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Les adjectifs qui finiffent au féminin par ereffe, changent au mafculin cette terminaison en eur, Pécherele, pécheur; vengereffe, vengeur; demandereffe, demandeur,&c. Ces mots fe rapportent à des verbes françois: pécher, venger, demander, &c. & c'eft probablement fur cette analogie que les navigateurs ont formé le mot guinderele, pour défigner une groffe poulie, qui fert à guinder les mâts, c'eft-à-dire à les élever & à les mettre en place. Outre les mots cités, enchantereffe, qui enchante; baillereffe, qui baille à ferme, qui fait un bail; défendereffe, qui fe défend en juftice; & felon quelques poëtes, chaffereffe, qui chaffe, qui pourfuit le gibier, font les feuls adjectifs féminins de cette efpèce de terminaifon. Il eft inutile de remarquer qu'il y a beaucoup de différence entre bailleur & baillereffe, celui ou celle qui confent une ferme, & bailleur & bailleuse, celui ou celle qui bâille, qui fait des bâillements; de même qu'entre demandeur & demandereffe, qui attaque en juftice, & demandeur & demandeufe, qui ne fe fait aucun fcrupule de demander.

Les autres adjectifs terminés au féminin par effe; fubftituent dans le mafculin, un e muet à cette finale: tygreffe, chanoineffe, prophétele, prétreffe, apothicaire le négreffe, drôleffe, traitrelle, diableffe, ivrogneffe, aneffe, font au mafculin tygre, chanoine, prophète, prétre, apothicaire, nègre, dróle, traître diable, ivrogne, ane, &c. Il en faut excepter abbelle, dont le mafculin abbé, prend l'é aigu au lieu de l'enniet; & deeffe, ducheffe, archidu cheffe, diaconeffe, larroneffe, qui font au mafculin dieu, duo archiduc, diacre, larron; & profeffe, expreffe, dont les mafculins font profès & exprès.

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SOPHIE.

Je croyois qu'on difoit au féminin, une perfonne dróle, une drôle d'hiftoire, & non une perfonne dróleffe, une drôleffe d'hiftoire.

L'ABBÉ.

Celà eft vrai, Mademoiselle. Quand ce mot eft employé avec un fubftantif, comme dans les exemples que vous venez de citer, on dit toujours au féminin drôle & non drôleffe; mais quand ce mot eft employé fans fubftantif, on dit toujours au féminin une dróleffe, des droleffes, & non une drôle, des drôles, &c.

Nous remarquerons à l'égard de tous ces adjectifs, ou mots fufceptibles des deux genres, que dans les féminins terminés par effe, l'e qui précède les deux s eft toujours ouvert; au lieu que cet e eft prefque toujours aigu dans les fubftantifs de la même terminaifon, tels que trifteffe, noblesse, jagesse, &c.

LE MILOR D.

Puifque celà eft ainfi, ne fût-ce que pour me rappeller vos obfervations, j'écrirai les premiers de ces mots avec un accent circonflexe : diaconéffe, dééffe, tygresse, ducheffe, &c. & les autres avec un accent aigu: tristésse, noblésse, sagésse, &c. L'ABBÉ.

C'eft, je crois, ce que vous pouvez faire fans nul inconvénient.

Les adjectifs féminins Grèque, publique, caduque, Turque, font au mafculin Grec, public caduc, Turc: tous les autres adjectifs féminins de ce genre de terminaifon, font les mêmes pour le mafculin. On dit également un palais magnifique & une maison magnifique; un monument antique & une médaille antique, &c.

Au refte, il y a des adjectifs qui ne font abfolument foumis à aucune régle. Les féminins Czarine, favorite, maligne, bénigne, fraiche douce faulle, roule, jaloufe, crue nue, tierce, diffoute, abfoute, font au mafculin Czar, favori, malin, bénin, frais, doux, faux, roux, jaloux, crud ou cru, nud où nu, tiers, diffous & abfous,

Belle, nouvelle, folle, molle, vieille, font au mafculin beau, nouveau, fou, mou, vieux.

SOPHIE.

Le mafculin eft quelquefois femblable au féminin; car on dit : un belle homme, le nouvelle an un folle espoir, vn vieille habit.

L'A B BÉ.

