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On ne doit pas s'attendre à trouver dans SaintSeurin l'architecture grandiose, ni les divers ornemens que les siècles ont accumulés dans nos vieilles cathédrales mais l'église gothique, avec sa construction simple et même un peu lourde, est dans son en

semble un beau monument: d'ailleurs, Saint-Seurin perpétue le souvenir de la vieille ville de Bordeaux, de même que le vieux Paris semble se grouper encore au pied des tours de Notre-Dame.

AMPHITHEATRE D'ARLES.

Eugène PONTIÉ.

Le voyageur qui approche de cette vieille cité romaine, est frappé du spectacle magnifique que lui offrent ses riches avenues. Le Rhône, le grand fleuve poétique, l'entoure comme une large ceinture d'azur. Ici, il a perdu cette impétuosité qui l'a rendu proverbial: ce n'est plus le torrent de la Suisse ou du pont Saint-Esprit; son onde tranquille et unie réfléchit, sans en altérer les couleurs, le beau ciel de la Provence. Il traverse, et semble quitter à regret ces rives aux ombrages gigantesques, aux ormeaux centenaires qui retentissent du mugissement des taureaux sauvages, ou du hennissement des chevaux camargues paissant en liberté.

La ville s'élève en amphithéâtre sur l'un des trois mamelons qui coupent seuls l'uniformité de la plaine immense, renfermée entre la chaîne des Alpines et les bords de la Méditerranée. On s'étonne, en y entrant, du silence de ses rues : les bruits de la civilisation ne s'y font entendre que comme le roulement d'un orage éloigné, à peine reproduit par l'écho. Au premier aspect, Arles pourrait paraître une ville exceptionnelle, jetée en dehors du mouvement progressif du siècle; ce serait une erreur. On marche là comme ailleurs, et il se tromperait étrangement celui qui croirait qu'on y vit de souvenir, que le mouvement y est mort. Sans doute, Arles, chef-lieu d'arrondissement est bien peu de chose, si l'on songe à la ville des Césars, à la cité-constantine. Mais elle ne s'est point voilé la tête pour rester étrangère au tourbillon qui l'entoure. L'ouragan des révolutions a bouleversé son sol; le vent brûlant des passions déchaînées y a laissé la trace de son terrible passage; des ruines en font foi. Ces vieux monumens, sur lesquels tant de siècles et de barbares étaient venus imprimer leur cachet destructeur, ont pu croire, dans nos dernières commotions politiques, que tous les va..dales n'étaient pas au tombeau.

Ies souvenirs sont si vivans, chaque pas nous monire tant et de si piquantes merveilles, l'histoire nous presse tellement sous les mille formes qu'elle a su prendre en se gravant sur le marbre, en se burinant sur le granit, qu'on ne sait à quoi s'arrêter d'abord; l'œil court avec l'imagination. Et

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HONORIUS ET THÉODOSE AUGUSTES, A AGRICOLA, Préfet des Gaules.

Sur le très salutaire exposé que nous a fait ta magnificence, entre autres informations évidemment avantageuses à la République, nous décrétons, pour quelles aient force de loi à perpétuité, les dispositions suivantes, auxquelles devront obéir les habitans de vos sept provinces, et qui sont telles qu'eux-mêmes auraient pu les souhaiter et demander. Attendu que, pour des motifs d'utilité publique ou privée, non-seulement de chacune des provinces, mais encore de chaque ville, se rendent fréquemment auprès de ta magnificence les personnes en charge ou les députés spéciaux, soit pour rendre des comptes, soit pour traiter des choses relatives à l'intérêt des propriétaires, nous avons jugé que ce serait chose opportune et grandement profitable, qu'à ́dater de la présente année, il y cût tous les ans, à une époque fixe, pour les habitans des sept provinces, une assemblée tenue dans la métropole, c'est-à-dire, dans la ville d'Arles. Par cette institution, nous avons en vue de pourvoir également aux intérêts généraux et particuliers. D'abord en la réunion des habitans les plus notables, en la présence illustre du préfet, si toutefois des motifs d'ordre public ne l'ont pas appelé ailleurs, on pourra obtenir, sur chaque sujet en délibération, les meilleurs avis publics. Rien de ce qui aura été traité et arrêté, après une mûre discussion, ne pourra échapper à la connaissance des provinces, et ceux qui n'auront pas assisté à l'assemblée, seront tenus de suivre les mêmes règles de justice et d'équité. De plus, en ordonnant qu'il se tienne tous les ans une assemblée dans la cité-Constantine, nous croyons faire une chose, non-seulement avantageuse au bien public, mais encore propre à multiplier les relations sociales. En effet, la ville est si avantageusement située, les étrangers y viennent en si grand nombre, elle jouit d'un commerce si étendu, qu'on y voit arriyer tout ce qui naît et se

