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de plusieurs villes, telles que Philadelphie, Boston et New-Yorck, annonçaient à quelle prospérité ces colons étaient appelés. Depuis vingt ans ils avaient produit des guerriers, des administrateurs, des magistrats, dont la réputation commençait à retentir dans l'ancien monde. C'était surtout à Francklin, à ses expériences et ses découvertes dans l'électricité, qu'ils devaient leur renommée. Le secret d'appeler et d'amortir la foudre. eût pu être repoussé dans d'autres temps avec une indignation superstitieuse; mais on regardait ce prodige comme réservé au dixhuitième siècle. On ne cessait de s'entretenir de celui qui l'avait révélé. Les compatriotes. de ce savant modeste avaient su reconnaître en lui un grand homme. Washington, à d'autres titres, soutenait leur confiance dans la lutte qu'ils allaient entreprendre.

Malgré les représentations des colonies, le ministère et le parlement britannique furent fidèles à leurs menaces. D'abord on gêna leur commerce avec les Antilles par des droits onéreux; ensuite on les assujettit à payer un impôt du timbre, qui devait les frapper dans toutes leurs transactions,

Le duc de Choiseul n'avait pas attendu ce moment pour fomenter le ressentiment des

Bill du timbre.

1764.

Amérique.

Intrigues do Anglo-Américains contre leur métropole. la France en On connaît peu les moyens auxquels il eut recours pour se faire entendre d'un peuple nourri dans le préjugé d'une haine nationale contre la France, et d'ailleurs ce serait une triste tâche que d'avoir à les développer. Ce genre d'intrigues, quel qu'en soit le succès, est une des plus dangereuses violations du droit des gens; il rend la paix frauduleuse et la guerre atroce, il appelle des représailles: celles qu'exerça l'Angleterre furent, par leur longue et impitoyable perfidie, sans proportion avec ce qui leur servit de prétexte. Le duc de Choiseul affectait de ne point craindre l'Angleterre, et cette politique réussissait les ménagemens timides et les serviles promesses du cardinal de Fleury.Les émissaires qu'il envoya en Amérique et dans les colonies, eurent peu de peine à persuader aux colons anglais que la France et l'Espagne seconderaient par de puissans efforts leur résistance à l'oppression. Dès qu'on y eut connaissance du bill du timbre et de quelques autres impôts que le parlement joignait à celui-là, le soulèvement fut général. Le peuple des villes insulta ou poursuivit les agens du gouvernement britannique: on dévasta leurs maisons, on pendit des manne→

mieux que

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quins qui représentaient les ministres. A Boston, à New-Yorck, le peuple soutint quelques combats contre les gardes qui voulaient appaiser le tumulte. Ces fureurs de la multitude ressemblaient à celles que la populace de Londres exerce fréquemment pour tenir son patriotisme en haleine; mais ce qui les rendait plus sérieuses, c'est qu'elles étaient provoquées par des citoyens que leur fortune et leur position devaient rendre ennemis de ces excès. Partout on protestait contre les actes du parlement d'Angleterre. Les représentans des différentes provinces, les juges, les hommes de loi, étaient unanimes dans leur résistance, et l'appuyaient sur des principes développés éloquemment. Dans des colonies formées depuis un siècle, on parlait un langage, on développait des connaissances dignes de la salle de Westminster.

Le lord Grenville essaya en vain de dissimuler au parlement ces fâcheux pronostics d'une scission des colonies. Les négocians, et surtout les manufacturiers de l'Angleterre, éprouvaient de vives alarmes, et maudissaient cette épreuve imprudente. Le lord Grenville, attaqué sans relâche le parti de l'opposition, perdit sa place avec la majorité qui faisait son appui, Un nouveau mi

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nistère fut composé des adversaires du bill, à la tête desquels était le comte de Rockingham: le sort de ces actes ne fut plus douteux. Une maladie aussi cruelle qu'opiniâtre tenait depuis quelques années William Pitt éloigné des affaires. Il se rendit au parlement le jour où l'on délibérait sur la question de savoir si l'on punirait les colonies de leur rebellion, ou si l'on satisferait à leurs plaintes. Le même jour Benjamin Francklin avait paru à la barre du parlement, et par les réponses les plus adroites et les plus fermes, il avait justifié les réclamations de ses compatriotes. Pitt, dont les conseils avaient porté la puissance de l'Angleterre plus haut que ne l'avaient fait les victoires de Marlborough, approuva la résistance des colons américains, fit reconnaître en eux les fils et non les vassaux de la Grande-Bretagne, et rappela combien, dans ses heureuses entreprises, il avait été secondé par leur patriotisme et leur valeur. « Ne troublons point, disait-il, dans » ses progrès, un peuple qui se prépare à >> nous soumettre le plus vaste empire. Res» pectons une fierté qu'il a puisée dans notre » sang; qu'il jouisse de nos priviléges, puis

qu'il nous fait jouir des fruits de sa pa» tiente industrie. N'est-ce donc rien pour

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» nous qu'un bénéfice annuel de deux mil» lions sterling qu'il fournit à notre com» merce? Mais quoi! doit-on céder à des séditieux? Vain prétexte, lorsqu'il s'agit » d'éteindre une querelle de famille. Quand » les flottes anglaises traversent les mers, >> c'est aux ennemis de la Grande-Bretagne, » et non à ses enfans à trembler. J'aime » mieux un excès impuni ou faiblement réprimé, qu'une guerre civile. En châtiant quelques factieux obscurs, sommes-nous » sûrs de punir et d'atteindre les aventuriers espagnols et français qui leur ont remis les torches de la sédition? Trompons l'espoir » de deux nations jalouses. N'est-il pas temps de surveiller leurs entreprises? Quoi! le précédent ministère a eu les yeux ouverts sur des tumultes momentanés de Boston et de New-Yorck, il s'est effrayé de ce que l'ivresse a pu inspirer à quelques matelots, et ses yeux ont été » fermés sur les intrigues des cabinets de » Versailles et d'Aranjuez? Ces ministres >> ne voient pas la maison de Bourbon, con» certer la vengeance des affronts qu'elle » vient de recevoir, et nous faire expier » cette lassitude trop prompte que nous >> avons ressentie et confessée au milieu de

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