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nonce le t dans cette phrafe: il eft onze heures: l'o fait élifion avec le mot qui précede dans celles-ci; agé d'onze ans, il me demande onze jours, &c. LE MILOR D.

Les h muettes ne produifent donc abfolument aucune fenfation?

L'ABBÉ.

Non, Monfieur. Les mots où elles fe trouvent fe prononcent exactement comme fi elles n'y étoient pas: elles n'empêchent ni l'élifion des voyelles, ni l'articulation des confonnes. C'eft ce qu'on voit dans ces vers:

Mais Edipe, héritier du fceptre de Corinthe,

Jeune, & dans l'âge heureux qui méconnoît la crainte, L'or feul règle les rangs de rien il fait un homme. C'eft n'être point heureux que de l'être en filence. Mais l'honneur fans argent n'eft qu'une maladie. Que peuvent devant vous tous les foibles humains On prononce comme s'il n'y avoit point d'A: di-péritier, l'a-geureux, eu-nomme, poin-teureux, l'onneur, foible-zumains, &c.

Ainfi c'eft faire un hiatus que de mettre après toute autre voyelle que l'e muet un mot qui commence par une h muette; ce qui fe rencontre dans ce mauvais vers :

Un joli homme, enivré de fes charmes.

Joli homme, c'eft comme s'il y avoit joli omme, ce qui fait un hiatus, puifque deux voyelles s'y fuccèdent immédiatement & fans élifion. Il n'en eft pas de même quand l'h eft afpirée ; parce qu'alors elle fait l'office de confonne. Un emploi honteux, il aura hai, ne forment point d'hiatus.

SOPHIE.

Ces h qui ne fe prononcent point doivent occafionner bien des difficultés!

H

LE MILOR D.

Il me paroît plus difficile encore de favoir quand l'ufage veut que les h foient muettes ou afpirées. Les Grammaires que j'ai lues fe bornent à faire une lifte de tous les mots dans lefquels cette dernière prononciation a licu.

L'A B B É.

C'eft auffi le parti que nous prendrons pour réfoudre l'une & l'autre de ces difficultés; mais nous artendrons pour celà que nos connoiffances nous permettent de ranger tous ces mots par claffes; ce qui diminuera beaucoup le travail de la mémoire.

Les confonnes qui approchent le plus de l'afpiration font les gutturales, c'eft-à-dire, celles qui fe prononcent de la gorge.

Nous diftinguerons la gutturale douce, qu'on exprime toujours par le g, tel qu'on le prononce dans gloire, garde, &c. & la gutturale forte, qui s'écrit ou par un k, comme dans alkali; ou par un 9, comme dans quelqu'un ; ou par un c, comme dans cacophonie; ou même par un g; ce qui a lieu quand cette confonne termine un mot, & qu'elle fonne avec le mot fuivant, comme dans ces expreflions un fang épais, un long & pénible travail, qu'on prononce un fan képais, un lon képénible travail, &c.

LE MILOR D.

Ce qui m'embrouille toujours dans l'emploi de ces confonnes, c'eft que leur valeur n'eft pas conftante. Le g & le c perdent la prononciation gutturale quand ils précèdent un e ou un i: le c prend alors le fifflement de l's, comme on le voit dans ciel, cerceau, qu'on prononce fiel, ferfeau, &c. & le g prend celui du j, comme dans génie, gite, qu'on prononce jénie,jíte, &c,

L'ABBÉ.

Quand on veut faire entendre le c guttural avant le ou l'i, on l'exprime ordinairement par qu. Ex. Vainqueur, vous vainquez, je vainquis, &c.

Mais comme aucune lettre ne peut être fubftituée au g, pour lui conferver la prononciation gutturale avant ces mêmes voyelles e & i, on eft obligé d'y interpofer un u. Par ce moyen le g dans guide & guérir, fe prononce comme dans gloire, garder, &c.

SOPHIE.

Cet u ajouté eft, fi je ne me trompe, ce qu'on appelle une voyelle perdue.

L'ABBÉ.