sentirait perdu dans un océan de détails; quelque chose vous avertirait que le travail est au-dessus de vos forces. Ecoutons donc cette voix qui est celle d'une sage économie, et pour ne pas laisser incomplet et inachevé ce brillant compartiment de notre Mosaïque, promettons-nous de tout dire en plusieurs

fois.

J'ai déja dit un mot du spectacle imposant qu'offre la ville d'Arles, quand on l'aperçoit de loin. Ces murs noircis, ces maisons d'une frappante irrégularité, ce je ne sais quoi d'antique qui se révèle dans les moindres détails: tout cela remplit l'ame de cet inexplicable sentiment de respect que l'on ressent à l'approche des vieillards. Mais il est un point sur lequel involontairement se fixe le regard sur lequel il s'attache de préférence : c'est l'amphithéâtre, posé dans la partie élevée de la ville, dont il semble ceindre le front comme un glorieux diadême. Là, se sont assis les maîtres du monde, et leur place, marquée depuis tant de siècles, n'a servi qu'à faire sentir plus vivement la rapidité de leur passage et de leur domination.

C'est vers ce monument, le premier que nous ayons aperçu, que tourneront nos regards et nos études.

Le peuple romain, ce colosse imposant que les siècles avaient vu grandir sans jamais s'arrêter; ce peuple dont les progrès, les conquêtes, seraient un inexplicable mystère, si l'on refusait de voir la main providentielle qui le guidait à travers l'océan des âges, jusqu'au jour où les temps furent accomplis; jusqu'au jour où les barbares du nord se ruèrent sur la ville éternelle, affaissée sous son propre poids, puis brisèrent sous les pieds de leurs chevaux cette unité gigantesque, dont les bornes était celles du monde habité; cet empire immense, dont la tête était à Rome et dont les bras s'étendaient partout, ne conserva pas toujours son admirable simplicité. Tandis que les armes triomphaient de

fabrique ailleurs. Tout ce que le riche Orient, l'Arabie parfumée, la délicate Assyrie, la fertile Afrique, la belle Espagne et la Gaule courageuse produisent de renommé, abonde avec une telle profusion, que toutes les choses admirées comme magnifiques dans les diverses parties du monde, y semblent des produits du sol. D'ailleurs, la réunion du Rhône à la mer de Toscane rapproche et rend voisins les pays que le premier traverse, et que la seconde baigne dans ses limites. Ainsi, lorsque la terre entière met au service de cette ville tout ce qu'elle a de plus estimé, lorsque les productions particulières de toutes les contrées y sont transportées par terre, par mer, par le secours des fleuves, à l'aide des voiles, des rames et des charrois, comment notre Gaule ne verrait-elle pas un bienfait dans l'ordre que nous donnons, de convoquer une assemblée publique au sein de cette ville, où se trouvent réunies, en quelque sorte, par un don de Dieu, toutes les jouissances de la vie et toutes les facilités du commerce, etc., etc..... Donné, le xv des calendes de mai; reçu à Arles, le x des calendes de juillet,

(Guizot, Cours d'Histoire moderne. )

tout ce qui semblait une barrière à son ambition, chaque nouveau sujet, en entrant dans son sein, y apportait son génie ou son caractère; ses goûts et ses passions, et venait acquérir à Rome ce droit do cité dont la capitale du monde se montra si avare. d'abord, si prodigue ensuite. Ainsi les Etrusques avaient impnté chez les Romains le goût des combats de bêtes féroces, et la Grèce vint enseigner les secrets du théâtre et ceux de l'architecture à ses conquérans. Peu à peu les palais de marbre remplacèrent les cabanes de chaume où avait siégé l'assemblée des rois qui dictait des conditions à Pyrrhus vainqueur : peu à peu le luxe énerva leurs mœurs, et, de chute en chute, les enfans de Cincinnatus et de Fabius en vinrent jusqu'à faire entendre le cri d'un peuple expirant de mollesse: Panem et Circences.

