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pour savoir nouvelles pour moy acquiter dudict fait. Et lors, je trouvay à l'ostel de monseigneur de Gaucourt, à Paris, ès mains de Jehan d'Olivedo, escuier dudit seigneur, vos dictes lectres dont cy-dessus est faicte mencion, lesquelles y avoient esté apportées après ce que je m'en estoie ralé oudit royaume d'Arragon. Pour quelle occasion elles furent après mondit département envoiées, je n'en dy plus. Mais ung chascun y pourra penser selon la teneur du fait, ce que bon lui semblera. De laquelle lectre je suis moult esmerveillé, et aussi sont plusieurs autres chevaliers et escuiers qui la teneur en ont oye, considérans le bon rapport de vostre chevalerie, que tant avez observé le droit des armes et maintenant les voulez changer, et sans nul autre traictié ne advis de partie, par vous mesmes avez voulu estre juge et placé à vostre plaisir et advantage. Laquelle chose, comme chascun peut savoir, n'est pas chose convenable. Or, quant aux autres lectres dessus escriptes en l'ostel de mondit seigneur de Gaucourt à Paris, pour y mieulx respondre, j'ay cy fait enarrer la teneur comme il s'ensuit.

Quant au premier point contenu ès dictes lectres où avez voulu dire que autres lectres m'avez envoiées avec sauf-conduit pour acomplir les armes là et au jour où il vous avoit pleu à vostre avantage et plaisir, sachez certainement et sur ma foy, qu'onques autres lectres ne vy de vous fors cestes cy qui me furent baillées le douziesme jour de mars, ne cellui sauf-conduit onques ne vy, car sans doute se je l'eusse eu avecq vosdictes lectres, vous eussiez assez tost eu nouvelles de moy et response à icelles. Car c'est la chose que je désire plus estre acomplie que chose qui soit. Et bien povez sa

.

à

voir que le grant désir et vouloir que j'ay à délivrer lesdictes armes m'a fait par deux foiz venir et eslongner de mon pays, par deux cens et cinquante lieues, grans frais et despens, comme chascun peut savoir. Et pour ce que autre fois et plus à plain èsdictes lectres que feistes savoir que vous aviez esleu place à Calais par devant noble et puissant prince le conte de Sombreseil, et après, pour tant qu'il estoit ocupé autre part, ainsi que vosdictes lectres veulent dire, messire Hue de Lucrelles, lieutenant à Calais dudit seigneur de Sombreseil, fut commis pour tenir la place par très hault et puissant prince le roy d'Angleterre vostre souverain seigneur, à vostre voulenté et poursuite, sans mon vouloir, sceu ne congié, dont je suis moult esmerveillé et à bon droit, que sans moy estes tant alé avant comme d'eslire juge et place, et mesmement à vostre souhait. Et me semble que de vostre pays ne vouldriez pour riens perdre la veue. Et toutesfoiz nos devanciers et les nobles chevaliers anciens qui tant nous ont laissé de beaulx exemples, ne quirent onques de grands honneurs en leur propre pays, ne onques furent coustumiers de requerre choses desconvenables; car ce n'est que pour eslongner les bonnes entreprinses. Si suis bien certain que en ce cas vous n'ignorez pas que le devis du juge, du jour et de la place, doit estre esleu du commun assentement des parties. Et se je eusse eu voz lectres à temps, je le vous eusse fait savoir.

De ce que vous dictes que vous ne savez se le Dieu d'amours m'a de soy banny, pour ce que je me suis eslongné du pays de France où mes premières lectres furent escriptes, ne se il m'a fait changer mon propos,

je vous fais assavoir tout acertes sans nulle faintise, qu'onques puis que je euz ceste chose encommencée ne changay mon propos, ne feray, tant que Dieu me garde de meschef, ne en mon lignage ne eut onques homme qui ne ait tousjours fait ce que preudomme et gentil doit faire. Et quant ce viendra à la journée, laquelle à l'aide de Dieu sera briefment se par vous ne demeure, je croy qu'il vous sera besoing d'avoir meilleur cuer que d'avoir à faire à homme retrait de son propos. Pour quoy je vous prie que laissons telles paroles qui ne povent porter fruit. Car ce n'est pas fait de chevalerie, ne de gentillesse; mais pensez au fait, ainsi que m'en avez donné espérance. Si vous fais assavoir que on m'a raporté que vous avez, à Calais, entré en place tout seulet contre moy qui estoie du fait tout non sachant, comme cy-dessus est dit, et loing de vous pour lors bien de trois cens lieues. Et se j'eusse fait semblables armes contre vous, là où pour le temps de lors estoie, ce que Dieu ne veuille, je crois que les haubergons n'en feussent jà froissez ne les lances brisées, aussi peu comme les vostres furent. Si eustes vous lors, de vous mesmes le pris sans contredit. Et en verité je pense que vostredicte entreprinse et journée ne fu onques à meure delibéracion de vos amis conclute, ne par autres qui en ont oy parler ne sera jà loée. Mais non por quant je ne vouldroie pas que par semblables fictions colorées, ce qui a esté dit, prononcié et promis par vous, on deist que vous l'avez baillé par paroles sans nul effect. Je vous prie tant chèrement et si acertes comme je puis, que vous me vueillez acomplir mesdictes armes ainsi qu'elles sont en mesdictes lectres devisées, et que je en ay grant

