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que la guerre a coutume de traîner après elle. Enfin après tant et de si grandes calamités, le comté de Hornes est dans une profonde paix et ses habitants jouissent, à l'ombre d'un gouvernement sage et pacifique, de tous les avantages de l'abondance et de la sécurité.

« Quant au château, quoiqu'on reconnaisse facilement que l'absence de ses maîtres lui a fait perdre de son ancien lustre, c'est encore un de ces grands et majestueux édifices dont les ruines mêmes sont respectables. Il est situé sur une petite éminence qui commande tout à l'entour une vaste et fertile plaine qu'arrose la petite rivière de Neer. Le plan en est rempli par une cour en demi-cercle, dont le diamètre est bordé d'un vaste corpsde-logis terminé par deux petites tours. La plus belle pièce de ce bâtiment est une salle où s'assemble la justice du pays nommée communément Landshall. Le reste de la clôture est une muraille crénelée que défendent deux grosses tours, dont l'une est surmontée d'une haute flèche; elles se communiquent réciproquement par une galerie qui règne en dedans, et sert de banquette aux créneaux. Un fossé large et profond achève la défense de cette forteresse, qui vraisemblablement a été d'une grande défense. Elle est présentement habitée par un des receveurs de la mense épiscopale. »

Jean, comte DE HORNES, dernier hoir de la branche des seigneurs d'Altena, disposa, par testament, du comté, ainsi que de tous ses autres biens, en faveur de Philippe de Montmorency, son cousin, du chef de la grand❜mère de celui-ci, Marie DE HORNES, fille de Frédéric, seigneur de Montigny, et de Philipotte de Melun, et également son beau-fils, comme époux d'Anne d'Egmont, veuve, en premier lit, de Joseph de Montmorency, seigneur de Nevele. Ce testament donna lieu à des difficultés entre les membres de la famille de Hornes qui pensaient y avoir droit; Herman de Nieunar, comte de Meurs, prétendait au comté, à cause de Jeanne DE HORNES, tante du dernier comte susdit, laquelle avait été mariée à l'aïeul de Herman. Philippe de Montmorency assoupit ce différend en épousant Walburge de Nieunar, sœur du comte Herman. Lors de la fin malheureuse de Philippe de Montmorency, comte de Hornes, fils de Joseph, seigneur de Nevele, et d'Anne d'Egmont, plusieurs prétendants du comté se présentèrent; ce furent le seigneur de Houtkerque et de Gaesbeek, comme héritier direct de Guillaume, sire de Hornes et d'Altena, et d'Élisabeth de Clèves; puis Éléonore de Montmorency, comtesse de Lalaing, en qualité de sœur et héritière de Philippe de Montmorency, comte de Hornes. D'autre part, René de Cerclair, seigneur de Blienbeek, réclama la terre de Hornes, comme lui ayant été promise en garantie d'une forte somme qu'il avait prêtée à l'infortuné Philippe de Montmorency,

comte de Hornes; et Walburge de Mandersheit, comtesse de Vuede, forma pareillement des droits sur ces terres comme héritière de Vincent de Nieunar, comte de Meurs, son oncle, créancier de Jacques, comte de Hornes. René de Cerclair en fut même mis en possession et s'y maintint quelque temps avec une poignée de soldats à sa solde privée. Plus tard, lors de la promulgation du traité de Munster, Guillaume-Adrien DE HORNES, général d'artillerie, au service de la république des Provinces-Unies, s'adressa aux états-généraux, à l'effet de rentrer dans la possession de ce comté dont sa famille se trouvait spoliée, mais en vain. Longuerue, que nous venons de citer, ajoute : « Quelques prérogatives qu'eût Philippe de Montmorency dans ce comté, il ne laissait de reconnaître pour son souverain Philippe II, et ce comté était si certainement alors sujet du roi d'Espagne, que le pape Paul IV en ôta la juridiction spirituelle à l'évêque de Liége et l'attribua à l'évêché de Ruremonde nouvellement érigé, en reconnaissant que ce comté était sous la domination du roi d'Espagne, de sorte que Philippe de Montmorency, ayant été exécuté comme criminel de lèze-majesté, l'an 1568, le comté de Hornes fut réuni au domaine du roi Philippe II, et aujourd'hui Charles VI en est possesseur. Néanmoins, les évêques de Liége, qui prétendent que ce comté a été un fief de leur évêché, prennent encore aujourd'hui le titre de comte de Hornes, sur lequel ils n'ont aucune autorité ni temporelle ni spirituelle. » L'évêque de Liége profita de ces embarras et de la position précaire de la famille de Hornes aux PaysBas, pour se mettre en possession du comté; ses successeurs s'y maintinrent, moins comme séquestres que comme comtes de Looz, dont on disait alors que le comté de Hornes relevait soit en totalité soit en partie.

