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madame de beauté.

V.

L'ABBAYE DE JUMIÈGES.

» En 1205, Philippe-Auguste reconquit cette ville | jours après, le château de Loches devint le séjour de après un siége d'un an ; Charles VII ajouta de nouvelles constructions au château, et le conserva en dépit des Anglais qui tenaient presque toute la France; Louis XI en fit une prison d'état; il fit construire des oubliettes, de nouveaux cachots, des cages de fer, où, entre autres victimes de ce farouche tyran, périt le cardinal de Milan. Le château se composait d'une masse immense de bâtimens; la plupart ont été renversés, il en reste encore de considérables, des ruines très curieuses et très pittoresques.

» Au sud, est une forteresse carrée, fort haute, entourée de tourelles et de fossés, qui sert maintenant de prison; l'ancienne église collégiale de NotreDame de Loches est remarquable par son style singulier, par ses quatre clochers alignés; l'intérieur est dépouillé des monumens et des ornemens qui le décoraient.

» Le château dit de Charles VII, maintenant la Municipalité, est un beau et grand bâtiment oblong, situé sur le bord du val de l'Indre, et possédant de ce côté une terrasse, d'où les vues sont délicieuses; la belle Agnès Sorel habita long-temps ce château ; il fut témoin des amours de Charles Vil (1). »

Loys le Dauphin et les seigneurs de son parti, ne cessaient de calomnier madame de beauté; Agnès Sorel résolut alors de ne plus paraître à la cour, espérant désarmer ainsi la colère de ses ennemis; mais les succès du roi augmentèrent sa faveur, et le crédit dont elle jouissait rendit implacable la haine que Loys portait à la royale favorite. Plusieurs fois il se laissa aller à des promptitudes indignes de la part d'un fils de France. Sorel, ne pouvant plus tenir tête à l'orage, résolut de se séparer de Charles septième, son doux ami, vers l'an 1445.

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- Gentil sire, lui dit-elle, Dieu et la Vierge me sont témoins de l'amour que j'ai pour vous et pour la gloire des fleurs de lys; pourtant mes ennemis, et surtout monseigneur Loys le Dauphin, disent de moi choses vilaines et déshonnêtes. Aussi, après avoir fait mon oraison, j'ai résolu de quitter la cour et d'aller vivre dans la belle solitude de Loches.

Vous n'aimez donc plus le roi de France, gente Agnès...?

Je prierai pour vous, gentil sire.
Pourrai-je vivre sans vous voir ?

Vous viendrez me voir en Touraine.

Cet entretien fut interrompu par l'arrivée de la reine, qui désapprouva fort la détermination de la belle Agnès. La favorite fut inflexible, et, quelques

(1) Le mausolée d'Agnès était dans l'église de Loches; en 1809, il fut transporté dans une tour que cette dame avait fait élever à l'angle du château ; on le voit au rez-dechaussée dans une petite chapelle; le monument a dix pieds de long et quatre de large; il est de marbre noir; la statue d'Agnès, les deux anges à sa tête et les deux agneaux à ses pieds, sont en pierrc blanche, de bon style et bien conservés. C'est ce qu'offre de plus intéressant le château de Loches.

Charles VII eut beaucoup de peine à se console de l'absence de sa douce amie. Souvent il fesait appeler Jacques Cœur de Bourges, son argentier, et lui parlait de madame Agnès.

Messire argentier, lui disait-il souvent, depuis que Sorel, ma mie, est partie pour son château de Chinon, je ne puis dormir ni jour ni nuit. Ditesmoi, Jacques Cœur, si le tout-puissant a jamais créé une femme plus gente et plus accorte.

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Je la prendrais pour dame et épouse, si la reine de France venait à mourir. Vous êtes le plus cher et le plus fidèle de mes serviteurs, messire argentier; aussi je requiers de vous un bon et signalé service: demain nous partirons pour la Touraine, et nous irons deviser ensemble avec madame Agnès.

