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COMPLETES

DE VOLTAIRE.

TOME QUATREIÈME.

STOUTGART,

CHEZ L'EXPÉDITION DE L'HISTOIRE DE
NOTRE TEMPS,

ET POUR LES PAYS-BAS EN COMMISSION

CHEZ LES FRERES HARTMANN A LA HAYE.

M. DCCC. XXIX.

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HISTOIRE DU PARLEMENT DE PARIS.

(Continuation.)

CHAPITRE XXVIII.

Suite des guerres civiles Retraite du chancelier de l'Hospital. Journée de la Saint-Barthélemi. Conduite du parlement.

AUGUSTE de Thou, contemporain, qui fut long-temps le témoin des malheurs de sa patrie, qui voulut en vain les adoucir, et qui les a racontés avec tant de vérité, nous apprend que l'inobservation des édits, les supplices, les bannissements, le dépouillement des biens, les meurtres réitérés et toujours impunis, déterminèrent enfin les protestants à se défendre. Ils étaient alors au nombre de plus d'un millon qui ne voulaient plus être persécutés par les quatorze ou quinze autres dont la France était composée. Ils étaient persuadés que dans le voyage de Charles IX par toutes les provinces de la France, le roi et la reine sa mère avaient vu secrètement le duc d'Albe à Baïonne, et qu'excités par le pape et le cardinal de Lorraine, ils avaient pris des mesures sanglantes avec le duc d'Albe pour exterminer en France la religion qu'on appelait la réformée et la seule véritable.

par

(10 nov. 1566) On donna d'abord sous les murs de Paris la bataille de Saint-Denis, où le connétable deMontmorency reçut sept blessures mortelles. Le chancelier de l'Hospital après chaque bataille trouvait le moyen de faire rendre un édit de pacification. Ils étaient aussi nécessaires qu'ils devinrent inutiles; celuici qui était très-ample, et qui accordait la plus grande liberté de conscience, fut enregistré au parlement de Paris (27 mars 1568); mais quand le roi eut fait porter cet édit au parlement de Toulouse par un gentilhomme, nommé Rapin, qui avait appartenu au prince de Condé, le parlement de Toulouse, au lieu de vérifier Tédit, fit couper la tête à Rapin. On peut juger si une telle violence servit à concilier les esprits. Elle fut d'autant plus funeste qu'elle demeura impunie. Le meurtre de René de Savoie, comte de Cipierre, assassiné dans la ville de Fréjus avec toute sa suite, pour avoir favorisé la religion protestante qui n'était pas la sienne, fut un nouveau signal de guerre.

Pour comble de malheurs, précisément dans ce temps-là, le pape Pie V, Ghisleri, autrefois dominicain, violent persécuteur d'une religion ennemie de son pouvoir, envoya au roi une bulle qui lui permettait d'aliéner le fonds de cinquante mille écus de rente de biens ecclésiastiques, à condition qu'il exterminerait les huguenots dans son royaume.

L'Hospital s'opposa fortement dans le conseil à cette bulle, qui trafiquait du sang des Français, mais le cardinal de Lorraine l'em

porta. L'Hospital se retira dans sa maison de campagne, et se démit de sa place de chancelier. Il est à croire que s'il eût gardé cette place, les calamités de la France auraient été moins horribles, et qu'on n'aurait pas vu arriver la journée de la Saint-Barthélemi.

Dès que le seul homme qui inspirait des sentiments de douceur fut sorti du conseil, la cour fut entièrement livrée au cardinal de Lorraine et au pape; on révoqua tous les édits de paix, on en publia coup sur coup, qui défendaient sous peine de la vie toute autre religion que la catholique romaine. On ordonna à tous les prédicants ou ministres calvinistes de sortir du royaume quinze jours après la publication. Les protestants furent privés de leurs charges et de la magistrature. Le parlement de Paris en publiant ces édits y ajouta une clause, ce qui ne s'était jamais fait auparavant. Cette clause était qu'à l'avenir, tout homme reçu en charge ferait serment de vivre et de mourir dans la religion catholique romaine, et cette loi a subsisté depuis dans toute sa force.

Ces édits, qui ordonnaient à des milliers de citoyens de changer de religion, ne pouvaient produire que la guerre: toute la France fut encore un théâtre de carnage.

La bataille de Jarnac, suivie de plus de vingt combats, signala l'année 1569 qui finit par la bataille de Moncontour, la plus meurtrière de toutes (13 sept. 1569). L'amiral de

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