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Au sein de ces bosquets, sous ces berceaux fleuris,
Tu ne crains plus du nord la tardive froidure,
Tu ne vois plus le deuil des bords que tu chéris.
Ah! quand un plomb cruel borna tes destinées,
Le front chargé d'ennuis, l'œil humide de pleurs,
De ces tranquilles lieux les nymphes consternées
Firent, dans le vallon, retentir leurs douleurs.
Il n'est plus! il a fui nos rives fortunées!
» Pour honorer la sœur du plus brillant des Dieux,
> La nuit a soulevé ses voiles;

> Et Phébé conduit dans les cieux

> Son char environné d'étoiles :

» Mais tous les feux épars sur l'horizon charmé » Ne réveilleront plus le chantre inanimé. »

Ainsi leur voix douce et plaintive,

Dans l'ombre et le repos, prolongeait ses accens;
Et le berger ému, d'une oreille attentive

Recueillait, sur les monts, ces concerts ravissans.
Tous les cœurs, Dieu du Pinde, à ton art obéissent:
Ces doux sons, ce beau ciel richement décoré,
Ce lae brillant miroir de l'espace azuré,
Le torrent qui mugit, les forêts qui gémissent;
Tout soumettait mes sens à ton pouvoir sacré,
J'implorai ton secours, tes faveurs souveraines :
Heureux, disais-je, heureux qui, docile à tes lois,
Des vains honneurs du monde a secoué les chaînes,
Et confié sa vie au silence des bois !

De ces murs où s'exile une foule insensée

Il fuit les froids plaisirs et les froids habitans :
Sans regreter jamais ni prodiguer le tems,
Seul il vit pour la muse à lui plaire empressée ;
Et plus fière a
eau désert, son active pensée
D'immortels entretiens remplit tous ses instans.
Son art du trépas même adoucit la souffrance:
Penché sur le gouffre éternel,

D'une main courageuse embrassant l'Espérance,
Il chante, en souriant, les délices du ciel.

A l'horreur du cercueil il sait mêler des charmes :
Du génie expirant le triomphe est plus beau;
Sur un destin vulgaire on peut verser des larmes,
Mais lui voit l'avenir et brave le tombeau.

J. L. H. MANUEL.

ENIGME.

Je suis un petit saucisson,

Fait avec la poudre ǎ canon.

Je suis sans bras, sans pieds, sans tête;
Je brille dans un jour de fête;

J'y fais quelque bruit; mais mon sort
Est d'y trouver bientôt la mort.
L'indifférence dont cette mort est suivie,
Me prouve assez le néant de la vie.

LOGOGRIPHE.

DANS mes six pieds, chez moi souvent
On pérore avec éloquence;

Coupe mon chef, je suis un vêtement
Consacré par la pénitence;

Coupe encore mon chef, je suis un bâtiment

Qui dans l'été recèle l'abondance;

Coupe encore mon chef, je suis un mouvement
Qui conduit à la violence.

CHARADE.

SÉJOUR de l'abondance,
Mon premier, de l'univers
Rassemble les trésors divers.

Mon second, des héros célébraît la vaillance,

Et sur les romantiques bords

Où souffle en gémissant Borée,
Tirait de sa harpe dorée

De sublimes accords.

Jadis mon tout, au milieu des alarmes,

Aux guerriers ravissait le jour;

S.....

J. D. B.

Préférant aujourd'hui la paix aux tristes armes,

Il habite de Dieu le tranquille séjour.

GUY.

Mots de l'ENIGME, du LOGOGRIFHE et de la CHARADE

insérés dans le dernier Numéro.

Le mot de l'Enigme du dernier Numéro est Encens.

Celui du Logogriphe est Bouillotte, dans lequor on trouve, jeu, boule, loto, bille et oiç.

Celui de la Charade est Angle-terro

SCIENCES ET ARTS.

L'ART DE MULTIPLIER LES GRAINS, ou Tableau des expé→ riences qui ont eu pour objet d'améliorer la culture des plantes céréales, d'en choisir les espèces et d'en augmenter le produit; par M. FRANÇOIS DE NEUFCHATEAU, sénateur, comte de l'Empire, grand-officier de la Légion d'honneur, titulaire de la sénatorerie de Bruxelles, membre de l'Institut de France et des Sociétés d'agriculture de Paris, de Berne, de Leipsick, de Florence, etc. Deux vol. in-12, chez Me Huzard, libraire, rue de l'Epéron (Saint-André-des-Arcs), n° 7.

Les habitans de nos campagnes sont presque toujours. tentés de rire quand on leur dit qu'il existe à Paris des savans qui, du fond de leur cabinet, en robe-de-chambre et en bonnet de nuit, dictent des préceptes d'agriculture, et se chargent d'enseigner à leurs concitoyens la meilleure manière de tailler la vigne et d'ensemencer la terre. Ils se persuadent que tout le mérite d'un Parisien doit se réduire à étudier les modes, lire la feuille du jour, assister au concert, et juger de la pièce nouvelle; leur teint fleuri et leurs mains blanches leur paraissent très-peu propres aux exercices de la vie champêtre.

