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ans,

tien dont le plus grand mérite peutêtre eft d'avoir élevé Théodofe à l'empire, & qui après un règne de huic mourut à vingt-quatre, vaincu à Paris & affaffiné à Lyon, eut auffi fes panégyristes. Le plus célèbre est Aufone. Il naquit à Bordeaux qui étoit alors l'Athènes des Gaules. Son père étoit Médecin ; & lui fut poëte & orateur. Il préféra l'art qui amufe & féduit l'imagination des hommes en leur parlant, à l'art utile & fouvent trompeur qui promet de les guérit. Nous favons qu'il enfeigna l'éloquence avec éclat. On eft intéreffé en tout pays, à chercher les hommes célèbres pour l'éducation des princes. Valentinien le donna pour précepteur à fon fils. Gratien fur le trône le fit d'abord Préfet des Gaules & d'Italie, & enfuite Conful. En le nommant à la feconde place de l'empire, il lui écrivit:j'acquitte ce que je dois,& je dois encore ce que j'acquitte. Aufone pour

remercier fon bienfaiteur, fon élève & fon prince, prononça alors le panégyrique de Gratien. Il s'en faut de beaucoup qu'il vaille celui de Théodofe que nous avons cité: il fembleroit qu'entre les deux il y a l'intervalle d'un fiècle. L'ouvrage n'a aucun mérite pour le fond; & à l'égard du style, il eft quelquefois ingénieux; mais fans goût, fans harmonie & fans grace. Ce n'eft prefque partout que des fons brifés & heurtés les uns contre les autres, un choc éternel de petites phra fes qui fe repouffent, des déclamations, des figures incorrectes, de l'exagération, enfin nulle nobleffe dans les fentimens. On diroit que l'orateur eft accablé fous le poids de l'honneur qu'il a reçu. Il ne favoit pas qu'il y a une fierté généreuse, qui honore le bienfaiteur même, & une baffeffe de reconnoiffance qui peut l'avilir. Par exemple, au milieu de fon discours, il fait un long commentaire fur la lettre

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que Gratien lui a écrite, fur chaque mot dont il s'eft fervi, fur la robe qu'il lui a envoyée, enfin fur ce qu'en le nommant Conful, il l'a nommé le premier & non pas le fecond. Je fais bien qu'il y a dans Cicéron même de ces petits détails de vanité. Mais dans l'orateur romain, ces foibleffes d'amour propre, font relevées par la beauté du style, par une éloquence harmonieufe & douce, par une certaine fierté de fentiment républicain qui s'y mêle, enfin par le fouvenir de fes grandes actions, & le parallèle qu'il fait fouvent de lui-même & de fes travaux avec ces Grands de Rome, endormis fous les images de leurs ancêtres fiers d'un nom qu'ils déshonoroient, inutiles à l'Etat & prétendant à le gouverner, rejettant tous les travaux, & afpirant à toutes les récompenfes. Il femble qu'un orgueil noble donne du reffort à la vanité, & lui communique un peu de fa grandeur. Mais ici on ne

trouve rien de pareil. C'eft un efclave peu éloquent qui remercie fon maître genoux. On n'a d'autres dédommagements que quelques épigrammes & des jeux de mots. Du refte tout eft pe tit, foible & barbare. Il faut plaindre un fiècle où avec de pareils ouvrages, on parvient cependant à être célèbre.

T

CHAPITRE XXIII.

Des Panégyriques en Vers, compofés par Claudien, & par Sidoine Apollinaire. Panégyrique de Théodoric, Roi des Goths.

TANDIS

ANDIS que dans l'Occident tout penchoit vers fa décadence, tandis que les malheurs de l'empire, les invasions des barbares, le mêlange des peuples, le defpotifme ou l'incapacité des princes, la terreur des fujets, l'efprit d'efclavage, le contrafte même de l'ancienne grandeur, qui ajoute tou jours à la petiteffe préfente, corrompoient le goût & retréciffoient à la fois les efprits & les ames; on vit paroître un homme né avec une imagination brillante & forte, & à qui peut-être, pour avoir les plus grands talens, il ne manqua que d'être né dans un autre fiècle. C'étoit Claudien. Je le nomme

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