Au point du jour, les chevaliers et les damoiselles étaient déja sur leurs palefrois et sur leurs laquenées. Grande fut la joie des bons paysans de Loches quand ils virent Charles septième, leur sire. Ces voyages se renouvelèrent souvent, et, pendant quatre ans, l'amitié que le roi portait à madame de beauté ne fit que s'accroître. Vers la fin de l'année 1449 la reine qui n'avait pas oublié les nobles conseils que la belle Agnès avait donnés à son époux, l'engagea à revenir à la cour: elle y resta jusqu'au départ du roi qui alla faire le siége de Rouen.

les

La fortune de la France avait changé. Depuis la mort de Jéhanne la Pucelle, dit Alain Chartier, Anglais n'éprouvèrent qu'échecs et déconfitures. Dunois, bâtard d'Orléans, était déja en campagne avec quatre ou cinq mille bons combattans; il s'empara de Verneuil, de Pont-Audemer, de Lisieux, de Vernon, de Mantes, de la Roche-Guyon et de bien d'autres places et châtellenies.

« Le duc de Sommerset, le lord Talbot et le resta >> des capitaines qui se tenaient, tant à Rouen qu'aux >> autres villes, voyaient bien et clairement que la

>> plupart des bourgeois et du commun du peuple >> ne désiraient rien tant que de retourner en l'obéis»sance du roi de France, et, pour cette crainte, ils >> ne s'osaient mettre ensemble aux champs, ni dé>> semparer leurs garnisons, afin de secourir leurs » gens qu'ils savaient de jour en jour être assiégés.

>> Toutes les compagnies venues et assemblées, >> le roi Charles septième partit de Louviers et vint » au Pont-de-l'Arche, d'où il envoya ses officiers » d'armes devers ceux de la ville et cité de Rouen, » pour les sommer de se rendre à lui : mais les » Anglais, qui avaient encore la garde de la ville » et étaient maîtres des portes, ne voulurent souf>> frir que lesdits héraults entrassent dedans et par>> lassent aux bourgeois.

>> Enfin, le dimanche 19 octobre 1449, sur les huit >> heures du matin, les habitans de Rouen qui se >> tenaient sur leurs gardes, voyant les Anglais ar» més et marchant dans la ville pour les venir >> opprimer, coururent sus, auxdits Anglais, et les >> chassèrent si durement et âprement, qu'à grand>> peine purent, les uns, entrer au palais, les autres » au château en même temps ceux de la ville ga>> gnèrent par force tous les murs et porteaux de » leur cité, et en firent déguerpir les Anglais. Le » duc de Sommerset retourna au palais en regardant >> parmi les rues tout le peuple portant la croix » blanche, de quoi il n'était guère joyeux. Enfin, » le 4 novembre, les Anglais s'en allèrent les uns » à Parfleur, les autres à Caen, et le roi Charles » septième, après avoir fait sa prière à la cathédrale, >> alla prendre son logement chez monseigneur l'ar» chevêque de Rouen. »

Ce succès inespéré rendit courage et liesse aux bons habitans de la Normandie. Charles alla ensuite se rafraichir un temps à la célèbre abbaye de Jumièges; il donna des fêtes magnifiques aux principaux seigneurs et chevaliers; il ne croyait pas qu'en quittant l'abbaye il aurait le cœur navré de la plus vive douleur.

En effet, la belle Agnès Sorel apprit que Loys le Dauphin tramait une nouvelle conspiration contre le roi son père; aussitôt elle partit du château de Loches, et, suivie de deux pages, elle se dirigea vers l'abbaye de Jumièges. Le roi ne se possédait pas de joie quand on lui dit que sa douce amie arrivait.

Liesse et festins! s'écria-t-il; Agnès Sorel, ma dame de beauté, vient prendre part à notre victoire.

L belle dame fut reçue avec tous les honneurs

qu'on accordait alors aux reines de France; les chevaliers et les damoiselles lui firent nombreuses courtoisies. Mais la joie ne fut pas de longue durée. Dans la nuit, madame Agnès se sentit atteinte d'une dyssenterie si violente, qu'elle trépassa au point du jour, le 9 février 1450.

« On la crut empoisonnée, dit un biographe; les >> uns ne craignaient pas de dire hautement que c'était » par l'ordre de Loys le Dauphin; d'autres accusè>> rent de ce crime Jacques Cœur, trésorier du roi, » désigné par Agnès pour son exécuteur testamentaire; >> cette seconde accusation était l'ouvrage des ennemis » de Jacques Cœur, qui fut condamné à mort trois >> ans après comme concussionnaire. Le corps d'Agnès >> Sorel fut déposé dans l'église collégiale du château » de Loches qu'elle avait enrichie de ses dons. Son >> tombeau se voyait encore à Loches, en 1752, et l'é>> pitaphe attestait la bienfaisance de celle à qui on » l'avait érigé. Les chanoines de cette église, voulant >> faire leur cour à Louis XI, supplièrent ce prince » de faire enlever de leur église ce tombeau qui était » à leurs yeux un objet de scandale. >>