Il faut leur dire pourtant qu'un Parisien peut, comme un autre, devenir un fort bon agriculteur, pourvu qu'il soit capable d'observer, de réfléchir, et de braver quelquefois l'inclémence des saisons. Un homme éclairé fera faire, en quelques années, plus de progrès à l'agriculture que tous les laboureurs qui n'ont pour guides que la routine et l'habitude.

On a dit que les empires ne sauraient s'élever au bonheur et à la gloire qu'autant qu'ils seraient gouvernés par des rois philosophes; on pourrait dire de même que

les arts ne sauraient prospérer et fleurir que quand ils sont cultivés par des hommes instruits.

Que l'on rie, si l'on veut, des prétentions fastueusés, des promesses ridicules de quelques économistes du dernier siècle qui, au moyen du produit net et de l'impôt unique, prétendaient régénérer les Etats et nous créer de nouveaux cieux et une nouvelle terre; mais au milieu de leurs travers, que d'idées heureuses n'ont-ils pas proclamées ! que de préventions détruites, de préjugés effacés, de méthodes améliorées, de conversions difficiles opérées ! N'est-ce pas à leur zèle apostolique, à leurs fréquentes prédications que nous devons l'amélioration de nos terres, de nos troupeaux, de nos prairies, et la culture de tant de productions exotiques que repoussaient l'ignorance et le préjugé? Que de résistances n'at-il pas fallu vaincre pour domter les dédains de nos riches, et amener sur leur table cette pomme-de-terre jadis si méprisée, aujourd'hui accueillie et recherchée de tout le monde !

Ce ne sont point des laboureurs, mais des savans, des académiciens qui ont découvert le secret de la végétation des plantes, l'action des fluides atmosphériques, et toutes ces combinaisons mystérieuses que la nature semblait avoir couvertes d'un voile impénétrable. C'est au savant, à l'homme de lettres, devenu agriculteur, qu'il est réservé de divulguer ces hautes connaissances et de les rendre populaires.

Avant cette heureuse révolution, dans quel état était Fagriculture? quels fruits pouvait-elle porter sous ce ciel de ténèbres et d'anarchie, où la gloire militaire était tout, où les arts de la paix n'étaient rien? Quel honneur pouvait-elle espérer quand la charrue et le hoyau étaient aux yeux des nobles des objets vils et abjects, que le sceptre de Cérès était abandonne à des mains serviles et mercenaires, ce sceptre porté jadis si glorieusement par les Curius et les Cincinnatus?

Vouliez-vous d'ailleurs semer, planter, recueillir quand les Huns, les Gépides, les Vandales parcouraient les campagnes, le fer et la flamme à la main; incendiant les maisons égorgeant le berger et mangeant ses mou

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tons? Vouliez-vous semer, planter et recueillir, quand les pirates venus du Nord infestaient toute la France, pillaient les villes et brûlaient les villages ? Pouviez-vous ensemencer votre champ et cultiver vos vignes, quand vos voisins, entraînés par un zèle aveugle et religieux, quittaient leurs foyers, et couraient au-delà des mers combattre les ennemis de la croix ? On ne laboura point non plus, quand ces insulaires rivaux éternels de la France, tentèrent de ravir à nos rois le sceptre des lis et de faire asseoir les Lancastres sur le trône des Valois. Il fallait, pour labourer paisiblement, que les fureurs de la Ligue fussent calmées; il fallait que le ciel, réconcilié avec la terre, nous donnât un monarque sensible et généreux qui s'occupât du bonheur de son peuple, et ne dédaignât pas d'abaisser sa pensée jusque sur l'humble asyle du cultivateur, et de s'occuper de son frugal repas. Il fallait un ministre sage économe, vertueux, qui sût habiter les palais, sans mépriser les chaumières; il fallait enfin Henri IV et Sully.

A cette époque mémorable, la terre cessa d'être roturière; le culte de Cérès reçut de nouveaux hommages, et personne ne rougit plus d'une profession que le premier des hommes, le chef de toute noblesse avait exercé dans les champs de l'Eden, au sortir de son séjour fortuné. On vit même de simples cultivateurs manier alternativement la charrue et la plume, et la France eut ses Columelles et ses Varrons. Olivier de Serres et Bernard Palissy attaquèrent courageusement les vieux préjugés et les serviles institutions. La richesse du sol fut mieux connue, les travaux du cultivateur mieux appréciés, les bienfaits de la nature recueillis avec plus de soins et de reconnaissance.

Ainsi se forma en France le goût de l'agriculture, et si depuis il a paru se ralentir sous les dernières années du règne de Louis XIV et les désastreuses combinaisons du système de Law, avec quelle vigueur ne s'est-il pas ranimé vers le milieu du siècle dernier! Alors des sociétés savantes se sont formées; d'une extrémité de l'Europe à l'autre les paisibles amis de la nature et de ses précieuses productions se sont entendus, et l'art de cultiver la terre s'est élevé à un haut degré de prospérité,

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