Oui, Mademoiselle; parce qu'il ne produit abfolument aucun fon, & qu'il n'eft ajouté au g que comme une fimple marque, qui en fait prefque un caractère différent, de manière qu'on pourroit diftinguer le g & le gu

LA MARQUISE

Quoique dans cette circonftance, l'u puiffe s'appeller perdu, du moins a-t-il quelque utilité; mais je n'en vois aucune dans celui qu'on met prefque toujours après le q. Quelqu'un, qui, quoi, &c.

LE MILO R D.

Cependant on l'emploie dans tous les mots, excepté coq & cinq. J'ai vu un ouvrage françois qui propofoit la fuppreffion de l'u après cette confonne: l'auteur a d'autant plus de raifon que le 9 a conftamment la prononciation du k, & que cet u ajouté ou fupprimé ne peut y apporter aucun changement.

LE COMT E.

Cet u eft étymologique: on le trouve après le 4 dans tous les mots latins fans exception; & il

est fi étroitement prefcrit dans la langue françoise, que quand on prononce un u après le q, il faut en écrire deux le premier eft cet u perdu, & le fecond l'u prononcé. Ainfi il faut écrire quelqu'un, il ne fait qu'ufer de repréfailles, & non quelq'un, il ne fait q'ufer de repréfailles, &c.

:

SOPHIE.

Ceci me paroît fort clair: il y a toujours après le q, un u qui ne fe prononce point; ainfi s'il y a un u prononcé, celà fait deux u de fuite. Quelqu'un, il n'en faut qu'une, &c.

LE COMTE.

Oui, Mademoiselle: il n'y a pas long-temps encore que cette règle étoit générale; mais préfentement l'usage en excepte le mot piqûre, que beaucoup de perfonnes ne se permettent plus d'écrire par deux u, piquúre.

LE MIL OR D.

S'il eft néceffaire de conferver cet u perdu dans tous les autres mots, je ne voudrois pas le retrancher dans le mot piquúre.

LE COMT E.

Ce ne fera point une faute: ces deux orthographes, piqûre & piquúre funt prefque également autorifées.

SOPHIE.

Quand on prononce un u après le g, faut-il aussi en mettre deux ?

L'ABBÉ.

Non, Mademoiselle il fuffit alors d'employer l'ù tréma, comme vous le voyez dans les mots cigüe, aigüille, pour empêcher que la feconde fyllabe ne s'y prononce comme dans figue & anguille. Encore cet u tréma n'eft-il utile que quand il cft fuivi d'une voyelle; car il eft de règle généralę

que l'u fe prononce toujours quand il précède une confonne: figure, augure, &c.

LE MILOR D.

Il me femble qu'il y a des mots françois dans lefquels il feroit néceffaire que le q fût fuivi d'un u tréma.

L'ABBÉ.

Oui, Monfieur : les mots écrits par que ou qui dans lefquels on a confervé la prononciation latine, tels que quinquagénaire, quinquagefime, équeftre, équitation, peuvent être écrits avec un u tréma, quinquagénaire, quinquagefime, éqüeftre équitation, &c. parce que l'u s'y prononce fans alté ration, comme dans aigüille, ambigüité, &c.

LE MILOR D.

Quand dans les mots latins ou dérivés de cette langue fans altération, l'u eft précédé du q ou du g, vous le prononcez donc toujours comme l'u françois ?

L'ABBÉ.

Cela n'eft pas général. Quand l'u eft fuivi d'un a, il prend le fon de ou; ce qu'on voit dans les mots fuivants & quelques autres qui gardent la prononciation latine ou étrangère: aquatique équateur, quadragénaire, quadragefime, quadru pède, quinquagénaire, quinquagefime, lingual, alguafil. On lit acouatique, écouateur, couadragénaire, couadragefime, couadrupède, cuincouagénaire, cuincouagefime, lingoual, algouafil,

&c.

On n'eft pas bien d'accord fur la prononciation de ces mots: plufieurs perfonnes voudroient qu'on y fupprimât le fon de l'u, & qu'on dit acatique, écateur, cadragénaire, &c. Il feroit à fouhaiter que tout le monde fût de cet avis, au moins pour les mots qui trouvent plus fouvent leur place dans le difcours ordinaire,

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