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fubjonctif & non le premier, qu'on peut mettre à la place du conditionnel.

LE COMT E.

Oui, Monfieur; encore cette fubftitution ne fe fait-elle qu'au conditionnel paffé, & feulement quand le verbe qui marque la condition cft précédé de la conjonction fi.

L'ABBÉ.

Pardonnez-moi, Monficur; premièrement le conditionnel paffé s'exprime par l'imparfait paffé du fubjonctif dans beaucoup de phrafes où les conditions ne font point exprimées, telles que celles-ci:

Qu'euffé-je été fans lui? Rien que le fils d'un Roi. c'eft comme s'il y avoit qu'aurois-je été fans lui. Dans plufieurs expreflions abrégées, cette fubftitution fe pratique au préfent du conditionnel.

Duffent tous les Thébains

Porter jufque fur moi leurs parricides mains;
Sous ces murs tous fumants dusse-je être écrasée,
Je ne trahirai point l'innocence accufée.

c'est-à-dire, quand tous les Thébains devroient.... quand je devrois étre écrasée fous ces murs tous fumants.

LE MILOR D.

On m'a dit qu'il n'étoit pas permis de mettre de fuite deux verbes au conditionnel féparés par la conjonction que comme fi je difois, par exemple on voudroit que je me promenerois, je craindrois qu'il ne vous arriveroit quelque accident. Il faut donc dire on voudroit que je me promène; je craindrois qu'il ne vous arrive quelque accident,

:

LE COMTE.

Vous vous trompez, Monfieur; ce n'eft pas le premier temps du fubjonctif mais le fecond qui quadre avec le, conditionnel.

LA MARQUISE

Monfieur nous a fait remarquer celà. Pour le préfent & le futur, on met le premier temps du fubjonctif. Ainfi je dirois on veut ou on voudra que je me promène; je crains, ou je craindrai qu'il ne vous arrive quelque accident.

Mais pour le conditionnel, ainfi que pour tous les temps paffés & imparfaits, il faut employer le fecond temps du fubjonctif, & dire, par exemple, on vouloit, on voulut, on voudroit que je me promenas.

LE MILOR D.

Vous faites une faute, Madame. Dans le fecond temps du fubjonctif, la première perfonne au fingulier finit toujours par deux & un e muet.

SOPHIE.

Je crois auffi que j'aurois dit: on voudroit que je me promenaffe; je craindrois qu'il ne vous arrivaffe quelque accident.

L'A BB É.

Vous vous trompez auffi, Mademoifelle. Dans le fecond temps du fubjonctif, la troifième perfonne du fingulier fubftitue un t à la terminaifon fe de la première perfonne. On obferve feulement de mettre un circonfiexe fur la voyelle qui précède, parce qu'elle a le fon fort & alongċ.

Que j'allaffe, que tu allaffes, qu'il allát.
Que je fiffe, que tu fiffes, qu'il fit.

Que je vêcuffe, que tu vêcuffes, qu'elle vécut
Que je vinfle, que tu vinfles, qu'elle vint.

Mais les deux fe confervent aux trois perfonnes du pluriel :

Que nous allaffions, que vous allaffiez, qu'ils allaffent, &c. LA MARQUISE.

Ainfi il faut dire fans s, à la troifième personne du fingulier, je craindrois qu'il ne vous arrivât

quelque accident, & avec des ', à la troifième perfonne du pluriel je craindrois que quelques accidents ne vous fuffent arrivés.

L'ABBÉ.

Je crois que vous faites encore une petite faute, Madame. Il paroît que votre intention eft de parler d'accidents qui pourroient arriver, & non d'accidents qui feroient déjà arrivés. Ainfi vous deviez dire avec le temps fimple du fubjonctif, je craindrois que quelques accidents ne vous arrivaffent. Mais dans cette phrafe: quand je vous verrois pále & défait, je craindrois que quelques accidents ne vous fuffent arrivés, le dernier verbe qui fe rapporte à un temps paffé relativement au refte de la phrafe, eft mis à l'imparfait du fubjonctif. Il ne feroit pas permis alors de dire avec le verbe fimple que quelques accidents ne vous arrivaffent.

