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HARVARD COLLEGE

JUN 16 1920

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DES

COULEURS

SYMBOLIQUES.

L'histoire des couleurs symboliques, encore ignorée, et dont je n'offre que quelques fragmens, servira peut-être à déchiffrer les hiéroglyphes de l'Égypte, et à dévoiler une partie des mystères `de l'antiquité. Je ne me flatte pas d'avoir atteint le but dans ces recherches; ma seule ambition a été de fixer l'attention des savans sur le point le plus négligé et l'un des plus curieux de l'archéologie.

Les couleurs eurent la même signification chez tous les peuples de la haute antiquité; cette conformité indique une commune origine qui se rattache au berceau de l'humanité, et trouve sa plus haute énergie dans la religion de la Perse; le

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dualisme de la lumière et des ténèbres offre, en effet, les deux types des couleurs qui devinrent les symboles des deux principes bienfaisant et malfaisant. Les anciens n'admettaient que deux couleurs primitives, le blanc et le noir, dont toutes les autres dérivaient; de même les divinités du paganisme étaient des émanations du bon et du mauvais principe.

La langue des couleurs, intimement unie à la religion, passe dans l'Inde, en Chine, en Égypte, en Grèce, à Rome; elle réparaît dans le moyen-âge, et les vitraux des cathédrales gothiques trouvent leur explication dans les livres zends, les Vedas et les peintures des temples égyptiens.

L'identité des symboles suppose l'identité des croyances primitives; à mesure qu'une religion s'éloigne de son principe, se dégrade et se matérialise, elle oublie la signification des couleurs, et cette langue mystérieuse reparaît vivante avec la vérité religieuse.

Plus on s'élève vers l'origine des religions, et plus la vérité apparaît dépouillée de l'alliage impur des superstitions hu

maines; elle brille du plus vif éclat dans l'Iran, patrie des premiers hommes. << Les << Iraniens, d'après Mohsen Fany, croyaient « fermement qu'un Dieu suprême avait «< créé le monde par un acte de sa puis<< sance, et que sa providence le gouyer<< nait continuellement. Ils faisaient pro« fession de le craindre, de l'aimer, de << l'adorer pieusement, d'honorer leurs « parens et les personnes âgées ; ils avaient « une affection fraternelle pour toute « l'espèce humaine, et pour les ani«< maux mêmes une tendresse compatis«< sante » (1).

Le culte de l'armée céleste, le sabeïsme, vint obscurcir ces dogmes sublimes sans les anéantir; ils se conservèrent dans le Desatir et le Zent-Avesta; et, si la vérité fut cachée aux regards des profanes, on la retrouve encore sous les symboles de ces livres sacrés.

Plus une religion vieillit, plus elle se matérialise : de dégradation en dégrada

(1) Dabistan et les Recherches asiatiques; traduction tom. II, p. 98.

tion, elle arrive au fétichisme; le culte des nègres est la dernière expression des dogmes de l'Éthiopie et de l'Égypte (1). Déjà, au temps de Moïse, la religion égyptienne montrait tous les élémens de décrépitude et de dissolution; le symbole était devenu Dieu; la vérité, oubliée du peuple, était exilée dans les sanctuaires, et bientôt les prêtres eux-mêmes devaient perdre la signification de leur langue sacrée; que l'on applique ces principes à l'Inde et à ses brahmes abâtardis, à la Chine et à ses bonzes honteux, à tous les cultes, au mosaïsme, à ces Juifs qui sacrifièrent aux idoles des étrangers.

Cette loi fatale de l'humanité explique la nécessité de révélations successives; le mosaïsme et le christianisme sont divins par le seul fait que l'intervention de la

(1) Les dieux des Égyptiens, des Phéniciens, des Cananéens, etc., étaient, comme ceux des nègres, de petites idoles appelées Ptha, Phetic, Phateiq, dont les Grecs firent le nom de pataïques, et qui, se conservant sans altération chez les nègres, est exactement leur mot fétique ou fétiche. (Cours de Gébelin. Monde primitif, tom. VIII.)

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