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Le titre de son ouvrage est un mot grec. « In nomine patris et filii et spiritus sancti incipit liber ανταποδόσεως, id est retributionis regum atque principum partis Europæ, a Luidprando Ticinensis ecclesiæ diacone ¿v t εxuxλoσíq αúтoù, en ti echmalosia autu, id est in peregrinatione ejus ad Recemundum, Hispaniæ provinciæ Liberritanæ ecclesiæ episcopum editus. » Ce titre n'est pas pour donner grande confiance dans l'hellénisme de Luitprand. Le mot expaλosix offre deux fautes d'orthographe & mis pour x, λo pour λw, et la traduction latine qu'il en donne par le mot peregrinatione ne répond que par une figure au sens du mot grec (1).

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Au livre III, il explique la raison qui lui a fait choisir ce terme « Operis hujus titulum, pater sanctissime, satis te mirari non ambigo. Ais forte cum virorum illustrium actus exhibeat, cur avtanódоons antapodosis, ei inseritur titulus? ad quod respondeo : intentio hujus operis ad hoc respicit ut Berengarii hujus, qui nunc in Italia non regnat sed tyrannizat atque uxoris ejus Willæ, quæ ob immanitatem tyrannidis secunda Jezabel, et ob rapinarum insacietatem Lamia, proprio appellatur vocabulo, actus designet ostendat et clamitet... sit igitur eis præsens pagina antapodosis, hoc est retributio, dum pro calamitatibus meis y aseбetav asevian, id est impietatem eorum præsentibus futurisque mortalibus denudavero. »

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Luitprand avait appris le grec par l'usage plutôt que par principes. Voilà pourquoi il écrit d'une façon incorrecte, au point de vue de l'orthographe et de l'accent, le mot ἀνταπόδοσις sous cette forme ἀνταπόδοσης. Ce n'est pas le seul manquement à la loi de la prosodie. Tantôt il met les accents, juste quelquefois, à faux le plus souvent; là où il est embarrassé, il les supprime. On peut

(1) Ailleurs il fait de ce mot peregrinatio le synonyme de captivitas.

en voir la preuve dans l'édition de Pertz, qui a suivi avec le plus grand soin le manuscrit dont il est l'éditeur. Ce manuscrit présente cette particularité que les mots grecs ont été écrits par une main qui n'est pas celle qui a copié l'œuvre entière. Ces parties-là sont de la main de Luitprand lui-même (1).

Il serait trop long et trop fastidieux de recueillir toutes les expressions grecques dont l'évêque de Crémone a distingué sa narration latine. Nous en rapporterons quelques-unes. Au livre premier, il parle de Léon Porphyrogenète, il indique exactement l'origine de ce mot, «de domo quæ porphyra dicitur, non quia natus esset in purpura. Constantinus imperator, jussit ædificari domum illam tov oixov TOútov ton icon touton. » Nous rapportons fidèlement l'orthographe et l'accentuation de Luitprand.

Basilius της πτώχειας tis ptochias jugo, cum serviret igumeno id est abbati ηγούμενον.

Christus Basilio apparuit ita conveniens ίνα τί ἔσφαζες τὸν δεσπότην σου βασιλεα, ina ti esfases ton despotin su basilea.

L'empereur Léon dit à des soldats dont il met la fidélité à l'épreuve μη διλησεται (pour μὴ δειλιάσετε σε οὔτε μαντην οὔτε ονιροπολον, se ute mantin ute oniropolon.

Il cite le coq de Lucien καθώς ο Λουκιανος de quodam dicit quod dormiens multa reppererit, atque a gallo excitatus nihil invenerit.

Au livre second, il dit des Hongrois ἄθεοι καὶ ἀσεβοῖς XVTI TWV SXxpeίwv, athei ke asevis anti ton dacrion.

(1) Pertz, p. 270. « Luitprandi manui omnia fere græca una cum explicatione, quibus quidem spatium a scriba relictum erat; sed et alia debentur... unde facies codicis singularis, quam tabula adjecta exprimendam curavi, ita ut nigricante atramento exarata scribam, fusca Luitprandi manum ostendant. >

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Il rapporte en grec le passage d'une chanson faite sur le prince Adelbert, « Adelbertus, primo ætatis tempore miræ humanitatis, postea (1) factus tam diræ famæ ut hujusmodi vera de eo tam a majoribus quam a pueris cantio diceretur. Et quia sonorius est græce illud dicamus : Αδελβέρτος κόμης κουρτης, μακροσπάθης, γουνδοRIOTIC, Adelbertos comis curtis, macrospathis, gundopistis; quo significatur et dicitur, longo eum uti ense et minima fide.

Au livre III (2), il parle de Romain, Romanos TOYÓS tamen χρήσιμος εις την μαχην, is tin machin, χρησιμότατα chrisimotata, ετιμήθη όπως προτοκαραβος, etimithi opos protocaravos.

