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devoirs écrits, la suppression, dans les récitations, des traités de grammaire et de prosodie, nous laisseront du temps disponible dans la classe et hors de la classe. On emploiera ce temps, dans la classe, à la lecture et à l'explication des auteurs latins et grecs, et à une étude plus sérieuse de la langue et de la littérature françaises; hors de la classe, à la préparation des auteurs et à la lecture.

Nous supprimerons, dans toutes les classes, les compositions et les prix de vers latins, et nous ne conserverons les compositions en thèmes que jusqu'à la cinquième inclusivement. En revanche, nous aurons, à partir de la quatrième, des compositions et des prix de langue et de littérature françaises. La réunion des professeurs de lettres arrêtera un programme pour que cet enseignement soit bien gradué. Des lettres, des récits, des jugements sur un événement ou sur un livre valent mieux, même en rhétorique, que des sujets de discours. Nos élèves ne doivent point oublier qu'il ne faut jamais parler pour parler, écrire pour écrire, mais parler ou écrire pour raconter un fait ou exprimer une idée juste.

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En ce moment, toutes nos compositions sont écrites. Il faut revenir au système des examens, plus employés autrefois qu'aujourd'hui, et qui ont l'avantage de tenir les élèves en haleine et de les obliger au sang-froid et à la présence d'esprit. Il y aura, dans chaque classe, quatre examens par an. Vous pourrez, si vous le jugez convenable, y appeler les parents. Ces examens rouleront sur l'explication et la traduction des auteurs grecs, latins, français, anglais ou allemands.

Ils seront faits par deux professeurs, sous la présidence du Recteur, d'un inspecteur d'académie, du proviseur ou du censeur. Le Recteur de l'académie nommera le président et les assesseurs pour chaque classe. Il regardera comme un devoir de présider lui-même une des commissions. Les résultats des quatre examens donneront lieu à un premier et à un second prix, qui seront décernés en séance publique, immédiatement

après les prix d'excellence; le prix de langue et de littérature françaises viendra ensuite, et les anciens prix dans l'ordre accoutumé.

Puisque je parle de prix et d'examens, je veux vous dire un mot de deux points importants: les concours généraux et les examens de passage d'une classe à l'autre.

On a, je le crains, abusé des concours généraux dans ces derniers temps. On les a multipliés jusque dans les écoles primaires. Ce sont des pertes de temps, des dépenses; quelquefois, malgré les soins que l'on prend, des occasions d'injustices et des termes de comparaison assez contestables. Lorsque les maîtres en viennent à désirer passionnément un succès et à dresser des élèves pour les concours, ils ne rendent pas grand service aux élèves qu'ils préparent dans ces conditions, et ils négligent le reste de la classe. Les véritables concours, qui pourraient nous dispenser de tous les autres, sont les examens de baccalauréat et les concours d'admission aux écoles. Je ne prends, à ce moment, aucune résolution sur ce sujet; mais je recevrai volontiers vos observations, Monsieur le Proviseur, et celles de l'assemblée des professeurs.

Des examens pour le passage d'une classe à l'autre dans les lycées ont été établis par le statut du 4 septembre 1821. L'importance en a été rappelée, des prescriptions nouvelles ont été faites dans l'arrêté du 29 juin 1838, dans le décret du 10 avril 1852 et dans les circulaires et arrêtés du 30 août 1852, du 13 mars 1855 et du 12 août 1857. Ces examens ont à mes yeux une importance capitale. En effet, pour qu'une classe soit bien faite, il faut que tous les élèves présents soient en état de la suivre. Les enfants qui remplissent les derniers bancs, et qui, faute de préparation antérieure, ne comprennent plus ce qui se dit devant eux, détournent l'attention de leurs camarades, découragent le professeur et le réduisent trop souvent aux fonctions d'un surveillant. Mais ce qui est encore plus grave, c'est de ne pas avertir les familles de l'incapacité ou de la mauvaise conduite de leurs enfants. Prévenu à temps, un père renoncerait à pousser son fils jusqu'au Baccalauréat; il le mettrait dans l'industrie, dans le commerce, et ne s'épuiserait pas en sacrifices inutiles pour entretenir un écolier paresseux et

préparer à la société le pire des parasites, un ignorant présomptueux. Je sais bien qu'en se montrant sévère, on risque de diminuer le nombre des élèves; mais cette raison d'indulgence, qui n'est honnête nulle part, ne saurait exister dans les établissements de l'État, entretenus en grande partie aux frais du public, pour servir de modèles aux institutions privées et pour maintenir le niveau des études. J'entends donc qu'à la suite du dernier examen public, les élèves reconnus incapables soient maintenus dans la classe inférieure ou impitoyablement exclus du lycée. Le jury adressera son rapport au Recteur, et le Recteur, quand il s'agira d'une exclusion, en référera au Ministre. Les boursiers seront, comme les autres, assujettis à cette règle. L'État, qui leur donne l'éducation gratuitement, ne peut pas dépenser en vain des ressources qui sont dues à des sujets plus méritants; et, de même qu'il prescrit de ne conférer des bourses qu'après un examen de capacité, il doit veiller aussi à ne les maintenir qu'à la condition que l'on continue à s'en rendre digne.

Je vous écrirai prochainement, Monsieur le Proviseur, au sujet des maîtres répétiteurs; je fais en ce moment des essais dont je veux vous rendre compte. Je rencontre des difficultés; mais j'y mettrai de l'opiniâtreté, car il s'agit des plus grands intérêts de notre famille universitaire. Quelle que soit notre passion pour le progrès des sciences et des lettres, et pour l'amélioration de l'instruction, l'éducation proprement dite, l'éducation morale de nos enfants, demeure le principal objet de votre sollicitude et de la mienne.

Veuillez agréer, etc.

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