Je ne veux pas oublier une obfervation qu'il nous refte à faire fur cet article ; c'eft que dans les phrafes conditionnelles, là conjonction que gouverne le conditionnel dans les cas où, fi le verbe principal étoit à l'indicatif, cette même conjonction gouverneroit l'indicatif.

Par exemple, à caufe qu'on dit avec le régime indicatif, je crois qu'on viendra, vous penfiez que tout alloit bien; il faut dire avec le conditionnel, je croirois qu'on viendroit, vous penferiez que tout iroit bien; & non avec le fubjonctif, je croirois qu'on vînt, vous penferiez que tout allat bien, &c. & parce qu'on dit avec le régime fubjonctif, je ne crois pas qu'on vienne, vous doutiez que tout allât bien, il faudroit dire de même avec l'imparfait ou parfait du fubjonctif ; je ne croirois pas qu'on vînt, vous douteriez que tout allât bien, & non qu'on viendroit, que tout iroit bien, &c. LA MARQUISE.

Comme très-fouvent le préfent de l'indicatif & celui du fubjonctif fe prononcent l'un comme

l'autre, quoiqu'ils s'écrivent différemment, je fens qu'il eft fort utile de diftinguer ces deux genres de phrafes. J'entends un peu les règles que vous avez données à ce fujet; mais je ne les poffède point encore affez pour en faire ufage dans toutes les occafions qui pourroient fe préfenter.

L'ABBÉ.

En attendant que ces règles vous foient devenues plus familières, voici une méthode méchanique qui peut vous en tenir lieu, parce que vous avez l'oreille délicate & accoutumée à la belle prononciation.

Subftitucz aux verbes qui vous embarrafferont un verbe dont le préfent indicatif differe bien clairement du préfent fubjonctif. Le vcrbe favoir par exemple, qui fe conjugue à l'indicatif: je fais, tu fais, il fait, & au fubjonctif: que je Jache, que tu faches, qu'il fache, &c.

Suppofez donc que vous vouliez favoir à quels modes appartiennent les verbes que renferme cette phrafe: je me diftrais bien fans qu'on me diftraie. Subftituons-y le verbe favoir.

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LA MARQUISE.

Il faut donc dire: je fais bien fans qu'on fache? L'ABBÉ.

Fort bien, Madame: lequel de ces deux verbes eft au fubjonctif?

LA MARQUISE.

C'est le dernier : qu'on fache.

L'ABBÉ,

Hé bien, c'eft auffi le dernier verbe de la phrafe propofée qui eft au fubjonctif: Jans qu'en me diftraie. Quelle conféquence tirez-vous delà pour l'orthographe?

LA MARQUIS E.

Comme dans tous les préfents fubjonctifs, ex

ceptá

cepté ceux du verbe étre & du verbe avoir, les trois perfonnes du fingulier doivent finir par un e muet, fuivi d'une s pour la feconde perfonne; le fecond verbe, qui eft à la troisième perfonne du fingulier préfent fubjonctif, doit finir par un e muet fans qu'on me diftraie. Pour le premier verbe, il eft à la première perfonne du fingulier préfent indicatif; & comme le verbe diftraire, n'eft pas de la première conjugaifon, cette première perfonne doit finir par s: je me diftrais bien. Je me diftrais bien fans qu'on me diftraie.

LE COMTE.

Comment mettriez-vous cette phrase au parfait ? LA MARQUIS E.

Vous ne m'y prendrez pas je fais préfentement que tous les compofés du verbe traire, n'ont point de parfait à l'indicatif, ni par conféquent au fubjonctif.

LE COMTE.

Ils n'ont même au fubjonctif, ni imparfait, ni conditionnel, puifque, dans ce mode, l'imparfait, le parfait & le conditionnel font exactement la même chofe.

L'ABBÉ.

Madame a très-bien expliqué cette phrafe: j'espère que bientôt elle n'ignorera aucune partie de ma méthode. Demain nous parlerons de l'impératif & de quelques autres modes, qui offrent peu de difficultés étrangères à celles que nous avons éclaircies dans nos derniers entretiens.

Оо

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