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que ledit nombre de cops se puist fournir dans la journée, à telles reprinses que je lui deviseray, et pareillement de tant de cops de hache que deviser me vouldra. Mais pour les haches se pourra armer chascun comme il lui plaira. Et s'il advenoit aussi, que jà ne puist advenir, que en faisant lesdictes armes l'un de nous deux feust blécié tant que pour la journée les armes ne peussent estre parfaictes, qui adonc seroient emprinses par nous deux, l'autre ne seroit en riens tenu de le actendre pour les parfaire, ains seroit quicte d'icelles. Et quant je auray acompli ce que dessus est dit ou que le jour sera passé, je, avec l'aide de Dieu, de Nostre-Dame, de monseigneur Saint George et de ma dame, me partiray de ladicte ville, se je n'ay essoine de mon corps, pour aler à Saint-Jacques en Galice. Et tous les gentilz hommes de la condicion dessusdicte, que je trouveray moy alant oudit voyage et retournant, jusques en la dessusdicte ville de Coucy, qui me vouldront faire tant de honneur et de grace de me délivrer de pareilles armes cy-dessus devisées, à cheval, et me bailler juge raisonnable sans me eslongner de mon droit chemin plus de vingt lieues, ne me reculer du chemin, et me affermer que le plaisir du juge soit tel que lesdictes armes soient commencées dedens cinq jours que je seray venu en la ville où les armes se devront faire, je, à l'aide de Dieu et de ma dame, si je n'ay loyale essoine de mon corps, quant il me auront acompli mon emprinse les délivreray prestement à pié et par la manière cy-dessus devisée, de tel nombre de cops d'espée, de hache et de dague qu'ilz me auront voulu deviser quant ilz commencèrent à acomplir ma dessusdicte entreprinse.

Et s'il advenoit que ung gentil homme et moy feissions accord à faire lesdictes armes, et me eust donné juge comme cy-dessus est devisé, et en alant devant le juge en trouvasse ung autre qui me voulsist faire les armes pareillement et donner juge plus près de moy que le premier, je araie toujours à aler premièrement délivrer cellui qui plus près juge me donroit, et quant je seroie quicte de lui, je retourneroie à l'autre pour fournir ce que accordé aurions ensemble, se je n'avoie essoine de mon corps; et ainsi pareillement faire tout le voiage durant. Et seray quicte devant chascun juge pour faire une fois lesdictes armes. Et ne pourra, ung gentil homme que une fois faire armes avecques moy tout le chemin durant. Et aurons bastons paraulx de longueur pour faire lesdictes armes qui se feront, laquelle longueur je bailleray quant je en seray requis. Et seront tous les cops de toutes lesdictes armes qui se feront, depuis le bort des plates dessoubz en amont. Et afin que tous gentilz hommes qui auront voulenté de me délivrer puissent sçavoir mon chemin, j'ay intencion, au plaisir de Dieu, de passer par le royaume de France et de là tirer à Bordeaulx et puis ou pays du conte de Foix, de là ou royaume de Castille, et puis à monseigneur saint Jacques. Et au retourner, s'il plaist à Dieu, repasseray par le royaume de Portingal, et de là ou royaume de Valence, ou royaume d'Arragon, en Cathelongne, en Avignon, et puis rapasseray parmi le dessusdit royaume de France, pourveu que je puisse par les dessusdiz pays seurement passer sans avoir empeschement et portant ceste présente emprinse, excepté ceulx du royaume de France et ceulx du pays de Haynau. Et afin que ceste emprinse

soit tenue véritable, j'ay mis le seel de mes armes à ceste présente lectre pour acomplir ce que dessus est escript et signé de ma main. Qui fut faicte en l'an de l'Incarnacion Nostre Seigneur mil quatre cens et deux, le premier jour du mois de juing. »

Lequel séneschal dessusnommé, pour fournir et acomplir son emprinse ala à Coucy, selon le contenu de ses lectres cy-devant escriptes, et là, fut par le duc d'Orléans très joieusement reçeu'. Mais audit jour ne comparut homme pour faire armes contre lui. Et pour tant, un peu de jours ensuivans se parti de là pour aler ou voiage de Saint-Jacques ainsi que promis l'avoit. Durant lequel voiage il fist armes en sept lieux et par sept journées avant son retour. Auxquelles, à toutes les foiz, il se porta si vaillamment et si honnorablement que tous les princes qui estoient juges d'icelles armes furent contens de sa personne.