désir et espoir. Et ne veuillés autrement le temps tenir en paroles. Car je ne doubte point qu'en Angleterre n'ait plusieurs chevaliers qui pieçà me eussent delivré de ma peine si la chose n'eust esté par vous emprinse. Et sur ce, ne vous excusez plus par voz lectres que vous dictes avoir à moy envoiées, car j'en suis tout sans coulpe, comme cy-dessus est dit. Si suis prest, sachez de vray, de soustenir et garder mon honneur et qu'il n'y a nulle chose cy-dessus escripte de ma part contre verité, qui du contraire me vouldroit charger. Et pour ce que je ne vouldroye point estre si oportun que je deusse le lieu et la place eslire sans vous le faire savoir, je offre, se voulez, aler devant très hault et puissant prince et mon souverain lige seigneur le Roy d'Arragon, ou devant les rois d'Espaigne, de Portugal ou de Navarre. Et, se nulz de ces princes ne voulez eslire, pour plus estre près de vostre repaire et pour non eslongner de vos marches et de Madame la vostre, à laquelle de mon povoir je vouldroye complaire, je suis prest d'aler à Boulongne, et que vous venez à Calais. Et là où le capitaine de Calais de vostre part, et le capitaine de Boulongne de ma part, et au jour que ces deux vouldront eslire, je suis prest et appareillé de y aler et vous acomplir lesdictes armes, ainsi qu'elles sont en mesdictes lectres comprinses, à l'aide de Dieu, de Nostre Dame, de monseigneur saint Michel et de monseigneur saint George. Et non obstant que je suis si loingtain de mon pays, je actendray vostre response jusques à la fin du moys d'aoust prouchain venant, et tandis, pour l'amour de vous, je ne porteray pas tronçon de grève, combien que plusieurs me aient exorté du contraire. Lequel terme passé, se je n'ay de

le

vous oy nouvelles, je porteray ledit tronson de grève et feray aler poursuivre mesdictes lectres premières par vostre royaume par tout où bon me semblera, tant que j'aye trouvé qui me délivre de ma peine. Et afin que vous adjoustez plus grant foy aux choses dessusdictes, j'ai mis à ces présentes lectres le seel de mes armes et icelles signées de mon seing manuel, et parties par A B C. Lesquelles furent faictes et escriptes à Paris, le quatriesme jour de septembre, l'an mil quatre cents et ung. »

S'ensuit la tierce lectre de l'escuier d'Arragon envoiée au chevalier

anglois.

« Ou nom de la saincte Trinité, de la benoiste vierge Marie, de monseigneur saint Michel l'Ange, et de Mgr. saint George, qui me gecte à mon honneur, je, Michel d'Oris, escuier, natif du royaume d'Arragon, fay assavoir à tous chevaliers anglois, que pour exaulcer mon honneur et quérir à faire armes, j'ay sceu certainement qu'il y a noble chevalerie partie d'Angleterre, et je, désirant avoir votre acointance et d'aprendre de vous les tours et fais d'armes, vous requiers pour l'ordre de chevalerie et pour la riens que plus aymez' que vous me vueillez délivrer des armes qui cy s'ensuivent. Premièrement, d'entrer en la place à pié, etc. Et tout ainsi qu'il est contenu ès premières lectres universelles, excepté qu'il avoit escript en la fin ainsi : Et me offre pour abréger mon fait et pour mieulx monstrer ma bonne voulenté et souveraine di

ligence, d'estre par devant vostre juge à Calais, dedens deux mois après ce que je auray reçeue vostre

1. Pour la riens, c'est-à-dire pour la chose. Ici, la dame.

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