J'y consens, répondit le roi, mais auparavant il faut rendre ce que vous avez reçu d'Agnès. « Les historiens ne sont pas d'accord sur l'opinion » que l'on doit avoir d'Agnès Sorel. Les uns la traitent » avec mépris, et l'accusent d'avoir dilapidé les fi>>nances; les autres lui altribuent l'honneur d'avoir » sauvé la France. Ce qu'on peut affirmer, c'est » qu'Aguès n'abusa jamais de son pouvoir, et qu'elle » se conduisit avec assez d'art pour conserver jusqu'à » sa mort l'amitié de la reine.

» Les poètes du temps ont célébré à l'envi les » charmes d'Agnès Sorel; la plupart des vers sont » tombés dans l'oubli; mais on lit encore avec plaisir >> le petit poème de Baïf, adressé au seigneur Sorel, » parent d'Agnès.

» La maladie d'Agnès, dit l'historiographe de Char» les VII, fut causée par certains chagrins et dé» plaisances; la dame de beauté avait l'ame haute, » et les hommages des courtisans et des chevaliers »> ne lui fermaient pas les yeux sur le mépris que » le peuple témoignait discourtoisement à la maîtresse >> du roi. >>

Avec ses grandes qualités et ses défauts, la belle Agnès sera toujours une figure historique représentant à elle seule le patriotisme, la beauté, l'amour de la gloire; trinité presque fabuleuse, qui nous apparaît, enveloppée de la majesté du passé, derrière un prisme de quatre cents ans !

LABORDERIE.

HISTOIRE RELIGIEUSE DE LA VILLE DE BORDEAUX.

ÉGLISE SAINT-SEURIN.

La ville de Bordeaux qui joua un rôle si brillant sous la domination romaine, qui avait vu dans ses murs l'immortel Germanicus envoyé dans les Gaules pour faire le dénombrement des diverses provinces, eut part aux bienfaits du christianisme, cinquantesix ans après la mort du Christ.

Saint Martial, l'apôtre des deux Aquitaines, prêcha à Bordeaux, et le nombre de ses disciples devint assez grand pour nécessiter la présence d'un évêque. Saint Gilbert occupa le premier ce siége épiscopal que devaient illustrer tant de vertus. Zélé pour le maintien de l'Evangile, il combattit les hérétiques venus d'Orient. Oriental, son successeur, assista au second concile d'Arles avec le diacre Flavien, el Delphin, poursuivant la glorieuse carrière qui lui avait été tracée, convoqua à son tour un concile à Bordeaux, où l'hérésiarque Priscillien fut condamné, et Urbica, son disciple, massacré par le peuple.

Le christianisme avait déja fait de rapides progrès dans la capitale de la deuxième Aquitaine, lorsque saint Amand fut choisi pour premier pasteur. Pendant le temps que dura son épiscopat, il jouit de la considération des hommes les plus éclairés de son siècle. | Saint Paulin, évêque de Noles et natif de Bordeaux, entrelint avec Amand une correspondance également honorable pour l'un et pour l'autre.

Il succombait à ses travaux apostoliques, lorsque Seurin abandonna le siége de Cologne, poussé par une inspiration divine, dit la légende, et vint à Bordeaux. Grande fut l'affluence du peuple qui se pressait sur les places publiques pour voir le jeune prélat déja célèbre par ses vertus. Seurin était bordelais, ajoute la légende; les seigneurs, les bourgeois et le menu peuple lui firent grands honneurs. Saint Amand, qui était déja vieux, bénit le ciel de lui avoir amené un si digne successeur, et se démit de ses fonctions épiscopales en faveur de Seurin, qui devint un des plus grands prélats de l'Aquitaine, et mérita d'être mis au rang des saints par les nombreux miracles qui s'opérèrent sur son tombeau.

Les fidèles, pour honorer la mémoire du bienheureux prélat, construisirent une église sous son invocation. Elle était située primitivement hors des murailles de la ville, dit l'auteur de la Chronique Bordelaise.

Saint-Seurin date des premiers siècles de l'Eglise, mais on ne peut affirmer à quelle époque les constructions furent commencées, interrompues et terminées. Après Sainte-Croix, elle est l'église la plus ancienne

de Bordeaux, et avant la construction de Saint-André, elle était métropole.