Il rapporte de ce général un trait singulier de bravoure. Une nuit qu'il faisait une reconnaissance contre les Sarrasins, il se trouvait près d'un marais couvert de roseaux, un lion en sort, poursuit une bande de cerfs, en prend un et le dévore. Le lion s'était réfugié dans un lieu couvert de roseaux. On y met le feu, mais le vent qui soufflait du côté opposé, laisse au lion une retraite où il peut encore se cacher. Romain marche à lui avec un seul suivant et le tue. La narration est toute entremêlée de grec. Luitprand semble rapporter un récit qu'on lui a fait. «Ρομανοσ δὲ τὸν αὐτῶν ψόφον ἀκουων ἐδειλίασεν σφόδρα, Romanos de tou auton psofon acuon ediliasen sfodra. Oppou de 6x0ews, orthru de vatheos, id est mane primo exsurgens, compertis vestigiis és euthéos, id est statim agnovit Romanos quid esset. Leone in arundineto commorante Pouzvos, græcum ignem, qui nullo præter aceti liquore extinguitur, undique per arundinetum jactare cœpit. Leo salvatur ab arundinibus, vento reflante, Romanos igne extincto acervum arundinum, comitante uno assecla, (1) Voir Pertz, p. 295.

(2) P. 307.

explorat. Gerit dextra ensem, læva pallium. Leo illos audit, non videt ob caligantes oculos п1⁄231⁄2 τ ××π para to capno quod est fumum, eos inter prosiliit. — Romanos non pavitat, ut etsi fractus caderet orbis, impavidum ruinæ ferirent ('). Pallium misit, quod leo discerpit dum intentus ad id, Romanos illum inter clunium juncturas ense percussit. Assecla jacebat pene mortuus, Romanos pede pulsans : έγειρε, ειπεν, άθλιε καὶ τα λεTopε, un poбou. Egire, ipen, athlie, ke talepore, mi λεπορε, μη φοβου. fobu, id est surge... ἐξεπλίσσοντο δὲ πάντες περὶ τοῦ Ρομάνου ταύτα ακουσαντες, exeplissonto de pantes peri tu Romanu tauta acusantes.- Unde factum est ut honorе олws XVTX τα πλοια Tλo opos panta plia ejus jussionnibus obedirent. » Nous apprenons de lui que Siméon le Bulgare s'appelait Emiargon, id est semi græcum, parceque dès son enfance il avait appris à Byzance la rhétorique de Démosthène et les syllogismes d'Aristote.

Il redit à propos du titre de Porphyrogenète, qu'être né dans la chambre de Porphyre est pour un prince une preuve de la légitimité de sa naissance, της γενέσεως δε αυτοῦ η αληθεία αυτή εστην, tis geneseos de autu alitia auti estin.

On le voit reprendre les épithètes d'Homère; il parle d'Hélène aux yeux bleus, glaucopis Helenæ ; d'Hélène aux bras blancs, leucolenon; d'une belle rançon xyλxx άπvя, aglaa apina id est præciosa dona. Dans le même endroit il désigne le cours d'une année par cette locution: Anni sinaxin; pour paraître en public, il dit : procedentes is tin prolempsim. Si son héros s'adresse à une assemblée il désigne ainsi ses auditeurs: EpiçavésTato nρwais, perifanestati, id est nobilissimi heroes.

En rapportant le supplice infligé à Gezo par le roi Hugues (2), il conte la fable suivante pour le féliciter

(1) Hor. dd. III, 3, 7.

d'avoir les yeux crevés: « ..... secundum Græcorum. fabulas, oculorum privatione vitam sibi protelavit, quæ multis ad perniciem usque in præsentem diem esse non desiit. Fabulæ vero ludum, cur ceci plurimum vivant, secundum grecorum ineptiam hic inseramus, quæ talis est : Ζευς καὶ Ηρα ήρισαν περὶ ἀφροδισιῶν, της πλείονα έχει ηδομας ἐν τῆ συνουσία και τότε Τιρεσίαν Εβρου υιον εζήτησαν. Οὗτος γὰρ εν ταις αμφοτέραις φύσεσοι μεταμορφώθη, επιδι δράκοντα ἐπατησεν. Οὗτος οὖν κατα της Ήρας απερκυνατο, καὶ Ηρα οργισθεῖσα ἐπήρωσεν αυτόν, Ζευς δὲ ἐχαρί σατο αυτῷ πολοίς ζῆσαι ετεσι, καί όσα ελεγεν μαντικα λεγειν. Zeus ke Ira irisan peri afrodision, tis pliona echi idomas en ti synusia, ke tote Tirésian Euru yon ezitisan, utos gar en tes amfoteres fysesi metamorfothi epidi draconta epatisen. Utos un cata tis iras apefkynato, ke ira orgisthisa epirosen auton, Zeus de echarisato auto polis zise etesi, ke osa elegen mantica legin.,

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Luitprand nous aurait rendu service s'il avait indiqué la source d'où il a tiré ce petit conte qu'il apprécie du reste à sa valeur. Mais on aimerait à voir par là quelles lectures ce singulier helléniste pouvait faire dans Constantinople. Cette phrase της πλείονα ηδομας, pour τίς πλειόνας ήδονάς, εβρου pour ευρου, cet autre verbe bizarre anεxpuvato, ce sont autant de bévues qui justifieraient l'opinion de Zambelios (1).

Luitprand n'a jamais été qu'un apprenti dans la langue des Grecs. Il nous offre pourtant avec son habitude de transcrire les textes en caractères romains, une preuve que la prononciation du Xe siècle n'était pas différente de celle que suivent encore aujourd'hui les Grecs modernes.

L'imperfection qu'on remarque dans la pose des

(1) Pertz pourtant n'hésite pas à dire : « Quo itinere Græcorum mores et instituta perspexit, et linguæ quoque et auctorum Græcorum notitiam haud mediocrem sibi comparavit. » T. III, p. 264.

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