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vostre voulenté par Chalon le hérault, porteur de ces présentes; lesquelles, pour y adjouster plus grant foy, j'ay seellées et signées à Paris, l'an mil quatre cent et quatre. »

Lesquelles lectres, ainsi envoiées de l'une partie à l'autre, finalement, quant au fait, rien n'en fut exécuté, ne mis à effect.

CHAPITRE III '.

Comment les grans pardons furent à Romme.

En cest an, cest assavoir l'an mil quatre cens, furent les grans pardons à Romme, ausquelz alèrent pour acquérir le salut de leurs âmes, infinies personnes de toutes les parties de chrestienté. Et durant lequel temps régna très-grant mortalité universelle, dont, entre les autres, moururent plusieurs légions de pèlerins alans audit lieu de Romme'.

1. L'intitulé de ce chapitre ne se trouve ni dans notre manuscrit, ni dans celui qui porte le n° 8345. Mais il existe, tel qu'on le donne ici, dans le ms. Suppl. fr. 93, et dans tous les imprimés.

2. Godefroi a donné dans son Charles VI (p. 599), une ordonnance de l'an 1400, qui défend ce pèlerinage de Rome. Au reste la peste ne fut pas le seul fléau qui atteignit les pèlerins. Ils furent dépouillés de tout par les bandes qui parcouraient la campagne de Rome. (Voy. Raynaldi, Ann. Eccl., t. VIII, p. 65.)

DE L'AN MCCCCI.

[Du 3 avril 1401 au 26 mars 1402.]

CHAPITRE IV.

Comment Jehan de Montfort, duc de Bretaigne, mourut; et du partement de l'empereur de Constantinoble de Paris; et le retour de la royne d'Angleterre.

Au commencement de cest an1 mourut Jehan de Montfort, duc de Bretaigne, auquel succéda Jehan, son filz, qui avoit espousé la fille du roy de France, et avoit plusieurs frères et seurs. Ouquel temps l'empereur de Constantinoble, qui avoit esté grant espace de temps en la cité de Paris, aux despens du roy de France, se parti, à tous ses gens, et s'en ala en Angleterre, où il fut moult honnorablement receu du roy Henry et de tous ses princes, et de là s'en retourna en son pays'.

Et adonc plusieurs notables ambaxadeurs, par diverses fois, furent envoiez de France en Angleterre et

1. Au commencement de cest an, c'est-à-dire 1401. Cette date n'est pas exacte. Jean IV, duc de Bretagne, fils de Jean de Montfort, et de Jeanne de Flandre, mourut le 1er novembre 1399. Jean V, son fils aîné, avait épousé Jeanne de France, fille de Charles VI. Il avait pour frères, Artur, comte de Richemont, qui fut duc de Bretagne, en 1457, et Gilles de Bretagne, mort en 1412. Ses sœurs étaient: Marie, femme de Jean, comte d'Alençon, Marguerite et Blanche.

2. Manuel Paléologue avait fait sa première entrée dans Paris, le 3 juin 1400, de là il était passé en Angleterre, en septembre, même année, puis était revenu à Paris le 28 février 1401.

d'Angleterre en France, pour traicter principalement que le roy d'Angleterre voulsist renvoyer la royne Ysabel, fille du roy de France, jadis femme du roy Richard', et avecques ce qu'il la laissast joyr et posséder du douaire qui enconvenancé lui avoit esté au traictié du mariage. Lesquelz ambaxadeurs, après plusieurs traictiez' en fin vindrent à conclusion, et fut celle royne ramenée en France par messire Thomas de Persi, connestable d'Angleterre, qui avoit en sa compaignie plusieurs chevaliers et escuiers, dames et damoiselles, pour icelle acompaigner. Et fut conduicte jusques à un lieu nommé Lelinguen, entre Calais et Boulongne, et là, fut délivrée et baillée à Waleran, conte de Saint-Pol, capitaine et gouverneur de Picardie", avec lequel estoient l'évesque de Chartres et le seigneur de Longueville pour la recevoir; et si y estoient la damoiselle de Montpensier, seur au conte de La Marche, et la damoiselle de Luxembourg, seur au conte de Saint-Pol, et autres dames et damoiselles, envoiées de par la royne de France. Lesquel

1. Le traité de mariage d'Isabelle, fille de Charles VI, avec Richard II, roi d'Angleterre, fut conclu à Paris, le 9 mars 1395 (V. S.). Ainsi la petite princesse n'avait pas sept ans révolus, étant née le 9 novembre 1389.