Cette fureur de spectacles était un des liens les plus forts qui attachaient les Romains à leur ville natale. Aussi, chaque fois que la conquête avait ajouté une province à l'empire, chaque fois qu'il devenait nécessaire d'envoyer une colonie pour combler le vide que les armes avaient fait, et pour asseoir la domination nouvelle sur de plus solides bases, fon tâchait de consoler ceux que les décisions supérieures envoyaient hors de l'Italie. On leur donnait, dans les villes qu'ils allaient peupler, une partie au moins de ce qu'ils laissaient à Rome. Selon toutes les apparences, la plupart des monumens antiques, renfermés dans la ville d'Arles, furent construits dans de telles circonstances. Ainsi les Thermes, les Aqueducs, le Forum, le Théâtre, l'Amphithéâtre. Or, Pline et Mela nous apprennent que, lors de l'invasion des Romains dans les Gaules, Arles reçut une colonie de la sixième légion, d'où sans doute est venue cette dénomination d'ARLATE SEXTANORUM, conservée sur quelques monumens de numismatique Ne pourraiton pas inférer de là que c'est vers cette époque que doit être placée la fondation des monumens que je viens de nommer, et en particulier de l'amphithéâtre? Rien ne s'oppose en effet à ce que nous fassions honneur de ce dernier aux architectes venus avec la colonie dont je viens de parler, et qui arriva à Arles sous la conduite de Caïus Tibérius, père de l'empereur Tibère, quarante-trois ans avant l'ère chrétienne (1).

Quoi qu'il en soit de cette date qui fait partie, il faut l'avouer, du domaine des conjectures, comme tant d'autres points restés obscurs dans l'histoire et dans l'archéologie; quoique rien jusqu'ici n'ait pu faire espérer une solution positive de ce problème, puisque cette date n'est écrite ni chiffrée sur aucune pierre du monument, et que toutes les pièces faites jusqu'à ce jour n'ont rien fait découvrir qui apportât la lumière sur ce point obscur, cependant on ne peut révoquer en doute la haute antiquité de cet édifice; antiquité établie par des documens histori

(1) Suetone, in vild Tiberi.

ques, confirmée par ce que nous savons des progrès | jouit d'un point de vue magnifique. D'immenses et de la décadence de l'art.

Suivant Pomponius Lætus, l'an 253 de l'ère chrétienne, l'empereur Gallus fit célébrer des jeux dans les arènes d'Arles.

Ammien Marcelin rapporte aussi que des spectacles eurent lieu dans le même amphahéâtre, sous l'empereur Constance, fils du grand Constantin,

l'an 353.

Le même fait est rapporté par Sidoine Apollinaire, et placé sous l'empire de Majorien, en 461 (1).

L'empereur Justinien accorda aux rois francs, d'après Procope (2), le droit de prendre part aux jeux qui se célébraient dans l'amphithéâtre d'Arles.

L'an 539, la ville d'Arles, veuve depuis long-temps des têtes couronnées qui l'avaient habitée, tressaillit encore une fois, et put croire revenus ses anciens jours de gloire. Le roi Childebert l'honora de sa présence, et, pour que rien ne manquât au prestige, les barrières de l'amphithéâtre récemment réparé furent levées; les vieilles galeries retentirent du bruit des trompettes; le pulvimar se revêtit de ses riches tentures, et le sang des gladiateurs coula dans l'arène...

