Imágenes de página
PDF
ePub

gée, en frapant d'aveuglement le Poëte fa tyrique; &, pour recouvrer la vue, Stéftchore fut obligé de chanter la Palinodie. Il compofa, en effet, un autre poëme, en soutenant qu'Hélène n'avoit jamais abordé en Phrygie, comme il l'avoit prétendu ci-devant. Il louoit également fes charmes & fa vertu, & félicitoit Ménélas d'avoir obtenu la préférence fur fes rivaux.

La fixieme Ode du premier Livre des Odes d'Horace, qui commence par ces mots, O matre pulchrá filia pulchrior, eft une vraie Palinodie, mais la plus mignoane & la plus délicate.

Les vers du Roi de Pruffe à Darget font úne véritable Palinodie, & le Poëte leur a donné ce titre; ils commencent ainfi :

J'en fuis fâché, pauvre Darget,
Si ma Muse trop indiscrète
De fes bons-móts te fit l'objet :
Rappelle-toi que tout Poëte
Doit amplifier fon fujet.

Ton nom,

fi propre à l'hémiftiche;
Vint, dans mon poëme, à propos
Se placer comme dans fa niche;
Et je chargèai deffus ton dos
Tout ce qu'une fiction folle
Et la gigantefque hyperbole
Imagina pour mes héros.

La Lettre, accompagnée de la traduction en vers du De profundis que M. Piron écrivit, il y a quelques années, à l'Auteur du Mercure pour qu'il l'inférât dans fon

Journal, est aussi une véritable Palinodie par laquelle ce Poëte rétracte tout ce qu'il a écrit contre les mœurs. Son repentir doit être une nouvelle leçon pour tous ceux qui pourroient abuser de leurs tålens. Lotfqu'on n'a point refpecté les mœurs ou la religion dans fes ouvrages, on s'en repent toujours dans un âge plus avancé. L'homme fage fe conduit à vingt ans, comme il voudroit s'être conduit, quand il en aura foi xante. Voyez POÉSIES licentieufes.

PANEGYRIQUE, difcours à la louange d'une perfonne illuftre, ou à la louange d'une vertu fignalée, ou d'une grande ac tion. Ce mot eft grec, & fignifie dans fon origine toute affemblée, parce qu'autrefois, chez les Grecs, on prononçoit les Panégyriques dans les cérémonies publiques & fo→ lemnelles qui attiroient un grand concours de peuples.

Nous avons un Recueil deHarrangues latines intitulé Panegyrici veteres, qui renferme les Panégyriques de plufieurs Empéteurs Romains. On trouve à la tête celui de Trajan, par Pline le jeune, qui le com pofa par ordre du Sénat & au nom de tout Î'Empire. L'Orateur y adreffe toujours la parole au prince, comme s'il étoit préfent; &, s'il le fut en effet, car on en doute, il dut en couter beaucoup à la modeftie de cet empereur de s'entendre ainfi louer en face & pendant long-tems. Le style de ce difcours eft élégant, fleuri, lumineux, tel que doit être celui d'un Panégyrique, ou il eft permis d'étaler avec pompe tout ce que l'éloquence a de plus brillant. Les pen

fées y font belles, folides, en grand nom bre, & fouvent paroiffent toutes neuves. Les expreffions, quoique'affez fimples, n'ont rien de bas, rien qui ne convienne au fujet, & qui n'en foutienne la dignité. Les defcriptions fon vives, naturelles, circonftanciées, pleines d'images naïves, qui mettent l'objet fous les yeux & le rendent fenfible. Tout le difcours & rempli de maximes & de fentimens dignes du prince qu'on y loue. M. de Sacy nous en a donné une fort belle traduction.

Dans ce même Recueil, fuivent onze autres piéces du même genre. Cette collecHift.anc. tion, dit M. Rollin, outre qu'elle contient tom. 12. beaucoup de faits qui ne fe trouvent point ailleurs, peut être fort utile pour ceux qui font chargés de faire des Panégyriques.