2. En effet, on peut lire dans Rymer les pièces très-nombreuses de cette négociation.

3. L'acte définitif de la restitution est du 3 août 1401.

4. Lelinghen, entre Boulogne et Calais. C'était le lieu habituel des conférences tenues entre les plénipotentiaires français et les plénipotentiaires anglais au sujet de ces trêves si souvent jurées et si souvent rompues.

5. Valeran de Luxembourg, fils aîné de Gui de Luxembourg, comte de Ligny, et de Mahaut de Châtillon, comtesse de Saint-Pol,

tous ensemble, après qu'ils eurent prins congié aux seigneurs et dames d'Angleterre, se partirent de là et amenèrent ladicte dame aux ducs de Bourgongne1 et de Bourbon', qui à grant compaignie l'atendoient sur une montaigne assez près de là. Si fut d'eulx reçeue et bienveignée très honnorablement. Et ce fait, la menèrent à Boulongne et de là à Abbeville, où ledit duc de Bourgongne, pour sa venue, fist un très honorable disner. Et après, icellui duc print congé d'elle et retourna en Artois. Et ledit duc de Bourbon, et les autres qui estoient à ce commis, la menèrent à Paris, devers le Roy, son père, et la Royne, sa mère, desquelz elle fut reçeue et bienveignée très bénignement'. Néantmoins, combien qu'elle feust honnorablement renvoiée, comme dit est, si ne lui fut assignée aucune rente, ne revenue, pour son dit douaire. Dont plusieurs princes de France ne furent pas bien contens dudit roy d'Angleterre, et désiroient moult que le Roy se disposast à leur faire guerre.

CHAPITRE V.

Comment le duc Phelippe de Bourgongne, oncle du roy de France, ala en Bretaigne, et le duc d'Orléans, frère du Roy, à Luxembourg; et du discord qu'ilz eurent ensemble.

En ce mesme an s'en ala en Bretaigne le duc Phelippe de Bourgongne prendre la possession, de par le

1. Philippe le Hardi, fils du roi Jean.

2. Louis II, dit le Bon.

3. On lit dans une chronique universelle qui finit à l'an 1431: « Et fu commune renommée que elle n'eubt oncques parfaicte joie depuis son retour d'Angleterre.» (Bibl. imp., f. Cord. 16, fol. 328.)

roy de France, de la duchié, pour le jeune duc. Lequel pays lui fist tantost obéissance. Et s'en ala à Nantes, veoir la duchesse vesve, qui estoit seur au roy de Navarre et avoit promis d'espouser tost après le roy d'Angleterre'. Et pour tant, ledit duc de Bourgongne, qui estoit son oncle, traicta tant avec elle qu'elle quicta son douaire à ses enfans, par condicion qu'elle devoit avoir par chascun an en récompense d'icellui, certaine somme d'argent. Après lesquelz traictiez, et que icellui duc eut mis garnisons de par le Roy en aucuns lieux et des plus fortes places du pays, il s'en retourna à Paris, menant avecques lui le dessusdit jeune duc et ses deux frères, lesquelz furent honnorablement receuz du Roy et de la Royne.

Et lors, Loys, duc d'Orléans et frère du Roy, ala prendre la possession du gouvernement de la duchié de Luxembourg, par le consentement du roy de Boesme, à qui elle appartenoit, avec lequel il avoit eu espéciales convenances. Si mist garnison de ses gens en plusieurs villes et forteresses d'icelle duché, et après s'en retourna en France'.

Et peu de temps après, sourdi grande discencion entre ledit duc d'Orléans et son oncle le duc de Bour

1. Le duc de Bourgogne fit son entrée à Nantes le 1er octobre 1402. Le mariage de Jeanne de Navarre, veuve de Jean IV, duc de Bretagne, avec Henri IV, roi d'Angleterre, se fit le 23 avril 1402 (V. S.).

2. Jean V, Artur et Gilles de Bretagne.

3. Ce n'est pas le roi de Bohême, mais Josse, marquis de Moravie, fils de Jean de Luxembourg, frère de l'empereur Charles IV, qui céda à Louis, duc d'Orléans, le duché de Luxembourg, et cela, non pas en 1401, comme le dit Monstrelet, mais en 1402. Il le reprit en 1407, à la mort du duc d'Orléans.

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