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verbi gratia, ceu solis flammigeri et luculento lunæ specimine potiatur, id est, Theodoro infula pontificatus fungente, ab ipso tirocinio rudimentorum in flore philosophicæ artis adulto; nec non et ejusdem sodalitatis cliente Adriano duntaxat urbanitate enucleata ineffabiliter prædito (1).»

Nous trouvons dans Aldhelm les traces du savoir grec qu'il tenait de son maître (2). Il aime à mêler des mots grecs à son latin. On y lit au milieu d'une phrase ad doxan onomatis Cyrii; salpix, strophosus, orama, cephale, sont tirés de la même langue. C'est du reste un mérite que lui reconnaissent ses biographes. Guillaume de Malmsbury l'appelle: «Pusio græcis et latinis eruditus litteris. Faricius, moine du douzième siècle, reconnaît aussi qu'il était capable d'écrire et de parler le grec comme s'il était de cette nation : « Miro denique modo graiæ facundiæ omnia idiomata sciebat, et quasi Græcus natione scriptis et verbis pronuntiabat (3).»

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Edelwald, disciple favori d'Aldhelm, suit les exemples de son maître; comme lui, il croit enrichir son style en y mêlant des hellénismes, dans une de ses lettres rapportées par Ozanam, on lit : « Blandæ sponsionis Epimenia," plus loin : « Calamo perarante charaxatum medium (*).,

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On reconnaît dans ces contrées un groupe de disciples qui ne sont pas étrangers à l'érudition de leurs

(1) Usher Vet. epistol. hibernic. Sylloge. p. 26.

(2) Voir l'Epitre XIII, dans Usher p. 26, elle est de 690. Elle commence ainsi: Primitus (pantorum procerum), ce qui ne donne guère une bonne idée de son hellénisme; p. 28, on lit Cata evangelicæ experimentum auctoritatis. A l'épitre XIV d'Adamanni Hensis, monasterii abbatis. - P. 29, dans Usher, on voit: nec ob aliqua scoticæ, vilis videlicet linguæ, aut humana onomata. p. 30, ad evitandum fastidium lectorum, sicut caraxata. Ce peu de science était d'autant plus estimable qu'on voit dans la lettre XVI, p. 37, l'ignorance d'un prêtre qui baptisait ainsi : Baptizo te in nomine patria, et filia et spiritu sancta.

(3) Ozanam. ibid. p. 492-490.- Mai, Classici auctores, t. V. Usher. Veter. Epist. Syll.

() Ibid. p. 494 n. 1. Apud Bonifacii epistol. edit. Würdtwein.

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maîtres. L'auteur de la Civilisation chrétienne chez les Francs relève dans une lettre de Boniface à Nidhard son ami, les mots grecs que voici: « Et hac de re aurilegi Ambrones apo ton grammaton agiis frustatis..." plus bas: <quia cata psalmistam. » Nous n'oserions pas dire avec Ozanam que les élèves surpassaient leurs maîtres, ni qu'ils avaient un savoir bien étendu et bien profond, mais nous ferons remarquer après lui qu'on rencontre des poèmes écrits en trois langues entremêlées, le grec, le latin et l'Anglo-Saxon:

Ac he ealue sceal

Boethia biddan georne,
Thurh his modes gemind
Micro in cosmo

Thæt him Drihten gyfe
Dinamis en earthan

Fortis factor

That he forth simle.

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Quand Aldhelm mourut en 709, Bède, né en 672, était déjà en état de lui succéder. Elevé dans le cloître de Jarrow, succursale de l'abbaye de Wearmouth, sous la conduite de Benoît Biscop, il y ensevelit sa vie, « trouvant, dit-il, une grande douceur à ne jamais cesser d'apprendre, d'enseigner et d'écrire. » Sa grande érudition est connue. Ce qu'il nous importe de faire observer, c'est que ses biographes ne manquent pas de parler de ses connaissances dans la langue grecque (').

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(1) Voici quelques détails recueillis sur les moines de Saint-Gall, dans Basnage, p. 190. Thesaurus monumentorum Ecclesiasticorum et historicorum, etc., etc., a Jacobo Basnagio. Antverpiæ 1725. t. I, pars tertia.

Versus Hartmani monachi S. Galli ante evangelium canendi :
...Clausa tenentes stomata...

P. 198. Sæculo, IX. Anno, 894. Notker Lantberto fratri salutem, quid singulæ litteræ in superscriptione significent Cantilenæ, prout potui, juxta tuam petitionem, explanare curavi.

V. Licet amissa in sua, veluti valde Vau Græca, vel hebræa velificat. Z. Vero licet et ipsa mere Græca, et ob id haud necessaria Romanis... In sua lingua Zitîse require.

...Salutant te Ellenici fratres; monentes te fieri de ratione embolismi

Sixte, de Sienne, dit ceci : « Omnigena scientiarum eruditione instructus, grammaticus Græce non minus quam latine peritus, poeta, rhetor, historicus, etc., etc. » Jean Basle ('), d'après Blount, fait de lui cet éloge : « Physicen et Mathesin, non a rivulis sordidis, sed ex purissimis fontibus, hoc est ex Græcis et latinis auctoribus primus hausit.... Ut ob exactam utriusque linguæ, latinæ et græcæ, peritiam, magno illo Gregorio a multis præclarior haberetur. "

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Bède, en effet, ne pouvait se passer de savoir le grec, quand il entreprenait de résumer, dans son traité de la Nature des choses, non-seulement la cosmographie de Pline, mais encore celle de Ptolémée. Ses écrits grammaticaux prouvent aussi qu'il étudia cette langue. Ainsi, les écoles Anglo-Saxonnes continuèrent la mission commencée au septième siècle par les Irlandais.

