Imágenes de página
PDF
ePub

LE DERNIER AMOUR DE GOETHE

N conserve aux Archives de Goethe et Schiller à

[ocr errors]

Weimar un cahier formé de neuf feuillets de papier vélin recouverts d'un carton bleu, les mêmes que Goethe, au dire de son secrétaire Eckermann, avait fixés autrefois par un ruban de soie sur une couverture de maroquin rouge. C'est le manuscrit d'une élégie écrite par lui en souvenir de sa dernière passion, celle qu'il éprouva pour Ulrique de Levetzow. Le directeur des Archives, M. Bernard Suphan, en donna un fac-similé aux membres de la Société de Goethe, en 1900, quelques mois après la mort d'Ulrique, et M. Auguste Sauer, professeur à l'université de Prague, publia, en 1904, quelques pages de Souvenirs, où Ulrique racontait elle-même, avec une grande sincérité, l'histoire de ses relations avec le grand poète 1.

Son intention, dit-elle au commencement et à la fin, est surtout de démentir les fables qu'on faisait

1. Ulrike von Levetzow und ihre Erinnerungen an Goethe, dans la revue Deutsche Arbeit (Munich).

courir sur son compte. Lorsqu'on sut, en effet, que Goethe, sur ses vieux jours, s'était épris d'une jeune fille au point de vouloir l'épouser, et qu'il l'avait chantée dans une longue élégie et dans de petites poésies de circonstance, les imaginations se donnèrent carrière; et, en l'absence de renseignements précis, il se forma une légende, où Ulrique apparaissait comme une Charlotte sentimentale et Goethe comme un Werther attardé. Eckermann lui-même, qui pourtant était en position de se renseigner, dit qu'il ajoutait foi à la légende, parce qu'elle semblait d'accord « avec la constitution vigoureuse de Goethe et avec la fraîche vivacité de son cœur >>.

Aujourd'hui que nous possédons les lettres échangées entre Goethe et la famille de Levetzow 2, et qu'Ulrique elle-même a pris la parole, la légende doit faire place à l'histoire; et l'histoire, comme il arrive d'ordinaire en pareil cas, n'est pas moins intéressante que la légende.

Les rapports de la famille de Levetzow avec lá société de Weimar dataient déjà de loin. Le grandpère d'Ulrique venait chasser avec le duc CharlesAuguste. Goethe appelait la mère d'Ulrique « une des étoiles de sa vie ». Cependant elle ne lui témoignait pas une admiration sans réserve. Goethe lui ayant demandé un jour si c'étaient ses poésies à lui ou celles de Schiller qu'elle préférait, elle répondit :

1. Conversations, 27 octobre 1823.

2. Goethe-Jahrbuch, t. VIII (1887) et XXI (1900).

« AnteriorContinuar »