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L'auteur montre combien est ridicule la manie du gouvernement d'élever à la dignité de nobles, tant de gens qui ne sont connus souvent, dans leur paroisse, que par leur talent d'acheter à vil prix ce qu'ils vendent fort cher. Ils ne brillent parfois ni par l'éclat de leur intelligence, ni par des actes d'humanité, ni par la grâce de leur personne, ni par la lumière de leur instruction, ni même par le bon ton de leur langage; mais le gouvernement en fait des comtes et des barons, afin sans doute qu'ils aient au moins quelque chose: un parchemin à défaut d'un talent.

C'est par erreur aussi qu'on a mis dans la Constitution que le roi a le droit de conférer des titres de noblesse, et notre vilain nous fait voir combien cette distinction est une chose surannée. Il n'y a pas jusqu'aux anciens nobles qui ne soient de son avis. Ils ont bien perdu à cette disposition constitutionnelle.

L. D.

PUBLICATIONS DU WILLEMS'-FONDS.

VLAEMSCHE BIBLIOGRAPHIE.

In 12. Gent, Eug. Vanderhaegen.

Il y a sept ans fut fondée à Gand une association ayant pour but d'encourager la langue et la littérature néerlandaises. Chacun des membres s'engagea à verser annuellement une certaine somme dans la caisse de la Société. Il fut décidé qu'une partie de ces fonds serait destinée à distribuer annuellement un certain nombre de livres aux élèves qui remporteraient le prix de flamand au collége et à l'athénée de la ville. Nous dirons en

passant que cette mesure nous a paru injuste: le Willems'-fonds est une société flamande, non gantoise, et si elle donne des récompenses, il est juste que toute la jeunesse flamande en profite; nous pensons qu'il suffit que cet abus soit signalé pour qu'il disparaisse. Mais le but principal de l'association était

de répandre à un prix modique des publications utiles concernant les sciences, les arts et les lettres.

Il serait trop long d'énumérer ici les vingt-six volumes qui ont vu le jour jusqu'à présent. Nous nous contenterons de citer, pour les sciences, les ouvrages de M. Ed. Campens sur la chimie et la zoologie, l'Introduction à la botanique, traitant particulièrement de la phanégoramie belge, par M. Frédéricq, et le Traité de perspective de M. Sunaert; dans la partie des arts, nous n'avons à mentionner que deux ouvrages les Réflexions sur les écoles de peinture flamande et hollandaise, par E. Zetternam (J. Diricksens), et l'Éloge de Van Dyck, par G. Hansen, œuvre d'un jeune homme qui promet de devenir poëte éminent. Nous avons appris avec plaisir que M. Dodd a été chargé par la société de faire l'histoire de la peinture et de la sculpture en Flandre, jusqu'aux Van Eyck. - La chanson, qui forme la littérature des classes inférieures, a été l'objet des soins particuliers du Willems'-fonds. Nous citerons surtout le Recueil de chansons anciennes et modernes, avec musique, publié par M. Snellaert, et les chansons populaires de P.-J. Vankerckhoven. Nous aurions voulu nous étendre sur chacun de ces ouvrages, et sur d'autres, tels que les deux volumes de Nouvelles de M. Geiregat, l'Esquisse de la situation politique, morale et industrielle de la Belgique, par M. Vandewalle, le Mouvement flamand de M. Vanruckelingen: nous nous plaisons à croire que ces travaux sont aujourd'hui généralement connus.

L'importance de la dernière publication de la Société nous fait un devoir d'en dire quelques mots. La Bibliographie flamande de M. Snellaert offre une lecture sinon attrayante, du moins infiniment instructive. Ce livre, qui en est à sa seconde édition, contient la meilleure réponse à ceux qui déplorent l'ignorance de nos Flandres. Ouvrez-le à la première page, vous y lirez que la Vie de Jésus-Christ, par le père Smet, a eu neuf éditions et a été vendue à 12,000 exemplaires; que la Vertu pour toutes les professions du père Hillegeer a été tirée, en deux ans de temps, à 26,600 exemplaires. Nous ne citerons que ces deux ouvrages, en ajoutant que 61 pages de la bibliographie contiennent les titres de pamphlets catholiques, sermons, vies de

saints, récits de miracles, etc., sans parler des journaux et revues qui se trouvent placés sous une autre rubrique. Quant à des livres démocratiques, on aurait de la peine à en trouver un seul. C'était pourtant une terre bien ingrate à exploiter que la terre de Van Maerlant et des Artevelde! Mais ils sont si habiles les Révérends! Et puis ils se sont souvenus des paroles de leur maître Vous récolterez ce que vous aurez semé; ils ont semé, beaucoup semé, et vous savez s'ils ont à se féliciter de la récolte.

Les Flandres sont catholiques, et elles le resteront aussi longtemps que l'on ne se sera pas décidé à parler au peuple dans sa langue, aussi longtemps que le libéralisme belge, négligeant cette population qui forme la majorité de la nation, se contentera de vaines récriminations, sans songer à des remèdes efficaces, à une intervention active, sans empêcher Conscience de se jeter dans les bras de la réaction et Th. Van Ryswyck de mourir dans une maison de santé.