Hélas! pourquoi toujours du song dans cette enceinte, pourquoi, tandis que l'antiquaire ou l'artiste fouillent et admirent, étudient et contemplent la magnificence de son architecture, la richesse de ses détails, la hardiesse de ses formes, le philosophe voit-il les fantômes errans des victimes qui y furent immolées aux applaudissemens d'une multitude féroce? Son imagination le reporte vers le passé; il croit entendre encore le rugissement des monstres de l'Afrique répondre au râle des mourans. Puis, comme si ce n'était point assez de tant de meurtres lâches et inutiles, la guerre vint aussi faire sa moisson dans ce lieu privilégié de la mort et des supplices.

Dans le vie siècle, Charles-Martel, maire du palais, préparait la chute de ses maîtres, en les absorbant dans sa propre gloire. Comme tout conquérant qui s'élève par ses propres forces; comme tout homme supérieur à son siècle, il eut des ennemis, et à ces ennemis tous les moyens furent bons. La trahison amena dans les murs d'Arles Joussouf-Ben-ald-el-Rahmou, Vali de Narbonne, et, dès lors, Arles devint le quartier-général des Maures en Provence; l'amphithéâtre, transformé en forteresse, subit tous les outrages, toutes les mutilations. Les galeries furent comblées, les arceaux bouchés, l'Attique, ou du moins ce qui en restait encore, fut détruit. C'est alors que furent construites les quatre tours dont trois subsistent encore, et que l'administration a eu le bon esprit de conserver comme une page de l'histoire du monument. Ces tours sont élevées sur les points cardinaux ou plutôt sur les quatre parties principales de l'édifice; de leur sominet on

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remblais couvrirent l'arène au-dessus du Podium, et formèrent sur les gradins une sorte de colline artificielle. Puis le feu, comme dans les arènes de Nismes, imprima en plusieurs endroits d'immortelles traces de son passage.

Cependant le terrible MARTEL écrasait les hordes infidèles partout où elles allaient résister. L'islamisme fut chassé d'Arles, et, de nos jours encore, la croix des Maures, restée debout au pied de leur citadelle, atteste sa propre victoire sur le croissant.

Ici commence une longue période de douleurs pour notre monument; il fut dès cet instant livré aux destructions de toutes les époques: la scie, le marteau, l'ignorance s'escrimèrent à l'envi sur le géant désarmé. D'informes bicoques l'encombrèrent et l'enveloppèrent; les gradins et les galeries disparurent sous ce labyrinte nouveau. Des fenêtres, des cheminées furent percées dans le mur antique pour la commodité des habitans. Plusieurs voûtes fléchirent; les marbres furent enlevés, des pans de murailles démolis exprès. Et telle enfin était la détresse de cette malheureuse ruine, qu'un homme de mérite (1) ayant essayé de la décrire fait un grand éloge des consuls qui, après plusieurs siècles d'oubli, ont daigné faire faire une porte en bois pour la commodité de ceux qui veulent monter sur la partie supérieure de l'édifice. On conçoit les regrets de l'antiquaire en présence de tant de désastres et de malheurs; on conçoit son indignation en songeant que la main impitoyable de l'homme a plus fait dans cette œuvre de destruction que le temps, déja si terrible. On se prendrait presque à regretter ici les bienfaits du Vésuve, dont les cendres nous ont rendu intactes, après tant de siècles, les richesses de Pompeï.

Enfin un jour plus doux a lui. Un homme plein d'amour pour son pays, plein de zèle et de moyens pour satisfaire cet amour et ce zèle, a été appelé à l'administration. Les obstacles soulevés par les passions contraires n'ont rien été pour lui; honneur lui soit rendu, au nom de tout ce qui porte un cœur d'artiste, de tous ceux qui ont le sentiment du beau! Le nom de cet administrateur peut être prononcé ici. Jamais il ne lira ces lignes, et du reste M. le baron de Chartroule et son administration sont un douce et bonne compensation en présence de tant d'incurie et d'indolence.. Encore si certaines gens avaient le mérite de ne s'en point trouver, et qu'ils voulussent bien laisser aux capables un soin qui les écrase !

L'amphithéâtre a peu à peu revécu, si je puis ainsi parler. L'innombrable quantité de vieilles masures qui remplissaient l'enceinte, et dans lesquelles s'entassait la partie la plus pauvre de la popul tion, ont maintenant disparu. Dès 1825, les travaux furent entrepris avec vigueur, et, de nos jours, tout est fait

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ou à peu près; l'on peut venir voir, admirer et méditer.

