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LE MILOR D.

J'ai vu des perfonnes commettre des fautes encore plus groffières que celles-là: elles réuniffoient les deux genres d'orthographe dans un même mor & écrivoient, par exemple: je connoissais, il paroiffait, ils affoibliffaient, &c.

LE COMTE.

Il doit y avoir bien peu de perfonnes capables d'une telle inconféquence; il ne faut qu'un peu de bon fens pour écrire chacun de ces mots tout entier à la moderne: je connaiffais, il paraiffait, ils affaibliffaient, ou tout entier felon l'orthographe ancienne: je connoiffois, il paroiffoit, ils affoibliffoient.

LE MILOR D.

Cette inconféquence confifte à représenter fucceffivement le même fon de deux manières différentes: l'ancienne orthographe en autorife une tout aufli blâmable, qui confifte à représenter dans le même mot deux fons différents par les mêmes lettres, je croiffois, tu croyois, ils voyoient. Comment un enfant ou un étranger peut-il deviner que ces mots fe prononcent je croeffès, tu croeyès, ils voeyé ? Toute la difficulté difparoîtra en fubftituant ai à la voyelle compoféc oi: je croiffais, tu croyais ils voyaient, &c. Je ne finirois point fi je voulois faire voir tous les avantages de cette nouvelle orthographe, que vous ne pouvez fouffrir.

L'ABBÉ.

Quelque genre d'orthographe qu'on fuive à l'égard de l'imparfait, il doit généralement être femblable à la première perfonne du pluriel préfent, à la terminaifon près, qui fe change pour le fingulier en ois, ois, oit, ou ais, ais, ait; & pour le pluriel en ions, icz, oient ou aient; de forte que les deux premières perfonnes du pluriel ont dans l'imparfait avant la dernière fyllabe, un i de plus

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qu'au préfent: c'cft ce que nous allons voir dans la comparaison de ces deux temps. Pour ne pas multiplier les exemples, je mets les imparfaits alternaoi & par ai.

tivement par

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la

Quand à la première perfonne du pluricl, dernière fyllabe eft précédée d'un y cet y fe conferve donc à toutes les personnes de l'imparfait ? L'ABBÉ.

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Oui, Monfieur parce que la prononciation l'exige toujours. Par exemple, l'imparfait du verbe croire: je croyois, tu croyois, &c. fe prononce ainfi: je croi-iois, tu croi-iois, il croi-ioit, nous croi-iions, vous croi-iiez, ils croi-ioient.

SOPHIE.

Je crois que le temps imparfait ne met aucune différence entre les deux conjugaisons.

L'ABBÉ.

Non, Mademoiselle.

SOPHIE.

Celà eft fort commode: on n'a pas la peine de chercher l'infinitif. J'agréois, tu agréois, il agréoit nous agreyons, vous agreyez, ils agréoient.

L'ABBÉ.

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Vous faites une faute, Mademoiselle. Les deux premières perfonnes, à l'imparfait, doivent avoir avant la dernière fyllabe, un i de plus qu'au préfent. Quel eft le préfent du verbe agréer?

SOPHIE.

J'agrée, tu agrées, il agrée ou elle agrée;

Nous agréons, vous agréez, ils agréent ou elles agréent. L'A B B É.

Formez préfentement les deux premières perfonnes au pluriel de l'imparfait.

SOPHIE.

Nous agréions, vous agréiez. J'entends cela. Quand les deux premières perfonnes du pluriel n'ont point d'i au préfent, on met un i à l'imparfait : nous agréons, nous agréions; vous agréez, vous agréiez; nous faluons, nous faluions, vous faluez, yous Jaluiez. Par la même raifon, quand il y a un i au préfent, on en met deux à l'imparfait nous rions, nous riions; vous riez, vous riiez; & quand il y a un y au préfent, l'imparfait prend un y & un i. Mais faut-il que l'i foit placé avant l'y, ou après ?

L'ABBÉ.

Il fe met toujours après, Mademoiselle. Dans

quelque genre de mots que ce foit, jamais l'y n'eft précédé d'un i

SOPHIE.

Nous diftrayons, nous diftrayions; vous diftrayez, vous diftrayiez, &c. Ceci ne me fortira point de la mémoire.

LE MILO R D.

Cet i ajouté me paroît caractériser l'imparfait pour la vue feulement.

L'ABBÉ.

Pardonnez-moi, Monfieur. Pour peu qu'on prononce avec exactitude, on fait fentir cet ajouté qui diftingue l'imparfait du préfent. C'eft ce que vous pouvez voir en comparant ces deux phrafes, dont la première eft au préfent, & la feconde à l'imparfait aujourd'hui nous jouons, nous rions, nous nous diftrayons après nos travaux; autrefois nous jouions, nous riions, nous nous diftrayions au lieu de travailler.

LA MARQUIS E.

Vous avouerez du moins que l'i après l'y n'cft pas fort utile à la prononciation.

L'ABBÉ.

Vous n'avez pas fait attention aux phrases que je viens de citer: aujourd'hui nous nous diftrayons, autrefois nous nous diftrayions. Dans le premier de ces verbes, qui eft au préfent, on fait entendre comme deux : nous nous diftrai-ions; dans le fecond, quieft à l'imparfait: nous nous diftrayions on fait entendre un i de plus, c'eft-à-dire trois i nous nous diftrai-iions. Or ces trois i ne peuvent être exprimés que par un y fuivi d'un i

SOPHIE.

Puis qu'un y a le fon de deux i, au lieu d'écrire à l'imparfait par deux i, autrefois nous riions,

il faudroit donc écrire par un y: autrefois nous

ryons.

L'ABBÉ.

Cette orthographe ne détermineroit pas la vraie prononciation. Nous ne fommes accoutumés à prononcer l'y comme deux i, que quand il cft placé après une voyelle ailleurs il ne fonne que comme un i fimple; ce qui n'a guère lieu que dans les mots empruntés des langues anciennes tels que phyfique, mythologie, &c. que plufieurs perfonnes fe permettent d'écrire par un i fimple : phifique, mithologie, &c. Ainfi en écrivant à l'imparfait nous ryons, par un y, on prononceroit comme au préfent, nous rions; au lieu qu'il faut dire, nous riions.

LA MARQUISE.

Voilà donc tout ce qui concerne le mode indicatif ?

L'ABBÉ.

Il nous refte encore à parler des temps compofés. Ces temps ne font autre chofe que les quatre temps fimples des verbes étre & avoir, joints à des espèces d'adjectifs qu'on appelle participes, parce qu'en effet ils participent des propriétés du nom & de celles du verbe.

Chaque verbe a fon participe adjectif, dont la terminaifon fe reconnoît à peu près comme celle des adjectifs. Par exemple, dans ces phrafes: Nous avons dit, je fuis venu, je m'étois diftrait, on m'auroit furpris, la terminaifon des participes dit venu, diftrait, furpris, eft indiquée par leurs féminins dite, venue, diftraite, furprise, &c. Ces indices fcroient prefque fuffifants pour des François, mais Monfieur ne fera point fâché que j'entre dans un plus grand détail.

Tous les participes des verbes de la première conjugaifon fe forment en retranchant Pr finale de l'infinitif, & marquant l'e qui précède d'un

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