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qui hors de la mer feroit indifférente, peut fur cet élément faire échouer les plus grands deffeins, & caufer la perte d'une flotte entière.

Idem. (22) Le pilotage eft l'art de diriger la route d'un vaiffeau, & de déterminer le point où il fe trouve. Pour y parvenir, il faut connoître parfaitement la direction que fuit le navire, & mefurer la viteffe de fon fillage: mais il y a des erreurs inévitables qui entrent néceffairement dans ces calculs. Le vaiffeau ne fuit jamais la même ligne. Il a une dérive néceffaire caufée par l'obliquité des voiles, par les mouvemens fecrets de la mer, par les élans inégaux des vagues, , par les courans qui tranfportent le navire vers un côté ou vers un autre : enfin la bouffole elle-même eft fujette à des variations. Pour trouver la véritable route d'un vaiffeau, il faut donc avoir égard à ces changemens, & corriger toutes ces erreurs. On découvre la variation de la bouffole en prenant la hauteur de l'étoile polaire, ou du foleil. Quoique le Général ne foit pas destiné à faire les fonctions de Pilote, il doit cependant être inftruit de cet art, foit pour l'exercer lui-même dans des occafions preffantes, foit pour être en état de juger celui qui l'exerce.

Page 187. (23) La manœuvre eft la science des forces mouvantes, appliquée à la Marine,

C'est elle qui apprend à connoître tout l'avantage qu'on peut tirer de chaque partie du vaiffeau; à évaluer l'effet des machines employées; à décomposer les forces; à diftribuer de la manière la plus avantageuse toutes les parties pefantes de la charge; à produire par la situation du gouvernail, le plus grand effet poffible; à fe fervir avec fuccès de la pluralité des voiles, d'où dépend prefque toute la fupériorité de la Marine moderne; à leur donner le degré de courbure ou d'étendue qu'il faut, pour que le vent ait un tel degré de force; à les combiner de différentes manières, pour augmenter ou pour ralentir la vîtesse, pour avancer en route droite ou en route oblique ; à fe fervir du même vent pour des routes oppofées; à faire fuccéder en pleine mer le repos au mouvement, par l'équilibre des forces qui agiffent en fens contraires; à faire tourner le navire dans tous les fens, par l'effet combiné du gouvernail & des voiles, de l'eau & du vent; à calculer tout ce qui peut accélérer ou retarder l'évolution, & le temps qu'elle doit durer; enfin à rendre la manœuvre tantôt plus lente & tantôt plus rapide; & ce qui est une loi générale, à régler toujours la force des impulfions fur la grandeur des navires & la réfiftance des obftacles. Cette étude eft beaucoup plus néceffaire à l'officier

de mer, que celle du pilotage. Dans les combats, c'est la manœuvre qui décide prefque toujours de la victoire. Enfin c'est à la manœuvre que Duguay - Trouin dut la plus grande partie de fa réputation & de fes fuccès.

Page 188. (24) Ce fut en 1695 que DuguayTrouin parut pour la première fois à la cour. M. de Pont-Chartrain, Miniftre de la Marine, le préfenta à Louis XIV, qui le reçut comme un homme utile à l'Etat, & deftiné à être un jour l'honneur de la nation. Depuis ce temps, le Roi lui donna toujours les plus grandes mar-1 ques d'eftime. Il fe plaifoit à entendre de fa bouche le récit de fes actions. La fierté noble & la franchife guerrière d'un Héros intérefe plus, fans doute, l'ame d'un grand Roi, que des hommages de courtifans. Un jour DuguayTrouin faifoit à Louis XIV le récit d'un combat où il commandoit un vaisseau nommé la Gloire. J'ordonnai, dit-il à la Gloire de me fuivre. Elle vous fut fidèle, reprit Louis XIV. Auffi Duguay-Trouin avoit-il pour fon Roi cet amour qui eft le premier reffort dans un gouverne ment monarchique. Jamais il ne fortit de fa préfence, fans être plus enflammé du defir de fervir l'Etat. Ce trait fait également l'éloge du Prince & du Sujet.

Page 189. (25) Duguay - Trouin passa en

1697 de la Marine marchande à la Marine royale. Ce fut à la fuite de fon fameux combat contre le Baron de Waffenaer. Il eut d'abord le titre de Capitaine de frégate légère. En 1702 il fut nommé Capitaine en fecond fur le vaiffeau de Roi, la Dauphine, commandé par le Comte de Hautefort.

Page 193. (26) En 1702, dans la guerre pour la fucceffion d'Efpagne, Duguay - Trouin attaqua un vaiffeau de guerre Hollandois de trente - huit canons. Surpris par l'activité de l'ennemi, qui tout-à-coup fit une manœuvre habile & imprévue, il se trouva dans une fituation défavantageufe qui l'obligea d'effuyer tout le feu de l'artillerie, fans pouvoir y répondre. Déja il avoit reçu deux coups de canons à fleur d'eau, & fept dans fes mâts. Les ennemis le croyoient perdu. Il prend tout-à-coup le parti de fe jetter dans leur vaiffeau avec tout fon équipage. Le plus jeune de fes frères qui combattoit fous lui, s'y lança le premier, & fit des prodiges de valeur. Le Capitaine Hollandois fut tué, & fon vaiffeau enlevé en moins d'une de- mi-heure.

Page 194. (27) En 1703, s'étant mis en mer avec trois vaisseaux & deux frégates, il rencontra le 7 Juillet une efcadre Hollandoife de quinze vaiffeaux de guerre. La brume qui étoit

*fort épaiffe, ne lui permit de les bien diftinguer que lorfqu'ils étoient déja fort près. Il donne auffi-tôt le fignal de la retraite. Mais fix vaiffeaux ennemis plus légers que les autres, s'avancent avec rapidité; & déja ils étoient prêts. à en joindre deux de fon escadre. Il ne put se réfoudre à les voir périr fans leur donner du fecours. Il fait plier une partie de fes voiles, & refte derrière eux pour les couvrir. Un vaisseau Hollandois de foixante canons s'avance à la portée du piftolet: Duguay - Trouin, en quatre bordées, le met hors de combat. Quatre autres fe joignent pour l'attaquer; il leur réfifte & les amuse pendant quatre heures, jufqu'à ce que fes vaiffeaux euffent le temps de s'échapper. Dès qu'il les vit hors de péril, il fait déployer toutes les voiles, & fe met en peu de temps hors de la portée des ennemis. De toutes les aventures de Duguay - Trouin, c'étoit celle dont il étoit le plus flatté. Il n'avoit eu que trente hommes hors de combat, & il avoit fauvé quatre vaiffeaux qui l'accompagnoient.

Idem. (28) On fçait que le commerce des I Hollandois eft immenfe. Il recueille tous les tréfors des continens & des ifles, & s'étend de l'équateur aux deux poles. Une des branches. de ce commerce eft la pêche de la baleine, qui fe fait fur les côtes de Spitzberg. Les Hol

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