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les VI l'héritage de fon père. La France animée contre l'Autriche, par cette ancienne rivalité que rien n'avoit pu éteindre, & qu'on regardoit depuis deux cents ans, comme néceffaire à la balance de l'Europe, joignit fes armes à celles de la Bavière. La Bohème devint le théâtre de la guerre, & des exploits de MAURICE.

Déja, malgré les rigueurs de la faifon, Prague eft affiégée par l'Electeur, & la fortune de ce fiége eft confiée au Héros de la Saxe (16). Tout femble confpirer contre le fuccès de l'entreprise. MAURICE voit les obstacles, & il est le feul qui n'en est pas effrayé. Son génie lui répond de la fortune. Il forme un projet dont la hardieffe étonneroit tout autre que lui. L'ennemi approche; dans la même nuit la tranchée s'ouvre; la Ville eft prise; l'ennemi peut à peine le croire; & la France applaudit à un fuccès qu'elle

n'ofoit espérer. Tome III.

B.

N'oublions pas d'obferver qu'il choifit pour l'exécution de l'entreprife, un homme qui juftifioit fon choix par fą valeur; qui élevé de grade en grade, dut tout à fes actions & rien à fes ancêtres; qui, pour s'avancer, ajoutoit à fon courage tout ce qui manquoit à fa naiffance; qui honora ce nom fi dédaigné de Soldat de Fortune, & le porta avec la jufte fierté qu'il a le droit d'infpirer; qui en parlant de lui-même fans s'affujettir toujours aux conventions timides de la modeftie, put quelquefois offenfer l'orgueil, mais jamais la vérité; qui, ayant commencé comme Fabert, dans les mêmes temps peut-être eût fini comme lui, & que la voix publique fembloit appeller aux premiers honneurs de la guerre, fans doute parce que ces fortes d'exemples toujours rares, ne peuvent être qu'utiles fans jamais nuire, & qué l'élévation d'un homme qui eft l'artifan de fa propre grandeur, fatte l'ambition

fecrette de tous les états & de tous les rangs. Qu'il me foit permis d'affocier en paffant le nom de Chevert à celui de MAURICE; aujourd'hui qu'il n'eft plus, on me le pardonnera plus aifément fans doute.

La conquête de Prague eft bientôt fuivie d'une autre auffi importante & peut-être plus difficile (17), Egra fuccombe, La poffeffion de la Bohème eft affurée ; & la communication avec la Bavière confervée libre. Dès ce moment les nations eurent les yeux fixés fur le Comte de Saxe, & le regardèrent comme un de ces hommes néceffaires au deftin des Empires, faits pour ébranler ou pour foutenir les Etats.

Une révolution changea bientôt la face des affaires de l'Allemagne, & la guerre fut reportée du fond de l'Autriche aux bords du Rhin. L'Alface & la Lorraine font fauvées une feconde fois par MAURICE. L'embrâfement de la guerre s'étend & fe communique.

La haine de l'Angleterre & l'ambition intéreffée de la Sardaigne fecondent la politique de l'Autriche. La France voit fans s'allarmer groffir le nombre de fes ennemis: elle a MAURICE pour défenfeur. Déja il a obtenu les deux prix les plus flatteurs de fes fuccès, la confiance de fon Roi, & le titre de Maréchal de France *. Cet honneur accordé à MAURICE devoit être utile à l'Etat. En effet, fi le droit de commander en Chef eft un dépôt dangereux dans des mains foibles, on peut dire qu'il est auffi nécessaire que juste dans un homme qui a de grands talens. Pour qu'il puiffe agir, il faut lui ôter fes entraves; & trop fouvent l'on a vu le génie dépendant échouer dans fes projets, ou arrêté dans fa courfe par l'autorité timide ou peu éclairée.

La Nation & l'Europe fe fouvien

Le 26 Mai 1744,

hent que Louis alla lui-même en Flan dre fe mettre à la tête de fes troupes, Il feroit à fouhaiter pour le bonheur des peuples, que tous les Princes qui font la guerre, commandaffent leurs armées. Obligés eux-mêmes de combattre & de vaincre, ils apprendroient à fe mesurer avec la nature, la fortune & les hommes. Du férail de Conftantinople ou d'Ifpahan, un Sultan voluptueux ou féroce ordonne le carnage. Il fait figne qu'on aille s'égorger fur les frontières de l'Europe ou de l'Afie. A ce figne, trois cent mille hommes marchent; les villes, les campagnes font ravagées; les villages font réduits en cendres; le meurtre fuccède au meurtre, & les embrâfemens aux embrâsemens; cependant le Sultan oifif dort dans fon férail. Le fang coule, des Provinces font défolées pour un fiecle; & le Sultan dort. Quand on a vaincu pour lui, on tra verfe avec rapidité des provinces,

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