Gaesbeek et Houtkercke. fallait agir de même à son égard. Hees insista en particulier sur le bon effet qu'avait produit à Maestricht l'interdiction des prêches, pour lesquels, ajoutait-il, les Bruxellois avaient de l'aversion. Le magistrat répondit qu'il ne pouvait prendre une décision sans avoir délibéré sur cette affaire. Champigny et ses amis lui accordèrent, à contre-cœur, un délai; étant sortis de la maison communale, ils invitèrent les bourgeois, réunis sur le marché, à venir, à deux heures de l'après-midi, à l'hôtel de Hees. Des colonels, des capitaines et environ soixante notables se rendirent à cette invitation, et le lendemain, entre midi et une heure, Hees, Champigny et les autres chefs catholiques allèrent de nouveau à l'Hôtel-de-Ville. Le magistrat leur donna part du rejet de leur proposition, en conformité de la décision des états généraux, et basé sur le tort qu'une mesure contraire pourrait causer aux catholiques de quelques autres villes, à la cause commune et à Bruxelles en particulier. Les seigneurs s'écrièrent que ce n'était qu'un subterfuge et déclarèrent que le large conseil et les nations approuvaient leur demande, et qu'il fallait réunir les corps. Après avoir rappelé les clauses de la Pacification de Gand, le bon esprit qu'avaient montré les bourgeois en 1566, ils offrirent le secours des catholiques du Hainaut et parlèrent avec beaucoup de mépris de l'archiduc, qu'ils traitaient d'enfant. Le magistrat leur opposa l'obéissance due aux états, la nécessité de conserver leur appui, les difficultés qu'entraînerait l'exécution de leur projet. La discussion s'échauffant, un des seigneurs demanda si on voulait de la ligue ou non, et s'écria que, dans le cas négatif, lui et ses amis savaient ce qu'ils avaient à faire; mais quand on les interrogea sur la ligue dont ils parlaient, ils se turent, s'apercevant qu'ils avaient été trop loin. Guillaume DE HORNES, seigneur de Hees, prit aussi une part très-active à la Cette ligue dont il a été question existait : c'est celle qui a été dite des Mécontents partie des troupes levées par ordre des états-généraux n'étant point payées, Hees, Gaesbeek et Houtkercke. Gaesbeek et Houtkercke. seraient décidés à Mons. Cet objet ayant été rempli, le roi d'Espagne ratifia le traité par des lettres conçues en ces termes : « Philippe, par la grâce de Dieu, roi de Castille, d'Aragon, etc. Comme après la retraite au château de Namur, de notre très-cher et très-aimé frère, don Jean d'Autriche, lors gouverneur et capitaine-général de nos Pays-Bas, seraient survenus plusieurs mal-ententes et discors entre lui et les états-généraux de nosdits Pays-Bas, lesquels ne s'étant pu appaiser par les communications pour ce tenues, auraient engendré, à notre grand regret, une grande et cruelle guerre à la désolation de bonne partie de nosdits pays, voulant faire office de père et bon prince, ayant dès les derniers troubles toujours recherché moyens et voies de réconciliation, finalement par notre cher et très-amé bon neveu le prince de Parme et Plaisance, lieutenant-gouverneur et capitaine-général de nosdits Pays-Bas, avec nos provinces d'Artois, Hainaut, Lille, Douay, Orchies, y ayant envoyé à ces fins révérend père en Dieu, Matthieu Moulart, évêque d'Arras, Jean de Noircarmes, chevalier, baron de Selle, gentilhomme de notre bouche et lieutenant de notre garde, et Guillaume Le Vasseur, seigneur de Valhuon, pour leur offrir de notre part l'entretènement de la Pacification de Gand, l'Union ensuivie, l'Édit Perpétuel, comme aux députés des autres provinces en notre ville d'Anvers, par lettre du douze mars dernier, lesquelles offres par les députés d'aucunes provinces rejettées et autrement interprêtées que n'était notre intention, auraient par les susdites trois provinces d'Artois, Hainaut, Lille, Douay et Orchies, mieux entendant la sincérité de notre volonté, été embrassées, ayant icelles trois provinces conçu et avisé quelques points et articles pour sur le pied d'iceux venir à une bonne réconciliation; lesquels points après plusieurs communications tenues en notre ville d'Arras, entre