Imágenes de página
PDF
ePub
[ocr errors]

manière les Phéniciens faisoient leur commerce dans la Bétique. Ces peuples, disoit-il, furent étonnés quand ils virent venir, au travers des ondes de la mer, des hommes étrangers qui venoient de si loin. Ils nous laissèrent fonder une ville dans l'île de Gadès; ils nous reçurent même chez eux avec bonté, et nous firent part de tout ce qu'ils avoient, sans vouloir de nous aucun paiement. De plus, ils nous offrirent de nous donner libéralement tout ce qu'il leur resteroit de leurs laines, après qu'ils en auroient fait leur provision pour leur usage et en effet, ils nous en envoyèrent un riche présent. C'est un plaisir pour eux, que de donner aux étrangers leur superflu.

2

Pour leurs mines, ils n'eurent aucune peine à nous les abandonner; elles leur étoient inutiles. Il leur paroissoit que les hommes n'étoient guère sages d'aller chercher par tant de travaux, dans les entrailles de la terre, ce qui ne peut les rendre heureux, ni satisfaire à aucun vrai besoin. Ne creusez point, nous disoient-ils, si avant dans la terre contentez-vous de la labourer; elle vous donnera de véritables biens qui vous nourriront;

VAR. 1 Ce peuple, disoit-il, fut tout étonné, quand ils virent venir, au travers des ondes de la mer, des hommes étrangers qui venoient de si loin. Ils nous reçurent avec bonté, et nous firent part de tout ce qu'ils avoient, sans vouloir de nous aucun paiement. Ils nous offrirent tout ce qui leur resteroit, etc. a. 2 de donner libéralement aux étrangers. a.

vous en tirerez des fruits qui valent mieux que l'or et que l'argent, puisque les hommes ne veulent de l'or et de l'argent que pour en acheter les alimens qui soutiennent leur vie.

Nous avons souvent voulu leur apprendre la navigation, et mener les jeunes hommes de leur pays dans la Phénicie; mais ils n'ont jamais voulu que leurs enfans apprissent à vivre comme nous. Ils apprendroient, nous disoient-ils, à avoir besoin de toutes les choses qui vous sont devenues nécessaires : ils voudroient les avoir; ils abandonneroient la vertu pour les obtenir 1 par de mauvaises industries. Ils deviendroient comme un homme qui a de bonnes jambes, et qui, perdant l'habitude de marcher, s'accoutume enfin au besoin d'être toujours porté comme un malade. Pour la navigation, ils l'admirent à cause de l'industrie de cet art; mais ils croient que c'est un art pernicieux. Si ces gens-là, disent-ils, ont suffisamment en leur pays ce qui est nécessaire à la vie, que vont-ils chercher en un autre? Ce qui suffit aux besoins de la nature ne leur suffit-il pas? Ils mériteroient de faire naufrage, puisqu'ils cherchent la mort au milieu des tempêtes, pour assouvir l'avarice des marchands, et pour flatter les passions des autres hommes.

2

Télémaque étoit ravi d'entendre ces discours

I

' pour

VAR. les obtenir. Ils deviendroient, etc. a. assouvir leur avarice. Télémaque étoit ravi, etc. a.

[blocks in formation]

d'Adoam, et il se réjouissoit qu'il y eût encore au monde un peuple ', qui, suivant la droite nature, fût si sage et si heureux tout ensemble. Oh! combien ces mœurs, disoit-il, sont-elles éloignées des mœurs vaines et ambitieuses des peuples qu'on croit les plus sages! Nous sommes tellement gâtés, qu'à peine pouvons-nous croire que cette simplicité si naturelle puisse être véritable. Nous regardons les mœurs de ce peuple comme une belle fable, et il doit regarder les nôtres comme un songe monstrueux.

VAR. 1 encore un peuple au monde, etc. a.

[merged small][ocr errors][merged small][merged small]

Vénus, toujours irritée contre Télémaque, demande sa perte à Jupiter; mais les destins ne permettant pas qu'il périsse, la déesse va solliciter de Neptune les moyens de l'éloigner d'Itaque, où le conduisoit Adoam. Aussitôt Neptune envoie au pilote Acamas une divinité trompeuse, qui lui enchante les sens et lę fait entrer à pleines voiles dans le port de Salente, au moment où il croyoit arriver à Ithaque. Idoménée, roi de Salente, fait à Télémaque et à Mentor l'accueil le plus affectueux : il se rend avec eux au temple de Jupiter, où il avoit ordonne un sacrifice pour le succès d'une guerre contre les Manduriens. Le sacrificateur, consultant les entrailles des victimes, fait tout espérer à Idoménée, et l'assure qu'il devra son bonheur à ses deux nouveaux hôtes.

PENDANT que Télémaque et Adoam s'entrete

noient de la sorte, oubliant le sommeil, et n'apercevant pas que la nuit étoit déjà au milieu de sa course, une divinité ennemie et trompeuse les éloignoit d'Ithaque, que leur pilote Acamas cherchoit en vain. Neptune, quoique favorable aux Phéniciens, ne pouvoit supporter plus long-temps que Télémaque eût échappé à la tempête qui l'avoit jeté contre les rochers de l'île de Calypso. Vénus étoit encore plus irritée de voir ce jeune homme qui triomphoit, ayant vaincu l'Amour et tous ses charmes. Dans le transport de sa douleur elle quitta Cythère, Paphos, Idalie, et tous VARIANTES. I LIVRE IX.

VIII.

16

les honneurs qu'on lui rend dans l'île de Chypre; elle ne pouvoit plus demeurer dans ces lieux où Télémaque avoit méprisé son empire. Elle monte vers l'éclatant Olympe, où les dieux étoient assemblés auprès du trône de Jupiter. De ce lieu, ils aperçoivent les astres qui roulent sous leurs pieds; ils voient le globe de la terre comme un petit amas de boue; les mers immenses ne leur paroissent que comme des gouttes d'eau dont ce morceau de boue est un peu détrempé : les plus grands royaumes ne sont à leurs yeux qu'un peu de sable qui couvre la surface de cette boue; les peuples innombrables et les plus puissantes armées ne sont que comme des fourmis qui se disputent les unes aux autres un brin d'herbe sur ce morceau de boue. Les immortels rient des affaires les plus sérieuses qui agitent les foibles mortels, et elles leur paroissent des jeux d'enfans. Ce que les hommes appellent grandeur, gloire, puissance, profonde politique, ne paroît à ces suprêmes divinités que misère et foiblesse.

C'est dans cette demeure, si élevée au-dessus de la terre, que Jupiter a posé son trône immobile ses yeux percent jusque dans l'abîme, et éclairent jusque dans les derniers replis des cœurs ses regards doux et sereins répandent le

VAR. 'humains. Edit. correction du marq. de Fén. sance, ne paroît, etc. a.

2

puis

« AnteriorContinuar »