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la feste de tous les sains et le jour des ames' dedens Paris sollempnelment, chascun en leurs hostelz. Et lors, aulcuns jours ensievans, ledit duc de Bourgongne fist en son hostel d'Artois et à ses propres despens, les nopces de messire Jehan de La Trimouille, seigneur de Jouvelles, et de la damoiselle de Rochebaron, seur au seigneur d'Amboise, qui pour ce temps se tenoit avec la royne de France', femme au roy Charles desfunct, en la compaignie de la dame de La Frète. Aux quelles nopces furent, ladicte royne, ledit duc de Bethfort, sa femme la duchesse, seur au duc de Bourgongne, avecques eulx le conte de Salseberi et la contesse sa femme, le conte de Suffort, l'évesque de Terrewane, le seigneur d'Escalle, avecques très grand nombre de notables chevaliers, escuyers, dames et damoiselles et autres gens de grand et noble estat, qui très grandement furent festoyés et receus par ledit duc de Bourgongne et les siens. Et furent adonc grans résolucions et esbatemens, tant en boires et en mengiers riches et précieux, comme en dansses, joustes et aultres esbatemens. Et mesme joustèrent les ducz de Bethfort et de Bourgongne et aulcuns aultres princes, avecques grand nombre de leur chevalerie.

En après le duc de Bourgongne retourna de Paris en son pays de Bourgongne, et là prist en mariage, par dispensacion apostolique, la vesve de son oncle

1. La Toussaint. Le jour des Morts.

2. Isabeau de Bavière.

3. Térouane.

4. Bonne d'Artois, fille de Philippe, comte d'Eu, et veuve de Philippe, comte de Nevers. Philippe le Bon eut trois femmes, celle-ci est la deuxième. La première avait été Michelle de France,

conte de Nevers, jadis mort à la bataille d'Azincourt. Laquelle dame estoit moult renommée de vivre saintement, et avoit du dessusdit conte de Nevers deux filz. Et si estoit seur germaine au conte d'Eu, qui pour lors estoit prisonnier en Angleterre, et demie seur à Charles de Bourbon, conte de Clermont.

En ce mesme temps rendi son esperit Jehan de Baivière, jadis évesque de Liège, oncle au duc de -Bourgongne et à la duchesse Jacqueline de Bavière. Et pour tant qu'il n'avoit nul enfant de la duchesse de Luxembourg, sa femme, il déclaira en son derrain ledit duc de Bourgongne son hoir et successeur, et mist du tout en oubli la descendence Jaqueline de Bavière, sa niépce.

CHAPITRE XXIV.

Comment le duc de Glocestre et la duchesse sa femme alèrent de Calais en Haynau prendre l'obéyssance des bonnes villes. Et comment le duc de Bourgongne se prépara pour aler en l'ayde du duc de Brabant son

cousin.

En la fin du mois de novembre, le duc de Glocestre, avecques son grand ost qu'il avoit amené à Calais, comme dit est dessus, et la duchesse Jacqueline sa femme en sa compaignie, se mist à chemin, et par Houdain et au dehors de Lens en Artois, ala en Haynau. Et en passant parmi le pays du duc de Bourgongne, ne souffri faire nul desroy, si non prendre vivres courtoisement. Et ala premiers à Bouchain et à

fille de Charles VI. Il épousa en troisièmes noces Isabelle de Portugal.

Mons, où il fu obéys assez libéralment. Auquel lieu vindrent devers lui plusieurs des gentilz hommes et seigneurs du pays, pour à lui et à sa femme faire service et obéyssance. Et brief ensievant firent serement audit duc de Glocestre toutes les bonnes villes de la contée de Haynau appartenans à la duchesse Jacqueline, qu'il disoit estre sa femme, et aussy tous les seigneurs et gentilz hommes du pays, si non, seulement, la ville de Halx, qui tint le parti du duc de Brabant; et pareillement, le conte de Conversent, seigneur d'Enghien, et messire Englebert d'Enghien et Jehan de Jeumont, avecques toutes leurs villes et forteresces. Et les aultres, comme dit est, tant nobles comme bonnes villes, en rompant et adnichillant le serement que aultrefois avoient fait au duc de Braibant, tinrent plainement le parti d'ycelui duc de Glocestre et la duchesse Jacqueline.