Vous vous trompez, Mademoiselle : cette reffemblance n'exifte que dans la prononciation. Ces adjectifs s'écrivent au mafculin par une fimple: un bel homme, le nouvel an, un fol espoir, le vieil Adam, &c. au lieu que le féminin prend deux Z fuivies d'un e: une belle femme, la nouvelle année, une folle espérance, une vieille maison, &c.

D'ailleurs, cette terminaifon du mafculin n'a lieu que quand les adjectifs précèdent le fubftantif auquel ils fe rapportent, & que ce fubftantif commence par une voyelle ou une h non afpirée; ce qu'on voit dans les exemples cités. L'adjectif mou, molle, ne prend jamais d'l au masculin: on dit un homme mou & efféminé, & non un homme mol & efféminé. On met indifféremment l'adjectif vieux ou vieil avant le fubftantif auquel il fe rapporte, pourvu que ce fubftantif commence par une voyelle on dit également bien un vieil arbre & un vieux arbre, un vieil habit & un vieux habit, &c. cependant il y a des phrases confacrées, où on emploie abfolument le premier on dit en ftyle myftique le vieil homme, le vieil Adam, & non le vieux homme, le vieux Adam, &c.

LE MILOR D.

Cette méthode de dériver le masculin du fémiín me paroît bien commode pour les perfones qui connoiffent la vraie prononciation des mots elle doit les mettre dans le cas de fe patfer très-fouver de dictionnaire.

LA MARQUISE.

Je voudrois que vous me propofaffiez quelques adjectifs féminins, pour en déduire le mafculin.

L'ABBÉ.

Vous pouvez vous les propofer vous-même. Pour plus de facilité, prenez le nom de quelque être féminin, auquel vous attribuerez diverfes qua➡ lités exprimées par des adjectifs.

LA MARQUISE

Je dirai donc par exemple:

Une peinture fine, éclatante, délicate & exquife.
L'ABBÉ.

Attribucz préfentement ces mêmes qualités à quelque être mafculin, fans vous mettre trop en peine du choix; car il eft rare que plufieurs adjectifs s'accordent également bien avec deux différents fubftantifs.

*་

LA MARQUIS E.

Mettons, par exemple, qu'il s'agisse d'un tableau; j'écrirai:

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Un tableau fin, éclatant, délicat & exqui.

L'ABBÉ.

Vous avez commis une faute, Madame: voyons vous pourrez la reconnoître.

LA MARQUISE.

J'ai retranché la dernière fyllabe des adjectifs féminins fine, éclatante, délicate & exquife. L'ABBÉ.

Celà eft fort bien, Madame'; mais il falloit laiffer fubfifter la confonne qui commence cette fyllabe retranchée.

LA MARQUIS E.

J'ai confervé l'n dans fin, le t dans éclatant, &

dans délicat. Falloit-il mettre une s à la fin du mot exquis?

L'ABBÉ.

Oui, Madame, puifque cette confonne commence la dernière fyllabe de l'adjectif féminin exquife.

LA MARQUISE.

Je voulois le faire aufli; mais j'ai pensé qu'il ne s'agit que d'un tableau, & que les mots ne doivent finir par une s que quand ils font au pluriel.

L'ABBÉ.

Vous étiez dans l'erreur, Madame. Nous avons beaucoup de mots qui finiffent par s au fingulier, comme au pluriel. On dit également un bois épais, & des bois épais; un bourgeois, & des bourgeois; un temps & des temps, & &c.

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SOPHIE.ambe nue.

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2 12

Je ne me flatterois pas encore de pouvoir expliquer votre règle; mais je crois que je l'entends un peu. Je finirai regard par un d, & tranfport par un t; parce que ce d & ce t commencent la dernière fyllabe des mots regarder & transporter.

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Dans ces exemples, vous ne paffez pas du féminin au mafculin. Regard & tranfport, font bien des noms masculins; mais regarder & tranfponier font des verbes.

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L'ABBÉ.

Celà n'y fait rien, Monfieur. La règle s'applique à tous les cas où on peut remonter du compofé au fimple, de quelque nature que foient les mots. De boifer, univerfel, joncher, planer, bondir, millet, on derive bois, univers, janc, plan, bond, mil, &c.

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Il en cft de même quand on eft obligé de retran

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