Le comté de Hornes subit, lors des bouleversements occasionnés par la révolution française, le sort du domaine temporel de l'église de Liége. Le château avec une partie des terres environnantes fut acquis par le receveur des domaines du prince-évêque.

L'étendue et la nature des domaines de la maison de Hornes, la noblesse de son extraction, lui procurèrent, dès les premiers temps, des alliances avec les maisons les plus riches et les plus puissantes, non seulement de Belgique, mais même d'Allemagne. « De plus, lit-on dans le diplôme cité plus haut, << ses ancêtres auraient fait de considérables alliances, comme Gérard DE HORNES, avec Jeanne de Louvain, princesse de la maison de Brabant, « dame de Baucignies, qui aurait épousé Félicitas de Luxembourg, sœurgermaine de l'empereur Henri septième, et icelui Gérard en secondes noces Ermengarde, princesse de la maison de Clèves, fille de Thierry et

«de madame Marguerite d'Autriche, nièce de l'empereur Rodolphe. En con«sidération de quoi et d'autres alliances, faites avec les maisons de Wur<< temberg, Savoie, Bavière, ledit DE HORNES, par arrêt solennel aurait été « déclaré appartenir au lignage de l'empereur et aux plus illustres maisons << d'Allemagne et des Pays-Bas. Pour ce est-il que nous, ce que dessus con«sidéré et ayant égard à l'ancienne extraction, haute valeur et bonne qua«lité, etc. » Parmi ces dernières maisons, celles de Nassau et de Wurtemberg sont montées sur le trône.

Ces alliances donnent une idée juste de la haute position qu'avaient les membres de la famille de Hornes soit à la cour soit dans le monde. Aussi voit-on, dès le XIIIe siècle, leur intervention dans les actes les plus importants, tels que traités de paix et contrats de mariage entre les souverains du pays ou leurs enfants et proches, actes que nous avons soin d'analyser ou d'indiquer seulement dans la biographie de chaque membre de la famille.

Sur le champ de bataille, durant tout le moyen-âge, la bannière d'or aux trois trompes de gueules annonçait à l'ennemi la présence du brave sire de Hornes et de ses hommes d'armes, combattant comme eux pour le duc de Brabant. Elle flotta à Zierikzée, à Woeringen, à Staveren, à Baswilre, à Azincourt, et dans toutes ces batailles mémorables leur conduite a répondu à leur haute renommée de bravoure. Plus tard, depuis la formation des troupes régulières, la maison de Hornes a fourni à ses rois et à son pays, dix-huit officiers généraux, dont la biographie offre des pages pleines d'intérêt pour l'histoire du pays et de titres de gloire pour la famille.

L'église et les hommes religieux ne lui ont point refusé, à leur tour, leur hommage six des siens ont porté la crosse épiscopale; deux ont été princesévêques de Liége dans les temps les plus difficiles, au xive et xve siècles, lorsque les maisons de Hornes et de la Marck, deux puissances rivales, jalouses l'une de l'autre, disputaient les avantages de la domination dans la principauté de Liége. Les monastères de Thorn, de Weert, de Keyserbosch, lui durent des supérieurs qui devinrent leurs bienfaiteurs. La maison de Hornes fonda les couvents de Keyserbosch, du Val-Sainte-Élisabeth dit le Val-des-Choux, et enfin des frères Mineurs de Weert. « Cette maison, portée aux pieuses actions autant qu'aux héroïques et martiales, dit le Charpentier en parlant de l'illustre famille de Hornes, fonda plusieurs monastères selon Gramaye, et entre autres au diocèse de Liége celui du Bois-l'Empire sur la Meuse (Nemus imperiale ou Keyserbosch) de l'ordre des Prémontrés vers 1270, et la commanderie de Schalme. En outre, elle laissa des marques

de sa piété aux églises de Cambray et spécialement à l'évêché et à l'abbaye de Saint-Sépulcre qui en obtinrent de beaux biens aux villages d'Audenaken, d'Itterbeek et de Beughem. L'abbaye de Saint-Aubert révère aussi ses libéralités aux villages de Herenthout et de Willebrouck, etc. » Les illustres chapitres de Nivelles, de Maubeuge et de Mons, reçurent ses filles comme chanoinesses et celui de Maubeuge honora une chanoinesse de ce nom, de la prévôté.

La charge de grand-veneur fut héréditaire chez les comtes de Hornes. D'autres dignités élevées furent également accordées à la plupart des membres de cette maison: plusieurs furent revêtus des charges de sénéchal, de panetier, de fauconnier, de chambellan, de mambour de Liége, de sous-avoué de Thorn. Les insignes de l'ordre de la Toison-d'Or, la Grandesse d'Espagne et d'autres honneurs qui étaient l'expression de la bienveillance des souverains, servaient à rehausser l'éclat d'un nom illustré dans le monde politique, militaire et religieux.

