satisfaire des vengeances particulières. Le péril imminent décida les propriétaires à veiller euxmêmes à leur sûreté; ils formèrent une garde bourgeoise; toute la jeunesse courut aux armes il fallut combattre et verser le sang des citoyens pour réprimer les bandits. La reine dut entendre de son palais déjà désert, des cris d'animadversion, et des vœux impies appelant les Français comme des libérateurs; trop tard convaincue de l'inutilité de ses efforts, elle s'embarqua précipitamment pour aller rejoindre le roi à Palerme,

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Cependant le prince Joseph Napoléon venait d'arriver à Rome, chez son oncle, cardinal Fesch, alors ambassadeur de France auprès du saint-siége. Après avoir réglé avec le gouvernement du pape l'affaire des fournitures exigées pour les besoins de l'armée,

il établit son quartier général à Albano, où le maréchal Masséna vint prendre ses ordres t arrêter le plan d'invasion.

Il semble qu'après avoir fait connaître les premières dispositions de l'armée française pour effectuer la conquête du royaume de Naples, nous ne devrions pas en interrompre la narration; mais nous avons pensé que, en fixant exclusivement l'attention de nos lecteurs sur les événemens qui se passèrent dans la partie méridionale de la péninsule d'Italie, pendant les six premiers mois de cette année (1806), nous l'aurions trop long-temps distraite de la scène principale où elle est naturellement appelée par les nouveaux intérêts des grandes puissances, et la singulière situation de l'Europe tout entière ébranlée par la bataille d'Austerlitz.

Napoléon n'avait pas attendu la conclusion du traité de Presbourg, pour saisir d'avance tous les avantages des changemens qui devaient en résulter. Se fondant sur ce qu'il avait garanti aux électeurs de Bavière et de

Wurtemberg, ainsi qu'au margrave de Bade, la pleine souveraineté de leurs états, il au torisa ces princes à prendre possession des domaines appartenant, soit à l'ordre équestre, soit aux ordres teutoniques, et de SaintJean-de-Jérusalem, qui se trouvaient enclavés dans leurs territoires. Un ordre du jour, daté de Schoenbrünn, le 19 décembre, enjoignit à tous les généraux, gouverneurs et commandans de places et de postes occupés par des troupes françaises, de prêter main forte aux agens des électeurs et du margrave, pour effectuer cette prise de possession; parce que, était-il dit dans cet ordre, la souveraineté de ces trois princes dans leurs états respectifs, n'est pas autre que celle de l'empereur d'Allemagne dans ses propres états héréditaires, et que celle du roi de Prusse, dans le Brandenburg.

L'élévation des maisons de Bavière et de Wurtemberg, à la dignité royale, mit fin aux réclamations qu'avait élevées cette violente application du droit de conquête. Ce fut le 1er janvier 1806 que les deux électeurs

prirent solemnellement le titre de roi : Napoléon venait d'arriver à Munich; il y reçut les hommages de la royale cour, et d'une foule de princes accourus pour capter la bienveillance d'un conquérant qui payait avec des couronnes le dévouement et la fidélité de ses alliés.

Cette large base du nouveau système, cette garantie de sécurité donnée à la France par l'interposition de deux monarchies, ses alliées nécessaires, sont peut-être le résultat le plus glorieux des victoires de Napoléon, et vraisemblablement le plus durable: il a laissé des traces profondes; et l'on jugerait mal des conséquences de cette grande création, si l'on s'arrêtait à ne considérer que celles qu'ont dû produire accidentellement des événemens hors de toute prévoyance humaine. Nous pensons que les grands revers de la France, depuis cette époque, le démembrement de la nouvelle monarchie de Bavière par la rétrocession du Tyrol, les alliances habilement ménagées par l'heureuse Autriche, n'ont pas suffi pour détruire l'ouvrage de Napoléon,

dans cette partie centrale de la politiquede l'Allemagne. La Prusse, malgré ses accroisemens ambitieux, a beaucoup perdu de soi influence: elle est tombée successivement dans la dépendance de la France et de la Russie; son protectorat des princes protestans et des états du second et du troisième ordre, contre les prétentions de l'Autriche, est resté sans objet; depuis que les monarchies de Bavière et de Wurtemberg se sont affermies par le développement des vrais principes, et l'adoption des formes du gouvernement représentatif, les intérêts de la plus forte population, et de la plus riche partie de l'Allemagne, se groupent autour de ces deux puissances, et tendent à les considérer comme les protectrices de leur indépendance.

Sans doute, en élevant cette double barrière, Napoléon ne songeait guère aux droits et aux libertés de ces peuples; il n'eut en vue que de resserrer l'Autriche, et de tenir une route militaire toujours ouverte jusques au coeur de ses états; il négligea même de protéger les faibles droits acquis aux états de

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