Item, aulcuns jours après que le duc de Bourgongne eust espousée sa femme, comme dit est dessus, il se party d'ycelle et ala à Mascon, où il tint parlement avec le duc de Savoie et les ambaxadeurs du duc de Bretagne, desquelx estoit le principal Artus, conte de Richemont. Lequel parlement durant, vindrent audit lieu de Mascon, envoyés de par le roy Charles, Charles de Bourbon, conte de Clermont, l'archevesque de Rains, l'évesque du Pui et aulcuns aultres notables ambaxadeurs. Lesquelz, entre les autres choses, traictièrent le mariage dudit conte de Clermont et de Agniès, seur germaine dudit duc de Bourgongne. Et la promist ledit duc de Bourbon en parolle de prince, en la main dudit archevesque, de l'espouser en dedens certain temps, qui par les par

ties fu conclud. Et après, sans plenté d'aultres grandes besongnes acomplir, se départirent l'un de l'autre, et retourna chascun en son propre lieu.

Item, Phelippe, duc de Bourgongne, sachant la venue de Hainfroy, duc de Glocestre, en Haynau, de ce moult indigné, envoya ses mandemens patens en ses pays de Flandres, d'Artois et environ par toutes ses dominacions, lesquelx sans délay furent publiés ès lieux acoustumes, contenans que tous nobles et aultres, de quelque estat qu'ilz fussent, qui se avoient acoustumé de eulx armer, se meyssent sus en armes pour aler en l'ayde du duc de Brabant contre le duc de Glocestre, en la compaignie de messire Jehan de Luxembourg, des seigneurs de Croy, de l'Isle-Adam et autres capitaines qui ad ce seroient commis pour les conduire et mener. Après laquelle publicacion se assamblèrent très grand nombre de gens d'armes soubz la conduicte desdiz seigneurs, qui tous ensamble se traïsent devers Phelippe, conte de Saint-Pol, frère au duc Jehan de Brabant. Auquel, de par ledit duc, fu baillié la charge de faire guerre et résistence contre ycelui duc de Glocestre. Avec lequel conte de SaintPol estoit principal gouverneur, Pierre de Luxembourg, conte de Conversen et de Brainne, seigneur d'Enghien. Et si y estoient messire Englebert d'Enghien, les damoisiaux de Wissemale, de Rosebare, et aulcuns aultres grans seigneurs banerès du pays de Brabant, avec grand multitude du commun du pays de Brabant, et infinis habillemens de guerre.

Et adonc commença de toutes pars la guerre de Haynau, moult dommageuse, par feu et par espée. quoy le povre peuple fu moult oppressé. Car le

Par

dessusdit duc de Glocestre mist grand garnison de ses Anglois audit pays de Haynau, en plusieurs villes et forteresces à lui obéyssans. Et pareillement le fist le conte de Saint-Pol sur toutes les frontières de son obéyssance. Lesquelles garnisons souventefois couroient sur les marches de l'un l'autre, en faisant, comme dit est, grands et innumérables dommages.

CHAPITRE XXV.

Comment le duc de Glocestre envoia unes lettres au duc de Bourgongne, et la copie d'ycelles.

Item, après ce qu'il fu venu à la congnoissance du duc de Glocestre que le duc de Bourgongne par ses mandemens avoit fait assembler gens d'armes par ses pays pour aler contre luy en l'ayde du duc de Brabant, il fu de ce grandement mal content, et pour tant escripvi unes lettres, lesquelles il envoia en Bourgongne devers ledit duc. Et contenoient, mot après autre, ce qui s'ensuit.

« Hault et puissant prince, trèschier et tresamé cousin. Nouvelles me sont venues que en voz terres et seignouries pardeçà, on a publié et fait cry de par vous, que toutes gens disposés aux armes soient prestz pour aler en la compaignie de messire Jehan de Luxembourg et aultres, ou service de mon cousin le duc de Brabant, à l'encontre de moy, mes amis, bien veullans et subgectz, en donnant à entendre contre vérité plusieurs choses. Autant ou plus en ay apperceu par une coppie de certaines lectres qui se dient de vostre part, escriptes en vostre ville de Digon, le xx jour de dé

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