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chef. Et après qu'ilz eurent prins terre, alèrent à Rouen et de là au Bois de Vincennes, devers le Roy son père et la Royne, sa mère, qui y estoient. Et chevauchoit ladicte royne Katherine en estat royal, toujours ledict duc avecques elle, à très grande puissance de gens d'armes. Auquel lieu' ala de Meaulx à l'encontre d'elle ledit roy Henry, son seigneur et mary, avecques ses princes, duquel elle fut receue joieusement comme l'ange de Dieu. Et aussi, du Roy et de la Royne de France, fut faicte toute léesse audit lieu de Vincennes, pour la venue de leur beau filz et de leur fille la Royne. Et le pénultime jour de may, prévigile de la Penthecouste, lesdiz roys et les roynes leurs femmes, se partirent dudit bois de Vincennes et entrèrent en Paris en moult noble estat. Et se logèrent

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roy de France et la royne, en l'ostel Saint-Pol, et roy d'Angletere et la royne sa femme, furent logez ou chastel du Louvre. Esquelz lieux chascun desdiz roys célébrèrent royalment en leursdiz hostelz la solemnité de la Penthecouste, qui lors estoit. Et à cedict jour furent' ensemble le roy d'Angleterre, et sa femme tant glorieusement comme pompeusement, à disner, couronnez de leurs précieux dyadèmes. En celle salle séoient aussi à table les ducs, princes et prélats, confannoniers et chevaliers de la gent anglesche, chascun comme à son estat appartenoit. Et furent remplis de plusieurs viandes et de précieux buvrages. Et tindrent à ce jour lesdiz roys et roynes noble court et large, de tous les Anglois qui estoient là venus à ceste feste.

1. De Vincennes.

2. Il y a feirent au texte.

Et lors, le peuple de Paris alèrent en grant nombre audit chastel du Louvre pour veoir et visiter ledit roy et royne d'Angleterre, séans ensemble et portans couronne. Mais ledict peuple, sans estre administré de boire ne de manger par nul des maistres d'ostel de céans, s'en partirent, contre leur coustume, dont ilz murmurèrent ensemble. Car ou temps passé, quant ilz aloient en si grandes et si haultes besongnes à la cour de leur seigneur et roy de France, ilz estoient festiez et receuz des gouverneurs, de boire et de menger, à sa court, qui estoit à tous ouverte. Et là, ceulx qui se vouloient seoir estoient servis de vins et de viandes, très largement, par les serviteurs du roy. Mais alors le roy Charles, qui tout le temps de sa vie avoit esté comme ses prédécesseurs large et courtois, se séoit en son hostel à Saint-Pol, avecques lui la royne sa compaigne, assez seul et ainsi que tout mis arrière et en oubli des grans seigneurs de son royaume, et aussi des autres. Et pour ce temps estoit yssue et eslongnée toute la puissance dudit royaume d'icellui roi Charles, et entrée ou arrestée en son beau filz le roy Henry. Et pour lors ledit roy ne gouvernoit point son dit royaume, mais estoit gouverné et mis à néant, ou regard de sa grande et noble puissance qu'il avoit autre fois eue durant son règne. Pour lesquelles choses plusieurs François, bons et loyaulx, avoient au cuer grant tristesse, et non pas sans

cause.

Esquelz jours, icellui roy d'Angleterre estant oudit lieu de Paris, fist en icelle ville cueillir la taille des marcs d'argent, dont dessus est faicte mencion, pour forger la nouvelle monnoye, ainsi et par la manière

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qu'on l'avoit déjà cueilli ailleurs. Si s'en esmeurent plusieurs rumeurs. Mais finablement, pour la crainte et doubte dudit roy Henry, ne osèrent monstrer semblant de nulle désobéissance, ne rebellion.

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CHAPITRE CCLXIV.

Comment la ville de Gamaches fut rendue en la main des Anglois. Le siége de Saint-Walery, et la reddicion de Compiengne aux Anglois, et autres incidens.