Ceux-ci n'avaient pas oublié les études qui leur avaient été si chères. Ils les transportèrent dans d'autres régions. Au huitième siècle, on remarque parmi les Irlandais lettrés, Saint Virgile, évêque de Salzbourg. Le roi Pépin, suivant le chroniqueur Wiguleus Hundius (2) voulut le voir, et, charmé de sa merveilleuse érudition, il le garda deux ans auprès de lui. L'archevêque de Mayence, Boniface, et le pape Zacharie, n'eurent pas la même admiration pour son grand savoir ils s'en effrayèrent, et l'Irlandais Virgile parut devant un concile comme auteur d'une doctrine perverse. On l'accusait d'avoir affirmé, sur le témoignage des grecs,

triennis, ut absque errore gnarus esse valeas biennis contempto precio divitiarum Xerxis.

Notkerus... ex Græco vertit libros perihermenias Aristotelis.

P. 211. Anonymi:

Pneumatis æterni Deus adsit gratia nobis.

P. 231. Olim in quodam clinodio templi hi erant versus:

Tertius hæc ayn Salomon dat dona Mariæ....

(1) Jean Basle, voir Hederiche. p. 875. Notitia auctorum antiqua et media. Wittenberg, 1714.

(*) Usher. Sylloge, p. 34.

l'existence des antipodes ('). Parmi les compagnons de Virgile, on cite maître Dobdan, surnommé le Grec. Evêque coadjuteur de Salzbourg, puis évêque de Chiemsée, il ouvrit une école publique dans cette ville, et il y attira une foule nombreuse d'auditeurs, « agmina discentium quam plurima habuit. »

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Un autre Irlandais, Malrachanus, est un grammairien habile. Ce qu'il y a de curieux, ce n'est pas qu'il cite Donat et Virgile de Toulouse, c'est a qu'il va toujours du grec au latin, et qu'expliquant tour à tour les procédés des deux langues, il les enseigne à la fois l'une et l'autre par d'ingénieux et subtils rapprochements (*). » Ainsi, dans les études des Irlandais, ce qui domine, même au huitième siècle, c'est l'hellénisme, c'est là ce qui leur donne un tour et un génie particulier qui commence à disparaître du reste de l'Occident. C'est donc à eux que revient l'honneur d'avoir conservé la tradition grecque, c'est à eux qu'il revenait de la renouer dans notre pays, lorsque, sous Charlemagne, commence à paraître un rayon naissant de politesse, comme dit Fénelon.

XV.

Le moine de Saint-Gall, un des historiens de Charlemagne, raconte, à peu près vers l'an 800, que deux moines d'Irlande descendirent un jour sur la côte de France avec des marchands étrangers. Les deux voyageurs s'établissent sur une place publique. Ils n'ont

(') Hauréau, p. 17.

(2) Hauréau, p. 19.

Ars Malrachani. Ms. de Saint-Germain-des-Prés, n° 1,188. Cet ouvrage incomplet commence par ces mots : Verbum est pars orationis cum tempore et persona sine casu. — - Ce manuscrit est du IX. siècle.

point étalé de marchandises, mais, à la foule qui les entoure et que la singularité de leur costume étonne, ils crient « Si quelqu'un veut acheter la science, qu'il vienne à nous, nous en vendons. » Charlemagne, instruit de leur prétention, les fait venir, les interroge, les trouve très-savants, et les retient à sa cour pour instruire la jeunesse de son Empire. Ozanam (1) établit que l'un de ces marchands s'appelait Dungal. C'est lui que Charlemagne envoya à Pavie pour enseigner au monastère de Saint-Augustin et réunir autour de lui tous ceux qui voudraient étudier. Son existence est attestée par cette phrase de l'édit de Lothaire: «Primum in Papia conveniant ad Dungalum, de Mediolano, de Brixia, de Laude, etc. (2); par l'épigraphe suivante d'un manuscrit offert au monastère de Bobbio :

Sancte Colomba, tibi Scoto tuus incola Dungal
Tradidit hunc librum, quo fratrum corda secutus.

et par cette autre indication retrouvée dans un catalogue de Bobbio : « Item de libris quos Dungalus præcipuus Scottorum obtulit beatissimo columbano (3). »

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L'autre marchand s'appelait Clément. Le roi l'établit dans la Gaule et lui confia un grand nombre d'enfants de la plus haute noblesse, des moindres familles et des plus humbles. Clément était grammairien, il portait le surnom d'Hibernien. Le catalogue des livres d'Angleterre et d'Hibernie Catalogus librorum Angliæ et Hiberniæ, publié à Oxford en 1697, désignait parmi les manuscrits de Vossius l'ouvrage suivant: Excerpta

(') Ibid. 512.-Usher. Præfatio. «Qui, cum in occidui mundis partibus solus regnare cœpisset, et studia litterarum ubique propemodum essent in oblivione, contigit duos Scotos de Hibernia cum mercatoribus Britannis ad littus Galliæ devenire, viros et in secularibus et in sacris scripturis incomparabiliter eruditos. Qui, cum nihil ostenderent venale, ad convenientes emendi gratia turbas clamare solebant: Si quis sapientiæ cupidus est, veniat ad nos, et accipiat eam; nam venalis est apud nos.....> (2) Apud Muratori, Script. rer. Ital. t. I, p. 2, p. 151. (~) Ozanam. p. 513, en note.

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