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Parmi les auteurs que le soin de leur gloire ne mit point à l'abri des imprudentes saillies du libertinage, on peut citer Voltaire, dont les passions étaient peu dirigées vers ce genre d'excès, mais qui crut devoir parler quelquefois ce langage pour se conformer au ton de la cour.

de M.le duc,

Le ministère de M. le duc ne produisit des Ministèro effets sensibles, ni sur les lettres, ni sur les sciences, ni sur les arts. Les goûts somptueux de ce prince ne lui inspirèrent la pensée d'aucun monument. L'éclat éphémère des cérémonies et des fêtes lui suffisait. Ce qu'il entreprenait de plus durable avait un caractère de magnificence exagérée : les fameuses écuries de Chantilly annoncent plutôt le caprice que la grandeur d'un prince. Les arts continuèrent à s'égarer dans un goût faux et recherché.

Voltaire fournit le seul événement littéraire qu'on distingue à cette époque : le poème de la Ligue parut en 1725 sans l'aveu de l'auteur qui ne l'avait point encore perfectionné. La religion y était invoquée et parée Voltaire atde ses couleurs les plus augustes; le fana-mist o tisme y était attaqué par des faits révol- persécute les tans de notre Histoire. Cette noble et judicieuse leçon de tolérance fut donnée au

taque le fa

moment où M. le duc

protestans.

moment où le duc de Bourbon venait de renouveler, contre les protestans, les dispositions les plus tyranniques du fatal édit de Louis XIV. On était trop ému par le nom de Henri IV, trop jaloux d'avoir enfin une épopée nationale, pour examiner sévèrement ce poème et pour en comparer l'ordonnance trop calme, les fictions trop timides, avec la marche hardie et le mouvement enflammé d'Homère et du Tasse. Les hommes sincèrement religieux applaudissaient à des vers qui rendaient la religion aimable; l'hypocrisie et ce qui pouvait rester de fanatisme reculaient à l'aspect du tableau de la Saint-Barthélemi.

Voltaire jouissait de sa gloire et pouvait s'applaudir des heureux effets de la sagesse qu'il avait consultée en écrivant le poème de la Ligue, lorsqu'une aventure cruelle vint porter un nouveau trouble dans sa destinée, et amena l'un des événemens les plus importans pour les lettres, les sciences et la philosophie, son voyage en Angleterre. Ce poète, fêté des grands, mettait de la vanité à paraître leur ami; mais son penchant à l'épigramme, et surtout sa fierté très - prompte à se réveiller, rendaient pour lui cette familiarité dangereuse. Le chevalier de Rohan se vengea d'une insulte qu'il

crut avoir reçue de lui, en le faisant maltraiter par ses gens à la porte du duc de Sully, l'un des seigneurs qui semblaient s'honorer le plus de l'amitié de Voltaire. L'auteur d'OEdipe et de la Henriade voulut en vain laver son outrage dans le sang de son ennemi; le chevalier de Rohan répondit au cartel du poète en le faisant arrêter. Voltaire fut de nouveau conduit à la Bastille, où il resta six mois. Tout l'avait aban- n posse en donné; son humiliation récente avait étouffé sa gloire. En sortant de prison, il n'eut point de regret de s'éloigner d'amis ingrats ou faibles, et d'un gouvernement qui venait de lui faire éprouver une grande injustice; il se retira en Angleterre.

Angleterre.

Caractère

de l'esprit

que dans ce

Voltaire fut chez les Anglais comme Alcibiade exilé avait été chez les Spartiates. Il philosophi parut tout admirer et tout imiter chez la na- royaume. tion qui lui donnait un asile. Il apprít à en · parler la langue, à l'écrire avec agrément. Rien ne l'arrêta dans ses recherches; son attention se tournait vers les idées nouvelles, les méthodes et les systêmes qu'il pouvait rapporter dans sa patrie. Il ne fit point son étude principale de connaître les ressorts compliqués de la constitution anglaise. Quoique le coup arbitraire dont il venait d'être

et défenseurs

tion.

frappé pût le disposer au sentiment d'une fière indépendance, ses pensées ne se dirigèrent jamais vers une révolution politique. Celle qu'il aspirait à produire avait pour objet de combattre tous les préjugés qui lui paraissaient être les causes les plus fréquentes de l'effusion du sang humain. Il trouvait en Angleterre de grandes ressources pour remplir cette tâche. L'esprit philosophique s'y était formé depuis plus d'un demisiècle, et concourait à y maintenir les principes de la révolution de 1688.

Adversaires Tandis que les sectes religieuses avaient de la révéla- couvert ce royaume de crimes et de discordes, les opinions les plus opposées des philosophes s'y discutaient avec calme, inquiétaient quelquefois la religion, mais ne l'arrachaient jamais ni du fond des cœurs ni de l'ensemble des institutions, exerçaient les esprits ardens, tempéraient leur fougue et amortissaient les pensées séditieuses qu'appelle en Angleterre le choc permanent des partis. L'athéisme avait péri sous les coups de la philosophie elle-même. Hobbes, qui, dans le siècle précédent, n'avait que trop annoncé ce systême, était condamné à l'oubli ; et les Anglais, qui méprisaient en lui un fauteur de l'esclavage, rejetaient avec la même indigna

tion tout le reste de sa doctrine. Shaftesbury, shaftesbury. dans son déisme, avait porté des coups indirects à la révélation; elle avait été défendue

Locke.

par le docteur Clarke, auteur de la plus Clarke. puissante démonstration que les hommes aient reçue de l'existence de Dieu. Locke, dans sa logique, avait renversé la méthode de Descartes, comme celui-ci avait détruit les lois savantes et tyranniques qu'Aristote avait voulu donner au raisonnement. Les hommes les plus religieux ne craignaient pas, en Angleterre, d'adopter la logique de Locke. Quoiqu'il lui fût échappé quelques propositions dont les matérialistes se firent des points d'appui, la candeur de ce philosophe avait été attestée par l'apologie qu'il avait faite du christianisme. Newton avait poussé encore plus loin que Locke sa soumission pour les livres saints; ct ce grand génie, fatigué de ses prodigieux travaux, s'était éteint en voulant pénétrer dans les ténèbres de l'apocalypse.

Ces illustres philosophes n'étaient plus, lorsque Voltaire vint étudier la philosophie anglaise; mais des génies d'un ordre différent honoraient alors cette nation. Les déistes étaient encore aux prises avec les défenseurs de la religion chrétienne. Les coups étaient parés et portés avec beaucoup.

لوم

Newton.

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