Item, le xxi jour du mois de juing, les deux roys de France et d'Angleterre se partirent de Paris et alèrent à Senlis, où ils séjournèrent par aucuns jours. Et de là, approuchant le jour que la ville de Gamaches se devoit rendre, le roy Henry y envoia pour icelle recevoir, le comte de Varvich, à tout trois mil combatans. Lequel conte, comme promis avoit esté, entra en ladicte ville, le xvio jour de juing, et restabli les hostages sains et hetiez, lesquelz y avoit menez avec lui. Et après receut les seremens de ceulx de la ville au nom des deux roys, et avec ce y commist capitaine messire Phileton, natif d'Angleterre, avec certain nombre de gens d'armes et archers. Et ces besongnes acomplies, ala, ledit conte, devant Saint-Walery, que tenoient les Daulphinois, et approuchant icelle, envoia ses coureurs devant ladicte ville. De laquelle yssirent à l'encontre d'eulx environ cent hommes d'armes, expers et bien montez sur chevaulx roides et habiles, qui de pleine venue se férirent èsdiz Anglois, et y eut de grans estours d'une partie et d'autre, et hommes d'armes navrés terriblement, et aucuns autres prins pri

sonniers de la partie des Anglois. Mais en ce faisant, le conte de Varvich, pour secourir ses gens se hasta moult fort, à tout son host, pour quoy il convint par contrainte les Daulphinois rentrer dedans leur ville en grant haste. Et lors, ledit conte, moult prudentement chevaucha en ses armes autour de la ville pour fermer son ost et tenir ses gens en bonne ordonnance.

La plus grant partie des Anglois se logèrent dedens l'abbaye, et les autres, le mieulx qu'ilz peurent, en tentes et paveillons. Après lequel logis prins par eulx, commencèrent ladicte ville à batre de leurs engins, et sans point cesser; gecter contre les murs d'icelle, et les dérompirent en plusieurs lieux. Et quant est des saillies et envaissemens que firent les Daulphinois chevaleureusement sur ceulx du siége, se convient taire pour cause de briefté. Et pour tant que du costé vers la mer n'y avoit point de siége, par faulte de navire, que point n'avoient lesdiz asségans, yssoient lesdiz asségez à leur plaisir par leur navire pour aler quérir vivres habondamment et autres choses à eulx décisibles et neccessaires, tant au Crotoy comme ailleurs. Laquelle chose desplaisoit moult au conte de Varvich et à ceulx dudit siége. Et pour ce, envoya icellui conte en plusieurs pors de Normendie quérir navire. Lesquelz tost après vindrent à grant puissance devant ladicte ville, laquelle ilz assegèrent par le costé de la mer. Dont lesdiz asségans, voians que de tous costez avoient perdu l'issue de leur ville, furent moult troublés et assumplis. Pour quoi, au bout de trois sepmaines ou environ, firent traictié avec le dessusdit conte de Warvich, par condicion qu'ilz se départiroient de ladicte ville, sauf leurs corps et leurs biens, le quatriesme jour

du mois de septembre ensuivant, ou cas que le duc de Touraine, Daulphin, ne seroit à ce jour puissant de combatre ses ennemis devant ladicte ville. Et ainsi, durant le temps dessusdit, lesdiz asségez se abstindrent de courir et fourrager le pays. Et sur ce, pour plus grande seureté, délivrèrent audit conte bons hostages. Lequel, à tout ses Anglois, retourna vers son mistre le roy Henry.

Item, après l'acomplissement des besongnes dessusdictes, le roy Henry envoya le duc de Bethfort son frère et autres princes, grandement acompaignez, à la ville de Compiengne, pour icelle recevoir de la main du seigneur de Gamaches, lequel, comme dit est devant, l'avoit promis. Et la rendi le xvin" jour du moys de juing, en la main dudit duc de Bethfort. Et après se départi, à tout environ douze cens chevaulx, lesquelz, soubz bon sauf-conduit du roy Henry, il emmena oultre la rivière de Seine, et de là vers le Daulphin.

Item, en cas pareil le seigneur de Gamaches rendi les fortresses que ses gens tenoient, dont dessus est faicte mencion. Et par ainsi toutes les places que lesdiz Daulphinois tenoient depuis Paris jusques à Boulongne sur la mer, furent remises en l'obéissance des deux roys de France et d'Angleterre, excepté le Crotoy et la terre de Guise.

En oultre, après que ledit duc de Bethfort eut receu les seremens de bourgois et habitans de Compiengne, et aussi qu'il y eut constitué capitaine messire Hue de Lannoy, s'en retourna à Senlis devers le roi Henry son frère.

Item, en ce mesme temps furent envoiez par iceulx

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