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remords dans le cœur d'un homme qui décèle déjà de la frayeur, Kosinski tombe à ses pieds, et se déclare son prisonnier. Le roi est bientôt ramené à Varsovie. Deux des conjurés sont arrêtés; on les condamne à mort; la même peine est prononcée contre les contumaces. Les cours qui ont concerté le démembrement de la Pologne, montrent la plus grande horreur de l'enlèvement du roi, La nation polonaise ne peut, dans cet extrême danger, se rallier sous un chef, ni concerter ses mesures; ce sont des Français qui vont, sans attendre de secours de leur gouvernement, et presque sans son aveu, clorre cette longue scène de combats inutiles. Ils cherchent à sauver l'honneur de leur patrie dans ce même pays où, quarante ans auparavant, le comte de Plelo voulut mourir pour que le nom français ne reçût point une tache ineffaçable.

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nent un

siége glorieux dans

de Cracovie,

Dumouriez avait quitté la Pologne. Le ba- Les Frane ron de Vioménil le remplace. Sa loyauté, son courage donnent aux Polonais quelque es- château poir que la France secondera bientôt leurs efforts d'une manière plus active, Une armée du roi de Prusse, qui s'avance sur leur territoire, les avertit que le conquérant de la Silésie cherche une occasion peu glorieuse

de s'agrandir. L'Autriche, qui d'abord leur avait donné quelques secours clandestins, garde avec eux un silence inquiétant. Quelques seigneurs polonais ont attendu, pour soutenir la cause de l'indépendance, qu'elle fût presque désespérée. Le comte Oginski est parvenu à soulever de nouveau la Lithuanie; mais il y a rencontré le redoutable Souwarow. Il vient se rallier aux Français avec les débris de son armée vaincue. Ceux-ci parviennent à surprendre la vigilance du général russe; ils s'emparent de la ville et du château de Cracovie; mais Souwarow ne les laisse pas long-temps tranquilles dans un lieu qui a été le premier foyer de cette guerre. Ils'en approche avec l'impétuosité qui le caractérise. Le brigadier de Choisi qui commande dans ce fort, repousse les Russes dans trois assauts, et leur fait éprouver une perte plus considérable que celle qu'ils avaient essuyée dans plusieurs combats. Souwarow tient les Français bloqués, bat de faibles corps qui marchent à leur secours, et leur fait éprouver les horreurs de la famine (a). Exténués, ils retrouvent encore des forces pour faire des

(a) Les détails du siége de Cracovie se lisent avec beaucoup d'intérêt dans un recueil de lettres du baron de Vioménil, publiées en 1808.

sorties brillantes. Enfin ils capitulent : ils sont prisonniers d'un ennemi qui les admire.

C'est en France qu'on s'entretient le moins des défenseurs du château de Cracovie. Cependant un Français cherche à éveiller en leur faveur la magnanimité de l'impératrice de Russie. Ce Français, c'est d'Alembert. Catherine, qui entretenait une correspondance avec ce philosophe, était parvenue à lui déguiser l'oppression de la Pologne sous le voile de la tolérance. « Montrez, lui écrivait-il, tous les sentimens généreux qu'ins pire une cause si belle; rendez la liberté à des Français qui ont combattu pour l'honneur. » Voltaire avait appuyé, dans ses lettres, l'intercession de son ami. Dans un siècle qui fut une suite de triomphes pour les lettres, elles n'eussent pu en obtenir un plus flatteur qu'un tel succès. Il était beau de voir la gloire des armes et la gloire littéraire se protéger réciproquement. Mais Catherine demandait aux philosophes des éloges, et non des conseils sa réponse ironique leur apprit qu'elle ne leur laissait point le droit de modérer les maux de la guerre. :

De nouveaux succès obtenus sur les Turcs, la conquête de la Crimée, Etat plein de ressources qui, cinq ans auparavant, s'était

Premier partage de la Pologne. 1772,

rendu redoutable sous la conduite du kan Krim - Guerai; deux campagnes où Romanzow avait agi au-delà du Danube, et réparé, avec toutes les ressources de l'art militaire, un revers éprouvé sous les murs de la forteresse de Silistrie, exaltaient l'orgueil de l'impératrice de Russie. Mais une révolte qui désolait plusieurs parties de son empire, un mécontentement assez général des vieux Moscovites, et quelque gêne dans ses finances, l'invitaient à recourir à des traités pour assurer ses avantages. Sans entrer ici dans un détail de négociations, qui s'accorde mal avec le mouvement de l'histoire, je dirai seulement que Catherine fut assez habile pour décider le roi de Prusse au partage de plusieurs provinces de la Pologne, sans lui accorder les villes de Thorn et de Dantzick; et que Marie-Thérèse se fit céder plusieurs districts de la Galicie. L'ambassadeur de France à Vienne, le prince Louis de Rohan, depuis cardinal de ce nom, n'eut aucune connaissance de cette négociation. Le sommeil fut profond à Versailles pendant ce mouvement politique. Ce traité fut conclu à Pétersbourg, le 5 août 1772. L'Autriche obtenait sur la rive gauche de la Vistule environ deux mille cinq cents lieues carrées, la Russie

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en acquérait plus de trois mille, et la Prusse n'en acquérait que neuf cents. Des manifestes furent prêts pour montrer, dans cet envahissement sans pudeur, la plus légitime des restitutions. Catherine n'oublia dans cette convention que les dissidens, dont elle avait embrassé la cause avec une philosophie si meurtrière, et qui n'obtinrent point le droit de suffrage à la diète. Près d'un an se passa, avant que ce traité reçût une entière exécution, et le gouvernement de France en parut plus confus qu'indigné. Louis XV n'exprima sa douleur que par ces mots : Ah! si Choiseul eût été ici, le partage n'aurait pas eu lieu.

Les agens Louis XV exilés

secrets de

arrêtés out exilés par le duc d'Ai

1772,

Le duc d'Aiguillon se vengea sur son maître des regrets que celui-ci venait de donner à l'éloignement de Choiseul. Il fit arrêter ceux des confidens diplomatiques de guillon. Louis XV qui avaient pris part aux affaires de la Pologne. On les punit, au nom du roi lui-même, de ne s'être adressés qu'au roi. Dumouriez, l'un des agens de cette correspondance secrète, était resté en Allemagne, lorsque ses mauvais succès et les ordres du duc d'Aiguillon lui firent quitter la Pologne, Il s'efforça par ses lettres de ranimer l'intérêt de Louis XV pour cette république,

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