A. W.

L'INQUISITION ET LA RÉFORME EN BELGIQUE,

PAR CH. RAHLENBECK.

In-12; Bruxelles, Deltenre-Walker.

Ce livre a déjà quelques mois de date, mais ce n'est pas une de ces œuvres de circonstance qui passent avec l'événement qui leur donne le jour. Au contraire, l'ouvrage de M. Rahlenbeck est sérieux, profond, d'un intérêt toujours présent. Aujourd'hui que partout les intelligences s'occupent à débrouiller l'histoire si compliquée et si agitée du xvIe siècle, il vient soulever, pour la Belgique, une partie du voile qui recouvrait encore cette grande époque.

La question religieuse et la question politique se mêlaient. alors; aussi les deux termes : Inquisition et Réforme représentent-ils bien à la fois, d'une part la faction catholique et le parti de l'Espagne, d'autre part, l'élément protestant, les amis de la liberté de conscience, le parti patriote pour tout dire.

Entre l'Inquisition et la Réforme est posée toute la question et s'engage toute la lutte. Une ville était la grande artère du commerce belge, admirablement située, et siége principal de la cause de la Réforme en Belgique. Aussi est-ce son histoire, pendant le xvIe siècle, que M. Rahlenbeck a songé à retracer. Autour de cette histoire se groupent la plupart des événements qui s'accomplissent, pendant cette période, dans nos provinces.

M. Rahlenbeck a mis ainsi en présence les deux principes qui se livraient une lutte acharnée; l'esprit qui anime son livre est un esprit de liberté, de progrès; il s'efforce de faire sortir de l'ombre une foule de figures de héros oubliés aujourd'hui, car le peuple eut alors ses grands hommes, ses martyrs. Ce n'est pas un d'Egmont ni un de Horne qui méritent la couronne civique, mais ces milliers d'artisans, de bourgeois qui se dévouérent à la grande cause de la réformation et de l'affranchissement de notre nationalité; quand la noblesse trahissait ses devoirs et se rangeait du côté de l'Espagnol, du sein de la masse plébéienne sortaient les généreux élans, les courageux efforts. M. Rahlenbeck s'attache, et avec raison, à mettre en lumière ce rôle du peuple.

Il montre Anvers tenant avec fermeté le drapeau de l'indépendance; les défaites ne la font pas désespérer; elle a à subir les cruautés du duc d'Albe, les trahisons du duc d'Alençon. Dans ce choc des partis, au milieu des guerres civiles, de l'exil de milliers de ses enfants, en présence de la ruine de son commerce, elle ne perd jamais courage; à l'appel de Guillaume le Taciturne, elle se relève; son héroïsme grandit sous son bourgmestre, Philippe de Marnix; elle est le dernier rempart des libertés belges: la dernière, elle tient tête à l'Espagnol, à cet invincible Alexandre Farnèse; Marnix est là pour la défendre, et Marnix semble lui avoir communiqué une partie de son âme; elle soutient dix-sept mois de siége et ne succombe que vaincue par la famine.

Avec la prise d'Anvers, on peut dire que finit pour nos provinces l'ère de liberté rêvée; deux siècles et demi de servitude et de douleur seront la conséquence du triomphe du catholicisme et de Philippe II.

La Hollande, se jetant avec ardeur dans la foi nouvelle, s'était sauvée du joug et se constituait en nation indépendante; dès ce moment a commencé pour elle l'ère de prospérité.

Voilà les enseignements que nous offre ce xvIe siècle; voilà ce que M. Rahlenbeck a parfaitement compris et fait ressortir; voilà en quoi son livre a une valeur morale aussi grande que sa valeur historique.

Les recherches de l'auteur sont nombreuses; il a trouvé maint document précieux pour notre xvre siècle; car c'est un érudit patient et modeste qui rend, par ses publications, de grands services à l'histoire.

Maintenant nous insisterons encore sur les qualités d'écrivain qui se trouvent dans le volume dont nous rendons compte. Il y a de l'animation, de la vivacité dans le style; on sent revivre les luttes de nos pères; c'est le sentiment profond de la liberté, c'est l'amour du progrès qui inspirent ces pages. Voilà plus de qualités, et de qualités éminentes, qu'il n'en faut pour racheter quelquefois un peu de désordre dans l'exposition des événements. Nous aurions aimé que l'auteur divisât son livre par chapitres, afin de mieux en indiquer les diverses parties; nous aurions désiré que les dates fussent toujours et soigneusement indiquées, enfin nous croyons qu'une table générale des matières aurait été excellente pour bien faire ressortir les nombreuses recherches de l'auteur, et pour offrir au lecteur un aperçu de l'importance des faits rapportés dans cette histoire.

A. Lx.

VIE ET CARACTÈRE DE NAPOLÉON BONAPARTE,

PAR CHANNING ET ÉMERSON,

traduit de l'anglais, par François Van Meenen.

In-12, Bruxelles, chez tous les libraires.

Un mouvement littéraire bien remarquable s'est accompli en Amérique depuis le commencement de ce siècle; c'est surtout dans ces dernières années que ce mouvement a pris une exten

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