La richesse de ses domaines, de hautes alliances, sa bravoure dans les combats les plus acharnés, sa constance aux époques les plus critiques, tout enfin a concouru à consolider le crédit et la puissance de la maison de Hornes, et à en répandre au loin l'éclat et la majesté.

En coordonnant la généalogie de cette famille, nous nous sommes efforcés de faire servir à l'intelligence de l'histoire du pays les nombreux documents qui nous ont été confiés; dans ce but nous avons fait aussi le dépouillement de vieux registres féodaux qui appartiennent aux dépôts publics. Rien n'a été négligé pour traiter convenablement un sujet aussi riche et aussi intéressant.

I. Guillaume, sire de Hornes, qui florissait au XIIIe siècle, chef de la maison de Hornes, fils de Guillaume, seigneur de Perwez, petit-fils de Godefroi III, duc de Lothier et de Brabant, et d'Imaine de Looz, était neveu de Henri I, successeur de Godefroi III, dans le duché de Brabant, et de saint Albert, évêque de Liége. Villenfagne qui a fait des recherches laborieuses sur l'histoire de la principauté de Liége, pour établir le commencement de l'illustre famille de Hornes, suppose que Gérard de Limbourg, seigneur de Hornes, n'ayant pas d'enfant, disposa de cette terre en faveur d'un des enfants mâles de Godefroi III, duc de Brabant, époux de sa sœur Marguerite de Limbourg; mais Godefroi, après la mort de Marguerite, convola avec Imaine de Looz, et il eut de ce mariage deux fils, Guillaume, sire de Perwez, dont le fils aîné Guillaume profita des dispositions testamentaires de Gérard de Limbourg, pour la terre de Hornes.

L'origine des seigneurs de Hornes, dit le chanoine Ernst dans son His

toire de Limbourg, t. I, p. 414, se cache dans les ténèbres du XIe siècle; mais elle ne fut pas limbourgeoise, rien au moins ne l'annonce. M. de la Chesnaye-Desbois, sans parler d'autres, les fait descendre des comtes de Looz, par Sophie de Limbourg, femme de Gérard de Looz, fils de Thierry et petit-fils d'Arnoud, comte de Looz, et d'Aleyde de Diest. Cette origine qui présente quelque vraisemblance, par la circonstance que le château et une partie de la seigneurie de Hornes étaient un fief du comté de Looz, est toutefois insoutenable par rapport aux personnes par lesquelles on la déduit, comme il nous serait aisé de le montrer, si nous ne craignions de trop nous étendre. Le Mire donne à ces seigneurs pour souche Gérard de Limbourg, fils du duc Henri III. M. Villenfagne, au contraire, croit que Gérard de Limbourg était possesseur de la seigneurie de Hornes, et que, se voyant sans enfant il l'avait cédée au duc de Brabant son parent, pour en faire un apanage à un de ses fils; il ajoute que Guillaume, fils aîné de Guillaume de Brabant, sire de Perwez, né du duc Godefroi III et d'Imaine de Looz, reçut pour sa part la seigneurie de Hornes et la transmit à son fils Guillaume et à ses descendants. » Telle est l'explication donnée par Villenfagne. Je n'ai qu'une objection à lui faire au sujet des relations politiques de la terre de Hornes avec celle de Looz, dont Hornes ne relevait point dans les temps anciens. Je cite un peu plus loin un acte qui confirme mon assertion : la terre de Hornes, sise dans le comté de Looz, en a été originairement indépendante, et les premiers reliefs, que l'on cite, sont des faits isolés. L'abbé de Longuerue prétendit aussi dans sa Description Historique et Géographique de la France ancienne et moderne, publiée à Paris en 1719, qu'on ne trouve rien avant le commencement du XIe siècle sur les comtes de Hornes. Alors, dit-il, Gérard de Limbourg, fils du duc Henri, était seigneur de Hornes, et à cause de cela on le nommait Gérard DE HORNES. Ce comté vint ensuite au pouvoir de Jean I du nom, duc de Brabant, qui le donna en partage et en fief à son fils puîné Guillaume, qui fut comte de Hornes.» (Long., partie 1, page 122.) Le chanoine Ernst fait néanmoins dans une note (Ilist. du Limb., t. ш, p. 419), une observation dont nous faisons plus loin notre profit : « Ego Wilhelmus de Altena et de Horne, « c'est le titre que Guillaume DE HORNES prend dans une charte datée anno « 1243 mense Augusto, par laquelle il fait connaître les fiefs qu'il tenait du « comté de Looz. L'original de cette pièce est aux archives de la province « de Liége. On y voit qu'en 1250, Thierry, sire d'Altena, et Guillaume, sire ⚫ de Hornes, qu'il nomme consanguineus noster, déclarent tenir, en commun, en fief du comté de Hollande, le château d'Altena et d'autres terres, en

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