les susdits députés et notredit neveu en notre camp devant notre ville de Maestricht pour en avoir l'agréation, furent trouvées en iceux aucunes difficultés et obscurités, et que selon lesdits éclaircissements et résolution, seraient entendus l'agréation et serment que lors en fit notredit neveu le prince de Parme, le 27 de juin dernier, suivant quoi aurions envoyé notre cher et féal cousin le comte de Mansfeld, de notre part, en notre ville de Mons; noble baron d'Heldinge, chevalier de notre ordre de la Toison, de notre conseil d'État, gouverneur et capitaine-général de notre duché de Luxembourg et comté de Chiny, et maréchal de notre ost, et nos amis et féaux chevaliers Jean de Noyelles, seigneur de Rossignol, de notre conseil de guerre, et Adrien de Gomiecourt, seigneur dudit lieu, gentilhomme de notre maison, ensemble Jean Vendeville, Antoine Hoult, docteur ès droits, conseillers et maîtres ordinaires de notre conseil privé, et George de Westendorp, aussi docteur en droits et conseiller de notre conseil en Frise, lesquels, ayant communiqué sur ce que dessus avec notre très-cher et féal cousin Robert de Melun, marquis de Richebourg, sénéchal de Hainaut, vicomte de Gand, gouverneur et capitaine-général de notre pays et comté d'Artois, et de notre ville et bailliage de Hesdin; avec nos chers et bien amés les députés de notredit pays du comté d'Artois, révérend père en Dieu, Dom Jean Sarrazin, prélat de l'église et abbaye de Saint-Vaast d'Arras; maître Jean de Goulatte, licencié en droits, chanoine de l'église de Notre-Dame d'Arras; François d'Oignies, chevalier, seigneur de Beaurepaire, de Beaumont, et Louis de la Planque, écuyer, seigneur de La Comté; Jacques de Pippre, licencié ès droits, échevin de notredite ville d'Arras, et Antoine Aubron, aussi licencié ès lois, conseiller provincial de notre ville de Saint-Omer; notre très-cher cousin Philippe, comte de Lalaing, gouverneur et capitaine-général et grand-bailli du comté de Hainaut, et nos chers et bien-amés les députés de notredit pays, révérend père en Dieu, Jacques Fioy, abbé de l'église et abbaye de Saint-Pierre de Hasnon; Antoine Verman, abbé de l'église et abbaye de Notre-Dame de Vicogne; Lancelot de Peyssant, seigneur de La Haye; Nicolas de Landas, chevalier, notre panetier héréditaire du Hainaut; Philippe Francan, seigneur de Bion-Chef, et Laurent Moussart, second échevin de notre ville de Mons; Louis Corbanis et Jacques de la Croix, seigneur de Caumont, du conseil de ladite ville, et messire François Gautier, licencié ès droits, premier conseiller et pensionnaire de cette ville; notre trèscher et féal Maximilien Vilain, baron de Rassenghien, gouverneur et capitainegénéral de nos villes et châtellenies de Lille, Douay, Orchies; Adrien d'Oignies, chevalier, seigneur de Willerval, et nos chers et amés les députés de nosdites villes et châtellenies, Floris van der Haer, chanoine de Saint-Pierre audit Lille; Roland de Visques, écuyer; maître Claude Miroul, licencié ès lois; Eustache, écuyer, seigneur de Jumelle, franchier et chef de l'échevinage de notredite ville, de Douay, et Philippe Broide, aussi licencié ès lois, conseiller de ladite ville et autres associés assemblés en notredite ville de Mons, seraient enfin tombés d'accord sur icelles obscurités et difficultés, etc. » L'auteur donne ensuite tout le traité et ajoute: « Ainsi se termina l'affaire la plus importante qui ait jamais occupé la province d'Artois. Il s'agissait de maintenir la religion que les novateurs cherchaient à détruire, de conserver la fidélité que l'on devait à son souverain et de mettre des bornes aux vexations de ses agents. A chaque instant on se trouvait dans des positions délicates, où il était peu facile de concilier tous les devoirs; ceux qui étaient à la tête de l'administration de la province montrèrent beaucoup de lumières, de prudence et de zèle. Après avoir marché pendant quelque temps dans des routes difficiles, ils parvinrent à la fin à dissiper les nuages épais dont ils étaient environnés et à remplir tous les objets qu'ils s'étaient proposés. Parmi ceux