Malgré tout ce que j'ai dit des dégradations et des mutilations dont il a été l'objet, ce gigantesque édifice frappe encore d'admiration par sa masse, par la majesté et la hardiesse de sa construction. Partout if porte en caractères ineffaçables le cachet de ce peuple romain, dont toutes les œuvres étaient marquées au coin de l'immortalité. Ses formes architectoniques sont conservées à l'extérieur; les galeries dont les voûtes ont été relevées ou réparées sont éclairées par un demi-jour favorable à la méditation; l'accès en est partout facile: on peut en visiter toutes les parties, y lire l'histoire si vivante et si profondément imprimée.

La forme du monument est un ovale dont le grand axe court du midi au nord, dans la longueur de 137 mètres 20 cent., en y comprenant les constructions dont le massif occupe 33 mètres 90 cent. L'étendue du petit axe qui court de l'est à l'ouest est, à l'intérieur de l'arène, de 39 mètres 63 cent.

L'ovale est formé par un double rang d'arceaux superposés, au nombre de 120.

Le nombre des gradins est de 43.

Bâti sur un rocher fort dur et sur un plan incliné, l'édifice est appuyé à sa base sur des galeries destinées à régulariser les mouvemens du sol, à applanir le terrain anguleux et inégal. Ces galeries concentriques et parallèles s'arrêtent partout où le rocher les rend inutiles. On y entre par une voûte située au-dessous de l'entrée septentrionale. Les gradins inférieurs sont appuyés sur celle de ces deux galeries qui se trouve le plus rapprochée du centre commun du monument. Celle-là fait complètement le tour de l'arène, dont elle est séparée par le mur d'enceinte. Dans cette galerie et dans le mur d'enceinte se trouvent des saillies de pierres énormes qui n'ont jamais été taillées et polies, et dont l'irrégularité a donné lieu à l'opinion que les arènes n'avaient jamais été achevées, opinion que nous discuterons eu son lieu. Le reste de ces substructions est voûté en moëllons sémillés.. On voit, à la naissance des voûtes, un cordon en forme

de corniche, qui ne manque, ni d'élégance, ni de fini. C'est dans cette partie souteraine de l'amphithéâtre, que l'on remarque des ouvertures élevées à peu près d'un mètre au-dessus du sol. Ces ouvertures qui ont la forme d'un segment dont la corde serait tournée vers le bas, donnent entrée dans des sortes de petites chambres privées d'air et de lumière. Quelques personnes avaient cru y voir le lieu dans lequel on tenait renfermés les animaux destinés aux spectacles; opinion insoutenable quand on a vu ces réduits humides, dont il eut été, du reste, à peu près impossible de faire sortir ces animaux, en supposant qu'ils eussent pú y vivre, ce qui est fort douteux, et je partage à ce sujet l'opinion du Guide du voyageur dans Arles, qui croit que les animaux étaient amenés dans l'arène au moyen de cages de fer moutées sur des roues.

Au-dessus de ces substructions et de ces voûtes, le monument se trouve assis et nivelé tel que l'œil l'aperçoit du dehors avec son double rangs d'arceaux separés par des colonnes engagées, dont l'une conserve encore son chapiteau corinthien d'un beau travail; avec ses voûtes inclinées, ses flancs énormes et ses moëllons sémillés; que de grace dans les détails, que d'ensemble dans le tout! Au-dessus des premiers arceaux et dans l'épaisseur des seconds, on voit les restes d'une galerie formée par d'énormes dalles, et qui embrassait toute la circonférence occupée par les portiques. Les spectateurs pouvaient, en attendant les jeux, se promener commodément dans cette galerie.

La hauteur des portiques en arcades cintrées qui forment l'enceinte extérieure de l'édifice, est de 17 mètres.

Hauteur des arcades supérieures, 7 mètres 65 centimètres.

Hauteur des premières arcades prises du sol du monument, terme moyen, 6 mètres 45 centimètres. Largeur des arcades du rez-de-chaussée, 3 mètres 70 centimères.