Au commencement du deuxième siècle, elle était déja desservie par un collége de chanoines, qui jouissait de plusieurs priviléges et immunités. Les ducs de Guienne, avant de partir pour une expédition, se rendaient processionnellement à l'église Saint-Seurin, déposaient leurs épées sur le maître-autel, el fesaient bénir leurs étendards par l'évêque, et, en son absence, par le chef du collége.

Ces pratiques relizieuses se perpétuèrent de siècle en siècle; plus tard, le syndic et le clerc de Bordeaux allèrent aussi à Saint-Seurin prêter serment avant de prendre le chaperon et les insignes de la Jurade.

Comme la basilique Sain'-Sernin de Toulouse, SaintScurin fut enrichie des reliques de plusieurs saints. Les gentilshommes et les principaux bourgeois voulurent être ensevelis auprès du saint lieu, et, en 1081, il y avait déja autour de la vieille église un vaste cimetière consacré, dit l'auteur de la Chronique Bordelaise, par saint Martial, premier apôtre de l'Aquitaine. Les chanoines exigèrent bientôt des droits de sépulture, qui plus tard furent abolis. Mais il était défendu d'enterrer ailleurs, et, en l'an 1086, il s'éleva à ce sujet un différend assez grave entre l'archevêque de Bordeaux et les chanoines de Saint-Seurin. Le chapitre eut gain de cause, et l'usage primitif fut maintenu dans toute sa rigueur.

Les chanoines avaient droit de juridiction ecclésiastique sur une partie de la ville de Bordeaux; les divers priviléges qu'on accordait quelquefois arbitrairement aux communautés, aux chapitres, aux monastères, donnaient lieu à d'interminables contestations.

Vers l'an 1220, un nouveau débat s'éleva entre l'archevêque et les chanoines, au sujet de l'étendue de cette juridiction ecclésiastique; les deux parties s'efforçaient de conserver mutuellement leur suprématie; les discussions duraient depuis long-temps, lorsque l'archevêque proposa de choisir pour juges les évêques de Tarbes et de Comminges. Les deux prélats se rendirent à Bordeaux, et, après de sages délibérations, ils prononcèrent leur sentence qui fut confirmée en 1222 par le légat du saint siége.

Ils adjugèrent au chapitre de Saint-Seurin les paroisses de Saint-Rémy, de Saint-Maxens, de SaintChristophe, de Notre-Dame de Puy-Paulin.

Ils ordonnèrent que les enfans nés dans ces parois

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ses jusqu'au ruisseau de la Divise qui coulait alors dans la ville, seraient baptisés à Saint-Seurin, et qu'il ne serait fait aucun changement aux usages primitifs.

Le reste de la ville fut adjugé à Saint-André et à l'abbé de Sainte-Croix. Les chanoines conservèrent ces divers priviléges jusqu'au temps où Saint-André devint église métropolitaine et réunit tout le Bordelais sous sa juridiction.

L'église Saint-Seurin, moins ancienne que SainteCroix, est le plus remarquable de tous les monumens religieux de Bordeaux, qui possède pen d'édifices de ce genre, eu égard à son importance et à son étendue. Saint-André a ses flèches aériennes, son clocher bâti en 1440 par Pierre Peyberland, fils d'un paysan du Médoc et archevêque de Bordeaux; Saint-Michel, élevé au-dessus de la cité noire et gothique, où s'agitent aujourd'hui les bras infatigables du télégraphe. Les murailles de Sainte-Croix sont couvertes de peintures à fresque du célèbre Jean Vanizetti; on admire à Saint-Bruno les groupes peints au xvu siècle par Bérinzago. Mais toutes ces beautés réunies ne rappellent pas autant de souvenirs que la nef et le porche gothique de Saint-Scurin