qui se distinguèrent dans ces temps orageux, on remarqua spécialement les magistrats d'Arras, Matthieu Moulart, évêque de cette ville, Jean Sarrazin, abbé de Saint-Vaast, Oudart de Bournonville, baron de Capres, La Motte, gouverneur de Gravelines, et Lalaing, baron de Montigny, appelé depuis marquis de Renty, à qui la province d'Artois eut des obligations infinies pour avoir empêché, avec un corps peu nombreux, les troupes du prince d'Orange de pénétrer dans ces contrées. >> Il résulte de ce qui précède que la conduite de Hees n'a pas été examinée par nos historiens avec l'impartialité que l'on est en droit d'exiger d'eux. A lui revient en bonne partie l'honneur d'avoir consolidé la ligue des Mécontents, Gaesbeek et Houtkercke. Gaesbeek et Houtkercke. et je ne puis m'empêcher de proclamer qu'à lui revient un honneur plus grand encore: celui d'avoir voulu stipuler dans ce traité même des garanties contre toute réaction. Le 28 juillet 1579, le baron de Licques, gouverneur de Louvain, vint avec un corps nombreux d'Italiens et d'Espagnols attaquer le fort de Willebroeck, et comme les dix compagnies écossaises qui étaient chargées de la garde du canal, avaient été appelées à Bruxelles, il s'en empara sans presque coup férir. Le bruit courut qu'Egmont et Hees, alors à Ninove, allaient se joindre aux Espagnols pour assiéger Bruxelles. Informés de ces rumeurs, ces seigneurs écrivirent au magistrat pour le rassurer et l'engager à en revenir à la Pacification de Gand. Le magistrat répondit à Philippe d'Egmont : « Qu'il comprenait bien qu'ayant reçu des Espagnols tant de vilaines tyrannies qu'on ne les saurait assez déplorer, ni venger jamais, il ne voudrait pour eux trahir Bruxelles sa patrie; que n'ayant jamais mal agi à son égard, il devait croire que quelque malentendu avait donné lieu à sa prise d'armes; que, pour l'éclairer, il allait lui envoyer des députés, espérant que de réciproques explications résulterait une complète réconciliation, à son retour à Bruxelles. >> Voici la réponse de Guillaume DE HORNES : « Messieurs, ayant entendu que les Espagnols approchent de votre ville, pour mon acquit, honneur et singulier devoir et désir que j'ai toujours eu à la conservation d'icelle, je veux encore vous faire ce mot pour la dernière fois, et vous exhorter de vouloir maintenir le traité de Gand si solennellement plusieurs fois juré par vous autres, messieurs, et vous y soumettre, afin d'obvier au malheur qui vous est imminent si vous ne prenez cette résolution. Quant à ce qu'on me reproche d'être Espagnol, je vous puis jurer et attester, en foi de gentilhomme, rien moins; mais vous autres, Vous retenez les Espagnols en pensant les chasser. Maintenez la Pacification de Gand, je vous promets comme dessus non-seulement de vous assister, mais encore de laisser la vie à votre service contre tous et envers tous, tant Espagnols que Bourguignons et autres, en conformité des États réconciliés: lesquels promettent, en cas que les Espagnols ne sortent, d'employer toutes leurs forces et même leurs villes et moyens convenables pour la sortie des susdits Espagnols. De quoi vous pouvez avoir toute assurance comme d'une chose véritable. La seule affection mienne envers vous m'a occasionné de vous faire la présente, en priant le bon Dieu, messieurs, qu'il lui plaise vous donner bon conseil et avis, et à moi le moyen de vous servir comme du passé, en repos et tranquillité, union et paix. Ninove, ce 30 juillet 1579. Votre bien bon ami à vous faire service, Guillaume DE HORNES. » - L'échevin François Hinckaert, seigneur de Lille, Henri de Bloyere et Jean Theron furent en effet envoyés à Ninove. Selon leurs instructions, ils devaient complimenter les deux comtes sur leur haine envers les Espagnols, leur démontrer que rien n'avait été innové en matière de religion et que la Pacification était en vigueur, et surtout insister sur la nécessité de s'unir. Egmont et Hees répondirent qu'il leur semblait nécessaire que le magistrat se prononçât solennellement et qu'il s'engageât à laisser les consciences libres; à ces conditions, ils promirent de |