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alliés, tant d'argent à l'Angleterre, tant d'efforts et tant de sang aux Russes et aux Autrichiens.

L'heureux conquérant, pressé de cueillir les fruits de sa victoire, quitta ces champs de carnage le 17 juin, et fit le même jour son entrée triomphale à Milan : ses religieuses actions de grâce à la cathédrale, la pompe des cérémonies rétablie par ses ordres, le trône des Césars préparé dans le sanctuaire pour le protecteur des deux républiques, fixèrent tous les regards, et dûrent être pour l'Europe un grand avertissement.

Le lendemain, le général Mélas avec son état-major, à la tête de sa première colonne forte de 10,000 hommes, sortit d'Alexandrie et se retira sur Mantoue par Voghera, Stradella, Plaisance et Parme; les deuxième et troisième colonnes se mirent en marche le 19 et le 21 juin, et suivirent la même

route.

Le 22, les citadelles de Milan, de Turin et de Tortone furent rendues.

Le général Masséna, qui, de retour d'Antibes, était débarqué à Finale, reçut l'ordre de venir prendre le commandement de l'armée française en Italie, et le gouvernement des États de la république cisalpine. Il arrivą à Milan le 21 juin.

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Le général Suchet, qui, peu de jours avant la bataille de Marengo, avait porté son avant-garde au-delà d'Acqui, jusqu'à CastelSpino, à la vue d'Alexandrie, était si près de communiquer avec la gauche de l'armée du premier Consul, et de prendre part à l'action, que le général Mélas avait détaché une forte division de cavalerie pour observer ses mouvemens. Aussitôt après la convention d'Alexandrie, il fut chargé de reprendre possession de Génes, que les Anglais auraient voulu retenir, et qu'ils n'abandonnèrent qu'avec dépit. Ils n'entendaient point être liés par les concessions du général Mélas; et pour assurer l'exécution des clauses stipulées, telles que la remise des magasins et la conservation de l'artillerie de la place, il ne fallut rien moins que la fermeté du

général Suchet et la droiture du général autrichien le comte de Hohenzollern, qui montra autant de loyauté dans cette pénible circonstance qu'il avait montré de valeur dans les combats du blocus de Génes.

L'armée autrichienne, arrivée sur le Mincio, prit position à Villa-Franca; l'aile gauche campait le long du Pó, et la droite s'étendait jusqu'aux frontières du Tyrol méridional. Couverte par le Pó et le Mincio, et couvrant elle-même les deux grandes communications de l'Italie avec les états héréditaires, cette armée attendit les renforts, les secours qui lui étaient si nécessaires, et les décisions de la cour de Vienne sur l'armistice consenti à Alexandrie, et sur les propositions de Bonaparte, auxquelles cet armistice devait servir d'ouver

ture.

Avant de quitter Milan, le premier Consul prescrivit une forme d'administration provisoire pour la république cisalpine; il établit une consulta de cinquante membres,

sous la présidence d'un ministre français, à laquelle il attribua le soin des affaires générales et la surveillance des finances : une commission de neuf membres fut chargée spécialement des affaires de l'intérieur et de la levée des impôts. Le Piémont fut aussi régi par une administration provisoire à peu près dans les mêmes formes; l'état de Gênes reprit celles de la république ligurienne. La Toscane, encore protégée par les armes impériales sous les ordres du général Sommariva, était aussi gouvernée militairement : on y excitait le peuple contre les Français. La cour de Naples, intéressée à élever entre elle et la Haute-Italie une digue contre l'esprit d'innovation qui venait d'y acquérir une nouvelle intensité, effrayée des conséquences du système de rigueur qu'elle avait adopté, cherchait des appuis au-dehors, armait les Toscans, leur offrait des secours, et tâchait de recruter et de recomposer son armée en publiant des amnisties.

Le courageux successeur de Pie VI quittait Venise, et porté dans les bras de ses

nouveaux sujets depuis son départ de Pesaro jusqu'à Rome, méritait ce triomphe par sa modération, sa sagesse et les projets qu'il méditait pour fonder la paix du monde chrétien sur la paix de l'Église de France."

Bonaparte, laissant l'Italie dans cette situation précaire et favorable à l'exécution de ses vues ultérieures, se hâta de rentrer dans Paris; il y ramena sa garde, qu'il recruta de l'élite des différentes armes, et qu'il organisa dans des cadres plus étendus; il augmenta aussi le nombre des corps de l'armée, et se prépara à déployer de plus grandes forces. Le succès de son expédition, la conquête de la moitié de l'Italie, entreprise et terminée en soixante jours, éblouirent, fascinèrent tous les yeux; les partis abattus, rongeant le frein qu'il leur avait imposé, renoncèrent à l'espérance de ressaisir le pouvoir le gouvernement s'affermit.

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Triomphant à Marengo, avant même de quitter le champ de bataille, Bonaparte avait pris des mesures pour profiter du premier effet que devait produire à Vienne

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