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époques marquées par trois langues distinctes.

La langue divine s'adresse d'abord à tous les hommes et leur révèle l'existence de Dieu; la symbolique est la langue de tous les peuples, comme la religion la propriété de chaque famille; le sacerdoce n'existe point encore; chaque père est roi et pontife.

La langue sacrée prend naissance dans les sanctuaires, elle règle la symbolique de l'architecture, de la statuaire et de la peinture, comme les cérémonies du culte et les costumes des prêtres : cette première matérialisation emprisonne la langue divine sous des voiles impénétrables.

Alors la langue profane, expression matérielle des symboles, est la pâture jetée aux nations livrées à l'idolâtrie.

Dieu parle d'abord aux hommes la langue céleste contenue dans la Bible et les plus anciens codes religieux de l'Orient; bientôt les fils d'Adam oublient cet héritage, et Dieu redit la parole sous les symboles de la langue sacrée; il règle les

costumes d'Aaron et des lévites et les rites du culte; la religion devient extérieure, l'homme veut la voir, ne la sentant plus en soi.

Dans le dernier degré de corruption, l'humanité ne comprend que la matière; alors le Verbe divin revêt un corps de chair pour faire entendre dans la langue profane comme un dernier écho de la vérité éternelle (1).

L'histoire des couleurs symboliques témoigne de cette triple origine, chaque nuance porte des significations différentes dans chacune des trois langues divine, sacrée et profane.

Suivons rapidement le développement historique de ces symboles.

(1) Observons ici la voie des hommes et celle de Dieu. Dans l'Iran domine l'idéalisme pur : les anciens Perses, d'après Hérodote, n'avaient point de temples; dans l'Inde apparait le spiritualisme dogmatique; en Egypte le rationalisme humain, et en Grèce le sensualisme. Telle est la marche rétrograde de l'esprit humain ; tandis que Dieu, recommençant l'œuvre dénaturée, rend la vérité aux hommes par la vocation d'Abraham, par la mission du peuple israélite; et par le Christianisme, se révélant d'abord à une seule famille, il initie bientôt une nation pour appeler à lui l'humanité.

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Les plus anciennes traditions religieuses nous apprennent que les iraniens assignaient à chaque planète une influence bienfaisante ou maligne d'après leur couleur et leur degré de lumière.

Dans la Genèse Dieu dit à Noë: L'arc-enciel sera le signe de l'alliance entre moi et la terre. Dans la mythologie, Iris est la messagère des dieux et des bonnes nouvelles, et les couleurs de la ceinture d'Iris, l'arc-en-ciel, sont les symboles de la régénération qui est l'alliance de Dieu et de l'homme.

En Égypte, la robe d'Isis étincelle de toutes les couleurs, de toutes les nuances qui brillent dans la nature; Osiris, le dieu tout-puissaut, lui donne la lumière; Isis la modifie et la livre aux hommes en la réfléchissant. Isis est la terre, et sa robe symbolique était le hiéroglyphe du monde matériel et du monde spirituel.

Les Pères de l'Église, ces platoniciens du christianisme, voient dans l'Ancien-Testament les symboles de la nouvelle alliance; si la religon du Christ est de Dieu, si les enfans d'Abraham reçurent la parole

sainte, les deux tables de la loi mosaïque et chrétienne durent s'unir dans une commune pensée. Joseph fut un symbole du Messie, et cette robe, diaprée des plus belles nuances que lui donna son père, était, dit saint Cyrille, l'emblème de ses attributs divins.

Tels étaient les symboles de la langue divine, lorsque la langue sacrée prit nais

sance.

Les arts naquirent de la religion. Ce fut pour orner les temples et les enceintes sacrées que la sculpture et la peinture firent leurs premiers essais: ce fait s'applique non seulement à l'histoire du genre humain, mais se retrouve vrai à l'origine de chaque peuple. Dans les plus anciens monumens de l'Inde et de l'Égypte, comme dans ceux du moyen-âge, l'architecture, la statuaire et la peinture, sont les expressions matérielles de la pensée religieuse. La peinture chez les Hindous, les Égyptiens, et, encore de nos jours, chez les Chinois, puisa ses règles dans le culte national et les lois politiques; la moindre

altération dans le dessin ou le coloris éntraînait une grave punition.

Chez les Égyptiens, écrit Synesius, les prophètes ne permettent point à ceux qui fondent les métaux, ni aux statuaires, de représenter les dieux, de peur qu'ils ne s'écartent des règles.

«

<«< Dans les temples de l'Égypte, dit

Platon, on n'a jamais permis et on ne << permet pas encore aujourd'hui, ni aux << peintres, ni aux autres artistes qui font « des figures ou d'autres ouvrages sem<«< blables, de rien innover, ni de s'écarter << en rien de ce qui a été réglé par les lois « du pays; et si on veut y faire attention <«< on trouvera chez eux des ouvrages de

peinture et de sculpture faits depuis dix <«< mille ans (quand je dis dix mille ans, ce <«< n'est pas pour ainsi dire mais à la lettre), « qui ne sont ni plus ni moins beaux que << ceux d'aujourd'hui, et qui ont été tra« vaillés sur les mêmes règles » (1).

A Rome on encourait la peine de mort en revêtissant ou vendant une étoffe de

(1) Les lois de Platon, liv. II.

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