CHAPITRE IX.

Comment Loys, duc d'Orléans, frère du roy de France, envoya lectres au roy Henry d'Angleterre pour faire armes, et de la response qu'il eut.

En l'an mil quatre cens et deux, Loys, duc d'Orléans, frère du roy de France, envoia unes lectres pour faire armes, au roy Henry d'Angleterre, dont la

teneur s'ensuit:

« Très hault et puissant prince, Henry, roy d'Angleterre, je, Loys, par la grace de Dieu, filz et frère de France, vous escrips et faiz savoir par

des

roys

1. L'an 1400, le duc d'Orléans avait acheté la seigneurie de Coucy de Marie de Coucy, veuve de Henri, duc de Bar.

moy, qu'à l'aide de Dieu, de la benoiste Trinité, pour le désir que j'ay de venir à honneur, l'emprinse que je pense que vous devez avoir pour venir à proesse en regardant l'oisiveté en quoy plusieurs seigneurs se sont perdus, extrais de royale lignée, quant en fais d'armes ne s'emploient, jeunesse qui mon cuer requiert d'emploier en aucuns fais pour acquérir honneur et bonne renommée, me fait penser à, de présent, commencer à faire le mestier d'armes. Plus honnorablement ne le pourroie acquérir, tout regardé, que d'estre en lieu, à ung jour advisé tant de vous comme de moy, et en une place comme nous feussions nous deux acompaignez de cent, tant chevaliers que escuiers de nom et d'armes et sans aucun reprouche, tous gentilz hommes, et nous combatre jusques au rendre. Et, à qui Dieu donra la grace d'avoir la victoire, le jour, chascun chez soy comme son prisonnier pourra mener son compaignon pour en faire sa voulenté. Et si ne porterons sur nous quelque chose qui tourne à sort ou invocacion quelconques qui de l'Eglise soit défendue. Et n'y aura traict en ladicte bataille, fors que chascun se aidera du corps que Dieu lui a presté, armé comme bon lui semblera, tant à l'un costé comme à l'autre, pour sa seureté, aians bastons acoustumez. C'est assavoir lance, hache, espée et dague, et chascun de tel avantage comme besoing et mestier sera pour sa seureté et pour soy aider, sans avoir alènes, broches, crocqs, poinçons, fers barbelez, aguilles, pointes envenimées, ne rasoirs; comme pourra estre advisé par gens en ce congnoissans, qui seront à ce ordonnez tant d'une partie comme d'autre, avec toutes les seuretez qui en ce cas sont neccessaires.

Et pour venir à l'effect d'icelle journée desirée, je vous fais assavoir, qu'à l'aide de Dieu, de Nostre Dame et de monseigneur saint Michel, vostre voulenté sceue, je vouldroie bien estre, acompaigné du nombre dessusdit, en ma ville et cité d'Angoulesme, pour acomplir à l'aide de Dieu ce que dit est. Or m'est advis, que se vostre courage est tel que je pense pour ce fait acomplir, vous pourrez venir jusques à Bordeaulx, et là, ès marches nous deux nous trouverons, pour oultrer nostre journée qui pourra estre advisée tant de vos gens comme des miens commis à ce aians pleine puissance comme se nous y estions en nos propres personnes. Très hault et puissant prince, mandez moy et faictes savoir en ce cas vostre voulenté pour acomplir les choses dessusdictes, et vueillez abréger le temps de en mander vostre plaisir. Car je pense que vous povez savoir que en tous faiz d'armes bien advisé le plus brief compte est le meilleur, principalement et généralement aux roys, aux princes et aux seigneurs, et en advisant tant par mandemens comme par escrips en ceste emprinse n'en pourroit venir entre vous et moy que empeschement de fais neccessaires qui sont ou pevent estre en noz mains. Et pour ce, afin que Vous sachez et congnoissez que ce que je vous escrips et mande je vueil acomplir à l'aide de Dieu, je me suis soubscript de ma propre main, et si ay seellé de mes propres armes ces présentes lectres, en mon chastel', escriptes le vire jour du mois d'aoust, l'an mil quatre cens et deux. »

1. Le ms. Suppl. fr. 93, ajoute de Couchy, Couci.

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