Largeur des arcades supérieures, terme moyen, 3 mètres 57 centimètres.

Hauteur de la tour du couchant, y compris celle du monument, 30 mètres.

Largeur de la tour du couchant, y compris les murs, 8 mètres.

Largeur de la porte du nord, 4 mètres 70 centimètres (1).

Le second étage et le monument entier étaient couronnés par l'attique dont il ne reste plus aucun vestige; je pense qu'il se composait d'un mur, de 2 mètres environ de hauteur, percé à jour par des fenêtres cintrées destinées, tant à l'ornement de cette partie, qu'à la circulation de l'air, quand le velarium était tendu.

Pour se former une idée générale des constructions intérieures de l'amphithéâtre, il faut, par la pensée,

(1) J'ai adopté ici les chiffres consignés dans l'excellent ouvrage de M. J. J. Estrougin. L'exactitude ordinaire de l'auteur m'a paru une garantie suffisante de celle de ces dimensions.

établir au rez-de-chaussée, un double corridor voûté, concentrique et fesant tout le tour de l'ellipse; audessus de celui qui est le plus éloigné du centre, construire une galerie aussi parallèle à la ceinture de portiques extérieurs, dont elle est éloignée de quelques mètres ; l'y joindre par des voûtes inclinées : continuer cette inclinaison, en s'appuyant sur les ouvrages inférieurs dont j'ai déja parlé, jusques au sommet du mur d'enceinte de l'arène proprement dite. Sur ce massif de travaux, cet amas de voûtes, d'arceaux, de corridors, de galeries, si habilement combinés, établir les quarante-trois rangs de gradins, depuis l'enceinte intérieure des portiques jusques à celle de l'arène. Par ce travail de la pensée, on arrivera, non point à connaître parfaitement l'édifice, cela n'est possible qu'après l'avoir bien et long-temps étudié, mais on concevra du moins l'ensemble de sa configuration. Quant aux détails, aux opinions diverses sur les parties qui ne s'expliquent pas d'elles mêmes, on sent que nous ne pouvons que les indiquer. La nature de ce recueil ne nous permettant pas de longues dissertations à ce sujet.

Les gradins étaient divisés en plusieurs précinctions parallèlles, destinées à établir une différence entre les divers ordres de spectateurs. Aux extrémités du petit axe de l'arène, on voit encore, d'un côté, le pulvinar ou place de l'empereur; de l'autre, celle des consuls et des édiles. Le premier gradin était occupé par les sénateurs, les prêtres, les vestales; les chevaliers et autres personnes de distinction, se plaçaient sur les gradins qui venaient ensuite, jusqu'à la séparation de cette précinction, d'avec celle qui était destinée au peuple, procinctio popularis. Cette séparation était effectuée par le balleur ou baudrier, quî était percé de portes et recouvert de marbre et d'ornemens. On entrait par ces portes dans les galeries de soutenement : c'était les vomitoires de la partie dont je viens de parler. La procinctio popularis s'élevait jusqu'à la hauteur du dernier portique; là se plaçaient les ouvriers, les artisans, les gens de la campagne; enfin, sur le dernier portique, venait la place des enfans, des femmes et des esclaves.

Des escaliers placés de distance en distance perpendiculairement aux gradins, les divisaient en sections à peu près égales en grandeur. Chacune de ses sections appelées cunei, était sous la surveillance d'un officier chargé de distribuer les places aux spectateurs. Ces places étaient du reste indiquées d'avance par le tessere ou billet d'entrée, en plomb, que chacun recevait à son entrée à l'amphithéâtre.

Au-dessous des dalles du Podium, il règne tout au-tour de l'arène un cordon en pierre, saillant de quelques pouces. Dans ce cordon, se trouvent des entailles d'inégale dimension, et espacées d'une manière irrégulière. On a, par conjectures diverses, tâché d'en expliquer l'usage, et l'on n'est tombé d'accord sur rien. Ont-elles servi à appuyer un plancher pour rehausser l'arène? Sont-elles l'ouvrage de l'architecte de Childebert qui aurait voulu la rétrécir? étaientelles destinées à armer cette partie de fers recourbés

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