La vieille basilique, avec son architecture bizarre et ses ornemens qui décèlent le mauvais goût des premiers siècles du christianisme, nous apparaît envi- | ronnée de la sombre majesté du passé. L'esprit préoccupé de pensées diverses, on s'écrie:

a Là, se réfugièrent peut-être les Bordelais, lorsque » le fier Abdérame, avant de succomber dans les » plaines de Poitiers, emporta d'assaut et pilla en » passant l'ancienne capitale de la deuxième Aqui»taine. Sur ces autels, les ducs de Guienne, dans les » beaux jours de la nationalité méridionale, dépo-, » sèrent leurs glaives trempés dans le sang ennemi. >> Sous ces voûtes, les Bordelais venaient prier le Dieu » de saint Louis, et demander au ciel de délivrer la » patrie du léopard de l'Angleterre, Ici, peut-être, se » réunirent les gentilshommes bretons et aquitains, » lorsque Henri Plantagenet vint à Bordeaux célébrer » ses fiançailles avec Alianor d'Aquitaine. Sur ces dalles » s'agenouillèrent les héros de Poitiers et d'Azincourt, » fidèles compagnons du roi Jean, quí partagèrent son >> infortune et l'accompagnèrent à la tour de Londres. » Ici tout est grand et sublime : les reliques des saints » martyrs qui reposent dans les chapelles, les noms » des prélats, des preux, portent dans l'ame une > ineffable et douce mélancolie; ici le passé donne la » main au présent, et les murailles sont un grand » livre de pierre sur lequel chaque siècle a laissé son > empreinte de gloire ou de malheur. >>

On ne peut se lasser d'admirer la vieille basilique; pourtant sa construction est irrégulière; on voit au premier aspect que plusieurs générations ont travaillé à Saint-Seurin. Selon toutes les probabililés, les Sarrasins, quand ils pillèrent la ville de Bordeaux, ne respectèrent pas un temple riche déja des reliques de plusieurs martyrs. Délivrés de ces barbares, les Bordelais se hâtèrent de réparer les dégâts,et ces diMOSAIQUE DU MIDI. 2e Année.

vers travaux ont contribué à l'irrégularité du monument.

L'intérieur renferme plusieurs objets dignes d'être remarqués sous le rapport artistique.

Un bas-relief, représentant un pape qui célèbre la messe, mérite surtout de fixer l'attention par l'originalité qui a inspiré le sculpteur.

On ne doit pas sortir de la vieille basilique sans avoir visité la chapelle souterraine consacrée à saint Fort, où l'on voit le tombeau de ce saint, ceux de saint Amand et de sainte Véronique.

« C'est une coutume fort ancienne chez les mères >> et les nourrices du Bordelais, dit un voyageur, de » se rendre chaque année, au mois de mai, dans la >> chapelle souterraine de l'église Saint-Seurin, où >> sont enfermées les reliques de saint Fort, pour >> faire baiser son tombeau à leurs nourrissons. Ce » saint a la réputation d'être favorable à la santé des >> petits enfans: un nombre considérable de femmes » y viennent donc faire dire des évangiles sur la tête » de leurs nourrissons. L'efficacité de cette lecture » n'est pas bien démontrée; il est plus certain que >> l'extrême fraîcheur de l'église, opposée à l'extrême >> chaleur et à l'air étouffé du caveau où la foule >> s'entasse, nuit aux faibles créatures qu'on y trans» porte. »

Ces vieux souvenirs de la foi de nos pères sont une preuve incontestable de la vénération que les Borde lais avaient pour les reliques de saint Seurin; aujourd'hui nous pouvons à peine comprendre le charme et la consolation que les chrétiens de la primitive Église trouvaient dans leurs croyances religieuses. Mais les basiliques sont encore debout pour attester que, dans un temps qui est déja bien loin de nous, la maison de la prière était le foyer commun.

Le porche de l'église Saint-Seurin est un beau morceau d'architecture gothique; et les ornemens du portique se font remarquer par l'originalité et la disposition des groupes.

On voit encore dans l'intérieur une vieille horloge avec un agneau qui sonne les heures; l'ensemble de l'édifice, la majesté des voûtes, l'ordre des chapelles, ont quelque chose de bizarre qui frappe le regard et porte au recueillement.

Depuis quelques années, l'église Saint-Seurin a eu besoin de plusieurs réparations. En 1820, la foudre tomba sur la tour de l'ouest et renversa une partie des murailles; mais l'autorité s'empressa de faire disparaître les moindres dégradations. En 1822, on se mit au travail: l'intérieur et l'extérieur de l'ancienne métropole de Bordeaux furent promptement réparés, et, pour mettre les tours à l'abri de la foudre, on y établit un paratonnerre.

La façade de la porte occidentale tombait presque en ruines: en 1829, on vola des fonds pour qu'elle fût entièrement reconstruite, et, d'une prompte activité, ce nouveau travail fut bientôt terminé. On décora la nouvelle façade de quatre statues en pierre, qui font honneur au talent du statuaire, et s'adaptent très bien à l'édifice.

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