Les Panégyriques & les Oraifons funébres font un genre d'éloquence à part, qui a fes régles & fon ftyle particulier. On les rapporte ordinairement les uns & les autres au genre tempéré; & quoiqu'en effet, ce genre y ait plus de part que les deux autres, il ne s'enfuit pas que ceux-ci n'y en ayent aucune. (Voyez GENRES d'Eloquence.) Le Panégyrique doit être moral, & l'Óraison funébre touchante. L'admiration qu'on fe propose d'exciter en louant les vertus des faints, ne doit point être ftérile, mais ramenée à l'inftruction & à la perfection des Auditeurs. L'éloge des actions des grands hommes doit être auffi rapporté à la religion. Nous difons un mot des défauts à éviter dans ces deux fortes d'ouvrages; mais les grands modèles que nous pro

poferons à cet égard, en dévoileront mieux les régles, que ne pourroit faire un long détail de préceptes. Nous avons dit fur les Oraifons funébres tout ce que nous avons cru néceffaire à ce fujet : nous nous bornerons donc ici à parler des Panégyriques des faints. Voyez ELOQUENCE de la Chaire. ORAISONS funébres

Le Panégyrique réunit deux objets, d'honnorer les faints par l'éloge de leurs vertus & de nous édifier, en nous portant à l'imitation de ces mêmes vertus. Mais en cela, il y a deux écueils à éviter; l'un de s'attacher tellement à exalter les vertus des faints, que l'on néglige l'inftruction; l'autre de donner à l'inftruction tant d'étendue, qu'à peine faffe-t-on connoître les actions ou les vertus des faints. C'eft donc du jufte mêlange des éloges & de la morale, que fulte la premiere perfection du Panégyrique. Louer chaque vertu en particulier, en tirer des conféquences falutaires à l'Auditeur, c'est s'expofer à entaffer des faits & des réflexions dont le grand nombre peut produire de la confufion. Il eft beaucoup plus avantageux de ramener les faits & la morale à quelque centre commun, à quelque vertu dominante qui ait particuliérement éclaté dans la vie du faint dont on entreprend l'éloge, ou de rappeller les principales circonstances de fa vie à quelques époques principales. Ainfi, foit que l'on confidere ses différentes vertus, foit que l'on détaille les divers états par lefquels il a paffé, on doit faire régner dans le Panégyrique une unité de fujet, à laquelle repondra l'unité de la

morale. Voilà ce qu'il y a de plus important à obferver pour en former réguliérement le plan. Mais l'exécution demande des attentions encore plus délicates. Comme le Panégyrique confifte, en partie, en narrations, les Orateurs novices, qui manquent de fond, croyent avoir fait quelque chofe d'excellent, quand ils fuivent exactement les traces du faint, depuis fa naiffance jufqu'à la mort, & lorfqu'enchaînant fans art une grande multitude de faits, ils font parvenus à faire le récit de fa vie. Ils ignorent qu'il ne fuffit pas de narrer, & qu'en narrant, il ne faut ni tout peindre ni toujours peindre; que les réflexions & les fentimens font comme des ombres qui fervent à donner de la force aux tableaux. Enfin, quoique le Panégyrique admette plus de graces & de fleurs dans le ftyle, que le difcours moral, la févérité de la chaire, interdit toujours une certaine éloquence trop brillante & de pure oftentation. Il faut de l'art fans. doute; & rien n'eft plus fufceptible que le Panégyrique de lieux communs, d'images. de comparaisons, d'antithefes & d'autres figures. Mais, quand çet art fe montre trop à découvert, il eft à craindre que l'Orateur ne dérobe, en fe l'attirant à lui même, une partie de l'admiration qu'on doit toute entiere à fon fujet. Je n'ai garde de comprendre dans ces réflexions les Panégyriques de M. Flechier, qui, bien que très-brillans renferment une morale faine, & refpirent partout l'édification & la piété. L'antithefe domine un peu trop dans fes difcours, d'ailleurs admirables par l'élégance par l'élégance & la pureté

« AnteriorContinuar »